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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS TIENT UN DÉBAT SUR LE DROIT DE CHACUN DE PARTICIPER À LA VIE CULTURELLE

09 Mai 2008



Comité des droits économiques,
sociaux et culturels
9 mai 2008



Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a tenu, aujourd'hui, une journée de discussion générale sur le droit de chacun de participer à la vie culturelle, conformément à l'article 15, alinéa 1 a) du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

La discussion s'est animée, par tables rondes, autour de quatre axes de réflexion, consacrés à la définition de la vie culturelle dans le contexte des droits de l'homme; au droit d'accès à la vie culturelle et de participer à la vie culturelle; aux droits culturels et l'universalité des droits de l'homme; aux dimensions individuelle et collective du droit de prendre part à la vie culturelle.

Outre les membres du Comité, de nombreux intervenants de la société civile – universitaires et représentants d'organisations non gouvernementales – ainsi que d'organisations et institutions internationales et régionales, ont pris part à cette journée de discussion.

Dans sa présentation du débat, M. Jaime Marchán Romero, membre du Comité, a rappelé que l'État partie est tenu de reconnaître les droits culturels et de prendre des mesures politiques, législatives et financières afin de protéger et nourrir la vie culturelle de tous sur un pied d'égalité.

Concluant le débat, un autre membre du Comité, Mme Virginia Bonoan-Dandan, a souligné que l'observation générale que le Comité élaborera s'agissant de la question examinée aujourd'hui traitera du droit de chacun - et non pas du droit de groupes – de participer à la vie culturelle, même si des groupes particulièrement vulnérables pourraient être identifiés dans cette observation générale.


La prochaine séance publique du Comité, le vendredi 16 mai, marquera la clôture de sa quarantième session. Le Comité rendra publiques à cette occasion ses observations finales sur les rapports examinés au cours de cette session et qui étaient présentés par la France, le Bénin, la Bolivie et l'Inde.



Déclarations liminaires

M. PHILIPPE TEXIER, Président du Comité, a souligné que l'article 15, alinéa 1a) du Pacte revêt une grande importance, même s'il est souvent sacrifié, peut-être parce que cet article est le dernier de la partie du Pacte consacrée aux droits économiques, sociaux et culturels proprement dits. Cette journée de discussion générale vise à faciliter l'élaboration d'une observation générale sur le droit de chacun de participer à la vie culturelle, a-t-il rappelé.

M. JAIME MARCHÁN ROMERO, membre du Comité, a proposé, dans le cadre de l'observation générale que le Comité envisage de rédiger au sujet du «droit de chacun de participer à la vie culturelle», d'analyser et d'approfondir les termes «vie culturelle», «chacun» et «participer». Anthropologiquement, on a tendance à parler de la culture comme mode de vie, a fait observer M. Marchán Romero. Dans son travail, le Comité s'abstiendra d'établir sa propre définition de la culture, a-t-il indiqué. L'accès à la culture doit être populaire, a-t-il poursuivi, ce qui ne signifie pas qu'il faille promouvoir une culture dite de masse en tant que produit de consommation. Il s'agit plutôt de promouvoir une culture de qualité, a-t-il ajouté. Comme pour les autres obligations qui lui incombent, l'État est tenu de reconnaître les droits culturels et de prendre des mesures, politiques, législatives et financières, afin de protéger et nourrir la vie culturelle de tous sur un pied d'égalité, a souligné M. Marchán Romero.

Définition de la vie culturelle dans le contexte des droits de l'homme

MME YVONNE DONDERS, Directrice adjointe du Centre pour le droit international de l'Université d'Amsterdam, a relevé que la portée des droits culturels est peu claire car la culture renvoie à une notion très vaste qui peut englober beaucoup de choses. Or, il y a absence de consensus sur ce qu'englobe la culture. Il faut donc se concentrer sur le droit de participer à la vie culturelle, c'est-à-dire le concept de vie culturelle dans le contexte des droits de l'homme. Aucune définition de la vie culturelle n'apparaît dans les directives du Comité pour l'établissement des rapports des États parties; il semble néanmoins que le Comité admette une notion plus large de la culture que ne l'avaient admise les auteurs de l'alinéa 1 a) de l'article 15. Le droit inscrit dans cet article englobe non seulement l'accès aux biens culturels mais aussi l'engagement dans l'élaboration de la politique culturelle et dans le processus de prise de décision qui lui est associé et la participation à la vie culturelle. En conclusion, Mme Donders a fait observer que la portée des droits associés au droit de participer à la vie culturelle a été élargie au fil des ans. Ce droit ne doit pas être utilisé pour limiter le droit des autres ou imposer une culture à d'autres, a-t-elle souligné.

