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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS EXAMINE LE RAPPORT DE L'ESPAGNE

04 mai 2004

Comité des droits économiques,
sociaux et culturels 4 mai 2004


Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné, hier après-midi et aujourd'hui, le quatrième rapport périodique de l'Espagne sur les mesures prises par ce pays pour mettre en œuvre les dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur ce rapport avant de les rendre publiques à la fin de sa session, le vendredi 14 mai prochain.

Présentant le rapport de son pays, M. Joaquín Pérez Villanueva y Tovar, Représentant permanent de l'Espagne auprès des Nations Unies à Genève, a indiqué que le changement de Gouvernement intervenu dans le pays au mois de mars dernier entraînera l'adoption de nouvelles mesures liées aux questions couvertes par le Pacte et aux droits économiques, sociaux et culturels.

Au 31 décembre 2003, a poursuivi le Représentant permanent, le nombre d'étrangers ayant des papiers en règle était de 1,6 million, soit 24% de plus que ce qu'il était à la fin de 2002. L'importance du phénomène migratoire a rendu nécessaire l'adoption d'une série de mesures visant à assurer la pleine intégration des citoyens étrangers qui entrent légalement en Espagne et à prévenir l'immigration illégale ainsi que le trafic de personnes, a-t-il expliqué. Au vu des résultats obtenus, on peut affirmer que, ces dernières années, la gestion administrative de ces personnes s'est améliorée et les politiques d'accueil et de protection sociale à leur intention se sont renforcées, a affirmé le représentant.

La délégation espagnole était notamment composée de représentants des ministères de l'éducation, de la santé, de l'intérieur, du travail et des affaires sociales et des affaires étrangères et de la coopération; ainsi que de la Mission permanente de l'Espagne auprès des Nations Unies à Genève. Elle a fourni aux experts des compléments d'information s'agissant de la situation des Gitans, des étrangers et des femmes, des questions concernant le logement, l'emploi et la lutte contre le chômage, l'éducation et la santé, ainsi, notamment, que des conséquences de la marée noire du Prestige.

Le Comité entamera demain matin, à 10 heures, l'examen du deuxième rapport périodique de l'Équateur (E/1990/6/Add.36). Un compte rendu de l'examen de ce rapport sera publié jeudi après-midi.


Présentation du rapport

M. JOAQUÍN PÉREZ VILLANUEVA Y TOVAR, Représentant permanent de l'Espagne auprès des Nations Unies à Genève, a rappelé que le mois de mars de cette année a été important pour l'Espagne, d'un point de vue politique, puisqu'un changement de Gouvernement est intervenu. Ce changement entraînera l'adoption de nouvelles mesures en rapport avec les questions couvertes par le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, et ce, dans le cadre du maintien des objectifs généraux de l'État dans les domaines social, culturel et économique, a-t-il précisé. M. Pérez Villanueva y Tovar a par ailleurs indiqué que son gouvernement déplorait l'intervention d'une organisation non gouvernementale espagnole qui a pris la parole devant le Comité lundi dernier, lors de la séance d'audition des ONG, car cette intervention abordait des questions davantage liées à des revendications politiques qu'à des préoccupations sociales.

Le représentant espagnol a rappelé que son pays est l'un des plus décentralisés du monde, comme l'a reconnu l'Organisation de coopération et de développement économiques dans son rapport de 2003. Pour autant, ce processus de transfert de compétences ne dédouane en aucun cas l'État espagnol de sa responsabilité en tant qu'État partie au Pacte, a-t-il assuré. L'exercice, par les diverses communautés autonomes, des compétences ainsi transférées se fait dans le cadre juridique de protection fixé au niveau constitutionnel, a insisté le Représentant permanent. Il a en outre souligné que la Constitution espagnole confère à l'État une compétence exclusive pour ce qui est de fixer les conditions fondamentales permettant de garantir l'égalité de tous les Espagnols du point de vue de l'exercice des droits. M. Pérez Villanueva y Tovar a souligné que le principe de non-discrimination est amplement reconnu dans la législation espagnole. Il a néanmoins admis qu'il existe des groupes, tels que les femmes, les étrangers, les jeunes, les personnes âgées et les personnes handicapées, qui sont très vulnérables aux attitudes et conduites discriminatoires. C'est pourquoi les pouvoirs publics doivent faire des efforts pour éliminer de telles pratiques, quels qu'en soient les motifs. Il convient à cet égard de souligner l'adoption, à la fin de l'année dernière, de la loi sur l'égalité des chances, la non-discrimination et l'accès universel en faveur des personnes handicapées.

