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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE EXAMINE LE RAPPORT DU MOZAMBIQUE

06 août 2007

Comité pour l'élimination de la discrimination raciale
6 août 2007

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a examiné, vendredi après-midi et ce matin, le rapport périodique du Mozambique sur la mise en œuvre des dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Le rapport a été présenté par la Ministre de la justice du Mozambique. En fin de séance ce matin, le Comité a tenu un échange de vues avec la Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion ou de conviction, Mme Asma Jahangir.

Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Mozambique, M. Kokou Mawuena Ika Kana Ewomsan, a relevé que des efforts ont été déployés par le pays pour combattre la discrimination raciale, mais que ces efforts doivent se poursuivre, notamment en vue de la pénalisation de la discrimination. M. Ewomsan a fait état de cas de discrimination sur la base de l'appartenance politique; d'une discrimination en matière d'accès aux soins antirétroviraux pour les personnes infectées par le VIH/sida; de prélèvements d'organes sur des enfants, destinés aux guérisseurs traditionnels et à des fins médicales; de traite d'enfants à des fins de prostitution et de travail forcé.

Le Comité adoptera, dans le cadre de séances privées, ses observations finales sur le rapport du Mozambique, qui seront rendues publiques à la fin de la session, le vendredi 17 août 2007.

Présentant le rapport de son pays, Mme Esperança Machavela, Ministre de la justice du Mozambique, a souligné que la Constitution mozambicaine garantit le principe universel d'égalité de tous les citoyens et interdit la discrimination fondée sur la race, la couleur, le sexe ou l'origine ethnique. Le Mozambique a une longue tradition de coexistence entre les différentes races et entre les différents groupes ethniques et religieux, qui bénéficient tous d'une ferme politique d'intégration sociale, a insisté la Ministre. Il n'y a pas au Mozambique de mouvement émanant de groupes se qualifiant de minorités ethniques qui revendiqueraient des mesures d'action affirmative. La Ministre a par ailleurs expliqué que les tribunaux communautaires sont des instances non judiciaires de résolution des conflits ayant des compétences de conciliation et de jugement pour les affaires d'ordre secondaire et pour les crimes de moindre gravité. Mme Machavela a indiqué que la loi instituant le poste de médiateur, a été adoptée par l'Assemblée.

La délégation mozambicaine était également composée de Mme Frances Rodrigues, Représentante permanente du Mozambique auprès des Nations Unies à Genève, ainsi que de représentants du Ministère de la justice, du Ministère des affaires étrangères et du Ministère de l'éducation et de la culture. Elle a fourni aux experts des compléments d'information en ce qui concerne, notamment, le rôle des chefs traditionnels (régulos); les fonctions de l'Ombudsman; la situation s'agissant de la traite de personnes; les questions relatives à la propriété de la terre; et les questions de nationalité.

Intervenant au sujet des méthodes de travail du Comité, le Président, M. Régis de Gouttes, a fait part de la proposition du bureau de mettre sur pied un petit groupe de travail chargé d'examiner la question de l'amélioration des méthodes de travail. Le bureau propose en outre que soient abordées, lors de la réunion du Comité avec les États parties le 14 août prochain, les questions de l'harmonisation des méthodes de travail, du suivi des observations finales, du suivi des communications individuelles, de la réforme des organes de traités et des relations avec le Conseil des droits de l'homme. Le Président a également fait savoir que le bureau s'est penché sur les sujets qui pourraient faire l'objet d'un prochain débat thématique du Comité, à des fins d'élaboration d'un commentaire général, et a suggéré à cet égard les thèmes suivants, par ordre de préférence: mesures spéciales; questions relatives aux minorités; et lien entre race et religion.


Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du quinzième rapport périodique de la République démocratique du Congo (CERD/C/COD/15).



Présentation du rapport

Présentant le rapport de son pays, MME ESPERANÇA MACHAVELA, Ministre de la justice du Mozambique, a rappelé que depuis son indépendance, le Mozambique est attaché aux principes fondamentaux de la dignité et de l'égalité des êtres humains. À la veille de l'indépendance du pays, le Premier Ministre d'alors, Joaquim Alberto Chissano, avait déclaré que «le Mozambique, plus qu'un pays multiracial, est un pays antiraciste». La Ministre a indiqué que le pays, qui compte 19,8 millions d'habitants, est composé de 16 groupes ethniques et 732 groupes religieux vivant ensemble en bonne harmonie. Le Mozambique accueille en outre un grand nombre de réfugiés, soit 7034 au total, venant essentiellement de la région des Grands Lacs et de la Somalie.

