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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS EXAMINE LE RAPPORT DE L'ITALIE

16 Novembre 2004


16 novembre 2004

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné, hier et ce matin, le quatrième rapport périodique de l'Italie sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport italien avant de les rendre publiques à la fin de sa session, le vendredi 26 novembre prochain.

Présentant le rapport de son pays, M. Alessandro Fallavollita, Président du Comité interministériel des droits de l'homme de l'Italie, a souligné que depuis les élections de mai 2001, le Gouvernement italien a pris de nombreuses initiatives dans des domaines importants tels que ceux du redressement économique, de l'administration publique, de l'emploi, de la santé, de l'environnement, ainsi que dans le domaine de la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. S'agissant du problème de la lutte contre la violence faite aux femmes, qui constituait l'un des principaux sujets des préoccupations et recommandations du Comité en 2000, M. Fallavollita a notamment souligné que le Gouvernement italien a mis sur pied une stratégie globale visant à traiter de cette question. En particulier, l'adoption de la loi contre la violence sexuelle a produit un impact positif.

En dépit d'un contexte économique international et national défavorable, le nombre total de travailleurs a augmenté de plus d'un million entre 2000 et 2003, a fait valoir M. Fallavollita. L'Italie est fermement engagée à renforcer les mesures visant à réconcilier travail et vie familiale, a-t-il poursuivi. À cet égard, la réforme du marché du travail récemment approuvée par la loi Biagi introduit de nouvelles formes de flexibilité, notamment le travail à temps partiel, afin de permettre de mieux concilier responsabilités familiales et engagement professionnel, en particulier pour les femmes.

La délégation italienne était également composée de représentants du Ministère pour l'égalité des chances; du Ministère de l'intérieur; du Ministère de l'instruction publique; du Ministère du bien-être; du Ministère de la santé; du Ministère du travail et des affaires sociales; du Département pour l'égalité des chances; du Conseil national pour l'économie et le travail; et de la Mission permanente de l'Italie auprès des Nations Unies à Genève. Elle a fourni aux experts des compléments d'information s'agissant, entre autres, de la coopération avec les organisations non gouvernementales; du niveau de l'aide publique au développement italienne; de la situation législative concernant l'asile; de la protection sociale des étrangers sans permis de séjour; du respect du principe d'égalité de salaires, à travail égal, entre hommes et femmes; du travail informel; de la liberté syndicale des juges; des questions de logement; de la lutte contre le trafic de personnes; ainsi que des questions d'éducation.


Le Comité entame cet après-midi, à 15 heures, l'examen du deuxième rapport périodique de l'Azerbaïdjan (E/1990/6/Add.37).





Présentation du rapport

Présentant le rapport de son pays, M. ALESSANDRO FALLAVOLLITA, Président du Comité interministériel des droits de l'homme de l'Italie, a affirmé, dans le cadre de la question de la justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels, que les raisons fondamentales présidant à l'élaboration d'un protocole facultatif au Pacte restent valables car il s'agit d'aider les États parties à protéger et promouvoir ces droits; d'identifier et de clarifier les obligations des États parties au titre du Pacte; d'encourager la mise en place d'une législation et de recours internes; et d'accroître la sensibilisation du public en ce qui concerne les droits économiques, sociaux et culturels. Depuis les élections de mai 2001, le Gouvernement italien a pris de nombreuses initiatives dans des domaines importants tels que ceux du redressement économique, de l'administration publique, de l'emploi, de la santé, de l'environnement, ainsi que dans le domaine de la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, a ajouté M. Fallavollita. Il a précisé qu'une attention particulière a été accordée à l'amélioration des droits économiques, sociaux et culturels et, en particulier, à la mise en œuvre des recommandations émises par le Comité à l'issue de l'examen du troisième rapport périodique de l'Italie.