M. Pérez Villanueva y Tovar a par ailleurs attiré l'attention sur le changement intervenu dans son pays s'agissant de la situation de la femme sur le marché du travail, faisant valoir que plus de la moitié des emplois créés depuis 1993 ont été occupés par des femmes. Il a par ailleurs rappelé que le nouveau Gouvernement espagnol se propose de redoubler d'efforts sur le terrain de l'égalité, un secrétariat général des politiques d'égalité ayant d'ores et déjà été créé.

En ce qui concerne la situation des étrangers, le chef de la délégation espagnole a indiqué que, d'après les dernières statistiques disponibles, qui datent du 31 décembre 2003, le nombre d'étrangers ayant des papiers en règle était de 1,6 million, soit 24% de plus que ce qu'il était à la fin de l'année 2002. L'importance du phénomène a rendu nécessaire l'adoption d'une série de mesures visant à assurer la pleine intégration des citoyens étrangers qui entrent légalement en Espagne et à prévenir l'immigration illégale ainsi que le trafic de personnes. Au vu des résultats obtenus, on peut affirmer que, ces dernières années, la gestion administrative de ces personnes s'est améliorée et les politiques d'accueil et de protection sociale à leur intention se sont renforcées. Il convient de souligner que l'Espagne, qui connaît bien toutes les dimensions du phénomène migratoire, n'est pas à l'origine de ce problème qui prend de l'ampleur mais, bien au contraire, en est victime, a poursuivi le représentant. Au cours de l'année 2003, de nouvelles adaptations législatives ont été faites afin de faire face à la nouvelle réalité de l'immigration irrégulière et de lutter contre le trafic des personnes. La loi 62/2003 a introduit toute une série de mesures visant à favoriser le principe d'égalité de traitement et à lutter contre la discrimination en général et, plus particulièrement, celle fondée sur l'origine raciale ou ethnique. Une Direction générale de l'intégration des immigrants a par ailleurs été mise sur pied au sein du Ministère du travail et des affaires sociales, a précisé M. Pérez Villanueva y Tovar.

S'agissant de la communauté gitane, le Représentant permanent a déclaré que l'origine de l'exclusion sociale dont souffre une partie de cette population est due à la conjonction de plusieurs facteurs historiques et d'autres facteurs liés au changements sociaux et technologiques rapides que connaît la société espagnole. Conscient de cette réalité gitane et des besoins de ce secteur de la population, le Ministère du travail et des affaires sociales applique depuis 1988 un Programme de développement gitan qui entend faire en sorte que cette collectivité parvienne à une égalité de fait avec le reste de la société espagnole. L'un des principaux axes d'action consiste à promouvoir l'image du peuple gitan, à sensibiliser l'opinion publique et à promouvoir la culture gitane.

Le quatrième rapport périodique de l'Espagne (E/C.12/4/Add.11) souligne que la loi réglemente expressément les droits suivants des étrangers : droit à l'éducation; droit au travail et à la sécurité sociale; liberté syndicale et droit de grève; droit aux soins de santé; droit aux aides au logement; droit à la sécurité sociale et aux services sociaux; regroupement familial. Parmi les droits reconnus à tous les étrangers, figurent le droit à l'éducation de tous les étrangers âgés de moins de 18 anset le droit aux prestations et aux services sociaux essentiels. Les soins de santé aux mineurs de moins de 18 ans et aux étrangers inscrits sur la liste de recensement de la municipalité de résidence, ainsi que les soins d'urgence, son reconnus dans tous les cas, insiste le rapport. En outre, les résidents légaux se voient reconnaître le droit au travail pour son propre compte ou pour le compte d'autrui; le droit de se syndiquer'; le droit de grève; le droit aux aides au logement; le droit aux prestations du système de sécurité sociale et le droit aux prestations et aux services sociaux'; le droit au regroupement familial. Le rapport signale que le Programme global de coordination et de régulation de l'immigration en Espagne (Programme GRECO) comporte certaines mesures destinées à faciliter l'insertion professionnelle des étrangers résidant en Espagne. Un tableau figurant dans le rapport indique d'autre part qu'entre 1993 et 2001, le taux de chômage est passé de 19% à 9,1% pour les hommes et de 29,2% à 18,8% pour les femmes.

