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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE ENTAME L'EXAMEN DU TROISIÈME RAPPORT PÉRIODIQUE DE LA GRÈCE

02 Mai 2001



CAT
26ème session
2 mai 2001
Matin





Le Comité contre la torture a entamé, ce matin, l'examen du troisième rapport périodique de la Grèce sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Présentant ce rapport, M. Dionissios Spinelles, Professeur à l'Université d'Athènes, a rappelé que l'article 2 de la Constitution grecque interdit la torture et qu'une loi complète depuis 1984 le Code pénal en sanctionnant cette pratique. Depuis 1995, un procureur adjoint de la Cour d'appel, assisté d'un procureur du parquet (magistrate court), a été affecté sur une base permanente dans les cinq principales prisons du pays afin de surveiller la situation qui prévaut dans ces établissements pénitentiaires. S'agissant de la situation des détenus dans les commissariats de police, M. Spinellis a notamment expliqué que ces dernières années, des problèmes n'ont pas manqué d'apparaître avec l'augmentation du nombre d'immigrants clandestins dans le pays.

La délégation grecque est également composée de représentants des ministères de la justice et de l'ordre public.

Le Président du Comité, M. Peter Thomas Burns a, en tant que rapporteur chargé de l'examen du rapport de la Grèce, fait état d'informations laissant entendre que des problèmes persistent dans le pays en ce qui concerne la situation des Roms et des étrangers. Il semble en effet que les étrangers continueraient d'être la cible de certains comportements inappropriés de la part des fonctionnaires de police. Une ONG affirme même qu'il existe en Grèce une certaine impunité à l'égard des agents de police ayant recouru à une force excessive, a indiqué M. Burns.

M. Ole Vedel Rasmussen, corapporteur du Comité pour le rapport de la Grèce, a fait part de ses préoccupations concernant les problèmes de surpopulation carcérale que connaît la Grèce et a déclaré que construire davantage de prisons, comme semble l'envisager le pays, ne saurait constituer le meilleur moyen de régler le problème. Relevant que les commissariats de police ne sauraient être les lieux adéquats pour la détention d'immigrants illégaux, il a engagé la Grèce à créer des centres d'accueil spéciaux pour ces immigrants clandestins.

En fin de séance, M. Andreas Mavrommatis, membre du Comité, a fait part au Comité des résultats de la dernière session du Groupe de travail chargé de l'élaboration d'un projet de protocole à la Convention contre la torture, qui s'est tenue en février dernier. L'expert a notamment indiqué que selon certains pays, il ne servirait à rien de disposer d'un nouvel instrument si celui-ci ne devait pas aboutir à la mise en place d'un mécanisme international de visites in situ dans les lieux de détention. Il ne sera cependant pas aisé de réconcilier les partisans des deux ou trois projets de protocoles qui circulent actuellement, a souligné l'expert avant d'indiquer que certains pays semblent résignés à l'idée de se contenter d'un mécanisme de supervision local. Un membre du Comité ayant souhaité savoir s'il ne serait pas possible d'en revenir au texte «fort» du projet initial quitte à le soumettre à un vote, M. Mavrommatis a rappelé que la Présidente du Groupe de travail a engagé des consultations car elle désire fixer une date butoir pour la rédaction du projet final.

Le Comité entendra demain à 15 heures les réponses de la délégation grecque aux questions qui lui ont été posées ce matin par les experts. Cet après-midi, à 15 heures, le Comité poursuivra l'examen du rapport de la Géorgie en entendant les réponses de la délégation géorgienne aux préoccupations exprimées hier par les experts.


Présentation du rapport de la Grèce

M. DIONISSIOS SPINELLIS, Professeur à l'Université d'Athènes, a rappelé que l'article 2 de la Constitution grecque interdit la torture, comme cela fut le cas dans toutes les constitutions dont le pays s'est doté depuis 1923. Une loi complète depuis 1984 le Code pénal en sanctionnant la torture, pratique passible de peines de privation de liberté. M. Spinellis a en outre rappelé que son pays a ratifié la Convention européenne contre la torture. Depuis 1995, un procureur adjoint de la Cour d'appel, assisté d'un procureur du parquet (magistrate court), a été affecté sur une base permanente dans les cinq principales prisons du pays afin de surveiller la situation qui prévaut dans ces établissements pénitentiaires.

