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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ ÉTUDIE LES MOYENS DE RENFORCER SA COOPÉRATION AVEC L'UNESCO POUR LA RÉALISATION DU DROIT À L'ÉDUCATION

14 Mai 2002



CESCR
28ème session
14 mai 2002
Après-midi




Il précise le rôle du comité conjoint d'experts de l'Unesco
et du Comité chargé d'examiner les progrès des États
dans la réalisation du droit à l'éducation



Dans le cadre du suivi de sa Journée de débat général sur le droit à l'éducation et du Forum mondial sur l'éducation, tenu à Dakar en avril 2000, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a notamment examiné les moyens de renforcer la coopération, instaurée depuis 1999, entre le Comité et l'Organisation des Nations Unies pour la science l'éducation et la culture (Unesco), en ce qui concerne l'élaboration et la mise en œuvre des plans nationaux consacrés à l'éducation.
Les experts et les représentants de l'Unesco ont souligné la convergence entre les articles 13 et 14 du Pacte qui consacrent le droit à un enseignement primaire, obligatoire et accessible à tous et demandent aux États d'adopter un plan détaillé des mesures nécessaires pour la réalisation de ce droit, d'une part, et l'article 9 du Cadre d'action de Dakar, d'autre part, qui invite tous les États à définir des plans d'action nationaux ou à renforcer ceux qui existaient déjà avant 2002. Dans ce contexte, une représentante de l'Unesco a suggéré que le Comité demande aux États d'annexer à leur rapport périodique leurs plans nationaux en vue de la réalisation des objectifs de l'éducation pour tous afin de pouvoir les examiner et se rendre compte des progrès accomplis. Elle a également demandé au Comité de s'enquérir auprès des États des mesures qu'ils ont prises au titre de la formation continue. Pour leur part, les experts ont insisté sur le fait que l'éducation devait inclure les droits de l'homme.
Les représentants de la Banque mondiale, de l'Organisation internationale du travail et du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) qui ont pris part aux débats ont attiré l'attention sur le fait que la réalisation du droit à l'éducation demandait la prise en compte des questions relatives à la santé, à la nutrition, aux infrastructures et à la formation des enseignants. Ils ont également mis l'accent sur l'incidence du VIH/sida sur la réalisation du droit à l'éducation.
La question de savoir comment le Comité et l'Unesco pouvaient collaborer en vue de préciser les obligations juridiques des États d'assurer le droit à l'éducation a également été soulevée. À cet égard, le futur rapport de l'Unesco sur l'évolution des constitutions à la lumière du Cadre d'action de Dakar sera sans doute utile au Comité. Les experts ont insisté sur le fait que les États ne doivent pas se contenter d'affirmer le droit à l'éducation, mais démontrer qu'ils ont adopté des lois pour assurer sa réalisation, attestant de leur volonté politique de traduire les obligations morales en obligations légales.
Les membres du Comité et les représentants de l'Unesco ont également abordé la question de la création du comité conjoint d'experts de l'Unesco et du Comité, qui se réunira tous les trois ans. À ce propos, les experts ont recommandé la mise en place d'une structure souple qui pourrait rassembler les données collectées par l'Unesco et le Comité.
Le Comité se réunira demain et jeudi 16 mai en séance privée pour adopter ses observations finales sur les rapports de pays examinés au cours de la session. La prochaine réunion publique du Comité aura lieu vendredi 17 mai, date de clôture de la présente session.