Le rapport affirme que les Gitans espagnols sont des citoyens à part entière et à tous égards, même s'ils subissent, en raison de leur appartenance à un groupe culturel différent, une discrimination dans divers domaines. À propos des formes concrètes de discrimination ou d'inégalité de traitement envers la population gitane, la majorité des communautés autonomes ou des régions d'Espagne signalent qu'il ne se produit pas de faits discriminatoires ou d'intolérance sur leurs territoires respectifs. Lorsque des faits de ce genre sont signalés, il s'agit de faits mineurs et ponctuels. D'autre part, selon les nouvelles que diffusent les moyens de communication, lorsque de telles situations surgissent, elles sont liées à l'accès à des lieux publics, au travail, au logement et à la coexistence entre la population majoritaire et la population gitane. Le programme de développement gitan, lancé en 1989, est conçu pour améliorer la qualité de vie des Gitans et des Gitanes, en favorisant leur participation à la vie publique et sociale, dans le respect de leur culture. L'objectif 3 du Plan national d'action pour l'insertion sociale, intitulé «Actions en faveur de groupes spécifiques de personnes plus vulnérables», comporte une mesure générale pour améliorer la situation de la population gitane exclue ou en danger d'exclusion et qui ,selon les calculs, se monte à plus de 30% de la population gitane totale, estimée à environ 630 000 personnes. Les seules limitations de l'exercice du droit de grève découlent des garanties précises visant à assurer le maintien des services essentiels à la communauté, poursuit le rapport, qui ajoute que le gouvernement a fait usage de cette faculté en de nombreuses occasions, par le biais de décrets de service minimum. Le rapport indique aussi que le système éducatif espagnol est caractérisé par un enseignement obligatoire, mixte et gratuit dans les établissements publics, de 6 à 16 ans. L'analphabétisme qui apparaît encore dans la population adulte est essentiellement féminin. Le taux d'analphabétisme atteint 2,1% pour les hommes, mais 4,26% pour les femmes.


Examen du rapport

Les membres du Comité ont demandé des compléments d'information à la délégation espagnole concernant l'application du Pacte dans le pays.

Un expert a notamment relevé qu'il semble que les divers plans et programmes mis en œuvre par les autorités espagnoles en faveur des Gitans n'améliorent pas leur sort; ils souffrent encore de préjugés sociaux et font face à la discrimination dans tous les domaines. Le Programme de développement gitan manque de fonds et ne traite pas sérieusement des problèmes de discrimination, a estimé cet expert, ajoutant que les Gitans ne semblent pas avoir voix au chapitre dans la mise en œuvre de ce programme.

L'Espagne a-t-elle l'intention de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, a demandé un autre membre du Comité? Dans quelle mesure la loi espagnole protège-t-elle les droits économiques, sociaux et culturels des étrangers sans papiers, s'est-il interrogé.

Un membre du Comité s'est enquis de ce que sont devenus les travailleurs marocains concernés par les événements intervenus dans la ville d'El Ejido il y a quelques années. Ont-ils obtenu un permis de travail ou sont-ils retournés chez eux?

En réponse à cette question, la délégation a notamment souligné que l'Espagne a déjà abordé devant le Comité sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale les questions en rapport avec les événements d'El Ejido.

La délégation espagnole a par ailleurs souligné qu'à la fin de l'année 2003, l'Espagne a transposé dans son droit interne les directives communautaires de l'Union européenne relatives à l'égalité de traitement de toutes les personnes et à l'égalité de traitement dans le domaine de l'emploi.

En ce qui concerne les Gitans, la délégation a rappelé qu'ils vivent en Espagne depuis plus de cinq siècles. Dans un premier temps, ils ont été bien accueillis puis, pour diverses raisons, les communautés ont divergé. Il existe des Gitans qui sont bien intégrés, notamment dans le domaine artistique, a souligné la délégation. Les Gitans représentent entre 1,5 et 1,8% de la population totale et ceux qui ont un problème ne représentent que 10% de ce petit groupe, a affirmé la délégation. Elle a précisé que les autorités espagnoles ont décidé de promouvoir une meilleure compréhension entre les Gitans et les non-Gitans. La culture, les coutumes et l'histoire de chacun doivent être respectées, a insisté la délégation. Elle a fait observer que l'action des autorités en faveur des Gitans s'inscrit dans la durée, tant il est vrai que les dysfonctionnements qui sont apparus en cinq siècles ne sauraient disparaître du jour au lendemain. Dans chaque région autonome, il existe au moins une fédération gitane, a ajouté la délégation. Elle a ajouté que les Gitans sont des Espagnols à 100%.. Ils ont leurs propres particularités et leur propre culture qui se manifeste notamment à travers les ferias ou encore à travers la tauromachie, a-t-elle rappelé.

