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Communiqués de presse Commission des droits de l'homme

LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTEND LE MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DES PAYS-BAS ET LE VICE-MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DE L'ITALIE

05 Avril 2001



Commission des droits de l'homme
57ème session
5 avril 2001
Après-midi





Plusieurs délégations demandent que les méthodes de travail des Rapporteurs spéciaux chargés des questions des droits civils et politiques soient plus rigoureuses



La Commission des droits de l'homme a entendu, cet après-midi, le Ministre des affaires étrangères des Pays-Bas et le Vice-Ministre des affaires étrangères de l'Italie avant de reprendre son débat sur les droits civils et politiques.

Le Ministre des affaires étrangères des Pays-Bas, M. Jozias Van Aartsen, a regretté que, malgré les efforts entrepris par la communauté internationale depuis de nombreuses années, la discrimination et l'intolérance demeurent largement répandues. La primauté du droit doit prévaloir au niveau national comme international, a par ailleurs souligné le ministre, qui a estimé que l'établissement de la Cour pénale internationale sera un pas fondamental dans la lutte contre l'impunité. Il a exhorté les États à ratifier le Statut de Rome au plus vite. Soulignant que la liberté d'expression offre aux sociétés démocratiques le nécessaire contre-pouvoir, M. Van Aartsen a estimé qu'il fallait encourager les médias libres et le libre échange des idées.

Le Vice-Ministre des affaires étrangères de l'Italie, M. Ugo Intini, a affirmé qu'en accusant la présidence du G8, son gouvernement a décidé de placer parmi les priorités du Sommet de juin 2001 les problèmes causés par la pauvreté, le droit à l'éducation, à l'alimentation et au logement ainsi que les questions liées à la migration et aux répercussions socio-économiques de l'immigration. Il a ensuite réaffirmé l'engagement de son pays s'agissant de la promotion et du respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son appui pour les efforts visant à abolir la peine de mort. L'engagement de l'Italie en faveur de la promotion des droits de l'homme se traduit notamment par une augmentation très nette du soutien financier qu'elle accorde aux activités du Haut_Commissariat.


La Commission a poursuivi son débat des droits civils et politiques, en particulier les questions liées à la torture et à la détention, les disparitions et les exécutions sommaires, la liberté d'expression, l'indépendance du pouvoir judiciaire et la liberté religieuse. Plusieurs délégations ont demandé que les méthodes de travail des Rapporteurs spéciaux soient plus rigoureuses. Elles ont notamment regretté que les Rapporteurs spéciaux reprennent dans leurs rapports des informations provenant de sources non vérifiées. Cela contribue à alimenter les campagnes de désinformation lancées par certains secteurs. Des délégations ont regretté que les critères utilisés par les Rapporteurs spéciaux soient parfois différents selon les pays examinés. Ils ont estimé que les rapports ne devraient pas seulement mettre l'accent sur les violations commises dans les pays du Sud.

La plupart des délégations ont évoqué les mesures prises par leurs gouvernements respectifs afin de lutter contre la torture, les disparitions, les exécutions sommaires et de promouvoir la liberté d'expression. En ce qui concerne la question de la torture, certains orateurs ont souligné le rôle fondamental de la prévention, appelant de leurs voeux la poursuite des travaux menés dans ce domaine par le Groupe de travail chargé de préparer un projet de protocole facultatif à la Convention contre la torture.

Les délégations des pays suivants sont intervenues: Pakistan, Viet Nam, Costa Rica, Inde, Fédération de Russie, Algérie, Cuba, Chine, Côte d'Ivoire et Sri Lanka. Les représentants des pays suivants ont exercé leur droit de réponse : Égypte, Burundi, République islamique d'Iran et Albanie.

La plupart des organisations non gouvernementales qui sont intervenues ont regretté que de nombreuses violations des droits civils et politiques se poursuivent dans de nombreux pays, malgré les engagements pris par les États devant la Commission et les mécanismes internationaux des droits de l'homme. Tandis que les États prétendent défendre et promouvoir les droits de l'homme, de nombreuses personnes continuent à perdre la vie où à être torturées. Les intervenants ont également évoqué les cas de disparitions forcées et ont déploré le manque d'intérêt de la communauté internationale pour cette question.

