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Communiqués de presse Organes conventionnels

EXAMEN DES MESURES PRISES PAR LA RÉPUBLIQUE TCHÈQUE S'AGISSANT DU DROIT DU TRAVAIL

30 Avril 2002



CESCR
28ème session
30 avril 2002
Après-midi



Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a poursuivi, cet après-midi, son examen du rapport initial de la République tchèque. Les experts ont porté leur attention en particulier sur l'application des dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels s'agissant du droit au travail, dans des conditions justes et favorables, y compris les droits syndicaux.
Les membres du Comité ayant demandé des précisions sur les mesures prises en vue de réduire le chômage des femmes et des membres de la minorité rom, la délégation, dirigée par le Vice-Ministre tchèque du travail et de la protection sociale, M. Miroslav Fuchs, a reconnu qu'en dépit de la législation relative à l'égalité de traitement, on enregistre un écart de 25 à 27 % entre la rémunération des hommes et des femmes et que le taux de chômage des femmes est plus élevé que pour les hommes. La délégation tchèque a expliqué la stratégie nationale en faveur de l'emploi qui s'efforce également de stimuler la création de petites et moyennes entreprises ainsi que le travail individuel. S'agissant du fort taux de chômage dans la minorité rom, la délégation tchèque a expliqué que l'on ne disposait pas de statistiques fiables concernant cette minorité. Au-delà de la discrimination sur le marché du travail, il faut également tenir compte du fait que les personnes appartenant à cette minorité ont un faible niveau de qualification. Ce fort taux de chômage est aussi la conséquence des inégalités enregistrées dans le domaine de l'éducation.
Interrogée sur la persistance des problèmes liés à l'intégration de la minorité rom à la société tchèque, la délégation a expliqué que le Gouvernement avait adopté, dès 1997, un programme en vue de faciliter l'intégration des Roms. Ce programme a été révisé en 2000. Il s'agit d'une démarche exhaustive qui touche tous les droits économiques, sociaux et culturels et se fonde sur le dialogue entre les organisations non gouvernementales rom et le Gouvernement, qui se garde d'adopter une démarche paternaliste, a ajouté la délégation.
Le Comité achèvera demain matin, à partir de 10 heures, son examen public du rapport initial de la République tchèque en abordant les questions relatives au droit à un niveau de vie suffisant, au droit à la santé et à l'éducation.

Examen du rapport de la République tchèque
S'agissant des questions relatives au droit au travail dans des conditions justes et équitables, les experts ont exprimé des préoccupations concernant le paiement des salaires, les inégalités de salaires au détriment des femmes, le calcul du minimum vital dans le cadre de la protection sociale. Ils se sont inquiétés du fort taux de chômage, en particulier chez les femmes, et ont recommandé que le prochain rapport de la République tchèque fournisse des statistiques ventilées et des informations sur la discrimination à l'égard des femmes sur le marché du travail. Des précisions ont été demandées sur les résultats des programmes visant à favoriser l'emploi des membres de la minorité rom. À ce propos, les experts ont de nouveau demandé des précisions sur la définition de «minorité» utilisée par les autorités tchèques. D'autres questions relatives au paiement des retraites ont mis l'accent sur la question du vieillissement de la population.
Répondant à ces questions, un représentant tchèque a reconnu qu'en dépit de la législation relative à l'égalité de traitement, on enregistre un écart de 25 à 27 % entre la rémunération des hommes et des femmes. On observe en outre que les femmes occupent des postes à moindre responsabilité. Cette différence s'explique aussi par les congés de maternité. Les inspecteurs du travail ont pour consigne de rechercher ce type de discrimination à l'égard des femmes et d'imposer des sanctions, a assuré le représentant. Par ailleurs, les femmes qui se sentent victimes de discrimination sont encouragées à déposer un recours devant les tribunaux. S'agissant de la forte proportion de femmes parmi les chômeurs, le représentant tchèque a reconnu que le chômage des femmes s'élevait l'année dernière aux alentours de 10 % pour les femmes alors qu'il était de 7 % pour les hommes. Il a expliqué que le Gouvernement avait introduit une disposition interdisant de publier des offres d'emploi discriminatoires à l'égard des femmes. Il a toutefois constaté que de nombreux employeurs rechignaient à employer de jeunes femmes de crainte qu'elles aient des enfants. Toutefois, a-t-il poursuivi, les femmes sont encouragées à se pourvoir devant les tribunaux en cas de discrimination. Il a expliqué que le Gouvernement s'était efforcé d'encourager des formes d'emploi plus souples, privilégiant par exemple les emplois à temps partiel, pour lutter contre le chômage des femmes.
