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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT DE LA POLOGNE

10 Mai 2007

Comité contre la torture

10 mai 2007

Le Comité contre la torture a entamé, ce matin, l'examen du quatrième rapport périodique de la Pologne sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Présentant le rapport de son pays, M. Andrzej Duda, Sous-Secrétaire d'État au Ministère de la justice de la Pologne, a indiqué que l'un des principaux changements enregistrés en ce qui concerne les questions en rapport avec la Convention contre la torture est l'amendement apporté en septembre 2006 à la Constitution, selon lequel l'extradition est interdite non seulement quand il s'agit d'une personne suspectée d'avoir commis un délit sans violence pour des raisons politiques, mais également quand l'extradition risquerait d'enfreindre les droits et libertés de l'individu, a ajouté M. Duda. Il a par ailleurs fait part des travaux en cours en vue d'amender le Code pénal polonais, l'un des changements majeurs en la matière devant être l'application dans l'ordre juridique interne du Statut de la Cour pénale internationale. Il a d'autre part souligné que le respect des droits des détenus en détention provisoire et soumis à des peines privatives de liberté est facilité par l'ouverture qui caractérise le système pénitentiaire polonais, par la formation des agents des services pénitentiaires aux normes nationales et internationales de droits de l'homme, ainsi que par un système de plaintes accessible à tous. Conformément aux recommandations adressées à la Pologne par le Comité en 2000, le Gouvernement polonais a pris des mesures visant à combattre les abus à l'encontre des jeunes recrues au sein de l'armée, ce qui a permis de réduire l'ampleur du problème.

La délégation polonaise était également composée du Représentant permanent de la Pologne auprès des Nations Unies à Genève, M. Zdzislaw Rapacki, ainsi que de représentants du Ministère de la justice, du Bureau central des services pénitentiaires, de la Police nationale et du Bureau pour les rapatriements et les étrangers.

M. Claudio Grossman, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport polonais, a souligné qu'en Pologne, si les traités internationaux ratifiés par le pays sont incorporés dans le droit interne; l'existence d'une disposition spécifique nationale est nécessaire. M. Grossman a par ailleurs relevé que l'assistance juridique ne semble pas être obligatoire lorsque la peine encourue pour le délit en cause est inférieure à trois ans. Il a en outre rappelé que de l'avis du Comité, les assurances diplomatiques ne doivent pas être utilisées comme justification pour violer les obligations des États parties en matière de non-refoulement. Le corapporteur, M. Luis Gallegos Chiriboga, s'est pour sa part enquis des mesures envisagées afin de prévenir les cas de détention secrète sur le territoire polonais. Un autre expert a relevé à cet égard que les détails de l'enquête parlementaire concernant la présumée existence de lieux de détention secrets en Pologne en rapport avec la détention secrète dans le cadre de lutte antiterroriste ne sont pas bien connus.

Le Comité entendra demain après-midi, à 15 heures, les réponses de la délégation polonaise aux questions qui lui ont été posées ce matin.

En fin de séance, M. Guibril Camara, membre du Comité, a présenté des informations mises à jour sur la question des réserves et les travaux du Groupe de travail sur les réserves. Une discussion s'est engagée sur ces questions.


Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entendra les réponses de la délégation japonaise aux questions qui lui ont été posées hier matin.


Présentation du rapport

M. ANDRZEJ DUDA, Sous-Secrétaire d'État au Ministère de la justice de la Pologne, a rappelé que le présent rapport couvre la période allant d'août 1998 à septembre 2004. Les recommandations du Comité figurant dans ses observations finales en date du mois de mai 2000 ainsi que les directives du Comité concernant l'élaboration des rapports périodiques ont constitué le point de départ de l'élaboration de ce quatrième rapport périodique, a-t-il précisé.

