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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE ACHÈVE L'EXAMEN DU RAPPORT DE L'URUGUAY

13 août 1999


MATIN

HR/CERD/99/50
13 août 1999



Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a achevé, ce matin, l'examen du rapport de l'Uruguay. Il adoptera ses conclusions et recommandations sur ce rapport avant la fin de la présente session.

La délégation de l'Uruguay a déclaré que certaines des lacunes qui ont été relevées par le Comité sont peut-être le résultat de différentes conceptions juridiques et culturelles. Elle a affirmé qu'il existe des fonctionnaires noirs, des présentateurs de télévision noirs et que la culture de l'Uruguay est largement influencée par la culture noire et les cultures des minorités ethniques en général. Elle a déclaré qu'une campagne de sensibilisation a été lancée dans les écoles publiques en ce qui concerne les principes fondamentaux des droits de l'homme. En outre, l'Université de la République se prépare à proposer des séminaires de formation aux droits de l'homme.

L'experte chargée de l'examen du rapport, MmeDeci Zou, a estimé que le Gouvernement uruguayen fournit de nombreux efforts pour améliorer le niveau de vie de la population et pour établir une société basée sur un état de droit. Cependant, il existe encore dans les faits une discrimination raciale, en particulier à l'égard des Noirs. Plus de renseignements sur les personnes noires devraient apparaître dans le prochain rapport, ainsi que des précisions sur la mise en oeuvre de l'article 4, qui fait obligation aux États partie d'interdire toute propagande appelant à la haine raciale.

Sont également intervenus les membres du Comité suivants : MmeSadiq Ali, M.Eduardo Ferrero Costa, M.Luis Valencia Rodríguez, M.Ion Diaconu, M.Mario Jorge Yutzis, M.Régis de Gouttes, M.Michael Parker Banton, M.AghaShahi, M.Mahmoud Aboul-Nasr et M.Rüdiger Wolfrum.

Cet après-midi à 15 heures, le Comité procédera à l'examen de la mise en oeuvre des dispositions de la Convention au Mozambique, en absence de rapport actualisé. Il examinera en outre la situation en République démocratique du Congo au titre des mesures d'alerte rapide et de sa procédure d'action urgente.

Examen du rapport de l'Uruguay

Un expert a demandé des explications concernant l'application du droit international au niveau interne. Les dispositions contenues dans l'article4, sur les mesures d'interdiction de la propagande raciste, semblent en outre n'être reflétées dans la législation nationale qu'en partie. Il serait nécessaire de mettre en oeuvre des programmes d'éducation à la tolérance, et au respect des différentes minorités ethniques. L'importance de l'interdiction de la discrimination dans la norme constitutionnelle a été soulignée. Or, les pratiques racistes semblent subsister en Uruguay. Il ne semble pas qu'il existe une véritable politique du gouvernement en faveur des minorités. Dans ce cadre, les experts ont demandé si l'État intervient dans le cadre d'activités racistes et discriminatoires, quelle forme prend alors son intervention et quelles sont les sanctions prises. Un expert a également demandé si la procédure de l'amparo a été appliquée dans des cas de délits de discrimination raciale.

Les indications démographiques du rapport ont été saluées, car elles sont très utiles, mais des statistiques sur les personnes d'origine juive ont été souhaitées. De plus, les références aux communautés «noires» ou «blanches» sont très lacunaires : parmi ces communautés de couleur, on compte de nombreuses ethnies différentes. Pour ce qui est de l'emploi et du chômage, il est clair que les Noirs et les autochtones sont en position d'infériorité, et les femmes Noires souffrent d'une double discrimination. Dans ce domaine et en matière de droit à la propriété, un expert a estimé qu'affirmer que la liberté existe, sans mettre en place les conditions nécessaires à son exercice, ne permet pas de réaliser les objectifs de la Convention. En revanche, les experts ont salué les progrès accomplis par l'Uruguay en matière d'éducation. Cependant, ici encore, les statistiques concernant les minorités manquent. Des experts se sont en outre interrogés sur les langues d'enseignement.

Par ailleurs, les résultats des activités de la commission spéciale, composée de représentants de la Banque centrale et de la Banque de la République orientale de l'Uruguay et visant à déterminer l'existence de fonds nazis dans le système financier international, devraient apparaître dans le prochain rapport.

La délégation de l'Uruguay, présidée par M.Miguel Ángel Semino, a déclaré que certaines des lacunes qui ont été mises en valeur par le Comité sont peut-être le résultat de différentes conceptions juridiques et culturelles. Elle a d'abord fourni des précisions concernant la classification des Juifs, des Arabes et des Orientaux dans les catégories établies dans le rapport. Les Orientaux sont les citoyens originaires d'Extrême-Orient : Chinois, Japonais et Coréens. Les Uruguayens d'origine arabe sont des Libanais en majorité. Les Noirs représentent seulement 0,9% de la population, ce qui explique qu'ils ne sont pas présents dans toutes les parties du pays. Par ailleurs, les Italiens, Espagnols, et autres européens sont regroupés sous la catégorie des «Blancs».