Répondant aux questions sur la définition de «minorité», une représentante tchèque a expliqué que la définition ne faisait pas référence à la religion comme critère parce que la population tchèque ne l'avait pas souhaité. Les dispositions en vue de protéger les droits des minorités nationales s'appuient principalement sur la Convention-cadre européenne relative aux minorités nationales. La représentante a apporté des précisions sur la politique nationale en vue de l'intégration des nouvelles minorités et des immigrants au sein de la société, indiquant notamment que les organisations non gouvernementales de ces minorités bénéficient de fortes subventions.
Pour ce qui est des discriminations à l'égard de la minorité rom sur le marché du travail, le représentant tchèque a expliqué qu'il était particulièrement difficile d'établir des statistiques sur cette population. De surcroît, les citoyens ne sont pas inscrits au bureau du travail sous le critère de leur appartenance à une minorité. En outre, les personnes appartenant à la minorité rom font partie de la catégorie de personnes disposant d'un faible niveau de qualification, très touchée par le chômage. Il faut également prendre en compte le fait que cette minorité est également victime de handicaps du fait de ses conditions de santé et de son faible niveau d'éducation.
Des précisions ont également été apportées sur l'accès des étrangers aux droits syndicaux. Le représentant a expliqué que le libellé de la loi prêtait à confusion, mais qu'il fallait comprendre ici le terme «citoyen» comme toute personne résidant et travaillant sur le territoire de la République tchèque. Il a reconnu que des révisions devaient être apportées à la législation régissant les droits des étrangers, mais a assuré que les dispositions actuelles respectaient l'esprit du Pacte. Parmi les étrangers vivant en République tchèque, on compte des Polonais, des ressortissants de pays d'Europe centrale (environ 10 %), des Allemands et des personnes venant du Royaume-Uni et du Vietnam. Les étrangers peuvent bénéficier d'un permis de travail d'un an renouvelable. Ce permis est délivré pour un emploi spécifique. À l'expiration de son contrat de travail, l'étranger peut s'adresser au bureau du travail pour savoir s'il y a des postes ouverts aux étrangers, c'est-à-dire pour lesquels aucun Tchèque ne se présente. S'il obtient un emploi, son permis de travail est renouvelé, sinon, il devient caduc. Le représentant a précisé que les programmes de formation continue et de recyclage étaient réservés aux citoyens tchèques.
Un représentant tchèque a précisé que son pays appliquait les recommandations européennes en matière de protection sociale. Il a espéré que la tâche d'harmonisation de la réglementation sur la protection sociale avec les normes en vigueur dans l'Union européenne s'achèverait d'ici à la fin de l'année. Il a également apporté des précisions sur le système de l'inspection du travail. On compte notamment un employé des services d'hygiène pour chaque groupe de 200 unités économiques. Pour ce qui est de la sécurité sur le lieu du travail, on compte un inspecteur pour 500 unités économiques. Il a déclaré que la loi sur l'inspection du travail était en cours de modification. Désormais, les inspecteurs devront mener des visites systématiques et assurer un suivi de leurs recommandations. Les inspecteurs du travail ont également le pouvoir de faire cesser une activité non conforme. Le représentant a indiqué qu'un projet de ratification de la convention 118 de l'OIT sur la protection sociale avait été rejeté par le Parlement, qui a notamment exprimé des doutes sur la capacité de la République tchèque à appliquer ses dispositions relatives aux accidents. Le représentant a précisé que le système tchèque prévoyait que les salariés étaient représentés auprès de l'employeur pour les questions de sécurité et de protection sociale. Ces représentants des salariés participent également aux enquêtes en cas d'accident du travail. Par ailleurs, une nouvelle loi réglementant le travail des enfants, notamment des adolescents qui travaillent avec leurs parents, est à l'étude.