Les représentants des organisations non gouvernementales suivantes ont pris la parole: Union internationale de la jeunesse socialiste; Freedom House; Union nationale des juristes de Cuba; Fédération démocratique internationale des femmes; et Fédération latino-américaine des associations des familles des détenus disparus.

Au cours de sa prochaine réunion plénière, à 18 heures ce soir, la Commission poursuivra l'examen des droits civils et politiques. Elle devrait notamment entendre la présentation orale du rapport établi par le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, M. Paulo Sergio Pinheiro.



Déclarations de dignitaires

M. UGO INTINI, Vice-ministre aux affaires étrangères de l'Italie, a affirmé que quand l'Italie a pris la Présidence du G8, son gouvernement a décidé de placer parmi les priorités du Sommet de juin 2001, qui se tiendra à Gênes, les problèmes causés par la pauvreté, le droit à l'éducation, à l'alimentation et au logement ainsi que les questions liées à l'immigration et aux répercussions socioéconomiques de l'immigration. La Commission a réagi rapidement à l'urgente nécessité de trouver un accord entre les pays riches et ceux en voie de développement garantissant des stratégies pour assurer que la jouissance des droits fondamentaux ne soit pas une simple illusion. Dans cette optique M. Intini a tenu à se féliciter, à l'instar de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme et du Président du Groupe de travail sur les droit au développement, des efforts déployés dans l'approfondissement de la question du droit au développement. Il a ensuite réaffirmé les engagements de son pays qui témoignent d'une augmentation très nette du soutien financier aux activités du Haut-Commissariat aux droits de l'homme. En ce qui concerne la lutte contre le racisme, un signe de l'engagement des gouvernements du Conseil de l'Europe a été l'adoption du Protocole 12 à la Convention européenne des droits de l'homme contre la discrimination qui, une fois ratifié, permettra aux victimes de discrimination de recourir légalement à la Cour européenne des droits de l'homme ou aux tribunaux nationaux.

M. Intini a affirmé que l'immigration illégale est devenue un problème dramatique quotidien car il entraîne la violence, l'exploitation des femmes et la prostitution des enfants, le trafic de drogue. Il a ensuite déclaré que la discrimination raciale est un vieux démon européen, et qu'elle est présente encore aujourd'hui partout dans le monde. La Conférence mondiale de Durban devrait se terminer par un panorama clair de ce qui a été fait pour combattre le racisme au niveau national, régional et international, et assurer un Plan d'action concret et efficace. Si l'on souhaite que cet effort soit couronné de succès, il faudrait davantage de ressources financières. À cet égard, il a annoncé une aide financière supplémentaire du Gouvernement italien pour l'ensemble de ce processus. La communauté internationale doit par ailleurs fournir les instruments appropriés et efficaces pour lutter contre la torture. C'est pourquoi il a lancé un appel aux gouvernements de la Commission pour qu'ils ratifient le Statut de Rome relatif à la création de la Cour pénale internationale. Il a enfin soutenu la lutte de l'Union européenne pour l'abolition de la peine de mort et s'est félicité du nombre de plus en plus important de pays qui ont déclaré des formes de moratoires de facto sur les exécutions capitales.