Documentation
Pour l'examen du suivi du débat général consacré au droit à l'éducation, le Comité est saisi d'un rapport de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture consacré au dispositions constitutionnelles relatives à l'éducation et élaboration ou modernisation des législations conformément aux obligations des États et aux responsabilités des gouvernements énoncés dans le Cadre d'action de Dakar (E/C.12/2002/SA/2) qui rappelle que l'une des principales questions à résoudre concerne les implications juridiques du Cadre d'action. Dans l'objectif de rechercher des solutions efficaces qui entravent la réalisation du droit à l'éducation, la Stratégie à moyen terme de l'Unesco (2003-2007) indique que «l'Organisation s'efforcera d'instaurer avec les États Membres et les nouveaux prestataires de services éducatifs un dialogue visant à encourager tous les acteurs de ce secteur à accorder dans leurs champs d'intervention respectifs la place qui doit revenir aux notions d'équité, d'intégration et de cohésion sociale dans les sociétés contemporaines». Le rapport signale qu'il est indispensable d'accroître l'investissement dans l'éducation de base aux fins du développement dans la mesure où moins de 2 % de l'aide publique au développement vont à l'enseignement primaire ou à l'éducation de base. Aux termes du rapport, il importe que les États Membres intègrent mieux les principes du Cadre d'action de Dakar dans leurs lois et politiques nationales et fassent le nécessaire pour mettre en commun leurs expériences dans ce domaine.
Le Comité est également saisi d'un rapport de l'Unesco sur l'élaboration, la mise en oeuvre et l'évaluation des plans d'action nationaux (E/C.12/2002/SA/3), qui donne les résultats de l'enquête réalisée par l'Unesco en 2001 afin d'évaluer l'avancement des plans nationaux d'éducation pour tous (EPT) et de recenser les besoins d'appui technique. Il en ressort que 45 plans d'EPT (63 %) sont actuellement en place, que 7 pays n'ont pas mis en place de plans d'EPT. En outre, la moitié des plans éducatifs existants ne dépassent guère le stade de déclaration de principes et manquent de crédibilité. En effet, plus de 80 % des pays auraient besoin d'un soutien méthodologique et technique pour préparer ou renforcer leurs plans éducatifs. Des efforts considérables doivent donc être consentis par les pays et les partenaires extérieurs. Il est donc indispensable de savoir comment renforcer les capacités des pays en développement concernant la mise en œuvre des plans nationaux d'EPT et encourager le recours au savoir-faire disponible tant au niveau national qu'international. Il importe aussi d'apporter un soutien technique à l'élaboration de Documents de stratégie de réduction de la pauvreté, qui doivent intégrer les objectifs de l'EPT, et des plans nationaux d'éducation. En outre, il convient de réfléchir à la façon d'établir une synergie entre les plans nationaux d'EPT et le Plan d'action pour la Décennie des Nations Unies pour l'alphabétisation : l'éducation pour tous (2003-2012).
Le troisième rapport de l'Unesco dont est saisi le Comité est consacré à la préparation du rapport de suivi de l'Unesco sur la mise en œuvre du Cadre d'action de Dakar et à la contribution possible du Comité des droits économiques, sociaux et culturels à l'élaboration du cadre conceptuel (E/C.12/2002/SA/4), qui indique qu'il est extrêmement important de renforcer la coopération croissante entre l'Unesco et le Comité. Parmi les questions importantes à examiner, le rapport cite en particulier celle portant sur les moyens d'aider les groupes marginalisés et défavorisés, en particulier les filles et les habitants des régions reculées, à exercer leur droit à l'éducation. Il importe également de se poser la question de savoir si l'Unesco et le Comité peuvent se mettre d'accord sur une définition universelle de la qualité et, dans cette optique, d'élaborer des indicateurs pour mesurer la qualité de l'éducation.

Remarques liminaires
MME VIRGINIA BONOAN-DANDAN, Présidente du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, a rappelé que le Comité avait la possibilité d'amener les États parties à prendre des mesures pour assurer l'application du Pacte, en l'occurrence des articles 13 et 14 concernant l'éducation. Elle a précisé que les nouvelles directives présentées sous forme de questions permettaient de mieux suivre l'application des politiques des États en matière d'éducation et d'évaluer leur progrès en vue d'assurer l'enseignement primaire gratuit et obligatoire pour tous. La responsabilité d'assurer l'exercice du droit à l'éducation incombe au premier chef aux États. Les rapports présentés par les pays permettent d'exercer une surveillance sur leur application. Les conclusions du Comité après l'examen des rapports de pays permettent, notamment, d'attirer l'attention des États parties sur les questions qui restent en suspens et peuvent l'encourager à solliciter l'assistance technique de l'Unesco en vue de remplir ses obligations découlant du Cadre d'action de Dakar.