Interrogée sur la situation des Gitans en Andalousie, la délégation a rappelé que 45% de la population gitane espagnole réside habituellement en Andalousie. La population gitane espagnole est sédentaire, a rappelé la délégation. Le Programme de développement gitan mené au niveau de l'État concerne notamment l'Andalousie. En outre, les autorités de la Communauté autonome d'Andalousie disposent de leur propre plan visant à aider la communauté gitane andalouse. On considère que 30% du budget total destiné aux Gitans en Espagne est géré par la Communauté autonome d'Andalousie, a indiqué la délégation.

Répondant à des questions sur la situation du logement, la délégation a notamment indiqué qu'en 2002, les jeunes de moins de 35 ans représentaient 80,35% des bénéficiaires de logements dits protégés, c'est-à-dire construits pour être attribués à des foyers à faible revenu. Depuis 2002, la loi prévoit que les étrangers résidents ont le droit d'accéder au système d'aide publique au logement dans les mêmes conditions que les Espagnols. Trois communautés autonomes ont en outre pris, ces dernières années, des mesures spécifiques de promotion du logement en faveur des immigrants : il s'agit de l'Estrémadure, de la Navarre et de Murcie.

La délégation a par ailleurs rappelé que les étrangers bénéficient des droits prévus par la loi sur un pied d'égalité avec les Espagnols. Lorsqu'ils sont résidents légaux, ils jouissent par exemple du droit à la liberté de mouvement et du droit de participer à la vie publique, y compris aux élections municipales; ils bénéficient également de la liberté de réunion, d'association et de manifestation. Les étrangers résidents légaux ont également droit au travail et à la sécurité sociale. Tous les étrangers de moins de 18 ans, qu'ils se trouvent en situation légale ou illégale, ont droit à l'enseignement au même titre que les Espagnols, a par ailleurs fait valoir la délégation. Qu'ils soient en règle ou illégaux, les étrangers ont en outre tous droit aux services et prestations sociales de base et, bien entendu, sont soumis au même régime fiscal que les Espagnols, a également précisé la délégation.

L'âge moyen des immigrants en Espagne est de 44 à 45 ans pour les personnes originaires d'Europe, d'Amérique du Nord ou d'Australie, de 29 ans pour les personnes originaires d'Afrique et de 32 ans pour les personnes originaires d'Amérique latine. Si une forte proportion des immigrants brésiliens sont des femmes, les immigrants maliens, par exemple, sont à 90% des hommes, a notamment précisé la délégation.

La délégation a par ailleurs indiqué que, depuis la création de l'Institut de la femme, quatre plans de promotion de la femme ont été adoptés. On s'efforce notamment de promouvoir la participation des femmes à la vie économique, en créant des entreprises et des postes de travail pour les femmes, a précisé la délégation. Des mesures sont également prises afin de favoriser le recrutement de femmes en finançant par exemple une partie des cotisations pesant sur les employeurs à l'embauche d'une femme.

Un membre du Comité s'est inquiété d'une enquête dans laquelle 4% des femmes de plus de 18 ans déclarent avoir été victimes de mauvais traitements au cours d'une seule année. Le nombre de plaintes pour violence conjugale s'élevait à 43 000 en 2002, a relevé cet expert.

Au vu de la forte proportion de contrats temporaires dans le monde du travail en Espagne, un expert a souhaité savoir si la lutte contre le chômage ne se fait pas, dans une certaine mesure, au détriment des garanties pour les salariés. Ce même expert s'est demandé si les femmes ne sont pas sous-employées, c'est-à-dire s'il n'existe pas une tendance à les employer à des postes qui ne correspondent pas à leur niveau de diplôme. L'expert a également relevé une insuffisance des moyens de l'inspection du travail ainsi qu'une insuffisance de la répression lorsque les normes de sécurité ne sont pas respectées dans les entreprises

En réponse à ces questions, la délégation a notamment indiqué que les autorités espagnoles s'efforcent de prendre des mesures pour lutter contre le chômage de longue durée des travailleurs de plus de 45 ans, qui constituent une classe d'âge confrontée à d'importantes difficultés en matière de réinsertion.