M. Spinellis a indiqué que la Grèce a mis sur pied trois organes indépendants de l'Exécutif qui ont pour mandat de veiller à la situation des droits de l'homme et, le cas échéant, d'intervenir : le Comité national des droits de l'homme, créé en 1998 et habilité à recevoir des plaintes; un organe mis sur pied pour enquêter sur les violations du droit à la vie privée; enfin un Médiateur des citoyens (ombudsman) - lequel a déjà été saisi de plus de 1000 plaintes. En 1999, le Parlement a adopté une loi qui prévoit de désigner ex officio un avocat pour les personnes qui n'ont pas les ressources financières suffisantes pour s'offrir les services d'un avocat.

La Grèce admet le principe de non-refoulement selon lequel une personne ne saurait être déportée ni rapatriée tant que sa demande d'asile n'a pas été traitée. Se déclarant conscient des préoccupations exprimées par certains en ce qui concerne la détention dans les commissariats de police grecs, M. Spinellis a précisé que les commissariats disposent de cellules de détention pour les personnes qui sont arrêtées (flagrant délit...), ainsi que pour les ivrognes qui doivent être dégrisés, les malades mentaux retrouvés et en attente d'être rendus à leur famille, ou les étrangers en attente d'expulsion. Or, ces dernières années, des problèmes n'ont pas manqué d'apparaître avec l'augmentation de l'immigration clandestine, a expliqué M. Spinelli. Sur les 11 millions d'habitants que compte la Grèce, a-t-il ajouté, 800 000 seraient des immigrants dont une partie sont illégaux parmi lesquels on trouve même des criminels. Trop de personnes sont donc désormais détenues pendant trop longtemps dans les commissariats de police grecs, a reconnu M. Spinellis. L'idée d'octroyer des visas temporaires de résidence à ces personnes en attendant qu'il soit statué sur leur sort, a été explorée. En vertu d'un décret adopté en 1999, les étrangers dont l'expulsion a été décidée par la justice ne devraient plus être détenus dans des commissariats de police mais dans des établissements pénitentiaires, a indiqué M. Spinellis.


Le troisième rapport périodique de la Grèce (CAT/C/39/Add.3) souligne que le pays a, entre 1994 et 1997, enrichi sa législation de dispositions qui contribuent à protéger les personnes détenues dans les prisons grecques contre tout traitement inhumain et à améliorer les conditions de détention et qui prévoient la possibilité de commuer les peines d'emprisonnement en amendes ou en travaux d'intérêt général dans la fonction publique, offrant ainsi une solution de remplacement à l'incarcération. L'adoption de diverses lois en 1995 et 1996 rend possible la supervision fréquente des prisons par des membres du ministère public; la supervision des prisons par des groupes de supervision mixtes; ainsi que l'éducation et la formation du personnel pénitentiaire concernant le traitement des détenus et les droits de l'homme.

La loi 2298/1995 (sous sa forme amendée) porte notamment création d'un organe consultatif au sein du Ministère de la justice: le Conseil technique central des prisons. Constitué par le Ministre de la justice qui nomme son président et ses membres suppléants, le Conseil se compose de cinq membres choisis parmi des personnalités éminentes dans leur domaine respectif. Le Conseil a pour fonction de formuler des propositions concernant la politique d'ensemble en matière correctionnelle ainsi que des mesures tendant à améliorer le fonctionnement des établissements pénitentiaires et à permettre aux détenus d'exercer leurs droits; d'élaborer et soumettre au Ministère de la justice des propositions ayant trait à la réglementation des établissements pénitentiaires, suite à l'avis formulé par les autorités pénitentiaires concernées; et de visiter les prisons et soumettre des rapports au Ministère de la justice. Cette même loi 2298/1995 porte en outre création, dans chaque centre de détention, d'un conseil pénitentiaire présidé par le directeur de la prison et comprenant deux autres membres, à savoir le psychologue ou le travailleur social en chef et un spécialiste (avocat, sociologue ou éducateur). Le Conseil pénitentiaire statue sur la formation des prisonniers et les relations avec l'extérieur.