La Pologne a ratifié en septembre 2005 le Protocole additionnel se rapportant à la Convention, ce qui témoigne de l'importance que le Gouvernement attache au renforcement de la protection des personnes privées de liberté contre toute pratique de torture, a poursuivi M. Duda. La Pologne accorde en outre des contributions régulières au Fonds de contributions volontaires pour les victimes de la torture, a-t-il rappelé. En ratifiant le Protocole, la Pologne s'est engagée à mettre en place un mécanisme national de prévention; cette tâche a été confiée à une autorité indépendante, à savoir l'Ombudsman (ou Médiateur), a indiqué M. Duda. L'équipe de l'Ombudsman suit actuellement une formation afin de la préparer à s'acquitter de sa tâche de mécanisme de prévention national, a-t-il précisé.

L'un des principaux changements enregistrés en ce qui concerne les questions en rapport avec la Convention contre la torture est l'amendement apporté en septembre 2006 à la Constitution, selon lequel l'extradition est interdite non seulement quand il s'agit d'une personne suspectée d'avoir commis un délit pour raisons politiques sans avoir recours à la violence, mais également quand l'extradition risquerait d'enfreindre les droits et libertés de l'individu.

Depuis l'institution du permis de séjour de tolérance, le 1er septembre 2003, a poursuivi M. Duda, la protection internationale a été accordée sous forme de permis de tolérance à quelque 4400 étrangers, en premier lieu parce que des menaces de violations de leurs droits pesaient sur eux dans leurs pays d'origine. Jusqu'au moment de la décision finale concernant l'octroi du statut de réfugié, les étrangers sont autorisés à rester sur le territoire polonais et cette règle ne souffre aucune exception, a précisé M. Duda.

Le chef de la délégation a par ailleurs fait part des travaux en cours en vue d'amender le Code pénal polonais, l'un des changements majeurs en la matière devant être l'application dans l'ordre juridique interne du Statut de la Cour pénale internationale.

Le Sous-Secrétaire d'État polonais au Ministère de la justice a d'autre part souligné que le respect des droits des détenus soumis à la détention provisoire et à des peines privatives de liberté est facilité par l'ouverture qui caractérise le système pénitentiaire polonais; par la formation des agents des services pénitentiaires aux normes nationales et aux normes internationales de droits de l'homme; ainsi que par un système de plaintes accessible à tous et un système élargi de contrôle et d'audit. Le surpeuplement des établissements correctionnels et des centres de détention constitue un sérieux problème, a poursuivi M. Duda. En raison de la croissance dynamique du nombre de détenus enregistrée à compter de 1999, les unités pénitentiaires ont commencé à rechercher les moyens de procéder à une augmentation immédiate de leurs capacités d'accueil et cette capacité a ainsi pu être accrue de quelque 5591 places entre 1999 et 2005.

M. Duda a également fait part de la mise en place d'un mécanisme d'ombdusman pour les patients des hôpitaux psychiatriques, opérationnel depuis 2006.

Conformément aux recommandations adressées à la Pologne par le Comité en l'an 2000, le Gouvernement polonais a pris des mesures visant à combattre les abus à l'encontre des jeunes recrues au sein de l'armée (un phénomène que l'on appelle la «vague»), de sorte que l'ampleur de ce problème a pu être notablement circoncise. Selon les statistiques, à compter de 2003, le taux de crimes au sein de l'armée a progressivement décliné, a insisté M. Duda.

Le quatrième rapport périodique de la Pologne (CAT/C/67/Add.5) rappelle qu'en avril 2004, le pays a signé le Protocole facultatif se rapportant à la Convention. Étant donné que le mécanisme national de prévention prévu au Protocole doit répondre au critère d'indépendance, ce qui ne serait pas le cas d'un organe relevant de l'administration publique, il est envisagé de confier cette fonction à une institution déjà en place, c'est-à-dire au Médiateur. La mise en place de ce mécanisme national de prévention sera annoncée dans l'année qui suivra l'entrée en vigueur du Protocole à l'égard de la Pologne. La Convention contre la torture est directement applicable et a une autorité supérieure à celle des lois nationales, poursuit le rapport. Ainsi, la définition de la torture énoncée dans la Convention fait-elle partie intégrante du droit polonais ayant universellement force obligatoire. L'article 40 de la Constitution dispose en outre que nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. De plus, la Constitution interdit les châtiments corporels. Nul ne peut être soumis à des expériences scientifiques, y compris des expériences médicales, sans son libre consentement, indique aussi le rapport. La Constitution garantit par ailleurs à toute personne privée de liberté qu'elle sera traitée humainement. En vertu de l'article 233 de la Constitution, ces droits et libertés ne peuvent en aucune circonstance faire l'objet de limitations. Par ailleurs, la Constitution garantit à toute personne victime d'une violation de ses droits fondamentaux le droit à l'indemnisation de tout préjudice subi de ce fait et rend imprescriptibles les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité.