M. JOZIAS VAN AARTSEN, Ministre des affaires étrangères des Pays-Bas, a mis l'accent sur les thèmes de la tolérance et de la non-discrimination. Les sociétés où ces valeurs prévalent démontrent comment un bon gouvernement et le respect des droits de l'homme agissent sur le développement et la prospérité. Pourtant, la discrimination et l'intolérance demeurent largement répandues. À cet égard, le Ministre a évoqué la situation en Macédoine où il s'est dit choqué, lors de sa récente visite dans ce pays, par l'impact destructeur de l'intolérance sur une société. La communauté internationale doit user de tous les moyens disponibles, qu'ils soient politiques ou économiques, pour aider les Macédoniens à promouvoir la tolérance et la non_discrimination, en particulier par le biais des Accords de stabilité et d'association. En Russie, également, le gouvernement doit enquêter en profondeur sur les plaintes de violations des droits de l'homme, a-t-il déclaré. M. Van Aartsen a aussi évoqué la situation au Moyen-Orient et appelé les parties à prendre les mesures nécessaires pour rompre le cycle de la violence, y compris par un appel public de M. Yasser Arafat dans ce sens, et à retourner à la table des négociations. En ce qui concerne l'Indonésie, partageant les inquiétudes du gouvernement, il a estimé que le renforcement de l'état de droit et du respect des droits de l'homme est crucial.

La promotion de la condition féminine est prioritaire pour le Gouvernement néerlandais, a rappelé M. Van Aartsen qui s'est félicité des mesures prises au niveau international pour lutter et condamner les crimes contre les femmes, qu'il s'agisse des mutilations, des crimes d'honneur ou encore du viol et de l'esclavage sexuel. La primauté du droit doit prévaloir au niveau national comme international, a-t-il indiqué, estimant que l'établissement de la Cour pénale internationale sera un pas fondamental dans la lutte contre l'impunité. Il a exhorté les États à ratifier le Statut de Rome au plus vite, soulignant que la liberté d'expression offre aux sociétés démocratiques le nécessaire contre-pouvoir, M. Van Aartsen a estimé qu'il faut encourager la liberté des médias et le libre échange des idées. À cet égard, il a souhaité la levée des obstacles qui freinent la liberté d'expression, de religion ou de croyance, citant en particulier les exemples de la Chine et de l'Iran.

Le Ministre néerlandais des affaires étrangères a appelé les membres de la Commission à faire preuve de plus de créativité, d'audace et de détermination pour faire changer les choses et a prôné en particulier l'établissement d'un partenariat responsable avec le monde des affaires, le secteur privé et la société civile. Il faut également assurer un meilleur financement du Haut-Commissariat aux droits de l'homme, a-t-il déclaré, déplorant que de moins en moins d'activités essentielles en matière de droits de l'homme soient financées sur le budget ordinaire de l'Organisation des Nations Unies. M. Van Aartsen a jugé inacceptable que moins de 2% du budget de l'ONU soient consacrés au Haut-Commissariat et suggéré qu'il soit décidé, à la prochaine Assemblée générale, d'augmenter l'allocation budgétaire allouée aux droits de l'homme.


Suite du débat sur les droits civils et politiques

M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a évoqué les efforts de son pays pour promouvoir et protéger les droits civils et politiques. Le représentant a rappelé que son pays connaissait les contraintes habituelles des pays en développement. Il est par ailleurs confronté à des problèmes imposés de l'extérieur et qui concernent la promotion des droits de l'homme. Les conflits en Afghanistan ont porté un coup très dur au Pakistan et ont apporté à ce pays apporté le fléau de l'extrémisme. Le Pakistan se prépare à lutter pour surmonter ses difficultés auxquelles il est confronté afin d'être digne de ses fondateurs. La situation en Afghanistan, qui est allée de mal en pis au fil des années, est extrêmement grave. La population afghane est au bord de l'abîme. Il s'agit d'une catastrophe humanitaire majeure. M. Akram a souligné que 170 000 personnes ont maintenant quitté l'Afghanistan. Le Pakistan a déjà accueilli de nombreux réfugiés et maintiendra son assistance aux réfugiés afghans. Les Nations Unies ont lancé un appel de 229 millions de dollars pour l'aide humanitaire à l'Afghanistan. Malheureusement, la réponse de la communauté internationale ne correspond pas à l'appel de l'ONU. Jusqu'ici aucune mesure n'a été prise par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés en vue de préparer des zones d'accueil sur le territoire afghan.

