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LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE ACHÈVE SON DIALOGUE AVEC LA DÉLÉGATION DE LA POLOGNE
17 mars 2003
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CERD
62e session
17 mars 2003
Matin
Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a achevé, ce matin, son dialogue avec la délégation de la Pologne sur la base des quinzième et seizième rapports périodiques de ce pays. À l'issue de ce dialogue, le rapporteur du Comité pour l'examen des rapports polonais, M. Yuri Reshetov a félicité la Pologne pour la qualité de son rapport et la précision de ses réponses. Il a souligné l'importance de prendre des dispositions afin de garantir l'application de Convention en Pologne. En particulier, il a appelé le Gouvernement polonais à prendre ses responsabilités pour veiller à ce que les auteurs de propagande raciste et ceux qui la diffusent soient traduits en justice.
Le Comité adoptera, au cours de la session, des observations finales sur le rapport de la Pologne.
Dirigée par M. Sylweriusz Krolak, la délégation polonaise a répondu aux questions posées vendredi par les membres du Comité concernant, notamment, les mesures visant à punir l'incitation à la haine raciale ainsi que le statut des minorités et, en particulier, de la minorité rom. Répondant aux nombreuses observations des membres du Comité à ce sujet, le chef de la délégation a réaffirmé que toute forme d'incitation à la haine raciale était inacceptable et a réitéré la détermination de son gouvernement à punir les auteurs de tels actes par tous les moyens légaux. Toutefois, rappelant l'attachement de son pays à la liberté d'expression, il a estimé difficile de mettre en œuvre une censure préventive. Il a en outre réaffirmé l'importance que son gouvernement accorde à l'amélioration de la situation des Roms, qui font partie des populations les plus défavorisées du pays. À cet égard, il a évoqué le programme pilote mis en œuvre dans la province de Malopolska pour améliorer leur situation matérielle et sociale.
Les membres suivants du Comité ont pris la parole dans le cadre de l'examen des rapports polonais: MM. Mahmoud Aboul Nasr, Mario Jorge Yutzis, Régis de Gouttes, Linos-Alexandre Sicilianos, Agha Shahi, José A. Lindgren-Alves, Ion Diaconu.
Le Comité entamera cet après-midi, à 15 heures, l'examen des seizième et dix-septième rapports périodiques du Ghana (CERD/C/431/Add.3).
Fin de l'examen du rapport de la Pologne
Répondant aux questions posées hier par les membres du Comité s'agissant du statut de la Convention sur l'élimination de toute forme de discrimination raciale, la délégation polonaise a souligné que la Constitution polonaise accorde un statut privilégié à ce texte qui est non seulement d'application directe mais a également préséance sur les autres textes de la législation nationale. S'agissant des mesures d'application, le représentant a indiqué que les dispositions de la Convention ont un effet direct sur tous les organes de l'État polonais.
Le représentant a indiqué que l'Ombudsman tient ses fonctions de la Constitution dans laquelle il est stipulé que chaque personne peut s'adresser à l'Ombudsman pour faire respecter ses droits. L'Ombudsman peut donc être contacté par n'importe qui, y compris des étrangers, et il protège les droits civils dans les relations entre les citoyens et les autorités polonaises à tous les niveaux. Selon la Constitution, l'Ombudsman est une instance indépendante faisant rapport directement au parlement, a indiqué la délégation, précisant que ce rapport est contraignant. Il n'est pas question de limiter les prérogatives de l'Ombudsman contrairement à ce qui a pu être dit lors des questions.
En réponse aux questions relatives à l'incitation à la haine raciale, le représentant a réaffirmé la nécessité de réprimer toute forme de discours incitant à la haine raciale. Toutefois, au sujet de l'institution d'une censure préventive telle que suggérée par deux experts, il a précisé que la Constitution interdit toute censure, même préventive, dans la mesure où elle garantit la liberté d'opinion et d'expression. Néanmoins, dans le cas de discours incitant à la haine, le système judiciaire a les moyens de prendre des sanctions pour punir ces abus. Il a demandé aux membres du Comite de faire confiance au Gouvernement polonais pour lutter contre ce fléau par le biais de mesures pénales. Il a en outre indiqué que le Parlement est en train d'élaborer un nouvel amendement pour renforcer ces sanctions.