La Constitution mozambicaine garantit le principe universel d'égalité de tous les citoyens et interdit la discrimination fondée sur la race, la couleur, le sexe ou l'origine ethnique, a poursuivi Mme Machavela. L'application de cette disposition constitutionnelle se fait par le biais de divers moyens politiques et juridiques, a-t-elle souligné. Ainsi, la loi sur le tourisme stipule-t-elle que la fourniture des services touristiques doit se faire sans discrimination aucune, faute de quoi l'établissement touristique qui ne respecterait pas cette disposition encourrait une décision de fermeture. Quant à la loi sur le travail, qui consacre le principe du droit au travail, elle interdit la discrimination fondée, notamment, sur l'orientation sexuelle, la race ou d'une infection par le VIH/sida.

La Ministre a souligné la longue tradition mozambicaine de coexistence entre les différentes races et entre les différents groupes ethniques et religieux, qui bénéficient tous d'une politique déterminée d'intégration sociale. La diversité culturelle et religieuse a rarement été source de conflit dans le pays, a-t-elle ajouté. Il n'y a pas au Mozambique de mouvement émanant de groupes se qualifiant de minorités ethniques qui revendiqueraient des mesures d'action affirmative, a indiqué Mme Machavela.

Les lois coutumières sont pertinentes dans le cadre du fonctionnement des tribunaux communautaires, a par ailleurs souligné la Ministre. La loi organique relative à ces tribunaux communautaires les définit comme des instances non judiciaires de résolution des conflits ayant des compétences de conciliation et de jugement pour les affaires d'ordre secondaire et pour les crimes de moindre gravité. Les autorités traditionnelles sont quant à elles des groupes ou des individus qui sont investis d'un pouvoir juridique institutionnalisé – politique ou autre – ayant une ascendance sur leur environnement et exerçant un rôle directeur sur la base de la confiance placée en eux par leur communauté. En particulier dans les zones rurales, il existe des dirigeants traditionnels, les régulos, qui exercent une grande influence sur leur communauté, a souligné la Ministre. Ces régulos bénéficient d'une légitimité au sein de leur communauté qui leur permet d'agir en tant que médiateur dans la résolution de conflits, en général par le biais d'un conseil composé d'un certain nombre de conseillers communautaires, y compris des femmes. Ces conseils travaillent en suivant les pratiques coutumières locales, de sorte qu'il existe des différences entre les mécanismes traditionnels de résolution des conflits des différentes régions du pays, a souligné la Ministre. Habituellement, a-t-elle précisé, les mécanismes traditionnels de résolution des conflits ne traitent que d'affaires civiles.

La Constitution du Mozambique définit ce pays comme un État de justice sociale, a poursuivi Mme Machavela. Étant donné l'impact de la pauvreté sur la jouissance des droits de l'homme, le Gouvernement a élaboré un programme de réduction de la pauvreté et de stimulation de la croissance économique, a-t-elle indiqué. L'éducation constitue un outil stratégique pour l'atténuation de la pauvreté; c'est un droit fondamental de chaque citoyen, a-t-elle précisé. Aussi, les efforts du Gouvernement dans ce domaine se concentrent-ils sur l'expansion de l'accès à l'éducation. En outre, suite au succès du programme-pilote PEBIMO d'éducation bilingue (langue maternelle et portugais) appliqué durant les années 1992-1997 dans les provinces de Gaza et de Tete, il a décidé d'étendre cette expérience d'enseignement bilingue en l'appliquant à 16 langues maternelles dans un nombre accru d'écoles – en moyenne deux par province.

Mme Machavela a par ailleurs souligné que la stratégie en matière de santé primaire reste le pilier de l'action gouvernementale pour ce qui est de réduire les taux de mortalité. Le Mozambique possède l'un des taux de prévalence du VIH/sida les plus élevés du monde, a-t-elle rappelé, précisant que selon les données les plus récentes, 16,2% de la population adulte (personnes âgées de 15 à 49 ans) sont séropositifs. La Ministre a rappelé que le pays s'est doté d'une stratégie nationale de lutte contre le sida qui comporte des volets de prévention et de traitement.