Le représentant pakistanais a souligné qu'il n'existe pas de restriction à l'assistance fournie aux réfugiés afghans par son pays. Cela fait 20 ans que le Pakistan coopère de façon fructueuse avec le HCR. Le Pakistan est attristé lorsque le responsable du HCR déclare que le Pakistan réduit cette assistance. Pour le Pakistan, c'est une véritable diffamation. M. Akram a ajouté que le Pakistan ne pourrait pas continuer à supporter le coût supplémentaire de l'arrivée de nouveaux réfugiés. C'est la raison pour laquelle il est impératif que le HCR et les Nations Unies tiennent leur promesse d'ouvrir de nouveaux camps en Afghanistan. Il est étonnant que le HCR ose critiquer le Pakistan qui a offert son hospitalité à de nombreux réfugiés. Le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en Afghanistan, M. Kamal Hossein, a déclaré qu'il n'avait pu avoir accès au camp de Jelosai. Or, ce camp est ouvert à tout le monde, même aux journalistes. M. Hossain n'a pas eu la courtoisie d'informer le Gouvernement du Pakistan de son arrivée. Les Nations Unies doivent demander au Rapporteur spécial d'avoir une plus grande conscience des responsabilités de sa fonction et d'agir avec davantage de circonspection.


M. NGUYEN QUY BINH (Viet Nam) a dénoncé la persistance de la discrimination raciale et de la propagande raciste sous prétexte de la protection de la liberté d'expression. Il a estimé que la lutte contre le racisme est devenu une question urgente et importante. Il a en outre rappelé que la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels contribue à la réalisation des droits civils et politiques. À travers l'expérience de son pays, M. Nguyen a estimé que promotion de la démocratie directe au niveau de la base ainsi que la prise en compte des plaintes et des dénonciations ont un impact concret sur la conscience que les citoyens de leurs droits. Le Gouvernement vietnamien a également concentré son attention sur l'amélioration de la justice criminelle et la diminution du nombre de délits passibles de condamnations. Il a procédé à des amnisties de masse. Le Viet Nam a adopté plusieurs mesures pour promouvoir une harmonie juridique et assurer une meilleure réalisation des droits des citoyens, en particulier en ce qui concerne la liberté religieuse et de croyances, l'égalité des religions, la protection des lieux de culte, la publication de documents religieux et l'enseignement religieux. Aujourd'hui, le Vietnam est en passe de devenir de fait un pays de tolérance religieuse, a déclaré M. Nguyen. La liberté de la presse est en outre garantie par la loi. La presse est devenue à présent une force très puissante dans la société, contribuant à protéger les intérêts des individus, à combattre la corruption et à offrir un espace de débat public, a_t-il ajouté.

M. CHRISTIAN GUILLERMET FERNÁNDEZ (Costa Rica) a rappelé que son pays, qui est un nouveau membre de la Commission, est attaché aux valeurs que la Commission défend. Le Costa Rica estime qu'il est impérieux de créer un mécanisme de prévention contre la torture. Le Costa Rica a présenté en 1980 un projet initial de protocole facultatif à la Convention contre la torture. La Commission a créé depuis 1991 un Groupe de travail chargé d'élaborer le texte d'un projet de protocole facultatif. Son travail est ardu mais il est important que l'on redouble d'efforts pour arriver à un texte solide. Des idées nouvelles ont été soumises qui ont permis d'enrichir le débat. Le représentant s'est félicité que le projet de protocole facultatif ait été mentionné par de nombreuses délégations au cours du débat. Une des propositions présentées vise à conférer un rôle fondamental dans la prévention contre la torture aux États qui souscriront au Protocole facultatif. Le représentant a reconnu que la contribution de la société civile, qui fait un travail de proximité et de terrain remarquable, enrichit les négociations du Groupe de travail. La prévention contre la torture doit être assurée sur la base d'un processus de consolidation de la confiance. La prévention est l'un des mécanismes d'alerte rapide qui doit permettre d'éviter que des violations des droits de l'homme ne soient commises. Le Costa Rica lance un appel pour que les efforts de coopération soient renforcés et que l'on arrive à un consensus sur le projet de protocole facultatif, sans que la portée du texte soit diluée.