M. GEORGES MALEMPRÉ, au nom du Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco), M. Koïchiro Matsuura, s'est félicité de l'étroite collaboration qui s'est instaurée avec le Comité depuis l'élaboration de l'Observation générale du Comité concernant le droit à l'éducation. Cette collaboration s'est institutionnalisée par la création d'un groupe d'experts conjoint de l'Unesco et du Comité. Il a rappelé les objectifs établis lors du Forum mondial sur l'éducation (Dakar, avril 2000) qui visent, notamment, à assurer que d'ici à 2015 tous les enfants, particulièrement les filles et les enfants vivant dans des circonstances difficiles ou appartenant à des minorités ethniques, ont accès à une éducation de base de qualité. Ce cadre d'action prévoit également d'augmenter de 50 % le niveau d'alphabétisation des adultes d'ici à 2015 et d'assurer un accès égal et équitable à une formation continue des adultes. Le Cadre d'action prévoit en outre d'éliminer les inégalités entre les sexes dans l'éducation primaire et secondaire d'ici à 2005 et d'assurer la parité entre les sexes d'ici à 2015. Il est évident, dans ce contexte, que la coopération internationale doit appuyer les efforts nationaux en vue d'assurer l'exercice du droit à l'éducation pour tous, a poursuivi M. Malempré. Il s'est félicité de l'importance que le Comité accorde à ces questions et a indiqué que les observations finales du Comité éclairaient le rôle que l'Unesco pouvait jouer pour aider les États parties à réaliser ces objectifs.
Deux ans après la tenue du Forum de Dakar, la complexité et les défis qui se posent dans la réalisation de l'éducation pour tous apparaissent plus clairement, a déclaré le représentant de l'Unesco. C'est pourquoi l'Unesco a élaboré une stratégie internationale de mise en œuvre du Cadre d'action de Dakar. Cette stratégie met en évidence la nécessité de renforcer les partenariats entre tous les partenaires, a-t-il précisé. L'une des questions qui se posent, a-t-il poursuivi, est de trouver les moyens de renforcer les capacités nationales d'évaluation, notamment en ce qui concerne l'adoption d'une approche fondée sur les droits. Pour ce faire, l'Unesco bénéficiera sans conteste de l'expérience du Comité en tant qu'organe de surveillance des traités. Ainsi, le dialogue entre l'Unesco et le Comité devrait permettre d'explorer les moyens de lier plus intimement la mise en œuvre du Cadre d'action de Dakar et l'application des articles 13 et14 du Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Il a estimé qu'il serait opportun d'examiner la façon dont les engagements pris par les États en ce qui concerne le droit à l'éducation se reflètent dans les législations nationales.

Autres déclarations
M. ALFREDO SFEIR-YOUNIS, de la Banque mondiale, a rendu compte de la coopération de la Banque avec les institutions spécialisées de l'ONU. Il a rappelé que la Banque a fourni quelque 30 milliards de dollars et finance de nombreux projets en faveur de l'éducation pour tous. Le financement de ces projets est crucial pour la réalisation du droit à l'éducation, a-t-il précisé. Il a également insisté sur le fait que la réalisation de ce droit ne dépend pas uniquement des ministères de l'éducation, il repose également sur l'infrastructure et la réalisation du droit à la santé. Plus de 100 millions d'enfants, dont 60 % sont des filles, ne reçoivent toujours pas une éducation, a-t-il rappelé. Le représentant a indiqué que la Banque avait l'intention de tripler les fonds alloués à l'éducation primaire, particulièrement des filles. Il a donné les détails d'un projet réalisé en Tanzanie qui vise à aider les familles pour qu'elles puissent maintenir leurs enfants à l'école. Tout indique toutefois que les pays ne seront pas en mesure de réaliser les objectifs de parité pour 2015. Il a souligné sur la nécessité d'allouer des ressources suffisantes à l'éducation, mais aussi sur l'importance d'évaluer les résultats de l'éducation.
