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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE ENTAME L'EXAMEN DU DEUXIÈME RAPPORT PÉRIODIQUE DE L'OUZBÉKISTAN

01 Mai 2002



CAT
28ème session
1 mai 2002
Matin




Plusieurs experts s'inquiètent d'informations faisant état
de nombreux cas de torture et de mauvais traitements
en Ouzbékistan



Le Comité contre la torture a entamé, ce matin, l'examen du deuxième rapport périodique de l'Ouzbékistan sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Plusieurs experts se sont inquiétés d'informations faisant état de nombreux cas de torture et de mauvais traitements dans ce pays, l'un d'eux affirmant même que ces pratiques «sont devenues plus ou moins systématiques» en Ouzbékistan.
Présentant le rapport de son pays, M. Akmal Saidov, Directeur du Centre national des droits de l'homme de la République d'Ouzbékistan, a indiqué que la torture entraîne, en vertu du code pénal, une sanction très sévère. Il est en outre interdit d'extorquer des aveux par la torture, a-t-il précisé. Il a également indiqué qu'un projet de loi a été élaboré qui vise à mettre en place un mécanisme permettant l'examen de plaintes pour torture. Il y a eu et il continue d'y avoir des cas de torture et de recours à la violence en Ouzbékistan, a reconnu M. Saidov, mais tout est fait pour qu'aucun acte de torture ne reste impuni, a-t-il assuré. Il a par ailleurs attiré l'attention du Comité sur une nouvelle loi réduisant la liste des crimes auxquels est applicable la peine capitale.
La délégation ouzbèke est également composée du Directeur adjoint du Centre national des droits de l'homme de l'Ouzbékistan, M. Shavkat Galiakbarov.
Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport ouzkek, M. Alexander M.Yakovlev, s'est enquis du délai légal de détention provisoire actuellement en vigueur dans le pays. L'expert a également souhaité savoir si les personnes arrêtées étaient soumises à un examen médical donnant lieu à un certificat médical. Il s'est également enquis de la législation en vigueur en ce qui concerne l'extradition d'une personne qui risquerait d'être soumise à la torture dans le pays vers lequel elle serait expulsée.
La co-rapporteuse du Comité pour l'examen de ce rapport, Mme Felice Gaer, a notamment indiqué que des organisations non gouvernementales russes fournissent des exemples très précis de prisonniers adeptes de l'islam qui se sont vu interdire de prier et qui, lorsqu'ils sont passés outre cette interdiction, ont été brutalisés. Elle a également fait état d'informations faisant apparaître de nombreux cas de décès pendant la garde à vue. Il semble en outre que peu d'enquêtes soient menées suite à des allégations de torture.
Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entendra les réponses de la délégation suédoise aux questions qui lui ont été posées hier matin par les experts.

Présentation du rapport de l'Ouzbékistan
Présentant le rapport de son pays, M. AKMAL SAIDOV, Directeur du Centre national des droits de l'homme de la République d'Ouzbékistan, a rappelé qu'en 1999, après que l'Ouzbékistan eut présenté son rapport initial devant le Comité, une campagne d'information a été organisée autour des questions soulevées lors de l'examen dudit rapport. Les observations finales du Comité ont alors été largement débattues au sein de nombreuses institutions, a-t-il précisé. Il a fait valoir que les organisations non gouvernementales ont largement collaboré à l'élaboration du deuxième rapport périodique de l'Ouzbékistan.
M. Saidov a souligné que depuis l'examen du rapport initial de l'Ouzbékistan, les autorités se sont efforcées de tenir compte des observations et recommandations qui avaient été adoptées par le Comité en 1999. Il a indiqué qu'en Ouzbékistan, la torture est qualifiée dans le Code pénal comme étant un acte entraînant une sanction très sévère. Il est en outre interdit d'extorquer des aveux par la torture, a poursuivi M. Saidov. Il a ajouté qu'un projet de loi a été élaboré qui vise à mettre en place un mécanisme permettant l'examen des plaintes pour torture émanant des citoyens.
Le chef de la délégation ouzbèke a par ailleurs indiqué que les critères de classification des infractions ont été modifiés dans le Code pénal. Ainsi, aujourd'hui, pour calomnie ou pour infraction aux règles commerciales, par exemple, les peines encourues ne sont pas privatives de liberté. Il a également attiré l'attention du Comité sur une nouvelle loi en vertu de laquelle le nombre de cas auxquels peut être appliquée la peine capitale ont été réduits. Seuls quatre délits (agression, génocide, terrorisme, assassinat prémédité avec circonstances aggravantes), au lieu de 36 auparavant, exposent désormais leurs auteurs à la peine de mort. En vertu de cette nouvelle loi, la peine capitale, qui ne pouvait déjà pas être appliquée aux femmes et aux mineurs, ne peut désormais pas l'être non plus aux personnes de plus de 60 ans.
Le Directeur du Centre national des droits de l'homme a reconnu qu'il existe un énorme fossé entre les dispositions légales de prévention de la torture et la réalité. En effet, il y a eu et il continue d'y avoir des cas de torture et de recours à la violence en Ouzbékistan. Mais tout est fait dans le pays pour qu'aucun acte de torture ne reste impuni, a assuré M. Saidov.
Le deuxième rapport périodique de l'Ouzbékistan (CAT/C/53/Add.1, à paraître en français) indique que l'utilisation de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants est interdite en vertu de la Constitution et de la législation du pays. À titre d'exemple, le paragraphe 2 de l'article 26 de la Constitution stipule que personne ne doit être soumis à la torture, à la violence ou à tout autre traitement cruel ou dégradant. En outre, des règles spéciales interdisent les méthodes illégales d'enquête ainsi que le recours à diverses formes de violence.