Sur la question du terrorisme, posée par deux experts, le représentant a précisé que la lutte contre le terrorisme ne peut aller à l'encontre des droits de l'homme et signifier l'inégalité devant la loi. Sur les problèmes concrets soulevés par M. de Gouttes, il a indiqué qu'après le 11 septembre et l'adoption de la résolution 1373, plusieurs amendements ont été adoptés afin de renforcer la lutte contre le financement des activités terroristes ainsi que les sanctions à l'encontre de ces activités.
Le représentant a par ailleurs indiqué que la Pologne n'a fait l'objet d'aucune communication (plainte) adressée au Comité des droits de l'homme. La Pologne a toujours traité les questions relatives aux minorités de façon sérieuse et satisfaisante, a-t-il dit, précisant que la Constitution garantit les droits des minorités nationales y compris la liberté de conserver et développer leurs langues, coutumes et traditions.
La délégation a rappelé que la Pologne a largement participé aux travaux de la Conférence de Durban. Elle a d'ailleurs précisé que le document final de la Conférence a été traduit en polonais et largement diffusé et qu'il sera bientôt disponible sur un site internet. Des travaux sont en cours en coopération avec les Universités afin d'identifier précisément les domaines prioritaires devant faire l'objet du plan d'action national de lutte contre la discrimination raciale.
Le représentant polonais a par ailleurs précisé que les travaux et publications à caractère raciste ou incitant à la discrimination sont sujets à confiscation. En 2000, 43 affaires de discrimination raciale ont été portées devant les tribunaux, a-t-il indiqué. Les auteurs de graffitis à caractère raciste ont également été poursuivis. Certains cas ont fait l'objet de non-lieu pour cause d'irresponsabilité des auteurs ou du faible danger social qu'ils représentaient, a-t-il précisé. Une loi doit en outre être adoptée prochainement afin de pouvoir punir non plus seulement des individus mais aussi des groupes ou des sociétés responsables de discrimination ou d'incitation à la haine raciale.
En ce qui concerne les partis politiques, le représentant a cité les articles de la Constitution assurant la liberté politique mais interdisant les partis ayant des programmes discriminatoires. Il a précisé que c'est la Cour constitutionnelle qui juge de ces questions, soulignant qu'aucune demande de dissolution d'un parti politique n'a été faite à ce jour sur cette base.
Sur la politique nationale de la Pologne à l'égard de ses minorités nationales et en réponse à la question de définition de l'expression «minorité nationale», la délégation polonaise a précisé que ce terme recouvre tout «groupe de citoyens polonais vivant en Pologne mais minoritaires et soucieux de préserver leur particularisme culturel». Il ne peut donc s'agir d'étrangers. La qualification d'un groupe comme «minorité nationale ou raciale» ne peuvent résulter d'une décision administrative mais doit se fonder sur des critères objectifs tels que les particularismes culturels, la langue ou les traditions. Sur la question du statut des «petites minorités», il a précisé que l'État s'estime tenu de s'occuper des minorités quel que soit leur nombre ou leur importance.
Pour ce qui est de l'assistance fournie par l'État à ces minorités nationales, objet de questions de plusieurs experts, le représentant a estimé que la question fait déjà l'objet d'une large section du rapport. Il a évoqué les dispositions légales, administratives, scolaires et financières en faveur de ces minorités. En ce qui concerne l'amélioration de leur intégration politique et sociale, il a précisé que la seule minorité posant problème à cet égard est la minorité rom et que des mesures sont à l'étude afin de leur assurer une meilleure représentation au Parlement.
Évoquant également la situation sociale particulièrement difficile des Roms, la délégation a fait état du programme pilote du Gouvernement pour les communautés rom de la province de Malopolska, ainsi que le nombre important d'organisations et d'associations rom. Il a précisé que ces efforts sont déployés dans tout le pays. Il a tout particulièrement attiré l'attention sur les classes rom visant à inciter les enfants à aller à l'école. En effet, la fréquentation assidue de l'école est la plus grande difficulté, notamment du fait des déplacements. Des mesures sont également prises afin de soutenir les enfants rom scolarisés et qui ont des difficultés, en particulier en langue polonaise. Il a par ailleurs évoqué les efforts déployés afin de contrôler et de répertorier les crimes et délits visant les Roms.
Répondant aux questions de plusieurs experts sur les langues, le représentant a précisé que le polonais est la langue officielle mais que cela ne remet en aucun cas en cause le droit des minorités à préserver leurs langues, qui est par ailleurs garanti dans la Constitution. Ce droit est d'ailleurs largement exercé y compris dans les administrations publiques.
