Skip to main content

Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE TERMINE L'EXAMEN DU RAPPORT DE L'ÉGYPTE

14 Novembre 2002



CAT
29ème session
14 novembre 2002
Après-midi




Le Comité contre la torture a poursuivi, cet après-midi, l'examen du rapport de l'Égypte en entendant les réponses de la délégation aux questions qui lui ont été posées hier par les experts, notamment sur l'application de la peine capitale en Égypte; des cas de décès en cours de détention; la durée de la détention provisoire; les conditions de détention; le fonctionnement des tribunaux d'exception; les réparations pour les victimes de mauvais traitements; la protection des personnes vulnérables, notamment les personnes sans logement.
Le Comité présentera mercredi prochain, à 15 heures, ses conclusions et recommandations sur le quatrième rapport périodique de l'Égypte.
Le chef de la délégation égyptienne, Mme Naéla Gabr, Représentante permanente de l'Égypte auprès des Nations Unies à Genève, fournissant des renseignements complémentaires demandés par les membres du Comité, a indiqué que des documents seront mis à leur disposition afin de répondre à certaines de leurs questions. Parmi ces documents, les experts trouveront un plan de rénovation des prisons entre 2000 et 2002, un document concernant les 18 cas de décès survenus dans les centres de détention, un autre portant sur les activités et compétences de la médecine légale et des informations sur les programmes de formation à l'intention des officiers de police. Enfin, un tableau présente des cas de détention arbitraire et de plaintes concernant la police du Caire.
La délégation a affirmé, en réponse à des questions du Comité, que le Gouvernement égyptien n'était pas opposé à une visite dans le pays du Rapporteur spécial sur la question de la torture de la Commission des droits de l'homme. Elle a indiqué que des problèmes de calendrier ont fait que cette visite n'a pas été possible jusqu'à présent, mais a assuré que l'Égypte s'acquittait pleinement de ses obligations conformément à la Convention contre la torture et coopérait avec tous les Rapporteurs spéciaux des Nations Unies. La délégation a par ailleurs indiqué que les causes de décès en détention sont parfois d'origine psychologique et ne sont pas toujours directement liées à la torture. Il a ajouté que des enquêtes ont effectivement mené à des condamnations d'agents de l'État.
Le Comité se réunira demain matin, à 10 heures, afin d'aborder l'examen du troisième rapport périodique de Chypre (CAT/C/54/Add.2).