Afin de renforcer les mécanismes de promotion et de protection des droits de l'homme, des institutions indépendantes – telles que l'Ombudsman et la Commission nationale des droits de l'homme – vont être mises en place, a indiqué la Ministre de la justice. La loi instituant le poste de médiateur (Provedor de Justiça), a déjà été adoptée, alors que celle instituant la Commission des droits de l'homme a été soumise à l'Assemblée pour examen et approbation, a-t-elle précisé.

Le douzième rapport périodique du Mozambique (CERD/C/MOZ/12) souligne que le principe de l'égalité est garanti de manière impérative dans la Constitution qui stipule que «tous les citoyens sont égaux devant la loi; ils jouissent des mêmes droits et sont soumis aux mêmes obligations, sans considération de couleur, de race, de sexe, d'origine ethnique, de lieu de naissance, de religion, de niveau d'éducation, de statut social,…de profession ou d'orientation politique». Les actes destinés à compromettre l'unité nationale, à perturber l'harmonie sociale ou à créer des divisions ou des situations de privilège ou de discrimination fondées sur la couleur, la race ou le sexe sont punissables conformément à la loi, poursuit le rapport, ce principe figure à l'article 39 de la Constitution et s'applique à tous les citoyens sur le territoire national. Le Gouvernement a notamment pour priorité d'améliorer les soins de santé afin que la population bénéficie d'une plus grande aide, poursuit le rapport. Quelque 60% des Mozambicains ont aujourd'hui accès aux soins de santé, précise-t-il. La loi sur le travail stipule que tous les travailleurs nationaux ou étrangers, quels que soient leur sexe, leur race, leur couleur, leur religion, leurs convictions politiques ou idéologiques, leur ascendance ou leur origine, ont le droit de recevoir un salaire et le droit à un salaire égal pour un travail égal, indique en outre le rapport. Si le Code pénal mozambicain ne définit ni ne réprime l'infraction de racisme, les actes de discrimination raciale susceptibles de relever de toute infraction définie par la loi (dommage corporel, viol et autre) entraînent la responsabilité pénale de leur auteur. Afin d'appliquer le droit d'asile prévu par la Constitution, le Mozambique a ratifié les principaux instruments internationaux relatifs aux droits des réfugiés et pris des mesures réglementaires pour assurer la réinsertion sociale des réfugiés et des personnes déplacées, poursuit le rapport.

Grâce aux efforts constants du Gouvernement pour promouvoir une politique d'unité nationale et de non-discrimination, et combattre toutes les manifestations de discrimination fondée sur l'origine ethnique ou tribale, la race, la couleur, le sexe ou toute autre situation, la discrimination ne se manifeste dans le pays que de manière sporadique et ne reflète aucunement une politique institutionnalisée, affirme le rapport. Les cas de discrimination raciale trouvent leur origine dans l'histoire coloniale et dans la persistance, chez certaines personnes, d'attitudes de soumission ou de supériorité raciale. Dans ce contexte, et dans certains milieux, principalement dans l'industrie hôtelière, on constate souvent un traitement inégal, fonction de la couleur, dans les services fournis aux clients, les Blancs ou les Métis étant mieux traités que les Noirs. Ce type de comportement est souvent le fait de personnes de race noire qui semblent conserver une attitude de soumission. Il arrive qu'il soit encouragé par des étrangers, généralement nés ou ayant résidé dans des pays où un système de discrimination était profondément ancré jusqu'à une période relativement récente. Les cas de discrimination raciale sont vivement condamnés par l'ensemble de la population et donnent lieu à des mesures appropriées de la part du Gouvernement, assure le rapport. Au Mozambique, les organisations qui incitent à la discrimination raciale ou qui l'encouragent sont interdites par la loi relative aux associations, indique en outre ce rapport. «Le présent rapport montre qu'il n'y a pas au Mozambique de cas de discrimination raciale, de xénophobie ou d'autres formes d'intolérance», affirme en conclusion le rapport.