M. ABDULAYE SOW, Coordonnateur du Centre interdisciplinaire sur les droits culturels de l'Université de Nouakchott, a souligné l'importance de donner aux populations la capacité de jouir du droit de participation à la vie culturelle. Chacun ayant sa fierté personnelle, la négation du droit de participer à la vie culturelle entraîne le repli identitaire, a-t-il souligné. Il a fait observer que dans la plupart des pays africains, le droit de participer à la vie culturelle ne se manifeste qu'à deux occasions: d'une part, lorsqu'il s'agit d'accueillir le Président en visite dans telle ou telle localité, la population locale se mobilisant alors pour organiser des manifestations d'accueil; et, d'autre part, dans le cadre des animations culturelles organisées par les présidences africaines.

Au cours de l'échange de vues qui a suivi ces deux déclarations, un membre du Comité, a fait observer que parler de «culture principale» induit la marginalisation de ceux qui ne font précisément pas partie de cette culture-là. La simple utilisation du mot culture induit une vie collective, a fait observer un autre expert. Or, il apparaît que les États ne mettent pas assez l'accent sur la dimension collective des droits, a souligné cet expert. Aussi, la réflexion relative au droit de chacun de participer à la vie culturelle doit-elle tenir compte de trois dimensions: les droits des individus, d'une part; l'individu comme faisant partie d'un groupe, d'autre part; et enfin la dimension collective du groupe en tant que tel. Il convient donc de trouver un compromis pour parvenir à un équilibre entre ces trois dimensions, a souligné l'expert. Aucun pays au monde ne possède de richesse culturelle qui se suffise à elle-même et qui n'aurait pas subi l'influence d'autres cultures, a souligné un autre membre du Comité. Le droit de participer à la vie culturelle est un droit opposable aux États; or, souvent, l'État n'admet que la culture de la majorité de la population voire la culture du groupe qui gouverne, a fait observer un expert, soulignant que les États sont généralement très jaloux de leur unité nationale. Jusqu'ici, les droits culturels sont restés sous-développés parce que l'on a souvent considéré qu'ils étaient couverts par la disposition générale relative à la non-discrimination, a souligné un intervenant. Un autre intervenant a mis l'accent sur la nécessité de veiller à ce que l'observation générale que le Comité se propose d'élaborer au sujet du droit de chacun de participer à la vie culturelle échappe aux intérêts nationaux.

Accès à la vie culturelle et participation à la vie culturelle

La pauvreté et l'accès à la culture

MME ANNELISE OESCHGER, Présidente du Comité de liaison des organisations non gouvernementales indépendantes auprès du Conseil de l'Europe, a fait observer que les gens les plus démunis ne demandent pas seulement qu'on les aide, mais aussi qu'on les comprenne. Pourquoi ne prend-on jamais en considération le fait que les personnes défavorisées ont aussi envie de jouir de leurs droits culturels, y compris le droit de participer à la vie culturelle, a-t-elle demandé ? Sans accès à la culture, personne ne peut sortir de la pauvreté, a-t-elle déclaré, précisant qu'il s'agit là d'un constat. L'être humain vivant dans la pauvreté ne se voit pas accorder de dimension culturelle; or sans cette dimension culturelle, il n'est pas possible de sortir de la pauvreté, a-t-elle insisté. Dans nos sociétés, il n'est pas acquis que nous faisons tous partie de la même famille humaine, a-t-elle ajouté. Dans le contexte actuel où l'on ne parle que de crise alimentaire, il ne faut pas omettre de parler aussi de crise culturelle, a-t-elle poursuivi. La vraie crise, actuellement, n'est pas la crise alimentaire, mais la crise culturelle, a-t-elle déclaré.

MME ALESSANDRA AULA, du Bureau international catholique de l'enfance (BICE), a invité chacun à se pencher sur l'idée de transmission des pratiques culturelles, qui s'accompagne d'un acte de compréhension desdites pratiques, ce qui permet d'effacer toute différence en termes de statut. C'est dans cet esprit que l'accès à la jouissance progressive des droits culturels trouve tout son sens, a-t-elle souligné. Il n'existe pas de hiérarchie entre les droits et libertés fondamentaux, a-t-elle rappelé. Toute culture est humaine, mais il ne faut pas non plus perdre de vue que certaines cultures nient les autres cultures, a-t-elle ajouté.