Soulignant que la lutte contre la discrimination à l'encontre des femmes reste un élément central de la politique italienne en matière de droits de l'homme, M. Fallavollita a déclaré que considérer les femmes comme des victimes seulement serait réducteur. Bien entendu, a-t-il précisé, les femmes sont des victimes particulières; mais elles doivent également être considérées comme des éléments précieux dans le domaine des droits de l'homme, c'est-à-dire comme des sujets actifs et non pas uniquement comme des objets de préoccupation dans ce domaine. Le Gouvernement italien est fermement convaincu que la participation des femmes aux processus de prise de décisions, à tous les niveaux des domaines politiques et socioéconomiques, est un atout pour chaque société. M. Fallavollita a attiré l'attention sur la loi portant modification de l'article 51 de la Constitution italienne et introduisant le principe d'égalité en matière d'accès aux fonctions politiques. Il a également mis l'accent sur la loi adoptée cette année en vertu de laquelle aucun des deux sexes ne saurait être représenté à hauteur de moins d'un tiers des candidats lors des élections parlementaires. De ce fait, la présence des femmes italiennes au Parlement européen issu des élections de juin dernier a augmenté de 20%, a-t-il fait valoir. Un projet de loi contenant des dispositions similaires pour les autres types d'élections est actuellement à l'examen du Parlement italien, a précisé le représentant italien.

S'agissant du problème de la lutte contre la violence faite aux femmes, qui constituait l'un des principaux sujets des préoccupations et recommandations du Comité en 2000, M. Fallavollita a notamment souligné que le Gouvernement italien a mis sur pied une stratégie globale visant à traiter de cette question. En particulier, l'adoption de la loi contre la violence sexuelle a produit un impact positif, a-t-il déclaré, faisant valoir que cette loi avait permis d'accroître la sensibilisation à l'égard de cette question, comme en témoigne l'augmentation du nombre de plaintes émanant de femmes qui affirment être victimes de violence ou de harcèlement sexuels.

La guerre contre le trafic des personnes, autre question cruciale soulevée par le Comité en 2000, reste l'une des principales priorités du Gouvernement, a poursuivi le Président du Comité interministériel des droits de l'homme. M. Fallavollita a affirmé que l'article 18 de la Loi 286 de 1998 sur les mesures régissant l'immigration et de normes relatives à la situation des citoyens étranger constitue l'un des instruments les plus efficaces dont l'Italie s'est dotée pour lutter contre le terrible phénomène du trafic des personnes. Cette loi prévoit l'émission d'un permis de résidence pour des motifs de protection sociale afin de permettre à un étranger de se soustraire à la violence et à une organisation criminelle et de prendre part à un programme d'assistance et d'intégration sociale. Le Gouvernement italien a par ailleurs approuvé en 2003 une importante loi ayant pour objet de remodeler l'organisation judiciaire propre à certains crimes tels que ceux d'esclavage, de trafic de personne ou de commerce de personne. Une définition claire de l'esclavage et de la servitude a notamment été énoncée. La peine a en outre été lourdement aggravée pour les crimes couverts par cette nouvelle loi. Demain, a poursuivi M. Fallavollita, le Ministère pour l'égalité des chances présentera à Rome le Bureau pour la promotion de l'égalité et pour l'élimination des discriminations fondées sur la race et l'origine ethnique, nouvellement créé. Ce Bureau sera un autre important instrument opérationnel permettant de combattre toutes les formes de discriminations.

Rappelant que l'Italie a toujours fait preuve d'une grande sensibilité et d'une grande attention à l'égard de la question de la protection et de la promotion des droits de l'enfant, M. Fallavollita a souligné qu'en 2002, le Gouvernement italien a approuvé le Plan national d'action pour l'enfance et l'adolescence (2002-2004). À par ailleurs été lancé cette année un Plan d'action contre le travail des enfants. En 2002, un Comité interministériel de coordination de la lutte contre la pédophilie a également été mis sur pied.

M. Fallavollita a rappelé que l'essentiel des recommandations que le Comité des droits économiques, sociaux et culturels avait présentées en 2000 portaient sur les conditions socioéconomiques des travailleurs en Italie. Aussi, a-t-il fait valoir qu'en dépit d'un contexte économique international et national défavorable, le nombre total de travailleurs a augmenté de plus d'un million entre 2000 et 2003. Près des deux-tiers de ces nouveaux travailleurs étaient des femmes. Par rapport à 2002, l'emploi a cru à un taux plus élevé que la population et que la main-d'œuvre. Au deuxième trimestre 2004, le taux de chômage - en baisse tant pour les hommes que pour les femmes - se situait à 7,9%, a précisé M. Fallavollita. Il a par ailleurs rappelé que, conformément à la Constitution, les régions ont la responsabilité de planifier et de coordonner les initiatives du secteur social et de la santé. Les services municipaux et les services de santé gérés par les agences de santé locales sont quant à eux responsables de la gestion, de l'organisation et de la mise en œuvre des services de prévention primaires, secondaires et tertiaires. Le Fonds national pour les politiques sociales, doté en 2004 de 1,884 milliard d'euros, fait pour sa part office d'instrument de programmation générale des actions de politique sociale.