Examen du rapport

Observations et questions des membres du Comité

M. KOKOU MAWUENA IKA KANA EWOMSAN, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Mozambique, s'est réjoui de cette reprise du dialogue entre le Mozambique et le Comité après de longues années sans que le pays lui ait soumis de rapport. Le Mozambique a connu une guerre de libération, une guerre civile et des catastrophes naturelles qui ont entraîné de nombreux déplacements de population tant vers les pays voisins qu'à l'intérieur même du pays, a-t-il rappelé. M. Ewomsan s'est réjoui à cet égard de la signature de l'accord de paix entre le FRELIMO et le RENAMO, avec l'appui des Nations Unies - qui ont engagé un programme de rapatriement ayant pris fin en 1995 et ayant permis le retour de plusieurs millions de réfugiés et personnes déplacées. M. Ewomsan a par ailleurs salué les progrès significatifs réalisés au Mozambique du point de vue de la démocratisation et de la mise en œuvre d'une politique de promotion et de protection des droits de l'homme. Il convient à cet égard de saluer la création d'un poste de médiateur qui garantit aux citoyens un droit de recours contentieux contre les actes administratifs, a-t-il insisté.

La disposition selon laquelle les traités internationaux font partie intégrante du droit interne reste théorique puisqu'il n'y a pas encore eu de cas où une disposition d'un traité international ait été directement appliquée par les tribunaux mozambicains, a fait observer M. Ewomsan. Le Code pénal ne définit ni ne réprime l'infraction de racisme, a-t-il également noté.

Relevant que, selon le paragraphe 100 du rapport, il existe des manifestations sporadiques de discrimination dans le pays, le rapporteur a souhaité en savoir davantage sur nature exacte de ces manifestations de discrimination et sur les mesures concrètes prises à la suite de ces cas. M. Ewomsan a ensuite relevé que le paragraphe 121 du rapport affirme qu'il n'y a pas au Mozambique de cas de discrimination raciale, alors qu'il est fait également mention de manifestations sporadiques; cette contradiction nuit à la cohésion du rapport

Selon certaines informations, a poursuivi M. Ewomsan, il y aurait au Mozambique des cas avérés de discrimination sur la base de l'appartenance politique, des cas de violence à caractère politique. Des membres de partis politiques d'opposition, notamment du RENAMO, seraient victimes de pratiques discriminatoires, notamment dans le domaine de l'emploi, a ajouté le rapporteur. Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre afin de mettre un terme à ces pratiques avérées, a-t-il demandé ?

M. Ewomsan a observé que, selon des informations fournies par Amnesty International, il existe une discrimination quant à l'accès aux soins antirétroviraux pour les personnes infectées par le VIH/sida.

Le rapporteur a par ailleurs relevé que des policiers ont été accusés au Mozambique d'exécutions extrajudiciaires, et que certains ont été poursuivis. En revanche, des policiers accusés d'usage excessif de la force contre des manifestants n'ont pas fait l'objet, eux, de poursuites, a-t-il déploré.

M. Ewomsan a par ailleurs déclaré que le Mozambique connaît des trafics d'organes qui prennent la forme d'enlèvements et d'assassinats d'enfants aux fins de «fournir» leurs organes à des guérisseurs traditionnels. Il existe aussi dans le pays une traite d'enfants à des fins de prostitution et de travail forcé ainsi qu'un trafic d'organes à des fins médicales à destination de l'Afrique du Sud et du Zimbabwe.

À la suite de M. Ewomsan, les experts ont été nombreux à se réjouir du retour de la délégation mozambicaine devant le Comité après près de 20 ans d'absence.

Une experte du Comité a rappelé que le Mozambique a connu 477 années de colonisation et une trentaine d'années de guerre de libération et de guerre contre les régimes racistes voisins. Aussi, a-t-elle indiqué s'être souvent demandé comment on peut survivre à cinq siècles de colonisation en conservant un minimum d'identité. À cet égard, elle a salué les efforts déployés par le Mozambique afin de garder son identité au sein des nations africaines.

Les informations fournies par la Ministre de la justice montrent que le Mozambique est sur la bonne voie, a pour sa part estimé un autre membre du Comité.

Pour l'octroi de la citoyenneté mozambicaine, il faut avoir 18 ans révolus, a relevé un autre expert; mais alors, les enfants des parents qui acquièrent la nationalité mozambicaine reçoivent-ils cette citoyenneté automatiquement ou bien doivent-ils attendre d'avoir 18 ans pour y prétendre?

Un autre membre du Comité s'est enquis de l'éventuelle existence de plaintes pour traitement discriminatoire à l'égard d'étrangers d'une nationalité déterminée.