Au cours de l'échange de vues qui a suivi ces deux déclarations, un membre du Comité s'est réjoui que ces interventions témoignent d'une approche inclusive, qui est précisément celle qu'adopte le Comité lorsqu'il s'agit d'aborder les questions de pauvreté. Cet expert a toutefois indiqué ne pas saisir le lien entre la crise alimentaire et la crise culturelle qu'a mentionné Mme Oeschger. Les pauvres ne sont pas dépourvus de vie culturelle intrinsèque et ont beaucoup à apporter à la culture, a souligné un autre expert. Souvent, la culture a un droit et les femmes n'en ont pas, a pour sa part déclaré la représentante d'une ONG.

Revenant sur le lien qu'elle a mentionné entre crise alimentaire et crise culturelle, Mme Oeschger a expliqué que ce lien est double. D'une part, le monde est confronté à une crise alimentaire parce qu'il n'associe pas les personnes vivant dans l'extrême pauvreté à la réflexion sur les moyens de parvenir à mettre un terme à la misère. D'autre part, on réfléchit aux moyens de vaincre la crise alimentaire, sans jamais se pencher sur la crise culturelle, de sorte que l'on peut persister des années dans cette voie alors que l'important est de permettre aux personnes de développer leurs potentialités humaines.

L'accès au patrimoine culturel

MME GABI DOLF-BONEKÄMPER, membre du Groupe de Fribourg, a expliqué que le patrimoine est – au-delà d'une chose que l'on peut toucher - une construction sociale. Elle a en outre fait observer que l'appartenance locale d'un monument ou d'un objet d'art n'est pas aisée à définir car un territoire sur lequel se trouve un monument) peut avoir changer de » propriétaire » et un monument comme par exemple l'autel de Pergame qui se trouve désormais à Berlin ou encore, l'Obélisque à Paris) peut avoir été transporté depuis son lieu d'origine vers une autre destination. Soulever la question des acteurs de la construction sociale implique de réfléchir à la question de l'appartenance culturelle des individus et la manière dont ces derniers se perçoivent de ce point de vue. L'appropriation d'un patrimoine ne crée pas une propriété du mais une appartenance au patrimoine, a souligné Mme Dolf-Bonekämper.

Les arts dans le contexte de la mondialisation

M. JOOST SMIERS, Professeur de sciences politiques des arts à l'École d'Arts d'Utrecht, a souligné que plus on élargit le concept de culture, plus on prend le risque de perdre de vue le volet artistique de ce concept. Dans une société, le domaine artistique est celui de la lutte symbolique. Dans nos sociétés actuelles, deux facteurs gênent la participation à la vie culturelle, a-t-il poursuivi. Il s'agit d'une part du système des droits d'auteurs et, de l'autre, de la manière dont des dominations s'établissent en matière, par exemple, de distribution de la culture. Le concept de droits d'auteurs va à l'encontre du droit de chacun de participer activement à la vie culturelle, a déclaré M. Smiers. Aussi, conviendrait-il d'abolir les droits d'auteurs, qui ne font que protéger quelques conglomérats culturels, a-t-il ajouté. Et précisément, a-t-il poursuivi, ce sont des centaines de milliers d'œuvres films, textes, musiques) qui se retrouvent entre les mains de quelques rares conglomérats exclusifs qui nous relèguent au rang de consommateurs passifs. Il faudrait donc désagréger en de multiples entités ces grands conglomérats, qu'il s'agisse de Sony, Google, Amazon.com ou d'autres. En fait, le domaine public d'expression culturelle a été privatisé à un degré considérable, a conclu M. Smiers.

Au cours de l'échange de vues qui a suivi ces deux dernières déclarations, un intervenant a souhaité savoir quelle serait, du point de vue du droit, la meilleure façon de protéger les beautés naturelles d'un pays – forêts tropicales, montagnes, cours d'eau. Mme Dolf-Bonekämper a souligné que le paysage est lui-même une œuvre – précieuse dans le cadre du processus d'identification- qu'il convient donc de protéger en tant que telle. Un membre du Comité a souligné que si l'on peut certes envisager de réformer les droits d'auteur, il semble difficile d'imaginer leur suppression pure et simple. Il faut bien protéger les œuvres produites et leurs auteurs, ont ajouté plusieurs intervenants.