M. Fallavollita a d'autre part indiqué que le Document blanc sur le bien-être social présenté par le Gouvernement en 2003 ainsi que le nouveau Plan national d'action sur l'inclusion sociale mettent l'accent sur la contribution cruciale de la famille pour faire face aux principales causes des changements sociaux : transition démographique et conséquences sur la relation entre les générations. L'Italie est fermement engagée à renforcer les mesures visant à réconcilier travail et vie familiale, a poursuivi M. Fallavollita. À cet égard, a-t-il précisé, la réforme du marché du travail récemment approuvée par la loi Biagi introduit de nouvelles formes de flexibilité (notamment le travail à temps partiel) afin de permettre de mieux concilier responsabilités familiales et engagement professionnel, en particulier pour les femmes.
S'agissant enfin des organisations non gouvernementales qui se sont plaintes d'une prétendue insuffisance des consultations durant le processus d'élaboration du présent rapport, M. Fallavollita a déclaré que si des consultations officielles n'ont pas eu lieu, le dialogue avec les ONG italiennes n'a pas été négligé pour autant durant la préparation du rapport. Il a précisé que si des consultations officielles n'ont pas eu lieu, c'est notamment parce qu'il n'existait pas en Italie, tout au moins au moment de l'élaboration du rapport, d'organisation qui aurait pu être considérée comme représentative de l'ensemble du mouvement des ONG italiennes (le Comité pour la promotion et la protection des droits de l'homme, qui représente 48 ONG, a été créé plus tard).

Le quatrième rapport périodique de l'Italie (E/C.12/4/Add.13) indique qu'au lendemain de sa nomination, le Gouvernement Berlusconi a présenté un programme d'action sous la forme d'un train de mesures contenant un ensemble coordonné de mesures complexes et variées. Dans le secteur économique, la loi du 18 octobre 2001, appelée Loi Tremonti bis, contenait les premières mesures de redressement visant à relancer l'économie par le biais, entre autres, de mesures d'incitation fiscale à l'investissement. Pour faciliter l'entrée des jeunes dans le monde du travail, l'une des priorités du plan gouvernemental était de mettre en œuvre la Directive européenne concernant l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée. Les données pour l'année 1999 font ressortir que le travail informel représente 15,1% de l'ensemble du travail, ce qui indique une progression de 1,7% par rapport à 1992. Afin d'apporter une réponse concrète au problème moralement inacceptable et préjudiciable, surtout pour le sud du pays, de l'économie souterraine, la loi du 18 octobre 2001 prévoit des incitations fiscales et des allègements de charges progressifs, qui augmentent en fonction du volume d'activité souterraine «émergeant» au grand jour. Le Ministère du travail a relevé des irrégularités dans 51 965 des 118 638 entreprises inspectées. Dans le secteur de la santé, les pouvoirs publics ont pris des mesures pour remédier aux lacunes des services de soins de santé dans les régions les plus défavorisées du pays, poursuit le rapport. En Italie, la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale est considérée comme un élément clef pour assurer le progrès économique et la croissance de l'emploi. Au cours des années, l'Italie a mis en place une série de plans sectoriels pour faire face à des catégories spécifiques d'exclusion sociale: Programme d'action relatif aux mesures concernant l'invalidité; Plan d'action en faveur de l'enfance et de l'adolescence; Fonds national de lutte contre la drogue; Programme d'intervention en faveur des personnes âgées; Fonds de soutien aux écoles maternelles. Le Plan national d'action pour les services sociaux, approuvé en avril 2001, au régime mis en place de se développer localement par le biais de plans régionaux et locaux, et qui fait directement intervenir les acteurs locaux dans la planification, la programmation et la mise en œuvre des mesures et des actions.