Un expert s'est inquiété de la situation d'enfants du Zimbabwe qui sont entrés seuls au Mozambique, où ils sont particulièrement vulnérables étant donné leur statut illégal. Ces enfants ont un accès limité aux services d'éducation, a notamment fait observer l'expert. Que fait le Gouvernement mozambicain pour protéger ces enfants, a-t-il demandé? Il a également fait état d'informations attestant de l'existence au Mozambique d'une traite de personnes, notamment à destination de l'Afrique du Sud; es autorités mozambicaines envisagent-elles l'adoption d'une loi spécifique de lutte contre la traite de personnes, a-t-il demandé?

Réponses et renseignements complémentaires de la délégation

La délégation a tenu à souligner que le Mozambique connaît cette année sa quinzième année de paix, situation rendue possible – en particulier – par l'intégration de toutes les composantes de la société. La Constitution est fondée sur le principe selon lequel tous les êtres humains sont égaux, a-t-elle insisté. Se définir par rapport à son appartenance ethnique n'est pas une pratique en vigueur au Mozambique, car la société repose sur le principe de l'intégration, a indiqué la délégation. Toutes les ethnies sont rassemblées à l'Assemblée nationale, mais en même temps, on ne demande jamais à une personne à quelle ethnie elle appartient, a-t-elle expliqué. À titre d'exemple, elle a fait observer que l'ethnie chopi est l'une des moins nombreuses du pays, ce qui n'empêche pas que le Président de la République appartient précisément à cette ethnie.

La Constitution prévoit que toutes les conventions dûment adoptées par l'Assemblée nationale deviennent partie intégrante de la Constitution, a par ailleurs souligné la délégation.

Le Mozambique reconnaît le pluralisme juridique, a par ailleurs indiqué la délégation. Les chefs traditionnels – que l'on appelle les régulos – sont reconnus par l'État comme autorités communautaires et, en tant que tels, travaillent en étroite coopération avec les organes de l'État pour tout ce qui a trait à la paix, à la justice et à l'harmonie sociale, à l'utilisation des terres, à l'emploi, à la sécurité alimentaire, à l'environnement, à la santé publique, à l'éducation et à la culture. Les régulos sont en liaison avec les tribunaux communautaires pour le règlement des petits délits civils conformément au sens commun de la communauté, a ajouté la délégation.

La loi sur le médiateur a été adoptée et l'élection d'une personne à ce poste est prévue pour la prochaine session du Parlement, au mois d'octobre, a par ailleurs indiqué la délégation; le médiateur doit être élu par un vote des deux tiers du Parlement, a-t-elle précisé. Le budget du bureau du médiateur a déjà été approuvé, a-t-elle ajouté.

En ce qui concerne la traite des êtres humains, la délégation a rappelé que le Mozambique a ratifié en décembre 2002 la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale
organisée. Le pays a également ratifié les protocoles additionnels se rapportant à cette Convention, notamment celui visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes,
en particulier des femmes et des enfants (2006). Le Conseil des Ministres a adopté et transmis à l'Assemblée nationale un projet de loi sur la prévention du trafic de personnes et la lutte contre ce phénomène et le processus de ratification est donc maintenant engagé. Cette démarche fait suite à l'affaire de soupçon de trafic d'organes d'êtres humains à laquelle certains membres du Comité ont fait référence, a précisé la délégation. Ce projet de loi est très étoffé et aborde tous les aspects du protocole sur la traite de personnes; il reprend la définition de la traite de personnes énoncée par les Nations Unies. Les sanctions prévues vont de six à huit ans d'emprisonnement, a fait savoir la délégation. Elle a indiqué qu'un plan d'action dans ce domaine va permettre une action coordonnée visant la réhabilitation des victimes de traite de personnes. À cet effet, deux centres d'accueil vont être créés en 2008 en faveur des victimes de traite, a précisé la délégation. Une formation spécialisée va en outre être dispensée aux personnels concernés par cette question, notamment les magistrats et les fonctionnaires des douanes, a-t-elle ajouté.

Répondant à des questions sur la propriété de la terre et les communautés locales, la délégation a expliqué qu'en vertu de la loi agraire, les ressortissants mozambicains, les entreprises et les communautés locales peuvent être propriétaires de la terre. Cette même loi stipule que dans le contexte du droit des communautés locales d'utiliser la terre et d'en tirer bénéfice, c'est le principe de la propriété conjointe qui prévaut. Le droit d'utiliser la terre et d'en tirer bénéfice est acquis par occupation par des personnes à titre individuel et par des communautés locales, conformément aux normes coutumières et aux pratiques qui ne sont pas contraires à la Constitution.