La délégation a indiqué qu'alors que le parc immobilier global passait en Espagne de 17 millions à 21 millions d'unités entre 1991 et 2001, le parc locatif se réduisait, ce qui n'a pas manqué d'entraver la mobilité géographique entre les régions à taux de chômage élevé et celles où il y a du travail. La Catalogne est une communauté qui connaît une situation de quasi plein emploi, a notamment fait observer la délégation.

Toutes les régions espagnoles ont fixé un revenu minimum. Néanmoins, le montant du revenu minimum diffère selon les communautés autonomes concernées, a expliqué la délégation. Il est prévu d'harmoniser ce revenu minimum et de faire en sorte qu'il représente 70% du salaire minimum interprofessionnel, a-t-elle précisé. Selon la loi, le Gouvernement espagnol doit revoir tous les six mois la situation du revenu minimum en tenant compte de l'évolution de l'indice des prix.

La semaine de travail hebdomadaire est fixée à 40 heures mais, en vertu de négociations catégorielles, cette durée est souvent moindre, a indiqué la délégation. Elle a précisé que le nombre annuel d'heures supplémentaires ne doit pas être supérieur à 80, tout dépassement de ce quota constituant une infraction administrative grave.

La délégation a par ailleurs indiqué que les travailleurs temporaires représentaient, au dernier trimestre de 2003, 30,7% du nombre total de travailleurs. Étant donné que ce taux avait atteint 34% il y a quelques années, on peut parler d'une régression du travail temporaire. Néanmoins, ce taux devrait encore rester élevé du fait de la structure économique même du pays, où les travaux saisonniers et le secteur touristique restent de gros pourvoyeurs d'emplois. La délégation a indiqué que les autorités cherchent à diminuer le coût que représente pour l'employeur le licenciement d'une personne sous contrat à durée indéterminée et à introduire une indemnisation à la fin des contrats à durée déterminée. Le Gouvernement a annoncé qu'il entendait engager le dialogue social sur diverses mesures visant à réduire le taux de travail temporaire, a souligné la délégation.

Un membre du Comité s'est inquiété du chiffre fourni par l'organisation non gouvernementale FIAN - «pour le droit à se nourrir», selon laquelle 18% de la population espagnole vivrait en dessous du seuil de pauvreté, fixé à 4 512 euros par an. Un autre expert s'est inquiété de ce que 5,6% de la population espagnole vivrait dans l'extrême pauvreté. Quels segments de la population sont touchés par ce phénomène, s'est-il enquis? L'Espagne compterait en outre 30 000 sans-abri, a-t-il été souligné.

Au cours de la dernière décennie, on a constaté une réduction du taux de pauvreté, de sorte que l'on peut avoir des raisons de croire qu'il sera possible d'accélérer ce processus de baisse, a déclaré la délégation. Il existe, il est vrai, de fortes disparités régionales dans ce domaine, a-t-elle admis; néanmoins, elles ont tendance à se réduire. La délégation a par ailleurs fait part de l'adoption d'un deuxième plan d'action pour l'inclusion sociale pour la période 2003-2005.

Répondant à des questions sur les conséquences de la catastrophe du naufrage du pétrolier Prestige, survenue le 13 novembre 2002, la délégation a déclaré que la société espagnole est très militante dans le domaine de la protection de l'environnement. Elle a rappelé l'existence d'une Agence européenne de l'environnement dont l'Espagne suit scrupuleusement les directives. L'Espagne possède en outre un Ministère de l'environnement doté de compétences étendues. L'Espagne possède les normes parmi les plus strictes d'Europe en matière de protection de l'environnement, a affirmé la délégation. S'agissant des personnes ayant participé au nettoyage des plages souillées par la marée noire et dont la santé a été affectée, la délégation a indiqué que la première mesure qui a été prise a consisté à recenser toutes les personnes qui avaient pris part à ces opérations de nettoyage. Leur nombre a été établi à environ 270 207 personnes. Sur ce nombre, 1 627 (soit 0,6% du total) ont bénéficié de soins en rapport avec les activités de nettoyage auxquelles elles s'étaient livrées. Sur les 27 964 militaires qui avaient également participé à ces opérations de nettoyage, 813 ont présenté des symptômes aigus, a ajouté la délégation. Aucun effet irréversible sur la santé de ces personnes n'a été décelé jusqu'à présent, a-t-elle précisé. Elle a ajouté que trois études épidémiologiques ont été menées dont l'une cherche à évaluer l'impact sur la santé en matière de reproduction et sur la mortalité par tumeur. Mais il faudra attendre une dizaine d'années pour obtenir des résultats précis.