D'autres dispositions visant à prévenir l'usage de la torture ou de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants figurent dans des textes législatifs réglementant les principes de fonctionnement des entités suivantes: police, corps des gardes frontière, Office de protection de l'État, Agence de sécurité intérieure, Agence de renseignements, Administration pénitentiaire et Garde communale. La loi de 1990 sur la police stipule qu'un fonctionnaire de police est tenu de refuser d'exécuter un ordre d'un supérieur ou d'un procureur, d'un organe de l'administration publique ou de l'administration locale au cas où l'exécution de cet ordre serait lié à la commission d'une infraction; le fonctionnaire en question doit rendre compte de son refus d'exécuter un ordre au commandant en chef de la police sans passer par ses supérieurs immédiats.


Examen du rapport

M. CLAUDIO GROSSMAN, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport polonais, a rappelé l'importance que revêt la formation des personnels concernés dans le contexte de la prévention de la torture et a insisté à cet égard sur la nécessité de veiller à ce que cette formation soit concrète. Aussi, a-t-il souhaité en savoir davantage sur la formation dispensée en Pologne aux fins de la prévention de la torture.

En ce qui concerne la définition de la torture, M. Grossman a rappelé la philosophie du Comité selon laquelle il est préférable dans ce domaine de ne disposer que d'une seule définition et donc de disposer d'un régime juridique unifié concernant la torture dans le monde. En Pologne, les traités internationaux ratifiés par le pays sont incorporés dans le droit interne, a relevé M. Grossman; il n'en demeure pas moins qu'en droit pénal, la «typification» (c'est-à-dire l'existence d'une disposition spécifique) est nécessaire, a-t-il fait observer.

M. Grossman a souhaité en savoir davantage sur le droit d'accès à un avocat aux différents stades de la procédure et sur le droit du détenu de s'entretenir en privé avec un avocat. Il semble que l'assistance juridique ne soit pas obligatoire lorsque la peine encourue pour le délit en cause est inférieure à trois ans, s'est inquiété M. Grossman.

Le rapporteur M. Grossman a en outre fait état d'informations laissant entendre que le système de l'assistance juridique de la défense ne serait pas conforme aux normes en la matière, plus particulièrement pour ce qui est du conseil (avocat) commis d'office.

M. Grossman a rappelé que de l'avis du Comité, les assurances diplomatiques ne doivent pas être utilisées comme justification pour violer les obligations des États parties en matière de non-refoulement. Aussi, l'expert a-t-il souhaité connaître les commentaires de la délégation à ce sujet.

Le rapporteur pour le rapport de la Pologne s'est par ailleurs enquis du niveau d'accès aux différents services sociaux pour les étrangers, notamment pour ceux qui bénéficient, par exemple, d'un permis de séjour de tolérance. Qu'est-il prévu, par exemple, en cas d'urgence de santé concernant des étrangers?

M. LUIS GALLEGOS CHIRIBOGA, corapporteur du Comité pour l'examen du rapport polonais, a insisté sur la nécessité de mettre au point des méthodes d'évaluation des programmes de formation afin d'évaluer leur impact réel. Il a par ailleurs souhaité en savoir davantage sur ce que l'on entend en Pologne par crimes et délits fiscaux.

M. Gallegos Chiriboga a également voulu en savoir davantage sur les critères appliqués pour la limitation des droits aux fins d'assurer le bon déroulement de la justice et des procédures pénales.

Le corapporteur pour le rapport polonais s'est par ailleurs enquis des différents types de cellules existant en Pologne.

Quelles mesures le Parlement polonais envisage-t-il pour prévenir les cas de détention secrète sur son territoire, a par ailleurs demandé M. Gallegos Chiriboga?