S'agissant des questions de nationalité, la délégation a notamment indiqué que selon la Constitution, la citoyenneté mozambicaine est obtenue soit parce que c'est la nationalité originelle de la personne – en vertu des principes de jus solis et de jus sanguinis –, soit par acquisition dite volontaire – c'est-à-dire par mariage, par naturalisation ou par adoption. La citoyenneté mozambicaine peut être octroyée par naturalisation aux enfants célibataires de moins de 18 ans.


Observations préliminaires

M. KOKOU MAWUENA IKA KANA EWOMSAN, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Mozambique, a salué la pertinence des réponses apportées par la délégation aux questions soulevées par les experts. «Nous connaissons la situation difficile que le pays a connue sur le plan politique, économique et social», a-t-il ajouté. Nous connaissons le degré de pauvreté qui caractérise le pays et saluons à cet égard la volonté du Gouvernement de réduire la pauvreté et de créer les conditions favorables à la paix et l'harmonie sociales, a-t-il poursuivi.

Aucun pays ne peut se considérer à l'abri de la discrimination et tout gouvernement doit prendre des mesures pour combattre la propension à la haine, a rappelé le rapporteur. Le Mozambique a compris que l'action la plus décisive est l'éducation des populations, a relevé M. Ewomsan. Des efforts ont certes été déployés mais les efforts doivent se poursuivre, notamment en vue de la pénalisation de la discrimination, a-t-il souligné.


Dialogue avec la Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion et de conviction

M. RÉGIS DE GOUTTES, Président du Comité, a rappelé que le Comité a rencontré les experts du Groupe de travail intergouvernemental chargé de la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d'action de Durban lors sa 70ème session, en mars dernier. Lors de cette rencontre, le message qui avait été adressé aux cinq experts du Groupe de travail était que – de l'avis du Comité – les dispositions de la Convention, telles qu'enrichies par la pratique et la doctrine du Comité, fournissent un potentiel suffisant pour traiter de toutes les discriminations raciales ou ethniques, directes ou indirectes, y compris les doubles discriminations – à caractère racial et religieux, par exemple. En outre, le Comité a élargi le groupe des victimes de discrimination, a rappelé M. de Gouttes.

A l'époque, a poursuivi M. de Gouttes, le Comité ne s'était pas montré favorable à l'élaboration de nouvelles normes par le biais, par exemple, d'un protocole additionnel. Le Comité se trouve en la matière davantage dans une démarche axée sur la méthode et la procédure. Ainsi, avait-il proposé un éventuel protocole additionnel sur la procédure visant à renforcer les capacités d'action.

MME ASMA JAHANGIR, Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion ou de conviction, a souligné que les éléments qui définissent une déclaration raciste ne sont pas les mêmes que ceux qui définissent la diffamation des religions. La race n'est pas une question de choix - on naît avec une appartenance raciale – alors que la religion procède d'un choix, a-t-elle souligné.

Un membre du Comité a souligné qu'aucun organe conventionnel de traite de la discrimination ou de la haine religieuse en tant que telles; lorsqu'elles sont traitées, elle le sont de façon extrajuridique. Il a fait observer que, dans le reste du monde, les musulmans sont souvent associés à une religion décrite comme terroriste. La recherche du dialogue entre les civilisations était dans les années 1970 un élément fondamental, tant il est vrai qu'il ne saurait y avoir de civilisation occidentale sans civilisation orientale et vice-versa, a rappelé cet expert.

Un autre expert a demandé à la Rapporteuse spéciale si elle pensait que le Comité pourrait organiser dans un avenir proche une discussion thématique sur la question du rapport entre religion et racisme.

L'interdiction du foulard islamique constitue-t-elle un signe d'islamophobie, a demandé un membre du Comité ?

En réaction à la déclaration de Mme Jahangir selon laquelle la religion procède d'un choix, un expert a demandé si, lorsqu'on est né dans une famille de religion musulmane, il est possible de quitter cette religion.

La Rapporteuse spéciale, Mme Jahangir, a rappelé qu'il y avait un droit des personnes et non pas un droit des religions. Elle a indiqué être consciente de ce qui se passe pour les musulmans à travers le monde; mais les chrétiens et les juifs sont aussi victimes de haine, a-t-elle fait remarquer.

Pour ce qui est du port du foulard islamique, au-delà de l'autorisation ou non de le porter, l'important est de veiller à ce qu'il n'y ait pas de discrimination, a déclaré la Rapporteuse spéciale.
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Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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