Abordant la question des retraites, le représentant a expliqué le fonctionnement du régime obligatoire de cotisations qui garantit une pension équivalant à 57 % du revenu brut net. Il a reconnu que l'augmentation du nombre de retraites poserait rapidement un problème. Le représentant a également fait part d'un système privé qui s'est institué à partir de 1994. On compte actuellement 20 caisses de retraite privées en République tchèque et 1,4 million de personnes y contribuent. Le représentant a précisé que le consensus sur cette question est difficile à atteindre au sein de la classe politique. Plusieurs projets ont déjà été rejetés. Il a indiqué que le Gouvernement avait déjà reçu des recommandations sur ce point émanant de l'OCDE et de la Banque mondiale et qu'elles seraient prises en considération dans l'élaboration d'une réforme du régime des retraites.
La délégation a ensuite précisé comment les politiques de privatisation tenaient compte des dispositions du Pacte. Les entreprises qui se portent candidates doivent respecter les normes en vigueur en ce qui concerne le droit au travail et la protection sociale. Ainsi, lors de la privatisation du secteur énergétique, composé de mines, d'une centrale nucléaire et de centrales hydrauliques, le Gouvernement avait édicté des conditions très strictes concernant les restructurations, exigeant notamment que les suppressions d'emplois soient étalées sur dix ans. Certaines entreprises étrangères, découragées par ces conditions strictes, ont d'ailleurs retiré leur offre, a-t-il déclaré.
Un représentant tchèque a ensuite donné les détails de la stratégie nationale en faveur de l'emploi. Cette politique est appliqué par divers ministères en vue d'éviter une trop forte augmentation du chômage qui a pu être maintenu au-dessous d 10 % en moyenne. L'année dernière, le taux de chômage se situait aux alentours de 8 % et il est à 9 % aujourd'hui, à l'exception de la Bohême où le taux de chômage est inférieur. Cette stratégie s'inscrit également dans le cadre de la préparation à l'entrée dans l'Union européenne et s'attache aussi à encourager la création de petites et moyennes entreprises. Le nouveau plan national d'action préconise des mesures plus concrètes pour prévenir la perte des emplois des jeunes diplômés.
La stratégie du gouvernement met en outre l'accent sur le travail individuel et sur le travail des personnes présentant des incapacités. À la fin de l'année 2001, on relevait toujours un fort taux de chômage des personnes présentant des incapacités malgré le quota de 5 % recommandé par le Gouvernement. Dans ce contexte, le Gouvernement s'efforce de combiner plusieurs programmes de réinsertion de personnes handicapées afin de faciliter leur recrutement, notamment en facilitant leur formation, en identifiant leurs besoins, en établissant des mesures d'incitation à l'intention des employeurs. Ce nouveau régime de réinsertion est conforme aux directives des Nations Unies concernant l'emploi des handicapés.
Face aux préoccupations concernant le non-paiement des salaires, la délégation a reconnu que des cas de non-paiement s'étaient produits, ce qui avait incité le Gouvernement à adopter une loi sur le paiement des salaires en cas de faillite. En outre, un amendement à la loi sur la faillite a été introduit afin de conférer au salarié un statut de créancier lui permettant de se pourvoir devant les tribunaux en cas de non-paiement de son salaire pendant trois mois. Dans ce cas, il peut percevoir une indemnisation qui s'élève à deux fois et demi le salaire moyen national. Ces dispositions ont permis de remédier à cette situation et les employeurs veillent désormais à respecter les dispositions légales.
S'agissant du calcul du salaire minimum net, le représentant a expliqué qu'il avait été réévalué pour encourager les bénéficiaires de l'aide sociale à rechercher un emploi. Il est calculé en tenant compte de l'accroissement des prix à la consommation à l'issue de consultations entre les organisations d'employeurs et de salariés.
Répondant aux questions relatives aux dispositions concernant la protection de la famille et le respect des droits fondamentaux des femmes, le représentant tchèque a assuré que le dispositif législatif reconnaît l'égalité des droits et des obligations des hommes et des femmes au sein de la famille. En dépit des efforts déployés par l'État en vue de modifier l'image de la femme, qui est encore principalement considérée dans son rôle de mère, le représentant a reconnu qu'il y avait peu d'évolution sur ce plan. Il a souligné le rôle que devaient jouer les associations de femmes dans ce domaine.