Faisant état des actions menées par la Banque, M. Sfeir-Younis a mis l'accent sur les projets visant à supprimer les frais de scolarité. Ainsi, au Malawi, le nombre d'enfants scolarisés a quadruplé grâce à ce programme. Le représentant a ensuite attiré l'attention sur l'incidence du VIH/sida sur la réalisation du droit à l'éducation car de nombreux enseignants meurent. De même, il faut attirer l'attention sur l'éducation dans les pays qui ont été touchés par les conflits, surtout en ce qui concerne les enfants soldats démobilisés. Il a ensuite expliqué que la Banque s'attachait à lutter contre la discrimination à l'égard des filles dans l'éducation et a indiqué que la Banque déployait des efforts particuliers en Afrique. Il a également indiqué qu'il fallait agir sur la santé et la nutrition pour que le droit à l'éducation puisse s'exercer et que les populations puissent prendre part à la vie politique et sociale de leur pays. Il a ensuite insisté sur la qualité de l'enseignement qui doit encourager l'épanouissement de la personne. L'enseignement des droits de l'homme fait partie de cet objectif de qualité de l'éducation.
MME MIRIAM MALUWA, Conseillère juridique du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA), a insisté sur le fait que la réalisation du droit à l'éducation permettra d'établir des conditions en vue d'éviter la transmission du virus. Le secteur éducation a les ressources nécessaires pour améliorer le comportement des jeunes. Toutefois, le VIH/sida pose de nouveaux défis à la réalisation du droit à l'éducation en décimant les ressources humaines et le nombre d'enfants qui vont à l'école. Il faut donc veiller à ce qu'une éducation sur le VIH/sida soit inclue dans les programmes scolaires. Elle a expliqué que l'ONUSIDA s'est concentré sur la formation des partenaires politiques pour qu'ils prennent la mesure de l'importance de l'éducation dans ce domaine, et sur la formation des individus pour qu'ils prennent conscience de leur droits.
La représentante a également apporté des précisions sur la coopération entre l'ONUSIDA et l'Unesco en ce qui concerne la formation des jeunes. Elle a également indiqué que l'ONUSIDA s'employait à former les populations sur l'accès aux médicaments. Ainsi, il importe de mettre en place des programmes éducatifs complets pour les enfants touchés par le virus et renforcer les programmes d'éducation informels.
M. BILL RATIERE, de l'Organisation internationale du travail a expliqué que l'OIT s'était attaché à améliorer la formation des enseignants et la qualité de l'enseignement technique, notamment dans ses liens avec le monde du travail. Il a rendu compte des efforts menés en collaboration avec l'Unesco pour améliorer la formation des enseignants et faire appliquer la Convention de 1966 sur le statut des enseignants. Il a estimé qu'il fallait attirer l'attention du Comité conjoint d'experts de l'Unesco et du Comité sur cette question. En effet, très peu de recherches ont été menées sur le statut des enseignants et la qualité de l'enseignement dispensé. Il faut prendre en considération le fait que les enseignants ont des droits, notamment en vue de former des organisations professionnelles permettant d'instaurer un dialogue avec les gouvernements sur les objectifs à atteindre en matière d'enseignement. Il a ensuite attiré l'attention sur les codes d'éthique et de conduite qui régissent la profession d'enseignant et a estimé que leur renforcement aurait des effets positifs sur la qualité de l'enseignement. Il a rappelé que les États devraient consacrer 6 % de leur budget pour assurer la réalisation du droit à l'éducation et a regretté qu'on soit loin du compte.

Débat
Au cours du débat qui s'est engagé par la suite, un expert a rappelé que les gouvernements ont l'obligation de respecter leurs engagements et que les États parties sont tenus de reconnaître le droit à l'éducation et de le mettre en œuvre. Il a souligné les nombreux éléments communs entre les dispositions du Pacte et les objectifs affirmés dans le Cadre d'action de Dakar, ce qui permet de demander aux États parties d'expliquer les mesures qu'ils ont prises pour mettre en œuvre ce cadre d'action.