S'agissant des questions de santé, la délégation a notamment souligné que tous les droits dans le domaine de la santé génésique sont reconnus aux Espagnols. Le nombre d'avortements augmente chaque année de 10 à 13%, a précisé la délégation.

En ce qui concerne le tabagisme, la délégation a indiqué que 34,4% de la population espagnole de plus de 16 ans fume. La lutte contre le tabagisme rencontre des succès auprès des hommes. En revanche, le tabagisme perdure chez les femmes, voire augmente chez les plus jeunes. L'Espagne est sur le point de ratifier la Convention-cadre de l'OMS sur la lutte contre le tabagisme, a annoncé la délégation. Elle a souligné que des mesures législatives ont été prises pour limiter la vente de tabac et créer des espaces fumeurs séparés. L'impact de ces mesures sera important puisqu'il sera désormais interdit de fumer sur le lieu de travail, a insisté la délégation.

Pour ce qui est de la toxicomanie, la délégation a notamment indiqué que la consommation d'héroïne a considérablement diminué en Espagne, ainsi, que les décès liés à cette toxicomanie. Il existe un plan national sur les stupéfiants qui dépend désormais du Ministère de la santé et non plus du Ministère de l'intérieur, a précisé la délégation. S'agissant des mesures prises pour prévenir la transmission du VIH/sida chez les toxicomanes, la délégation a notamment indiqué qu'il existe actuellement 1500 lieux d'échange pour les seringues, dont 70% sont des pharmacies auxquelles tout le monde a accès. Le nombre de cas de sida a été considérablement réduit ces dernières années grâce aux mesures prises en matière d'aide aux toxicomanes.

Dans le domaine de l'éducation, la délégation a indiqué qu'il est prévu, entre le mois de mai et le mois d'octobre de cette année, de mener de larges consultations en vue de recueillir le consensus sur une réforme de l'éducation. Le système définitif devrait être mis en place en 2006, a précisé la délégation. En Espagne, tous les enfants, qu'ils soient citoyens espagnols ou étrangers, ont droit à l'éducation, a-t-elle par ailleurs rappelé. Toute la population en âge scolaire est scolarisée. Pour les enfants de trois ans, le taux de scolarisation est de 98%, a précisé la délégation. Il va sans dire que pour les enfants de 6 à 16 ans - période couverte par l'enseignement obligatoire et gratuit - le taux de scolarisation est de 100%, a insisté la délégation.

Un membre du Comité a souhaité savoir s'il est vrai que l'Espagne fait partie des pays de l'Union européenne qui ne sont pas disposés à accueillir les ressortissants des dix nouveaux pays membres de l'Union européenne. La délégation a réfuté cette allégation et a rappelé que les périodes de transition - en attendant les conditions requises pour la liberté de mouvement - ne sont pas fixées par les États membres mais par l'Union européenne en tant qu'institution.

La délégation a par ailleurs affirmé que l'Espagne ne pense pas qu'il y ait de relation de cause à effet entre l'augmentation tout à fait regrettable de la traite des personnes et l'élargissement de l'Union européenne; en effet, les frontières étaient déjà relativement perméables avant que l'élargissement n'intervienne.

La délégation a par ailleurs affirmé que les transnationales espagnoles ont cette caractéristique particulière qu'elles investissent majoritairement dans les services publics essentiels des pays dans lesquels elles opèrent, ce qui ne manque pas d'avoir une influence sur la situation économique et sociale des populations concernées.

S'agissant de la question des enfants marocains non accompagnés de Ceuta et Melilla, la délégation a notamment rappelé qu'un mémorandum d'accord sur cette question a été signé l'an dernier entre l'Espagne et le Maroc. Jamais des mineurs n'ont été expulsés du territoire national car on s'efforce toujours - c'est une obligation - de favoriser le regroupement familial dans de telles affaires, a assuré la délégation.


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