Réponses de la délégation égyptienne aux questions des experts
Le chef de la délégation égyptienne, MME NAELA GABR, Représentante permanente de l'Égypte auprès des Nations Unies à Genève, répondant aux questions posées hier par les membres du Comité, a notamment tenu à préciser que l'approche de l'État égyptien était une approche globale, fondée sur la responsabilité totale et sans condition du Gouvernement,dans le respect des droits de l'homme, avec le soutien des organisations non gouvernementales et la société civile. Elle a rappelé que le Gouvernement n'avait aucun intérêt à entraver les actions des organisations non gouvernementales et jouait donc la transparence complète dans ce domaine. Les 16 000 organisations non gouvernementales présentes en Égypte agissent avec une totale liberté et sans entraves. La représentante a signalé à cet égard qu'un certain nombre de ces organisations non gouvernementales sont présentes aujourd'hui dans cette réunion. Mme Gabr a ajouté que ces organisations étaient tenues de procéder de manière irréprochable pour obtenir leur financement et que toute infraction à ce principe entraînait des mesures et poursuites.
Répondant aux questions sur les femmes et les actes de torture perpétrés à leur encontre, Mme Gabr a souligné que l'excision était punissable ainsi que le viol, délits fortement sanctionnés par la loi appuyée par les actions de la Commission nationale pour les femmes. Elle a ajouté que dans les prisons de femmes, tout le personnel était composé de femmes.
S'agissant de la situation des enfants égyptiens, la représentante a déclaré que l'Égypte à été l'un des premiers pays à signer la Convention relative aux droits de l'enfant. En matière de travail des enfants, la délégation a précisé que la loi établit un âge minimum pour l'emploi.
La représentante a ajouté que l 'État s'était engagé à protéger les enfants contre la mendicité et l'errance et a pris des mesures de prévention concernant notamment le placement d'enfants dans des institutions spécialisées. La délégation a par ailleurs indiqué qu'en dessous de 15 ans, les enfants ne sont pas susceptibles être incarcérés. Entre 15 et 18 ans, ils peuvent faire l'objet de sanctions provisoires dans des centres spécialisés de réhabilitation. Enfin, la délégation a tenu à souligner la difficulté que représente la mise en œuvre d'une politique en faveur des enfants dans un pays qui compte autant d'enfants.
S'agissant du Rapporteur spécial contre la torture, la délégation a assuré que l'Égypte n'a jamais manqué de coopérer avec le Rapporteur spécial et fait son possible pour fournir le maximum de renseignements demandés. Elle a fixé le cadre général pour une visite du Rapporteur spécial et a souligné qu'elle ne s'est jamais opposée à la visite de Rapporteurs spéciaux de la Commission des droits de l'homme, certains s'étant d'ailleurs déjà rendus dans le pays. La délégation a indiqué que des problèmes de calendrier ont empêché, jusqu'à présent, cette visite d'avoir lieu. Le pays s'efforce de développer et de renforcer ses obligations internationales, et œuvre sans relâche à l'amélioration de son bilan dans le domaine des droits de l'homme.
Sur les «minorités», la délégation a estimé que l'emploi de ce terme était inapproprié en Égypte et que les Coptes ne sont pas considérés comme une minorité mais comme des Égyptiens à part entière et ne sont victimes d'aucune forme de discrimination.
Pour ce qui est des questions relatives aux pratiques sexuelles, la délégation a fait savoir qu'il n'existait pas de texte de loi qui punissait l'homosexualité. Il existe toutefois une loi qui punit les délits touchant à l'exploitation sexuelle des autres et à la prostitution.
M. Fakhry Saleh, Directeur de la division de la médecine légale au Ministère de la justice, a ensuite pris la parole pour évoquer la question des preuves médicales en cas d'allégation de torture ou de décès suite à des actes de tortures, soulignant que l'administration de la médecine légale dépendait du Ministère de la justice depuis 1931, et était un service qui a pour vocation d'assister la justice en toute impartialité. Le service, a t-il ajouté, œuvre afin d'améliorer le niveau des médecins par le biais d'échanges et de séminaires, entre autres, et un enseignement est fourni en matière des droits de l'homme.
Concernant les décès de personnes victimes de traitements violents, le Directeur a signalé, en s'appuyant sur des démonstrations médicales, que la plupart des cas sont liés à un manque de soins nécessaires et à des négligences, et non aux blessures infligées. Pour établir l'origine des blessures, des enquêtes sont menées dans le but de savoir si elles sont réellement dues à une agression, car dans certains cas les personnes s'infligent volontairement des blessures. Il a conclu en affirmant que les causes du décès étaient parfois d'origine psychologique et ne sont pas toujours directement liées à la torture. Il a ajouté que des enquêtes ont effectivement mené à des condamnations d'agents de l'État.
Revenant sur les mesures de prévention qui sont prises et les inspections dans les lieux de détention, la délégation a précisé les trois formes d'inspection avaient cours en Égypte : l'inspection périodique une fois par mois dans les commissariats de police, dans les prisons et lieux de détention, les inspections inopinées, et les inspections en cas de plaintes. Elle a rappelé qu'en cas de manquement dans le processus d'inspections, l'inspection judiciaire par le parquet peut intervenir.