L'expert a d'autre part relevé que quatre cas seulement d'indemnisation pour acte de torture ont été enregistrés en Pologne et a demandé les commentaires de la délégation à cet égard.

En ce qui concerne la question du trafic de personnes, et tout en relevant une évolution positive dans ce domaine, M. Gallegos Chiriboga s'est fait l'écho de recommandations visant à ce que la Pologne intègre la définition du crime de trafic dans son Code pénal.


Un autre membre du Comité a pour sa part demandé des précisions, notamment statistiques, quant à la mise en œuvre de la loi sur les violences conjugales.

Qu'en est-il de la définition du délit de terrorisme en Pologne, a aussi voulu savoir cet expert? La loi distingue-t-elle le terrorisme international d'une autre forme de terrorisme et quelles sont les sanctions prévues par la loi pour les délits en rapport avec le terrorisme? L'expert a relevé que les détails de l'enquête concernant la présumée existence de lieux de détention secrets en Pologne en rapport avec la détention secrète dans le cadre de lutte antiterroriste ne sont pas bien connus. Y aura-t-il publication du rapport écrit de l'enquête parlementaire?

Un autre expert s'est inquiété de constater que les comportements délictueux des forces de l'ordre sont souvent sanctionnés par des peines avec sursis, ce qui ne saurait constituer le bon message à envoyer au personnel concerné pour le convaincre qu'il doit s'abstenir de ce type de comportement.

Un membre du Comité s'est enquis des statistiques dont dispose la Pologne concernant des violences à caractère homophobe dans le pays.

Plusieurs membres du Comité ont abordé la question de la justice juvénile. Un expert a jugé peu claires les différentes limites d'âge fixées en la matière, s'agissant notamment de l'âge de la responsabilité pénale. Qu'en est-il exactement des centres de détention pour les jeunes, a-t-il été demandé?



Discussion sur la question des réserves

En fin de séance, M. GUIBRIL CAMARA, membre du Comité, a présenté des informations mises à jour sur la question des réserves et les travaux du Groupe de travail sur les réserves auprès duquel il représentait le Comité.

La Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités est un effort de codification de diverses règles coutumières, afin de réglementer quelque peu la manière dont les États parties aux traités peuvent régler leurs litiges en matière d'application et d'interprétation desdits traités, a rappelé M. Camara. Le Comité contre la torture, pour sa part, a décidé que la Convention de Vienne pouvait régir la Convention contre la torture, a-t-il également rappelé.

M. Camara a indiqué que le Groupe de travail sur les réserves a préconisé une réunion avec la Commission du droit international pour débattre de la question des réserves. Il a rappelé qu'un séminaire se tiendrait les 15 et 16 mai prochain sur la question des réserves (ndlr: la Commission du droit international tiendra les 15 et 16 mai prochain à Genève une discussion sur les réserves aux traités des droits de l'homme, à laquelle chaque organe de traité a été invité à participer).

Un membre du Comité a souhaité que le Comité étudie les recommandations du Groupe de travail sur les réserves afin de voir si elles doivent être reprises dans le rapport du Comité.

Un autre membre du Comité a souligné que la question des réserves est une question très complexe. Il a fait observer que certains pays, avant d'adhérer à un traité, émettent des réserves – et dans ce cas, les choses sont claires; mais dans d'autres cas, des pays qui n'ont jamais émis de réserves se présentent devant un organe de droits de l'homme en affirmant que leur propre législation ou leurs propres tribunaux considèrent comme non pertinentes certaines dispositions de tel ou tel instrument international.

Le Comité contre la torture est le seul organe mandaté pour surveiller l'application et l'interprétation de la Convention contre la torture, a rappelé M. Camara. Il a indiqué être totalement disposé – quel que soit son point de vue personnel – à transmettre au Groupe de travail sur les réserves le point de vue du Comité s'agissant de la question des réserves et plus particulièrement des diverses recommandations émises par ce Groupe.

La question fondamentale consiste à savoir si le Comité peut se prononcer sur la validité d'une réserve, a souligné un expert. Le Comité peut certes émettre une opinion à ce sujet; mais toute la question est de savoir si cette opinion peut avoir un caractère contraignant pour l'État partie concerné.

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Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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