En 1999, 4,8% des foyers italiens, soit environ 1 038 000 personnes, vivaient dans des conditions de pauvreté absolue; en Italie du Sud, la pauvreté absolue concernait 11% des foyers. L'Italie est l'un des pays les plus gravement touchés par le vieillissement de la population, souligne en outre le rapport. Entre 1980 et 1999, le nombre moyen d'enfants par femme est passé de 1,68 à 1,22 alors que l'espérance de vie augmentait en moyenne de 5 années chez les personnes des deux sexes. En janvier 2001, le taux de chômage, en légère baisse tant chez les hommes que chez les femmes, était de 10,1% dans le pays; 29,2% des jeunes recherchaient un emploi, contre 32,3% en janvier 2000. Le taux de fréquentation scolaire dans l'enseignement secondaire a augmenté au cours des années, passant de 68,3% au cours de l'année scolaire 1990-1991 à 82,3% en 1998-1999, et ce surtout grâce aux filles. Cependant, chaque année, environ 5% des jeunes ne parviennent pas à terminer le premier cycle du secondaire. Il y aurait 17 000 sans-abri dans l'ensemble du pays, indique par ailleurs le rapport; la plupart sont des hommes (80%) et seulement la moitié sont Italiens. La plupart sont dans cette situation depuis trois ans au plus, mais 12,1% sont «à la rue» depuis plus de dix ans. La situation s'agissant des accidents mortels dans l'industrie et les services est extrêmement nuancée entre les régions du pays.

Selon un premier recensement sommaire, en 1993, on dénombrait environ six mille membres des populations rom et sinte à Rome, poursuit le rapport. Le premier recensement général effectué en novembre 1995 a révélé la présence de 5 467 membres de ces communautés, ainsi que l'existence de 50 campements de fortune et d'une aire de campement équipée (créée en 1994). Grâce aux mesures prises pour réorganiser ces sites, ils sont désormais au nombre de 26, dont cinq nouveaux villages dotés de logements, d'équipements de base et desservis par les services collectifs. Depuis 1993, au total, 25 campements illégaux ont été fermés. Une grande attention a par ailleurs été accordée à l'insertion sociale des Roms et aux mesures de protection. L'introduction d'un programme de suivi de l'assiduité scolaire des mineurs a conduit à une augmentation constante du nombre d'enfants scolarisés ces dernières années; des mesures ont été prises dans le domaine de la santé (centres de soins mobiles dans les camps, campagnes vaccinales, accès aux services de soins); des services d'insertion ont été mis en place (cours d'italien pour adultes, initiatives de formation professionnelle). Dans la ville de Milan, une personne sur mille appartient à la population rom, cependant que dans la province du même nom, on dénombre au maximum un Rom pour 3 200 habitants. Dans le Piémont, et en particulier à Turin, la population rom comprend plusieurs groupes: les Sinte piémontais, les Roms «Vlax», les Roms «balkaniques», les Roms «réfugiés» et les Tsiganes «roumains».


Examen du rapport

Un membre du Comité a relevé que la coopération avec les organisations non gouvernementales durant le processus d'élaboration du présent rapport périodique n'a pas répondu aux attentes. En effet, nombre d'ONG se sont plaintes de n'avoir pas été suffisamment consultées durant ce processus.

La délégation a assuré que même si les ONG ne sont pas officiellement représentées dans le Comité interministériel des droits de l'homme, les contacts ont été élargis avec les représentants de la société civile et des ONG. Des audiences - ou consultations informelles - se sont déroulées sur certaines questions spécifiques telles que la situation dans les prisons, par exemple. Il est vrai que ces consultations ne s'inscrivent pas dans un cadre institutionnalisé, mais notre préoccupation essentielle est de maintenir un canal de communication avec la société civile, a déclaré la délégation italienne.

S'agissant de la question de l'élaboration d'un protocole facultatif se rapportant au Pacte, un membre du Comité a relevé que, selon des informations qu'elle a fournies avant la présentation du Président du Comité interministériel des droits de l'homme, l'Italie a indiqué qu'elle estimait que la reconnaissance de la justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels constituerait une ingérence dans des secteurs relevant de la seule souveraineté des États.

La délégation a souligné qu'il s'agit là d'une question très complexe. Certes, a-t-elle déclaré, certains droits économiques, sociaux et culturels sont immédiatement applicables, s'agissant par exemple du principe de non-discrimination; mais il y a d'autres droits, tels que ceux intéressant la santé, le logement ou la coopération technique, qui sous-entendent une implication budgétaire de l'État. Comment, par exemple, imaginer que l'on puisse introduire un recours contre un État qui ne participe à l'aide publique au développement qu'à hauteur de 0,3% de son PIB, au lieu du taux de 0,7% fixé par les Nations Unies? En outre, si en vertu du Pacte les États s'engagent, certes, à respecter tous les droits énoncés dans cet instrument, il semble qu'il puisse y avoir différentes façons de faire respecter et de promouvoir certains droits. Il n'en demeure pas moins que l'Italie apportera sa contribution concrète à ce débat afin de parvenir à une résolution positive de ces questions, a déclaré la délégation.

