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LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE ENTEND LE RAPPORTEUR SPÉCIAL SUR LE RACISME Il adopte un «avis» sur la question des réserves aux instruments internationaux dans le domaine des droits de l'homme

18 mars 2003



CERD
62e session
18 mars 2003
Après-midi


Il adopte un «avis» sur la question des réserves aux instruments internationaux dans le domaine des droits de l'homme
Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a entendu, cet après-midi, le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l'intolérance qui y est associée, M. Doudou Diène, qui a plaidé pour une complémentarité entre tous les organes luttant contre la discrimination raciale. À cet égard, il a estimé que le Comité était son interlocuteur privilégié et il a exprimé le souhait de renforcer sa coopération avec le Comité. Dans cette optique, il a dit vouloir examiner les moyens concrets d'articuler son mandat par rapport à celui du Comité dans une dialectique de renforcement mutuel et de coopération.
À l'issue de l'échange de vues entre le Rapporteur spécial et les membres du Comité, il a été décidé qu'une séance complète sera consacrée à la discussion des rapports du Rapporteur spécial lors de la prochaine session du Comité, au mois d'août 2003.
Le Comité a également entendu un représentant de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco), M. Vladimir Volodine, qui a annoncé le «retour» actif de l'Unesco dans les efforts de lutte contre la discrimination raciale.
Le Comité a d'autre part adopté un «avis» sur la question des réserves aux instruments internationaux dans le domaine des droits de l'homme.
Le Comité a d'autre part décidé d'adresser une réponse préliminaire au questionnaire adressé par le Rapporteur spécial pour les droits des non-ressortissants.
Au cours de la séance, les membres suivants du Comité ont pris la parole : MM. Mahmoud Abul Nasr, Mohammed Aly Thiam, Régis de Gouttes, Linos-Alexandre Sicilianos, Patrick Thornberry, Tang Chengyuan, Mario Jorge Yutzis, Nourredine Amir, Luis Valencia Rodríguez, Raghavan Vasudevan Pillai, Agha Shahi, Morten Kjaerum, Yuri Reshetov, Kurt Herndl, José A. Lindgren Alves et Ion Diaconu.
Le Comité reprendra ces travaux demain, à partir de 10 heures, afin d'adopter ses observations finales sur l'Équateur, l'Ouganda et la Côte d'Ivoire.