M. A. GOPINATHAN (Inde) a souligné que les actes de terrorisme, y compris le terrorisme commandité par les États, persistent voire augmentent, accompagnés par une propagande de désinformation d'acteurs étatiques et non étatiques. La nature pernicieuse de cette propagande peut atteindre l'audace d'élever les terroristes à leaders politiques mondiaux. Mais le terrorisme, a-t-il rappelé, est antidémocratique. Il y a un besoin urgent d'assurer la responsabilité des acteurs non-étatiques. Il a ensuite déclaré qu'un pays voisin de l'Inde, qui nourrit des ambitions territoriales sur l'État indien du Jammu-et-Cachemire, est en train de mener une guerre par groupe interposé contre l'Inde. Cette guerre et son parrainage par un pays du terrorisme étatique sont à l'origine des graves violations des droits de l'homme de la part des terroristes au Jammu-et-Cachemire. Par ailleurs, les forces armées de ce pays qui soutient les terroristes prête peu d'attention au droit international humanitaire. Ayant été victime du terrorisme, l'Inde est prête à promouvoir les efforts de la communauté internationale pour la mise en place d'une convention globale sur le terrorisme international.

En ce qui concerne les conclusions du Rapporteur spécial sur la torture s'agissant de l'Inde, M. Gopinathan les a jugées déséquilibrées et a souligné qu'elles dont fondées sur des allégations sans tenir compte des réponses du Gouvernement indien. Le représentant a ensuite rejeté catégoriquement les évaluations du Rapporteur spécial quant au niveau d'impunité dans la police et les forces de sécurité indiennes. De plus, il a exprimé l'espoir que le Rapporteur est conscient de la violence sur une grande échelle et des actes de brutalité perpétrés par les terroristes. Enfin, en ce qui concerne les observations du Groupe de travail sur les disparitions forcées et involontaires, il a exprimé trois observations: tout d'abord, les cas de disparitions dans le Pundjab ont été portés devant la Commission nationale des droits de l'homme; ensuite, un certain nombre de cas signalés au Groupe de travail ont déjà reçu des réponses dans le passé; enfin, s'agissant de la question du Jammu-et-Cachemire, le gouvernement a répondu à un nombre d'allégations spécifiques et il est en train faire de son mieux pour essayer de prévenir de tels incidents.

M. VLADISLAV ERMAKOV (Fédération de Russie) a estimé que la liberté et la tolérance en matière religieuse sont fondamentales. Il a toutefois souligné les conflits entre l'universalisme rationaliste et les exigences religieuses. En Russie, les relations inter-religieuses existent du fait de la cohabitation, depuis des siècles, de plusieurs religions. Il a ajouté qu'un dialogue entre les religions se développe à plusieurs niveaux. L'Église orthodoxe participe à un dialogue avec les autres religions au sein de divers forums internationaux. Les entités religieuses sont séparées de l'État mais cela n'empêche pas des relations mutuelles fructueuses, a-t-il précisé. S'agissant des critiques concernant le préambule de la loi sur la liberté de conscience, le représentant russe a souligné que la loi est conforme aux lois internationales mais qu'elle tient également compte des particularités historiques de la Russie. Il a précisé que, contrairement à la période soviétique où les activités religieuses étaient interdites sans être dûment enregistrées, la Fédération de Russie permet à toutes les communautés religieuses de mener librement leurs activités.

M. Ermakov a d'autre part souligné le facteur politique essentiel dans les relations avec les pays limitrophes. Il s'est dit en faveur d'une approche tenant compte des intérêts et des liens historiques des peuples qui ont vécu côte à côte pendant des siècles. Il a, par ailleurs, évoqué la difficulté d'élaborer une loi fédérale sur un service civil alternatif. Ce qui constitue un obstacle à l'établissement d'un statut d'objecteur de conscience. Il a cependant affirmé que le Gouvernement russe est déterminé dans le cadre de la réforme de l'institution militaire, à oeuvrer dans ce sens.