Les droits culturels et l'universalité des droits de l'homme

M. PATRICK THORNBERRY, membre du Comité pour l'élimination de la discrimination raciale, a souligné que s'il y a un droit de participer à la vie culturelle, il faut donner corps à ce droit. La culture se manifeste de manière très variée, a-t-il poursuivi; on peut interpréter cette notion de manières très différentes, a-t-il ajouté. Tenter d'en donner une définition reviendrait à couler la culture dans l'intangible et l'immobile, ce qui n'irait pas dans le bon sens, a poursuivi M. Thornberry. Le principe de non-discrimination est un principe universel, a-t-il souligné. Toutefois, la non-discrimination n'implique pas un traitement uniforme des différents groupes, a-t-il tenu à préciser. Très souvent, l'origine culturelle d'une discrimination est très patente, a-t-il poursuivi. Dans de nombreuses communautés, la ligne de séparation entre religion, coutume et culture est difficile à discerner; il peut même être préférable de ne pas chercher à l'établir, a-t-il ajouté.

M. TAIEB BACOUCHE, de l'Institut arabe des droits de l'homme, a fait observer que plusieurs questions sont problématiques ou ne font pas l'unanimité s'agissant des droits culturels. Il en est ainsi de la question du rapport entre diversité culturelle et universalité de ces droits. L'être humain se définit à la fois par sa spécificité en tant qu'individu et par son appartenance à la communauté humaine, a poursuivi M. Bacouche. La valeur, dans ce contexte, puise sa source dans les liens établis avec l'universel. L'universalité ne saurait toutefois se confondre avec la mondialisation, qui en constitue plutôt la perversion et la négation.

M. PATRICE MEYER-BISCH, Coordonnateur de l'Institut interdisciplinaire pour l'éthique et les droits de l'homme de l'Université de Fribourg, a lui aussi insisté sur les rapports entre l'universel et le particulier, qui sont en fait l'envers et l'endroit d'un même disque, puisque c'est par l'universel que l'on peut aller recueillir, en la valorisant, la diversité des œuvres culturelles. Le sujet, en droits de l'homme, est toujours stricto sensu, individuel, mais il n'existe aucun droit dont l'exercice en lui-même serait individuel, un droit ayant toujours une dimension sociale, à savoir qu'il s'inscrit dans un système social. Il faut travailler sur l'objet social d'un droit afin de sortir de la rhétorique catastrophique opposant l'individuel au collectif, a souligné M. Meyer-Bisch. Il faut se départir de cette logique alternative pour adopter une logique inclusive, a-t-il ajouté.

MME JULIE RINGELHEIM, du Fonds national pour la recherche scientifique du Centre pour la philosophie juridique de l'Université de Louvain, a fait observer que la notion de participation à la vie culturelle recoupe la possibilité de contribuer à la production de la vie culturelle et la possibilité d'accéder à cette production. Pourrait s'y ajouter la possibilité de prendre part à la prise de décision concernant la vie culturelle. Mme Ringelheim a par ailleurs rappelé l'obligation qui est faite aux États de protéger, de respecter et de faciliter les droits culturels. L'une des spécificité des droits culturels, a-t-elle poursuivi, résulte du fait qu'en protégeant la diversité des cultures, on admet que les individus puissent avoir une vision du monde et une hiérarchie des valeurs différentes, ce qui ne va pas sans créer des tensions avec le fondement même des droits de l'homme, universels. Il faut distinguer culture et pratiques culturelles, certaines pratiques pouvant être condamnées sans que l'ensemble de la culture concernée soit rejetée, a ajouté Mme Ringelheim. Dans toute culture on peut trouver des pratiques qui s'avèreront en contradiction avec les droits fondamentaux, a-t-elle insisté.

Au cours de l'échange de vues qui a suivi ces déclarations, un membre du Comité a fait observer que le droit international autorise les États à exprimer des réserves au sujet de telle ou telle disposition d'un traité international. Or, il se trouve que nombre de réserves précisément exprimées par les États se fondent sur des valeurs culturelles. Dans ce contexte, il convient de rappeler que les réserves ne doivent pas être contraires à l'objet principal du traité visé, a rappelé cet expert. Un autre expert a insisté sur l'importance de pluralisme, en tant que reconnaissance du droit à ce qu'existent, dans une démocratie, différentes cultures. Dans de nombreux cas, la religion se trouve au cœur des pratiques culturelles et l'on ne peut faire l'économie d'une réflexion sur cette question, a-t-il été souligné.