La délégation a signalé que les services de sécurité, plus précisément de renseignement, sont des services administratifs et qu'à ce titre ils ne sont pas soumis à des inspections.
Concernant les plaintes déposées par des personnes se disant victimes de torture ou de mauvais traitement, la délégation a affirmé qu'après le dépôt d'une plainte, un membre du parquet se déplaçait jusqu'au centre de détention et une enquête en bonne et due forme était diligentée. Il a ajouté qu'en cas de décès ou de blessures, un médecin légiste procédait à un examen. L'affaire est ensuite présentée au tribunal après enquête ou classée, le plaignant étant tenu informé du résultat. Il peut en outre faire appel de la décision.
Répondant aux questions sur le fonctionnement de la Commission nationale des droits de l'homme au sein du Ministère de l'intérieur, créée en 1999 sur recommandation du Comité, la délégation a indiqué que les compétences de cette commission consistent à relever d'éventuelles atteintes aux droits de l'homme et à mettre en application le principe des droits de l'homme. Elle reçoit en outre des recommandations qu'elle est chargée d'étudier.
Sur les questions relatives au terrorisme, la délégation a rappelé que le Parti de Libération islamique (Hisb ut-Tahrir) en Égypte était une organisation secrète terroriste fondamentaliste crée à la fin des années 40. Elle a précisé que cette organisation est installée au Royaume-Uni où elle prépare des attentats. Dans ce contexte, quatre citoyens britanniques ont été arrêtés en avril dernier dont l'un a été libéré et est reparti au Royaume-Uni, les trois autres ont été inculpés et reconnus coupables. Elle a ajouté que 127 personnes ont été arrêtées dans le cadre de cette affaire. Concernant la situation de ces trois britanniques, la délégation a rappelé qu'ils ont reçu de nombreuses visites des autorités britanniques, des avocats, et de membres de leur famille et qu'il n'y avait eu aucune violation des droits de ces détenus et n'ont fait l'objet d'aucun mauvais traitement.
Répondant aux questions relatives à la destruction de logements, la délégation a signalé que dans la région de Port-Saïd, des immeubles construits en 1956 étaient dans un état de délabrement important certains avaient du être évacués et démolis. Dans un quartier du Caire, certaines habitations avaient été construites illégalement, et le gouvernement a voulu mettre en place un projet de développement urbain afin d'éliminer les bidonvilles.
S' agissant de la détention provisoire et préventive dans le cadre des dispositions relatives à l'état d'urgence, la délégation a signalé que ces mesures s'avéraient nécessaires pour protéger le pays contre les menaces de terrorisme. Elle a ajouté que le nombre de détenus administratifs était difficile à chiffrer avec précision.
Sur la question du régime cellulaire, la délégation a rappelé que les prisons contenaient beaucoup d'individus dangereux et que le lieu d'emprisonnement devait être soumis à une certaine discipline justifiant des sanctions disciplinaires telles que l'isolement cellulaire en vertu de la Loi des prisons de 1956.
La délégation affirmé que les sanctions à l'égard des fonctionnaires de police sont régies par la loi. Ces sanctions peuvent comprendre le déclassement pour une période de 2 mois, la suppression de prime ou d'une partie de celle-ci, la mise à pied ou le licenciement. La délégation a conclu sur ce chapitre en rappelant l'existence de divers conseils disciplinaires, dont le conseil disciplinaire suprême vers lequel sont déférés les fonctionnaires du grade de général ou de brigadier. La délégation a ajouté que l'application de sanctions administratives ou des sanctions disciplinaires ne retire pas la responsabilité pénale de l'accusé.
À propos du maintien de l'état d'exception et de sa possible incompatibilité avec l'application de la Convention, la délégation a précisé que le maintien de l'état d'urgence est en conformité avec la loi. Cette loi ne suspend pas la législation concernant le déroulement normal de la justice et la lutte contre la torture, a précisé la délégation.
Répondant aux questions sur l'application de la peine capitale en Égypte et les statistiques s'y rapportant, la délégation a souligné qu'un certain nombre de procédures et garanties existaient et que les jugements étaient prononcés par des tribunaux après un avis consultatif du Mufti. Le jugement final rendu doit être unanime et, si la sentence est prononcée, le jugement doit être transféré à la Cour de cassation même sans demande de l'accusé. La décision est ainsi soumise au Président de la République qui dispose du droit d'amnistie. L'exécution s'effectue par pendaison. La peine de mort n'est pas appliquée aux personnes de moins de 18 ans.
La délégation a indiqué qu'une plainte contre un fonctionnaire, si l'accusation concerne un crime grave, est examinée par le parquet, chargé de s'assurer du bien-fondé de la plainte, et ce, afin de protéger le fonctionnaire qui peut être accusé à tort, mais sans pour autant constituer un système d'immunité en sa faveur.
S'agissant de la question des réparations aux victimes de mauvais traitements ou de torture, la délégation a indiqué que la victime peut recourir au civil devant les tribunaux pénaux pour demander réparation.



* *** *

VOIR CETTE PAGE EN :