M. MOHAMED-SALAH DEMBRI (Algérie) a rappelé que le point consacré aux droits civils et politiques devait provoquer un débat interactif entre les États membres, les observateurs, les ONG et les Rapporteurs spéciaux. Qu'en est-il vraiment? Le représentant a regretté que les Rapporteurs spéciaux ne soient pas présent lors de ce «débat interactif». Évoquant la question de la méthodologie suivie par les Rapporteurs spéciaux, le représentant a estimé qu'il y avait peu de rigueur dans l'élaboration des documents. Les Rapporteurs spéciaux reprennent les matériaux qui leur sont fournis par des sources extérieures. Le représentant a regretté qu'il y ait même par moments un certain laxisme et une désinvolture. Certains rapports livrent en vrac et sans souci d'analyse des cas divers, ce qui ouvre la voie à des interprétations diverses. Il est urgent de revoir en profondeur les méthodes de travail des Rapporteurs spéciaux ainsi que le fonctionnement des mécanismes des droits de l'homme.

Pour ce qui est du rapport établi par le Rapporteur spécial sur la torture, M. Nigel Rodley, le représentant a précisé que pour tous les cas cités à propos de l'Algérie au paragraphe 22, des instructions sont en cours. Mentionnant les paragraphes 25 à 30 du rapport, le représentant a déclaré que des réponses ont été communiquées au Rapporteur Spécial la semaine dernière. En ce qui concerne le rapport établi par le Groupe de travail sur disparitions forcées ou involontaires, le représentant a estimé que les délais sont trop courts et ne permettent pas de mener des enquêtes qui exigent par définition des données précises et du temps. Le Groupe de travail doit revoir sa façon de communiquer avec les États. Au sujet du rapport de la Rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, Mme Asma Jahangir, le représentant algérien a déclaré qu'il y avait un décalage entre les dates fournies sur un cas d'assassinat et a jugé que cela manquait de sérieux, précisant qu'une réponse a été envoyée à Mme Jahangir à ce sujet. Le représentant a demandé qu'il y ait une plus grande rigueur dans la méthode suivie par la Rapporteuse spéciale. Au sujet du rapport établi par le Rapporteur spécial sur la liberté d'opinion et d'expression, M. Abid Hussain, le représentant a regretté que le Rapporteur spécial ignore qu'il y a des médias des services publics et des médias indépendants. Il utilise des expressions différentes selon les pays. Ainsi il a utilisé l'expression de « médias d'État» au lieu de dire des médias des services publics. Le représentant a regretté de devoir constater qu'il y a un mépris profond pour les pays du Sud.

Évoquant les interventions faites par plusieurs États ou groupes d'États qui ont exhorté les États à accueillir les Rapporteurs spéciaux, le représentant de l'Algérie a rappelé que les Rapporteurs spéciaux n'ont pas besoin d'intermédiaires. Les États ne sont pas gestionnaires des mécanismes des droits de l'homme qui ont été mis en place. Le représentant algérien a demandé que la juxtaposition de soliloques fasse enfin place à un véritable débat interactif sur les grandes données de promotion des droits de l'homme.

M. MIGUEL ALFONSO MARTÍNEZ, (Cuba) a affirmé que ses méthodes de travail rendent la tâche impossible à la Commission. Il a fait remarquer le nombre important de documents à lire par les délégations, dont une grande partie n'a été mise à disposition que ces derniers jours. Il a noté à cet égard qu'il s'agit en particulier des questions ayant un caractère politique. Une délégation qui veut faire un travail sérieux ne dispose pas d'assez de temps, a-t-il souligné. Ce sentiment de frustration ne s'adresse pas au service des conférences ni au Secrétariat, mais il faut chercher la raison dans ce désir de prolifération. L'une des conséquences est, par exemple, à accorder trop peu de temps à la négociation et à la recherche d'une conciliation, ce qui conduit à la confrontation. Les rapports montrent une fois de plus que les violations des droits de l'homme sont une réalité propre aux pays du Sud comparée au «monde merveilleux» du Nord. À cet égard, le rapport du Groupe de travail sur la détention arbitraire et du Rapporteur spécial contre la torture sont éloquents. Il a ensuite regretté que les Rapporteurs spéciaux sur l'intolérance religieuse et sur les exécutions extrajudiciaires n'aient pu accomplir leur tâche en raison du refus d'Israël de leur accorder l'accès. Il a ensuite noté que le rapport du Rapporteur spécial contre la torture comporte 300 pages, et ceci en violation des décisions prises par la Commission.