Dimensions individuelle et collective du droit de prendre part à la vie culturelle

M. EPHRAIM NIMNI, de l'École de politique, d'études internationales et de philosophie de la Queen's University à Belfast, a insisté sur la dimension collective des droits culturels en soulignant en outre que la culture est par définition dynamique, c'est-à-dire qu'elle change avec le temps. Aucune culture en soi, intrinsèquement, n'est pour ou contre les droits de l'homme, a-t-il ajouté. Dans un monde de 192 pays englobant 2500 nations, il faut disposer d'un élément équilibrant permettant aux diverses cultures existantes de participer au domaine public. Il a recommandé à la communauté internationale de faire tout son possible pour que le débat démocratique donne de l'élan aux cultures minoritaires plutôt que de pointer un doigt accusateur contre elles, afin de prévenir toute poussée fondamentaliste.

MME ELISSAVET STAMATOPOULOU, Chef du Secrétariat de l'Instance permanente sur les questions autochtones du Département des affaires économiques et sociales des Nations Unies, a attiré l'attention sur les spécificités juridiques des droits culturels. Les autochtones et membres des minorités sont victimes de discrimination et de marginalisation de la part de la société dominante; or la philosophie des droits de l'homme est de protéger les plus vulnérables, au nombre desquels figurent également les migrants, les enfants, les pauvres, les homosexuels, les handicapés et les personnes en détention, a-t-elle rappelé. Les principes de non-discrimination et d'égalité contribuent à éviter la marginalisation de tous ces groupes, a-t-elle ajouté. La liberté de l'individu de choisir à quelle vie culturelle il veut participer est cruciale, a-t-elle en outre fait observer. Cela renvoie en effet à la liberté de chacun de choisir sa vie culturelle et, partant, son mode de vie.

M. EMMANUEL DECAUX, Professeur de droit public international à l'Université de Paris II, a rappelé que nombre de droits sont à la fois individuels et collectifs. Il y a des droits qui sont intrinsèquement individuels (liberté de conscience, droit de ne pas être soumis à la torture), mais ils sont finalement assez rares car on en vient très vite à un traitement collectif. Il y a ensuite des droits qui appartiennent à une collectivité et enfin les droits qui sont exercés collectivement. Il convient de relever qu'il existe des groupes qui sont constitués de manière informelle et d'autres qui le sont de manière formelle. En outre, il y a des groupes identitaires exclusifs pour lesquels se posent les problèmes de la définition du groupe et du choix de l'individu de faire partie ou non de ce groupe.

MME CAROLINE DOMMEN, Directrice de 3D commerce, droits de l'homme et économie équitable, a rappelé que des centaines de milliers d'agriculteurs mexicains ont dû quitter leurs terres parce qu'ils ne pouvaient soutenir la concurrence liée aux importations en provenance des États-Unis; on a ici un exemple clair de la manière dont la politique commerciale affecte le droit de participer à la vie culturelle. Le Comité devrait alerter les États sur la nécessité de veiller à ne pas souscrire à des accords internationaux qui les amèneraient à accepter des exceptions en matière de droits de propriété intellectuelle, a ajouté Mme Dommen, précisant que cela peut avoir des conséquences graves sur le droit d'accès aux connaissances.

Au cours de l'échange de vues qui a suivi ces quatre déclarations, un intervenant a relevé que du point de vue juridique, se pose le problème qu'une action ou omission de la part d'un État affecte tout un groupe et non un seul individu, de sorte que le recours face à cette action ou omission doit être collectif. Un membre du Comité a souhaité savoir si la notion de patrimoine commun de l'humanité est applicable aux droits économiques et culturels et dans quel sens. L'éducation est un élément fondamental du droit à la culture, a-t-il été souligné durant cette discussion. Plusieurs membres du Comité ont insisté sur la notion de liberté culturelle. Il faut veiller à laisser à chacun la liberté de s'identifier ou non à une culture, a rappelé l'un d'entre eux.

Un intervenant a regretté que cette journée de discussion n'ait pas suffisamment abordé la question des pratiques culturelles qui limitent l'accès des femmes à la culture.

Remarques de clôture

MME VIRGINIA BONOAN-DANDAN, membre du Comité, a jugé très enrichissante cette journée de débat général. Elle a indiqué que l'élaboration par le Comité d'une observation générale sur le droit de chacun de participer à la vie culturelle se ferait très rapidement et a exprimé l'espoir qu'il serait possible d'en faire circuler le projet le plus vite possible, dans le courant de cette année. Cette observation générale, a-t-elle souligné, traitera du droit de chacun - et non pas du droit de groupes – de participer à la vie culturelle, même si des groupes particulièrement vulnérables pourraient être identifiés dans cette observation générale, comme cela a été le cas pour d'autres portant sur d'autres thèmes.

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