La délégation a souligné que les informations prétendant que l'Italie serait le seul pays d'Europe ne disposant pas d'institution nationale des droits de l'homme conforme aux Principes de Paris sont fausses. En effet, sur les 25 membres de l'Union européenne, seuls 12 pays disposent d'une institution conforme à ces Principes et 12 autres ont des institutions nationales de droits de l'homme qui ne sont pas vraiment conformes aux Principes de Paris. Il n'en demeure pas moins vrai qu'effectivement, l'Italie ne dispose pas encore d'une institution nationale indépendante de droits de l'homme. Néanmoins, le Sénat s'est saisi d'une proposition visant à créer une institution très proche des Principes de Paris, car même s'il est prévu que la future institution soit rattachée au Président du Conseil, elle devra avoir suffisamment d'indépendance pour agir.

Plusieurs experts se sont inquiétés du faible niveau atteint par l'aide publique au développement (APD) en l'Italie. L'un d'eux a demandé à la délégation si elle était en mesure de donner des assurances que l'Italie atteindra d'ici 2006, comme elle s'y est engagée, le taux de 0,33% de son PIB consacré à l'APD. La délégation a fait observer que ce taux est passé de 0,2% en 2003 à 0,24% en 2004 et qu'il devrait atteindre 0,28% en 2005 avant de parvenir à l'objectif de 0,33% en 2006.


Droit au travail, non-discrimination en matière d'emploi

Un membre du Comité a souhaité savoir quelles sont les personnes qui sont le plus affectées par le chômage, en particulier le chômage de longue durée, en Italie. Il a également souhaité connaître le pourcentage de travailleurs qui ne touchent que le salaire minimum. En ce qui concerne le principe d'égalité de salaires entre hommes et femmes pour un travail égal, il s'est dit quelque peu désorienté par les réponses aux questions écrites du Comité dans lesquelles l'Italie affirme que d'un point de vue général, il est hors de question d'appliquer ce principe de manière absolue. Le principe d'égalité de salaire, à travail égal, entre hommes et femmes est un principe fondamental qui ne saurait que difficilement souffrir d'exception, a insisté l'expert. Il est difficile de s'abriter derrière l'autonomie du contrat de travail pour justifier le non-respect de ce principe, ont souligné plusieurs membres du Comité.

Faisant valoir qu'en matière d'égalité de salaires entre hommes et femmes, une personne qui s'estime lésée peut ester en justice, la délégation a souligné qu'il serait surprenant que l'on reproche à l'Italie d'assurer ainsi la justiciabilité d'un droit intéressant le Pacte tout en pressant le pays de promouvoir la justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels.

La législation actuellement en place en Italie n'autorise aucune discrimination dans le domaine du travail, a par ailleurs assuré la délégation.

Tout en rappelant que l'Italie est un pays qui a été marqué par la syndicalisation des juges et tout se défendant de vouloir aborder ici les relations tumultueuses entre la magistrature et l'actuel chef du Gouvernement qui a déclaré que pour être juge il fallait être malade mental, un membre du Comité a jugé surprenant qu'une loi restreigne d'une certaine manière la liberté des juges d'appartenir à une organisation syndicale.

La délégation s'est dite très impressionnée par le ton de cette dernière intervention et a assuré qu'il n'existe aucune restriction de la liberté syndicale applicable aux magistrats. La seule restriction applicable aux juges est qu'ils ne doivent pas appartenir à un parti politique, a précisé la délégation. En Italie, il n'existe pas de syndicat de la magistrature en tant que tel, a ajouté la délégation; il existe seulement des groupes de magistrats organisés.

Un membre du Comité ayant souhaité savoir pourquoi l'Italie n'a toujours pas ratifié la Convention de l'Organisation internationale du travail sur la prévention des accidents industriels majeurs, la délégation a indiqué que la convention n°174 est actuellement en cours d'examen. Elle a ajouté que seuls dix pays au monde ont à ce jour ratifié la convention.