Discussion avec le Rapporteur spécial sur le racisme
M. Doudou Diène, Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l'intolérance qui y est associée, a plaidé pour une complémentarité entre tous les organes chargés de ces questions. À cet égard, il a estimé que le Comité était son interlocuteur privilégié et a souhaité explorer les moyens de renforcer leur coopération.
M. Diène a expliqué que son approche de son mandat est fondée sur une double stratégie : une stratégie juridique qui vise à l'adoption mais surtout l'application des instruments internationaux, d'une part, mais aussi une stratégie intellectuelle et éthique qui explore et tienne compte des causes culturelles, historiques, sociales et économiques des comportements de discrimination. Il s'agit ainsi d'explorer la construction identitaire et les structures profondes, sociales et mentales afin de voir comment celles-ci conditionnent les comportements discriminatoires mais aussi afin d'apporter la réponse juridique appropriée à chaque situation.
Le Rapporteur spécial a indiqué qu'il ne peut concevoir son travail comme un exercice solitaire. En ce qui concerne la dimension juridique, il a insisté sur la nécessité d'une collaboration étroite avec le Comité car il est indispensable de savoir ce qui a déjà été traité et bénéficier ainsi de l'acquis du travail en profondeur fait par le Comité. De même, au niveau du suivi des recommandations, il est indispensable de tenir compte de la complémentarité des mandats de chaque organe.
Mais il faut lire les mécanismes de discrimination également dans les structures sociales, a-t-il souligné. Il a souhaité que le combat contre le racisme s'inscrive dans la durée avec l'élaboration et le développement d'instruments et de mécanismes internationaux qui tiennent compte des structures mentales profondes. Pour cela, il faut absolument un travail en commun entre les différents mécanismes.
À la suite de la présentation de M. Diène, un expert a souhaité que l'occasion soit trouvée d'avoir un échange de vues en profondeur sur cette question cruciale mais complexe de la coopération.
S'agissant de la nécessité de s'attaquer à la racine du mal, un expert a mis l'accent sur la nécessité d'étudier chaque cas avec sa spécificité. Il a souligné que la lutte contre le racisme est une lutte culturelle qui passe avant tout par l'éducation.
Le problème est de bien définir les tâches respectives afin de renforcer la coopération entre le Comité et le Rapporteur spécial. Plusieurs experts ont demandé comment le Comité, avec son travail de fourmi, pouvait aider le Rapporteur. L'idée d'adopter de nouvelles normes internationales en matière de discrimination est à prendre avec précaution car cela risquerait d'affaiblir les instruments existants et de faire perdre énormément de temps, a relevé un membre du Comité. Il s'agit donc d'être prudents et de s'attacher plutôt à renforcer et compléter les instruments existants. À cet égard, la question a été posée au Rapporteur si, dans l'exercice de son mandat, il constate des lacunes au niveau des normes existantes. Un expert a exprimé son intérêt pour les rapports préparés par le Rapporteur spécial portant sur les pays dont la situation est examinée par le Comité. En effet, les membres du Comité disposent souvent de peu d'information sur les pays qui présentent leur rapport et pourraient très certainement bénéficier des travaux du Rapporteur.
Certains experts on par ailleurs mis l'accent sur la nécessité de mette en place des mécanismes d'alerte rapide pour répondre à des résurgences de pratiques racistes ou discriminatoires, par exemple dans des situations de désagrégation des sociétés ou à la suite de crise économique aiguë. Le rôle du Rapporteur spécial pourrait à cet égard être très important pour attirer l'attention sur des situations semblables ou présentant un risque.
Soulignant à son tour l'importance de cette question, le président a invité M. Diène à se joindre au Comité à sa prochaine session afin d'approfondir cette question.
Dans sa réponse aux membres du Comité, le Rapporteur a indiqué que précisément sa volonté est d'examiner les moyens concrets d'articuler son mandat par rapport à celui du Comité dans une dialectique de renforcement mutuel et de coopération, pour tirer avantage de la force des mandats de chacun tout en suppléant à leurs limites.
À cet égard, il a rappelé qu'il ne peut procéder à la lecture des situations de discrimination hors de tout cadre et que c'est bien à la lumière des normes en vigueur qu'il les examine. Par ailleurs, il note que de par sa nature, son mandat lui offre une grande liberté de mouvement et un contact direct avec les spécificités du terrain culturel des pays étudiés qui peuvent expliquer l'origine de certaines pratiques discriminatoires. Il a exprimé son intention d'encourager les divers organes à procéder à l'analyse des mécanismes et processus qui débouchent sur des pratiques discriminatoires afin de pouvoir les traiter en profondeur.
M. Diène a par ailleurs estimé que les instruments en vigueur étaient suffisants et a souligné l'importance qu'a eu la Conférence de Durban pour mettre en évidence le caractère holistique de la discrimination.
Le Rapporteur spécial a souligné l'importance du contexte de la mondialisation qui a créé des pulsions identitaires qui débouchent sur l'exclusion, mais qui permet aussi de globaliser les réponses.
M. Diène se propose de consulter le Comité le plus souvent possible et, en particulier, de se référer aux travaux du Comité avant chacune de ses missions dans un pays. Il a souhaité par ailleurs que le Comité puisse discuter les deux rapports qu'il a présentés à la Commission des droits de l'homme dont l'un porte sur la situation des populations musulmanes et arabes dans le monde à la suite des événements du 11 septembre 2001.
Il a été décidé qu'une séance complète sera consacrée à la discussion des rapports du Rapporteur spécial à sa prochaine session, au mois d'août.