Entre 1994 et 1997, quatre plaintes ont été déposées contre des gardiens de prison pour voie de fait sur des détenus, précise par ailleurs le rapport. Sur ordre du Secrétaire général du Ministère de la justice, chacune de ces plaintes a fait l'objet d'une enquête disciplinaire préliminaire séparée, menée par le chef du parquet du tribunal de première instance compétent. Dans chacun des cas, il a été établi que les accusations étaient dénuées de fondement et les affaires ont donc été classées.



Examen du rapport de la Grèce

M. PETER THOMAS BURNS, rapporteur du Comité chargé de l'examen du rapport de la Grèce, a relevé que la Grèce n'a pas émis de réserve à l'égard de l'article 20 de la Convention et qu'elle a reconnu la compétence du Comité au titre de l'article 22 de cet instrument, ce qui place ce pays dans le petit cercle restreint de ceux qui ont reconnu au Comité de telles compétences. M. Burns a par ailleurs félicité la Grèce pour avoir adopté un projet de loi relatif à l'aide juridique.

M. Burns s'est enquis d'éventuels exemples de sanctions disciplinaires ou autres imposées à des officiers de police. Le Président du Comité a fait état d'informations laissant entendre que des problèmes persistent en Grèce en ce qui concerne la situation des Roms et des étrangers. Il semble en effet que les étrangers continueraient d'être la cible de certains comportements inappropriés de la part des fonctionnaires de police. Une ONG affirme même qu'il existe en Grèce une certaine impunité à l'égard des agents de police qui recourent à une force excessive. Selon un rapport de Helsinki Monitor, les juges seraient même complices de cette impunité.

La Grèce est l'un des pays qui contribue le plus au Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les victimes de la torture, a souligné M. Burns.

M. OLE VEDEL RASMUSSEN, corapporteur du Comité pour le rapport de la Grèce, s'est enquis des procédures et pratiques précises relatives aux interrogatoires en Grèce. Il a souhaité savoir combien, sur les mille plaintes reçues par le Médiateur des citoyens, avaient trait à des actes de torture ou de traitement cruel, inhumain ou dégradant.

M. Rasmussen a fait part de ses préoccupations concernant les problèmes de surpopulation carcérale que connaît la Grèce et s'est enquis des efforts déployés par le pays pour remédier à cette situation. Construire davantage de prisons, comme semble l'envisager la Grèce, ne saurait constituer le meilleur moyen de régler le problème, a-t-il fait valoir. Il a par ailleurs souligné que la violence entre les détenus est incontestablement liée à la surpopulation carcérale.

Le corapporteur a par ailleurs affirmé que les commissariats de police ne sauraient être les lieux adéquats pour la détention d'immigrants illégaux. À cet égard, il semble que le délai maximum fixé par la loi pour la détention d'individu dans les commissariats de police ne soit pas respecté lorsqu'il s'agit d'immigrants illégaux. M. Rasmussen a rappelé que les immigrants clandestins ne sont pas - dans leur grande majorité - des criminels et ne sauraient être traités comme tels. Il a engagé la Grèce à créer des centres d'accueil spéciaux pour ces immigrants clandestins.

M. Rasmussen s'est inquiété du traitement réservé aux immigrants illégaux qui refusent de se soumettre aux décisions d'expulsion prises à leur encontre. Il s'est enquis d'éventuelles instructions qui auraient été données à la police pour faire face à de tels cas.

Un autre membre du Comité a souligné que le manque de statistiques empêche chacun de se faire une idée précise de la véritable situation de la minorité turque en Grèce - seule minorité reconnue dans le pays - ainsi que de la situation d'autres minorités telles que les Roms. Ce même expert a fait état d'allégations selon lesquelles des immigrants illégaux auraient été forcés d'avoir des relations sexuelles avec des policiers.



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