Un membre du Comité a fait état d'informations selon lesquelles en Italie, c'est le secteur privé qui jouerait le rôle le plus important en matière d'éducation des enfants handicapés.

Un expert a relevé que le Code maritime italien ne semble pas être compatible avec la convention de l'OIT sur l'abolition du travail forcé. En effet, les articles 10.91 et 10.94 de ce Code maritime prévoient que les peines d'emprisonnement peuvent comprendre le travail forcé.

Après avoir fait observer que cette question a été soulevée au Conseil de l'Europe, la délégation a assuré que ces articles ne sont plus appliqués depuis bien longtemps.

Un membre du Comité a souligné que selon les statistiques, 15% du PIB - voire le double selon le Fonds monétaire international - sont issus du secteur informel. L'Italie est le pays de l'Union européenne où le travail informel est le plus répandu, a insisté un expert, soulignant que des milliers d'entreprises y ont recours, tant au sud que dans les autres régions du pays. L'ampleur de ce phénomène mine le système de sécurité sociale et de santé, a ajouté l'expert, ajoutant que près du tiers des décès au travail interviennent dans le secteur informel.

La délégation a indiqué qu'afin de lutter contre le phénomène du travail informel, des mesures de vigilance se sont développées en Italie, en particulier grâce à un fort engagement des inspecteurs du travail. Des efforts ont également été déployés en matière de prévention. Il est en outre important de souligner qu'une loi récemment approuvée a permis de régulariser près de 700 000 travailleurs qui étaient auparavant des travailleurs irréguliers clandestins.

En ce qui concerne le chômage, la délégation a indiqué que son taux est de 7,9% contre 10,9% auparavant. En Italie, le nombre total de travailleurs est en hausse depuis plusieurs années, en dépit d'un contexte international et intérieur peu propice, a-t-elle rappelé. Elle a en outre insisté sur la tendance à la baisse qu'enregistre depuis 1998 le chômage de longue durée.

En Italie, le travail des enfants n'est possible qu'à partir de l'âge de 15 ans, a souligné la délégation. Entre 15 ans et 18 ans, les adolescents peuvent suivre des cours de formation professionnelle qui sont susceptibles de venir s'intercaler avec les cours d'éducation à proprement parler mais qui s'inscrivent néanmoins dans le contexte de l'enseignement général.

Santé

En ce qui concerne les questions de santé, un membre du Comité a reconnu que l'Italie a placé la barre très haut dans ce domaine. Les immigrants peuvent accéder aux services et soins de santé même lorsqu'ils se trouvent en situation irrégulière, ce qui n'est pas commun, a notamment fait valoir cet expert. Il a néanmoins souhaité savoir comment a évolué la situation du VIH/sida en Italie ces dernières années. Il a également fait part d'informations selon lesquelles environ 10 000 prisonniers ont été diagnostiqués dans le pays comme souffrant de maladies infectieuses telles que l'hépatite virale ou la tuberculose - ce qui pourrait trahir une surpopulation carcérale.

La délégation a souligné que l'Italie s'est dotée d'un plan national sur le VIH/sida. L'intégration sociale des personnes souffrant du VIH/sida nécessite un engagement de grande envergure auquel souscrit le Ministère de la santé, a notamment précisé la délégation.

Un membre du Comité a relevé que les trois quarts des personnes vivant dans un état de pauvreté absolue se trouvent dans le sud du pays. Il pourrait donc s'avérer particulièrement judicieux d'intervenir - au-delà des familles défavorisées - en faveur des régions défavorisées. L'expert a cité un rapport du Département d'État des États-Unis selon lequel les immigrants roms vivraient dans des conditions de grande pauvreté et dans des conditions sanitaires très précaires; ils auraient peu de perspectives d'emploi et leurs enfants ne fréquenteraient guère l'école. Ces personnes seraient donc réduites à la petite criminalité et à la mendicité. Aussi, quelles actions ont-elles été prises en direction de ce segment particulièrement vulnérable de la population, a demandé l'expert? Plusieurs membres du Comité ont fait part de leurs préoccupations suite à l'expulsion de leur logement et du pays dont ont fait l'objet des Roms roumains qui squattaient via Adda, à Milan. Cette expulsion s'est déroulée dans des conditions qui ne semblent pas correspondre aux positions exprimées par le Comité en la matière, a-t-il été souligné.