Un autre expert a demandé quel était le mécanisme qui permettait de mesurer les progrès réalisés dans la mise en œuvre du Cadre d'action. Il s'est demandé si l'Unesco entendait envoyer des observateurs dans les États ou demander aux États parties d'élaborer des rapports. Il a demandé comment l'Unesco comprenait les engagements pris par les États parties. Il s'est déclaré d'avis qu'il s'agissait d'un engagement politique et quasi juridique des États et a demandé comment l'Unesco entendait mesurer leur réalisation.
Un expert, mettant l'accent sur l'éducation en tant que facteur de développement, a insisté sur la nécessité de convaincre les États que l'éducation était leur meilleur investissement en faveur du développement. L'expert a estimé qu'il fallait donc insister sur le fait que c'était l'intérêt des pays d'investir dans l'éducation. Un autre expert a estimé que l'Unesco n'insistait plus suffisamment sur le fait que l'éducation était un investissement ayant un intérêt économique, et a demandé au représentant de l'Unesco de s'expliquer sur ce changement de stratégie.
Un expert a regretté que le Cadre d'action mette l'accent sur les obligations des États en omettant d'insister sur le fait qu'il faut inscrire les droits de l'homme dans l'éducation. Il faut fournir une éducation qui renforce le développement de chacun. Il importe d'insister sur l'éducation en tant que promotion des droits de l'homme. Un autre expert a estimé que, malheureusement, l'éducation en matière de droits de l'homme n'est pas très efficace, si l'on en juge par la montée de l'intolérance et du racisme.
Répondant à ces interventions, MME MARY JOY PIGOZZI, de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, a confirmé que l'investissement dans l'éducation, en particulier celle des filles, s'est montré rentable. Elle a expliqué que l'argument économique était passé au second plan parce que l'on met aujourd'hui l'accent sur le développement humain. En outre, le Cadre d'action de Dakar a été élaboré par des éducateurs et non par des économistes.
S'agissant des résultats des efforts menés en faveur de l'éducation en matière de droits de l'homme, Mme Pigozzi a indiqué que l'Unesco s'est aperçue que l'on ne peut pas enseigner les droits en tant que tels. Les droits de l'homme doivent s'inscrire dans le concept d'une éducation de qualité. Il importe toutefois, a-t-elle convenu, que l'Unesco apporte des précisions sur ce qui constitue une éducation de qualité. En effet, il est impensable d'obtenir des résultats en matière de droits de l'homme dans des écoles où les châtiments corporels sont encore en vigueur. Elle a estimé qu'une éducation de qualité doit également comprendre une sensibilisation au problème du VIH/sida, de façon à ce que les jeunes apprennent à se prémunir et de façon à éviter la discrimination à l'égard des malades du sida. Toutefois, elle s'est déclarée convaincue qu'il faut d'abord pratiquer les droits de l'homme avant de les enseigner.
M. KISHORE SINGH, de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, a indiqué que les obligations morales des gouvernements sont liées à leurs obligations juridiques. C'est pourquoi il importe de renforcer les dispositions constitutionnelles relatives à l'éducation et la base juridique du Cadre d'action de Dakar. S'agissant de l'éducation en tant qu'investissement, il a précisé que les rapports de pays examinés par l'Unesco comportent des informations sur les résultats des investissements en matière d'éducation et sur leur montant.