Discussion avec l'Unesco
M. Vladimir Volodine, représentant de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation et la science et la culture, a rappelé l'engagement de longue date de l'Unesco dans la lutte contre la discrimination ainsi que la part active qu'elle a prise à la Conférence de Durban mais a surtout évoqué les travaux menés au cours de l'année 2002. Il a notamment mentionné le grand nombre d'études en cours sur les différents aspects de la lutte contre le racisme et la discrimination dans différents contextes ainsi que sur les nouvelles formes de discrimination. Il a également évoqué les consultations qui ont été conduites dans la région Asie-Pacifique, en Afrique et en Europe afin de discuter de ces questions dans les contextes régionaux spécifiques. Il a en outre mentionné la tenue d'une réunion d'experts consacrée à la révision des programmes et des manuels scolaires afin d'éliminer les stéréotypes racistes qui perdurent dans ces manuels. Il a souligné l'importance de ces travaux pour surmonter l'inertie des mentalités et la persistance de réflexes discriminatoires.
Sur la coopération entre l'Unesco et le Haut-Commissariat aux droits de l'homme, M. Volodine a indiqué qu'un nouveau memorandum a été signé récemment dans le cadre du suivi de la Déclaration et du Programme d'action de la Conférence de Durban. À cet égard, il a déploré que les résultats de la Conférence de Durban aient été occultés par le 11 septembre. Une des premières actions prises a été l'élaboration d'un manuel sur les moyens de lutter contre les stéréotypes racistes.
«L'Unesco est de retour», a lancé M. Volodine, faisant allusion à la période d'éclipse qu'a pu connaître la coopération de l'Unesco avec le Comité.
À la suite de la présentation de M. Volodine, certains membres du Comité ont exprimé leur intérêt pour les informations dont l'Unesco dispose et qui pourraient éclairer les travaux du Comité, en particulier en matière d'éducation. Ils ont exprimé leur vif intérêt en particulier pour l'action de l'Unesco visant à éliminer les stéréotypes raciaux ou discriminatoires dans les manuels scolaires.
Certains experts ont par ailleurs demandé des précisions sur les contacts existants entre l'Unesco et les organisations régionales en matière de suivi de la Conférence de Durban, soulignant l'importance du rôle des organisations régionales en la matière.
Soulignant l'importance de l'éducation pour faire évoluer les mentalités, et ainsi lutter contre la discrimination, plusieurs membres du Comité se sont interrogés sur les stratégies à long terme et les ressources mobilisées par l'Unesco pour faciliter l'éducation aux droits de l'homme dans les pays du tiers-monde.
Répondant aux questions des membres du Comité, M. Volodine a souligné l'importance de réfléchir ensemble aux moyens d'atteindre de façon efficace les personnes les plus défavorisées dans le tiers-monde. À cet égard, il a suggéré de rassembler les bonnes pratiques expérimentées à travers diverses initiatives et d'utiliser le réseau d'écoles associées, de chaires d'enseignement des droits de l'homme et autres associations afin de pallier les ressources souvent insuffisantes. Il a mis l'accent sur l'importance des efforts conjoints pour lutter contre la discrimination, en particulier s'agissant des mécanismes concrets de mise en œuvre des normes juridiques.

Avis de Comité sur les réserves
Le Comité a adopté un avis sur la question des réserves aux instruments internationaux dans le domaine des droits de l'homme, qui sera transmis à la Commission du droit international (CERD/C/62/MISC 20/Rev.3). Il souligne notamment qu'en examinant un rapport présenté par un État partie, les organes conventionnels pourraient adopter des avis sur la compatibilité d'une réserve émise par cet État avec l'objet et les buts de l'instrument concerné.
Le Comité estime en outre qu'il devrait continuer de promouvoir la mise en oeuvre complète de la Convention en recommandant aux États d'adopter des lois et mesures adéquates et, si nécessaire, en leur recommandant d'envisager de modifier la teneur de leurs réserves ou des les retirer. À cette fin, il devra souligner, au moment de l'examen des rapports périodiques des États parties, que leur législation n'est pas suffisante pour garantir l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale et d'assurer une protection contre la discrimination raciale. Une telle approche serait beaucoup plus bénéfique qu'un débat juridique avec les États parties.

Réponse du Comité au Rapporteur spécial sur les non-ressortissants
Le Comité a ensuite examiné sa réponse au questionnaire qui lui était adressé par le Rapporteur spécial chargé de la question des non-ressortissants (CERD/C/62/Misc.17/Rev.2). Le projet de texte a été présenté par M. Kjaerum. À l'issue du débat, il a été décidé que le texte serait adressé par le Président au nom du Comité en tant que réponse préliminaire au Rapporteur spécial.
Dans ce texte, le Comité relève qu'il y a souvent discrimination contre des non-ressortissants dans des secteurs comme le droit au logement et le droit à l'accès à l'emploi. Il a récemment été saisi de cas de mauvais traitements de la part d'agents de l'État contre des non-ressortissants. La discrimination est aggravée lorsqu'elle est associée à des possibilités insuffisantes de porter plainte et d'obtenir réparation.
Le Comité a décidé de commencer l'examen d'une «recommandation générale» mise à jour sur les droits de non-ressortissants, en coopération avec d'autres Comités.



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