Droit à un logement digne

Un membre du Comité s'est inquiété des dispositions d'une loi de juillet 2002 qui, semble-t-il, limitent l'accès des immigrants à l'habitat public (logement social) et aux facilités d'emprunt pour l'achat ou la rénovation de logements. En effet, en vertu de cette loi, il faut désormais remplir un certain nombre de conditions pour pouvoir prétendre à un logement social: il faut notamment posséder un permis de résidence, un permis de séjour valable pour au moins deux ans, un permis de travail, ainsi qu'un emploi régulier (alors qu'auparavant il suffisait de témoigner d'une recherche d'emploi). Ainsi, du fait du durcissement des conditions d'accès, une grande majorité d'immigrants sont a priori exclus de la liste des personnes éligibles à un logement social, a expliqué cet expert.

S'agissant de ces questions de logement, la délégation a indiqué que 80% des Italiens sont propriétaires de leur logement. L'État central et les régions disposent de tout un arsenal de mesures visant à encourager l'achat de logements, y compris par les travailleurs immigrés qui restent dans le pays, a précisé la délégation. Il existe également un fonds spécial qui accorde des prêts aux familles afin qu'elles puissent payer leur loyer, a-t-elle ajouté. Elle a précisé que le Parlement devrait adopter en mars 2005 une loi sur les expulsions. Pour accéder à un logement public, a précisé la délégation, l'étranger doit disposer d'un permis de séjour de deux ans au moins et disposer d'un travail rémunéré. Ainsi, les logements sociaux sont-ils réservés aux immigrants en situation régulière. Les autorités s'efforcent notamment de promouvoir les meilleures pratiques afin de faire disparaître les problèmes de discrimination qui peuvent continuer à se poser, dans le secteur privé, en matière d'accès au logement par les étrangers.

Un expert a fait observer que les logements sociaux ne représentent que 5% du parc immobilier. Un autre expert a souligné que 200 000 familles sont en passe d'être expulsées du fait de la mise en œuvre de la nouvelle loi sur la libéralisation des loyers.

Situation des minorités

En ce qui concerne les Roms, la délégation a indiqué qu'une grande majorité d'entre eux ont la citoyenneté italienne, de sorte qu'ils bénéficient des mêmes droits que tout Italien. Reste que, habitués à la vie nomade, les Roms n'aiment pas beaucoup l'intégration, a poursuivi la délégation. Il n'en demeure pas moins que les autorités locales disposent à leur intention de plans d'action qui sont mis en œuvre en collaboration avec la société civile.

La délégation a précisé que 9 000 enfants rom environ suivent un enseignement dans les écoles publiques italiennes, auxquels il faut ajouter une petite minorité d'autres enfants rom suivant des cours dans des écoles privées. Environ 22 000 Roms ne sont pas Italiens et 300 à 500 sont en transit sur le territoire italien, a par ailleurs indiqué la délégation.
Situation des migrants et des requérants d'asile, traite des personnes

Un expert a demandé si une loi italienne permettait de protéger les migrants et les requérants d'asile. Un autre membre du Comité a souhaité savoir s'il est vrai que l'Italie ne possède pas de loi sur l'asile mais seulement un décret sur la question. Un expert a souhaité en savoir davantage sur le regroupement familial dans le contexte des requérants d'asile, et sur la durée des procédures d'asile.

Il est vrai que l'Italie ne dispose pas d'une loi traitant spécifiquement du droit d'asile, a reconnu la délégation. Néanmoins, un tel projet de loi est actuellement en cours de discussion au Parlement et on espère qu'il sera possible de régler la question d'ici peu de manière à ce que l'Italie dispose enfin d'une telle loi, a précisé la délégation.

La délégation a par ailleurs fait part de la mise à disposition des migrants de services de médiation chargés de les aider à mieux comprendre toutes les procédures d'accès aux services sociaux.

Un membre du Comité s'étant enquis de la façon dont est assurée la protection sociale des personnes qui ne possèdent pas de permis de séjour la délégation a souligné que les immigrants en situation illégale ont, comme toute autre personne en Italie, le droit d'être hospitalisés et soignés. Il est même interdit aux autorités hospitalières d'avertir la police de la présence dans leurs établissements d'immigrants illégaux venus obtenir des soins, a précisé la délégation. De la même manière, les enfants d'immigrants illégaux ont pleinement le droit de suivre l'enseignement primaire public et les autorités scolaires n'ont, elles non plus, pas le droit d'avertir la police de la présence de ces enfants dans leurs établissements.