Reconnaissant que le Cadre d'action de Dakar comporte des dispositions relatives au financement de l'éducation, un expert a toutefois fait remarquer que l'on observe une dégradation générale de l'éducation publique, du fait d'un manque d'investissement dans les infrastructures, de méthodes obsolètes et de salaires trop bas des enseignants. Il a indiqué que cet état de fait était généralement justifié par un manque de ressources. Il a rappelé que la corruption grevait les ressources de l'État, que les faiblesses du système bancaire absorbaient également d'importantes ressources. Il a considéré que les institutions financières internationales et nationales ne faisaient pas grand chose pour lutter contre le gaspillage des ressources publiques. Il a estimé que les institutions financières internationales et les institutions spécialisées de l'ONU devaient assortir leur aide de conditions, notamment en ce qui concerne la lutte contre la corruption. Il a cité l'exemple de l'Union européenne et de l'OTAN qui ont posé des conditions drastiques pour obliger les États à lutter contre la corruption et le gaspillage des ressources publiques.
Un autre expert a estimé que le Cadre d'action se fondait sur une obligation juridique des États d'assurer le droit à l'éducation. Il a regretté que rien ne soit fait pour améliorer la qualité de l'enseignement et a demandé à la Banque mondiale d'expliquer quelle était sa politique en la matière.
Répondant à ces questions, M. SFEIR-YOUNIS (Banque mondiale) a indiqué que les gouvernements doivent disposer de fonds pour construire les infrastructures nécessaires à l'éducation et pour payer les enseignants. Il a précisé que, dans de nombreux pays, le budget était principalement consacré au paiement des salaires des enseignants et non à la construction des écoles. En outre, ces pays n'ont pas les moyens d'augmenter les impôts pour augmenter le budget de l'éducation et finissent par entrer dans la spirale de l'endettement. Il a recommandé une transparence accrue de la part des pays de façon à ce que les communautés comprennent comment sont utilisés les fonds alloués à l'éducation. Prenant appui sur des chiffres, il a démontré que les pays développés consacraient des sommes plus importantes aux loisirs, à la consommation d'alcool ou de cigarettes qu'à l'aide allouée à l'éducation. Il a précisé que la Banque mondiale avait cessé d'assortir ses prêts de conditions parce qu'on lui avait reproché de s'ingérer dans les affaires intérieures des États. Toutefois, elle s'efforce de monter des projets de lutte contre la corruption, mais ne peut les mettre en œuvre qu'à la demande des États. Expliquant ensuite la politique de la Banque sur l'avenir de l'éducation, il a fait part de projets de classes sur l'internet.

Préparation et évaluation des plans nationaux d'action
MME PIGOZZI, Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, a indiqué que presque tous les pays avaient déjà adopté un plan sur l'éducation et que divers partenariats avaient été établis pour leur réalisation. En outre, les stratégies de lutte contre la pauvreté visent tous les secteurs sociaux, y compris l'éducation. L'Unesco s'attache à vérifier que ces plans sont conformes aux engagements internationaux en la matière, a-t-elle indiqué. Ces plans nationaux doivent inclure les objectifs de Dakar. Dans ce contexte, elle a estimé que le Comité pouvait aider l'Unesco en s'assurant, que lors de l'examen des rapports des États parties, les plans nationaux d'éducation visent tous les secteurs de l'éducation, y compris la formation continue. Il conviendrait aussi que le Comité demande aux États parties comment ils comptent assurer l'accès à l'éducation des groupes défavorisés et des personnes vivant dans des zones reculées. Elle a considéré que le Comité pouvait également encourager les États à faciliter la participation de la société civile à la réalisation des plans nationaux d'éducation. Elle a attiré l'attention du Comité sur les pays qui n'étaient pas en mesure d'adopter ou de réaliser un plan du fait de conflits, de catastrophes naturelles ou de situations extrêmes.