Répondant aux questions sur les restrictions qui pèseraient sur l'accès des femmes à la formation dans certains domaines, le représentant a assuré que seules la formation de prêtre dispensée par l'église catholique était interdite aux femmes. Pour ce qui de l'éducation dans le domaine des droits de l'homme, le représentant a expliqué tous les textes des grandes conventions avaient été traduits en tchèque et pouvaient être consultés sur l'internet, assortis d'exemples et de recommandations.
Apportant des précisions au sujet du statut des apatrides, un membre de la délégation a indiqué que la République tchèque est partie à la Convention sur la réduction de l'apatridie depuis janvier 2001 et a engagé le processus de ratification de la Convention sur le statut d'apatride. En outre, la République tchèque est partie à la Convention européenne sur les nationalités, qui traite également des cas d'apatridie.
Répondant aux allégations concernant l'exploitation sexuelle des enfants, le représentant a expliqué qu'il s'est avéré que ces allégations étaient infondées. Il a précisé que la République tchèque avait pris des mesures de prévention et de protection des enfants victimes de sévices sexuels, ainsi que des mesures visant à assurer la protection des témoins et la réinsertion des victimes.
Revenant sur la question de la protection sociale des groupes vulnérables, le représentant a fait part de l'ouverture de centres d'accueil pour les enfants des rues, ainsi que pour les femmes victimes de violence. Des personnes ont également reçu une formation spéciale pour travailler avec les adolescents qui se prostituent. Des centres d'hébergement ont été créés dans les grandes villes et le Gouvernement espère maintenant établir des normes sur leur fonctionnement. Par ailleurs, le Gouvernement entend établir des priorités en matière de protection sociale, notamment en instaurant un inspectorat des services sociaux en vue de faire respecter les normes de qualité.
Interrogé sur la persistance des problèmes liés à l'intégration de la minorité rom à la société tchèque, un représentant a expliqué que le Gouvernement avait adopté dès 1997 un programme en vue de faciliter l'intégration des Roms. Ce programme a été révisé en 2000. Il s'agit d'une démarche exhaustive qui touche tous les droits économiques, sociaux et culturels et se fonde sur le dialogue entre les organisations non gouvernementales roms et le Gouvernement qui se garde d'adopter une démarche paternaliste. Ce programme est doté d'un volet de recherche sur la situation des Roms, notamment en ce qui concerne le logement et le niveau de vie. Il est attendu que ce processus s'étale sur plusieurs années.
Portant leur attention sur les questions relatives à la protection de la famille, la violence à l'égard des femmes et de la traite des femmes, les experts se sont, notamment, inquiétés de l'absence de dispositions pénales relatives à la violence au sein de la famille. Ils ont également fait part de préoccupations concernant le droit des réfugiés au regroupement familial et ont demandé si le Gouvernement appliquait les dispositions de la Convention sur la protection des travailleurs migrants et de leur famille concernant le regroupement familial. Les experts se sont également inquiétés de l'ampleur du problème de la traite des femmes et ont fait part d'allégations relatives au développement d'un tourisme sexuel dans les zones frontalières. Ils ont voulu savoir si le Gouvernement consacrait les ressources et la volonté nécessaires pour endiguer ce fléau.
D'autres questions ont porté sur le droit un niveau de vie suffisant, notamment le droit au logement. Les experts ont voulu savoir si la privatisation du parc immobilier national avait été recommandé par une institution financière internationale et si le Gouvernement avait pris des mesures compensatoires. Les victimes des lacunes de cette politique du logement sont souvent les Roms, qui se retrouvent parqués dans des ghettos à la périphérie des villes, ce qui a des répercussions en chaîne sur leur droit à l'éducation et à la santé. Les experts se sont en outre inquiétés du nombre important de sans-abri, estimés à quelque 100 000, alors que les structures d'accueil ne gèrent que 2 000 lits.
S'agissant du droit à la santé, les experts ont demandé des précisions et des explications sur la persistance des maladies cardiovasculaires, sur les mesures prises pour lutter contre l'alcoolisme, le tabagisme et la toxicomanie, en augmentation dans le pays. Ils ont voulu connaître les détails de la coopération internationale en vue de lutter contre le tourisme sexuel et savoir pourquoi les chiffres concernant le VIH/sida présentés par le rapport tchèque sont très inférieurs à ceux fournis par ONUSIDA.


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