Il ne fait aucun doute que l'Italie - qui fait office de frontière méditerranéenne en tant que point d'entrée en Europe - fait actuellement face à une importante immigration clandestine, a affirmé un expert; aussi a-t-il souhaité savoir si les accords que le pays a passés avec des pays tels que la Libye et la Tunisie reconnaissent les droits économiques, sociaux et culturels des immigrants clandestins.

En ce qui concerne la question du regroupement familial pour les requérants d'asile, la délégation a indiqué que l'Italie n'est pas en mesure de garantir la réunification familiale pour ces personnes car le regroupement familial ne se justifie que lorsque la personne concernée se trouve dans une situation stable dans le pays d'accueil. Le problème en la matière réside donc dans la durée des procédures d'asile, a poursuivi la délégation; or, le fait est que les autorités italiennes s'efforcent précisément de réduire les délais de procédure. Un projet de loi est actuellement à l'étude au Parlement qui permettrait d'améliorer très nettement la situation à cet égard, a précisé la délégation.

En ce qui concerne la lutte contre le trafic de personnes, la délégation a fait valoir que de 1999 à 2004, l'Italie a cofinancé 296 projets de protection sociale sur l'ensemble du territoire national en accordant une attention particulière aux
zones où existe un grand risque de criminalité. Les résultats sont bons en termes de réadaptation et de réinsertion sociale, mais aussi en termes de sensibilisation du public à ce problème, a précisé la délégation.

Après avoir fourni un certain nombre de statistiques concernant les centaines de poursuites engagées contre des auteurs présumés de délits tels, entre autres, que la pornographie impliquant des enfants, la délégation a par ailleurs indiqué que de 1998 à 2002, le Ministère de l'intérieur et le Ministère des communications ont lancé des activités de surveillance des sites internet, procédant à ce titre au contrôle d'un millier de sites web. Ce sont au total 63 personnes qui ont été mises en examen suite à cette vaste opération de contrôle et 729 personnes ont fait l'objet d'enquêtes spécifiques, a précisé la délégation.


Éducation, culture

En ce qui concerne les questions d'éducation, la délégation a notamment assuré qu'il n'existe pas en Italie de ségrégation à l'égard des enfants handicapés, lesquels sont traités sans discrimination. Il est faux de prétendre qu'il y aurait eu une diminution du nombre d'enseignants spécialisés pour élèves handicapés, a ajouté la délégation. Désormais, ces enseignants spécialisés doivent uniquement travailler auprès d'étudiants ayant un handicap, ce qui n'était pas le cas auparavant, a-t-elle même fait valoir. En 2004, l'Italie compte 160 000 étudiants ayant un handicap et plus de 80 000 enseignants spécialisés à leur intention. Étant donné que la loi prévoit que le taux d'encadrement des élèves handicapés doit être d'un enseignant pour quatre élèves, il convient de souligner que pour l'heure, ce taux est largement respecté. La délégation a ajouté que c'est le principe de parité qui prévaut, en vertu duquel les écoles privées sont considérées comme des écoles publiques pour peu qu'elles affichent les mêmes indicateurs que ces dernières. Il n'existe aucune discrimination entre filles et garçons au niveau scolaire, a par ailleurs souligné la délégation.

S'agissant de la question des langues minoritaires, la délégation a rappelé qu'au sud-Tyrol (région du Trentin-Haut Adige), la population est bilingue (italien/allemand). Il en va de même dans la région du Val d'Aoste où la population est bilingue (italien/français). Des accords ont par ailleurs été passés avec divers pays concernant le fonctionnement d'établissements scolaires dispensant un enseignement dans les langues vernaculaires de ces pays, a poursuivi la délégation. En outre, l'albanais est enseigné dans la région où se trouvent depuis des siècles des Italiens ayant une ascendance albanaise et une forte tradition culturelle albanaise, a ajouté la délégation.

Un membre du Comité ayant souhaité savoir si l'Italie considérait comme une menace pour sa propre culture et son propre modèle de société l'arrivée sur son territoire de nombreux immigrants provenant d'autres cultures, la délégation a déclaré que l'Italie considère comme très positif que la société italienne évolue vers une société multiculturelle.

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