M. PAUL HUNT, s'exprimant au nom du Comité, s'est félicité de l'aide accordée par la Banque mondiale pour supprimer les frais de scolarité qui empêchent les plus pauvres de scolariser leurs enfants. Rappelant que, selon les engagements pris à Dakar, tous les pays devraient avoir adopté un plan d'action en faveur de l'éducation d'ici à la fin de 2002, il a souligné la convergence de cette obligation avec l'article 14 du Pacte. Il a convenu que le Comité avait des difficultés à obtenir des pays qu'ils adoptent des plans nationaux et a indiqué que l'Unesco était confrontée au même problème. Reprenant les termes de la Stratégie à moyen terme de l'Unesco (2003-2007), il a mis l'accent sur le fait que l'un des défis qui se posaient consistait à convaincre les États de renforcer les dispositions constitutionnelles et juridiques. Dans la mesure où le Comité est lui aussi confronté au même problème, il a recommandé que les États parties fournissent en annexe à leur rapport le plan d'action qu'ils ont adopté en vue de mettre en œuvre les engagements de Dakar. Il a estimé que le Comité pourrait ainsi connaître directement ces plans et formuler des observations sur leur réalisation. Il a également suggéré que le comité conjoint d'experts de l'Unesco et du Comité examine ces plans d'action et fasse rapport au Comité. Dans la mesure où le Comité et l'Unesco se heurtent au même problème en ce qui concerne l'élaboration des plans d'action, il a suggéré que la Haut-Commissaire aux droits de l'homme ou le Directeur général de l'Unesco encouragent les États parties à établir suffisamment à l'avance leurs rapports en ce qui concerne l'application du paragraphe 9 du Cadre d'action de Dakar et de l'article 14 du Pacte, qui portent sur l'élaboration de plans d'action.
MME PIGOZZI, de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, a souligné la difficulté de disposer de données précises sur la situation de l'éducation dans un pays donné. Les rapports des États devraient rendre compte des progrès réalisés dans la mise en œuvre des six objectifs de Dakar, a-t-elle ajouté. Elle a expliqué que l'Institut des statistiques de l'Unesco travaillait avec la Banque mondiale, l'UNICEF et le PNUD afin de collecter des données relatives à l'éducation. L'Unesco prévoit de demander aux pays des rapports d'évaluation thématiques sur la mise en œuvre du plan et de nommer des inspecteurs chargés de se rendre dans les pays pour évaluer la mise en œuvre du Cadre d'action. Dans ce contexte, elle a estimé que le Comité pourrait être d'une grande utilité pour l'Unesco afin de fixer les modalités de mise en œuvre.
M. EIBE REIDEL, s'exprimant, au nom du Comité, au sujet de l'élaboration du rapport d'évaluation de l'Unesco, a expliqué que le Comité ne collectait pas les données lui-même et examinait celles fournies par les États, en insistant pour obtenir des données ventilées. Dans le cadre de la collaboration entre l'Unesco et le Comité, il a suggéré qu'une petite équipe d'experts travaillant à la compilation des données en vue de l'élaboration du rapport pourrait ensuite faire rapport à l'Unesco et au Comité sur la mise en œuvre du Cadre d'action. Il a aussi recommandé que cette petite équipe examine l'intégration des droits de l'homme dans l'éducation. Il a mis en garde sur la création de lourdes structures rigides et a fortement recommandé que l'on se limite à une petite structure souple et mobile.
Suite à ces interventions, un expert a demandé à savoir ce qui se passait exactement sur le terrain, notamment au regard de l'engagement pris par les institutions internationales d'aider les États parties à réaliser les objectifs de l'éducation pour tous. Il a demandé aux insitutions spécialisées de rendre compte de leur action, à savoir notamment si elles ont des cadres généraux d'action en vue d'aider les pays à réaliser l'objectif de l'éducation pour tous.
M. ANDRÉ LEGRAND, Président de l'université de Paris X (Nanterre), représentant de l'Association pour l'éducation de la loi, a soulevé la question de l'intégration des immigrés et des étudiants étrangers dans les systèmes éducatifs nationaux. Il a également abordé la question de la réalisation du droit à l'éducation dans un contexte où la socialisation de certains groupes devient plus difficile et se manifeste par un rejet de l'institution et par l'institution. Il a observé que certains groupes marquaient un recul en ce qui concerne à l'accès au système scolaire.