Examen du rapport de l'Ouzbékistan
Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'Ouzbékistan, M. Alexander M.Yakovlev, a souhaité obtenir des informations plus détaillées sur les activités des tribunaux ouzbeks. Il s'est enquis du délai légal de détention provisoire actuellement en vigueur. Ce délai est-il toujours de 72 heures comme cela était le cas auparavant? L'expert a également souhaité savoir si les personnes arrêtées étaient soumises à un examen médical donnant lieu à un certificat médical et a souligné l'importance que revêt cette question pour ce qui est de la prévention effective de la torture. Les personnes arrêtées se voient-elles signifier leurs droits, a également voulu savoir M. Yakovlev ? L'expert s'est enquis de la législation en vigueur en Ouzbékistan en ce qui concerne l'extradition d'une personne qui risquerait d'être soumise à la torture dans le pays vers lequel elle serait expulsée.
Mme Felice Gaer, co-rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport ouzbek, a souligné qu'en dépit des nombreux efforts déployés en Ouzbékistan pour sensibiliser la population aux droits de l'homme, (comme l'atteste le fait qu'une grande partie du rapport est consacrée aux questions d'éducation aux droits de l'homme), il s'avère assez difficile de voir en quoi ces efforts ont un lien avec la Convention contre la torture. Mme Gaer a notamment souhaité savoir comment le Gouvernement ouzbek s'y prend pour surveiller les méthodes et pratiques d'interrogatoire. Existe-t-il un registre des prisonniers, a demandé Mme Gaer, qui a également demandé si les membres de la famille sont prévenus.
Mme Gaer a fait état d'informations émanant d'organisations non gouvernementales russes qui fournissent des exemples très précis de prisonniers adeptes de l'islam qui se sont vu interdire de prier et qui, lorsqu'ils sont passés outre à cette interdiction, ont été brutalisés.
Il semble que des enquêtes sur les cas allégués de torture sont rarement ouvertes, même en présence de preuves, a fait observer la co-rapporteuse avant d'ajouter que les juges ne semblent pas très désireux de faire avancer ces affaires. Doit-on y déceler un manque de volonté politique de mettre fin à ces pratiques, a demandé Mme Gaer? L'experte a en outre demandé des précisions sur la pratique en matière de recevabilité des aveux obtenus en l'absence d'un avocat. Mme Gaer a également souhaité obtenir davantage d'informations concernant les plaintes déposées contre les agissements d'agents responsables de l'application des lois. Elle s'est également inquiétée d'informations selon lesquelles les membres de la famille d'un plaignant peuvent être victimes de menaces de violence ou de sévices, voire de mesures de représailles.
Mme Gaer a fait état d'informations faisant apparaître de nombreux cas de décès pendant la garde à vue. Un rapport fait état d'une vingtaine de décès de ce type, a-t-elle précisé. Elle a également indiqué avoir reçu de nombreuses informations sur des sévices sexuels commis à l'encontre de prisonniers et de nombreuses plaintes déposées à cet égard.
Un autre membre du Comité a fait état de rapports alarmants selon lesquels des actes de torture sont pratiqués en Ouzbékistan non seulement pendant la première période de détention mais aussi pendant l'emprisonnement, c'est-à-dire dans les pénitenciers à proprement parler. Il est donc essentiel de mettre sur pied un système d'inspection régulière des lieux de détention, a souligné cet expert. Ce même expert a fait observer qu'en matière de surpopulation dans les centres de détention, c'est dans les centres de garde à vue que la situation est la plus préoccupante, les prévenus étant obligés de dormir à tour de rôle faute de place.
Un autre expert a affirmé qu'il semble que la torture et les mauvais traitements soient «devenus plus ou moins systématiques» en Ouzbékistan.
Un membre du Comité a demandé des renseignements sur la compétence des tribunaux militaires, ainsi que sur la définition du délit de terrorisme en vigueur dans le pays.
Il a également été fait état de nombreux déplacements forcés dans le pays, qui équivaudraient à un traitement inhumain. Selon certaines informations, ces déplacements forcés concerneraient surtout des membres d'une minorité.


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