S'agissant du recensement, le représentant a précisé que les données présentées auparavant dans les rapports de la Pologne étaient approximatives car fondées sur des chiffres datant d'avant la dernière guerre mondiale. Lors du dernier recensement, des questions ont été posées sur l'appartenance nationale ainsi que sur la langue des personnes interrogées. Il a souhaité que cette première tentative pourra être améliorée par la suite.
En ce qui concerne le statut des réfugiés, le représentant a indiqué que celui-ci est régi par le droit interne en accord avec les conventions internationales. Diverses aides sont fournies aux réfugiés pour les aider à s'intégrer dans la société et sur le marché du travail. L'an dernier, plus de 400 personnes ont bénéficié de cette aide, a-t-il précisé ajoutant que les réfugiés peuvent en outre obtenir la citoyenneté polonaise au bout de cinq ans de résidence. Pour ce qui est de l'accès au marché du travail, le représentant a indiqué qu'en 2002, 24 640 permis de travail ont été émis en faveur de personnes de différentes nationalités. Le taux de chômage étant de 19 pour cent, il est toutefois très difficile d'assurer le respect du droit au travail pour tous, y compris pour les nationaux. À ce jour, une seule plainte pour discrimination a été déposée et le jugement a donné raison au plaignant.
Un expert a posé la question de la définition du terme «terroriste», demandant si une personne résistant à l'occupation étrangère pouvait être qualifiée de «terroriste». S'agissant de l'articulation des notions de liberté d'expression et de «censure préventive», un autre expert a recommandé de se référer à la jurisprudence et aux Recommandations générales du Comité, en particulier les recommandations n° 5 et 15 relatives à l'article 4 de la Convention, pour éclairer l'interprétation des dispositions de la Convention en la matière. Plusieurs experts ont précisé que le Comité ne demandait pas à la Pologne d'exercer une censure préventive mais bien de poursuivre effectivement les auteurs d'actes ou de discours incitant à la haine raciale ou professant des idées racistes en mettant en application ses textes de lois par ailleurs effectivement conformes à la Convention. Certains se sont inquiété de la persistance de la distribution en masse de documents racistes y compris avec le soutien de l'État ainsi que de la poursuite des activités d'organisations professant des idées racistes. D'autres se sont par ailleurs interrogés sur le degré de diligence des enquêtes concernant des actes de discrimination, en particulier à l'encontre des Roms.
En réponse à cette dernière série de question, le représentant de la Pologne a précisé que la lutte contre le terrorisme ne saurait entraîner des situations où les droits de l'homme seraient menacés et l'égalité devant la loi remise en cause. Il a indiqué que le droit polonais ne donne pas de définition du terrorisme mais que les dispositions du code pénal permettent de mettre en oeuvre les recommandations du Conseil de sécurité.
Le représentant a par ailleurs réaffirmé que dès lors qu'il y a discours de haine raciale, la liberté d'expression ne saurait être invoquée. Il a insisté sur le fait que le parlement oeuvre à améliorer encore l'arsenal juridique permettant de lutter contre ces discours de haine. Sur la protection des Roms, le représentant a insisté sur le fait que le Gouvernement y accorde une importance toute particulière. À cet égard, il a évoqué la Conférence entre le Ministre de la justice et des représentants de différents tribunaux pour les sensibiliser à cette question. Il a en outre indiqué qu'un effort de sensibilisation et de formation était entrepris à l'intention de la police.
M. YURI RESHETOV, rapporteur du Comité sur la Pologne, a félicité le pays pour la qualité de son rapport et la précision de ses réponses. Il a estimé que le statut de la Convention dans la loi polonaise était clair mais a recommandé l'adoption de dispositions de mise en application. De même, en ce qui concerne les activités des médias diffusant une propagande raciste ou les organisations soutenant ces discours, il a estimé que l'État devait prendre ses responsabilités et qu'on ne saurait invoquer le respect de la liberté d'expression ou d'association. Il s'est dit inquiet de l'invocation de «l'absence de danger pour la société» ou de «schyzophrénie» pour expliquer les non-lieux rendus dans certaines affaires. En ce qui concerne les droits des minorités, il a préconisé des solutions pragmatiques et reconnu qu'un travail de fond avait été entrepris par le Gouvernement en ce qui concerne la minorité Rom.
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