Dispositions constitutionnelles relatives au droit à l'éducation et élaboration ou modernisation des législations conformément aux obligations des États
M. ABHYMANYU SINGH, de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, a donné des exemples de pays qui ont modifié leur législation pour se conformer aux engagements de Dakar, notamment la Lituanie, la Namibie, le Pakistan, l'Indonésie, le Viet Nam. Il a attiré l'attention sur le fait que la Constitution indienne a été modifiée pour inclure une disposition consacrant le droit à l'éducation comme un droit fondamental. En outre, la Cour constitutionnelle indienne a rendu un arrêt reconnaissant que le Gouvernement avait une obligation juridique au vu de ses engagements internationaux. Il a posé la question de savoir comment le Comité et l'Unesco pouvaient collaborer en vue de préciser les obligations juridiques des États pour assurer le droit à l'éducation. Il a indiqué que l'Unesco préparait un rapport sur l'évolution des constitutions conformément au Cadre d'action de Dakar qui sera sans doute utile au Comité.
M. ARIRANGA GOVINDASAMY PILLAY, membre du Comité, a souligné la convergence entre le Cadre d'action de Dakar et les articles 13 et 14 du pacte et a estimé qu'il importait de savoir comment les États reflétaient dans leur juridiction nationale les engagements internationaux auxquels ils ont souscrit. Il importe qu'ils prennent des dispositions en vue d'affirmer le principe de non-discrimination dans l'éducation, d'affirmer le principe d'égalité dans l'éducation, en prenant si nécessaire des mesures spéciales pour favoriser l'accès des filles, des handicapés et des groupes vulnérables à l'éducation. Ils doivent également prendre des dispositions qui affirment le principe d'un enseignement primaire gratuit pour tous, et se dotent de plans d'action nationaux dans ce sens. Ainsi, les États ne doivent pas se contenter d'affirmer le droit à l'éducation mais démontrer qu'ils ont adopté des lois pour assurer sa réalisation qui atteste de leur volonté politique de traduire les obligations morales en obligations légales. En effet, sans loi, il n'y a pas de fondement légal et donc pas de voie de recours. Il a rappelé l'Observation générale No 13 du Comité qui fait référence à l'assistance technique et interdit de violer ce droit à l'éducation. Ainsi, les autres pays et les institutions internationales sont aussi tenues de respecter leurs engagements en ce qui concerne le droit à l'éducation.
M. GIORGIO MALINVERNI, membre du Comité, a estimé qu'il était fondamental que les États inscrivent dans leur Constitution le droit à l'éducation, ou au minimum consacrent ce droit dans une loi. Ils peuvent également se contenter d'inscrire dans l'ordre juridique interne les dispositions internationales relatives au droit à l'éducation et de leur donner force de loi. En effet, de cette manière le droit à l'éducation devient un droit fondamental pouvant être invoqué devant une Cour constitutionnelle. Outre la Constitution et les lois, les gouvernements peuvent également adopter un plan d'action de droit interne qui prévoit une politique globale. Toutefois, cette option a un degré de normativité moindre. Il importe de préciser que cet enseignement doit être gratuit, obligatoire, suffisant et laïc. Il a rappelé que le principe de la laïcité de l'enseignement dispensé par l'État avait été confirmé par la Cour européenne des droits de l'homme. D'autre part, il conviendrait que ces dispositions constitutionnelles ou juridiques régissent les rapports entre l'enseignement public et l'enseignement privé de façon à laisser aux parents le choix de l'éducation qu'ils veulent donner à leurs enfants. Ainsi, il importe aussi de consacrer la liberté de l'enseignement.
M. MALEMPRÉ, de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, a réaffirmé l'engagement des institutions spécialisées de l'ONU, notamment le PNUD, le FNUAP et l'UNICEF qui sont engagées sur le terrain, aux côtés de l'Unesco, pour la réalisation du droit à l'éducation. Toutefois, il a rappelé que ces institutions ne pouvaient pas tout. Il importe que les politiques nationales soient élaborées et mises en œuvre par les États, qui doivent démontrer leur volonté politique dans ce domaine. Il a précisé que les politiques nationales que l'on examine comprenaient également l'action des collectivités locales et de tous les intervenants en matière d'éducation.



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