La délégation a indiqué que le délit d'incitation à la discrimination raciale, accompagné d'actes de violence est puni de 6 à 24 mois d'emprisonnement. En ce qui concerne les organisations qui promeuvent le mépris pour des raisons de race, elles sont considérées comme des associations de délinquants qui encourent 5 mois à 5 ans de régime pénitentiaire. Dans la pratique, une plainte récente a été déposée contre un groupe menaçant les Juifs de représailles pour leur appartenance à ce groupe ethnique, par le biais de l'Internet. Les membres de cette association ont été arrêtés et remis à la justice.

Au sujet de l'amparo et de l'habeas corpus, la délégation a reconnu qu'il n'existe pas de statistiques concernant le recours à ces dispositions par des personnes de race noire ou autochtones. L'amparo est toutefois une institution très utilisée auprès des tribunaux du pays. Elle permet une réponse rapide à toute manifestation de violation manifeste des droits de l'homme. La victime s'adresse directement au juge, qui se rend sur le lieu du délit et prend une décision qui doit être respectée sous peine d'amende. En outre, tous les étudiants de droit sont tenus de fournir des services d'avocat sous la direction de leurs professeurs, ce qui permet à tous de bénéficier des services d'un avocat sans frais. En ce qui concerne les fonds nazis, l'enquête a été réalisée par la commission spéciale qui n'a découvert aucune preuve de trafic bancaire ayant eu cours pendant la deuxième guerre mondiale.

Au sujet des droits politiques, la délégation a noté que la présence de Juifs au Parlement uruguayen n'a rien à voir avec la race, mais avec les partis politiques. Elle a estimé que Mundo Afro fournit des informations incomplètes. Ainsi, les syndicats, qui n'ont rien à voir avec le gouvernement et qui sont des associations indépendantes, pratiquent une véritable discrimination. En revanche, des métis sont fonctionnaires dans les plus hautes sphères de l'État. Il existe des fonctionnaires noirs, des présentateurs de télévision noirs, par exemple. De plus, la culture musicale de l'Uruguay est largement influencée par la culture noire. Par contre, il n'existe pas de parti politique noir qui ait reçu assez de voix pour accéder au pouvoir. Concernant le droit au travail, la délégation a affirmé que les domestiques sont protégés par les caisses de retraite et le régime de sécurité sociale en général. Leur situation n'est pas une situation d'esclavage, loin s'en faut. La délégation a en outre informé le Comité sur la tenue d'une discussion d'un nouveau projet de loi au Parlement pour réglementer l'immigration générale, qui ne contient aucune mesure discriminatoire.

Au sujet de l'âge requis pour le mariage, la délégation a souligné que le Code pénal date de 1968, ce qui peut expliquer cet aspect archaïque de ses dispositions. Ceci dit, dans la pratique, personne ne se marie à cet âge. Concernant le logement, la délégation a affirmé que les Noirs peuvent acheter leur logement. Le Ministère du logement et la Banque d'hypothèque gèrent un programme visant à faciliter l'accès à la propriété des populations les plus pauvres. Une organisation appelée Mouvement d'élimination des logements ruraux insalubres s'occupe de construire des logements décents, équipés correctement, pour la population rurale, très faible en nombre en Uruguay. Les bénéficiaires de ces mesures ne sont pas les autochtones ou les Noirs, ils font partie des classes sociales les plus défavorisées sans distinction de race.

La délégation a déclaré qu'une politique de propagande dans les écoles publiques a été lancée afin de sensibiliser les populations aux principes fondamentaux des droits de l'homme. De même, l'Université de la République se prépare à proposer des séminaires de formation aux droits de l'homme. Dans les écoles, la langue utilisée est l'espagnol. Le statut des dispositions des instruments internationaux, et de la Convention en particulier, dans le droit interne est une question qui recevra une réponse écrite. Mais la délégation a indiqué qu'il existe en Uruguay deux écoles de pensée sur le sujet, dont une pense que les traités internationaux relatifs aux droits de l'homme ont une valeur supérieure au droit interne.

L'experte chargée de l'examen du rapport, MmeDeci Zou, a remercié le Gouvernement de l'Uruguay pour avoir envoyé une délégation qui a réalisé un échange de vues sincère. Pour améliorer le niveau de vie de la population et pour établir une société basée sur un état de droit, le gouvernement fournit de nombreux efforts, a reconnu l'experte. Cependant, il existe encore dans les faits une discrimination raciale, en particulier à l'égard des Noirs. Plus de renseignements sur les personnes noires devraient apparaître dans le prochain rapport, ainsi que des précisions sur la mise en oeuvre de l'article 4 qui, a-t-elle rappelé, a un caractère obligatoire.

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