M. SHEN YONGXIANG (Chine) a indiqué que son gouvernement s'est engagé dans un programme de développement économique et d'amélioration des conditions de vie. La promotion et la protection des droits de civils et politiques, tout en améliorant constamment le cadre démocratique et légal, font également partie de ses préoccupations. Ainsi la Chine a constamment oeuvré pour établir la primauté du droit en améliorant sa législation et en renforçant le rôle de supervision du Congrès national du peuple. Elle s'est également engagée dans l'approfondissement de la réforme de son système juridique afin de garantir la justice et le respect des droits de l'homme. La liberté d'expression est garantie par la loi et les médias jouent un rôle important dans ce domaine, a indiqué le représentant. Il a également évoqué le respect et la protection que le gouvernement garantit aux croyances religieuses, ce qui s'est traduit par une augmentation sensible du nombre de croyants en Chine. Il a en outre rappelé que la Chine interdit formellement la torture et attache depuis longtemps une attention particulière aux droits légitimes des détenus, interdisant strictement tout mauvais traitements. La Chine, avec la mise en oeuvre du dixième plan quinquennal pour le développement social et économique, entre dans une nouvelle phase de la construction d'un État fondé sur la primauté du droit. Il a regretté que les États-Unis tentent de politiser cette assemblée en lançant des accusations sans fondements sur la situation des droits de l'homme dans d'autres pays et en faisant preuve ainsi d'ingérence dans leurs affaires intérieures. La situation des droits de l'homme aux États-Unis est d'ailleurs très préoccupante, a_t_il dit, suggérant aux États-Unis de se «mêler de ce qui les regarde».

M. CHRISTIAN-CLAUDE BEKE DASSYS (Côte d'Ivoire) a évoqué la période de transition militaire, du 24 décembre 1999 au 26 octobre 2000 , au cours de laquelle différents cas de violation des droits de l'homme ont été signalés. Des exécutions sommaires, des détentions arbitraires, des tortures, des entraves à la liberté de presse ont été commises durant cette période. Le 26 octobre 2000 ouvre l'ère d'un président démocratiquement élu. Les autorités ivoiriennes s'attellent à instruire tous les cas de violation dont elles sont saisies et ce dans un esprit d'ouverture et de transparence. Contrairement à la déclaration de l'Union européenne, le gouvernement a répondu favorablement aux demandes de visite et à toutes les demandes de renseignement sollicitées par les Rapporteurs spéciaux de la Commission. Les harcèlements et extorsions constatés qui procèdent en réalité du racket de la part des forces de l'ordre constituent un mal dont ont souffert tous ceux qui habitent sur le sol ivoirien sans distinction d'origine. Toutefois, depuis l'avènement de la Deuxième République, les polices parallèles formées au sein de l'armée n'existent plus. Le gouvernement a pris en outre, depuis mars 2001, des mesures énergiques telles que la création d'une police des polices et la suppression de nombre des barrages routiers. Le représentant a tenu à rassurer la communauté internationale en précisant que ceux dont la culpabilité sera prouvée seront punis. Le Gouvernement de la Côte d'Ivoire s'engage à lutter contre toute impunité.

M. YASANTHA KODAGODA (Sri Lanka) a déclaré que le terrorisme continue de menacer la paix, de violer les droits de l'homme, de déstabiliser les sociétés et de mettre en péril l'intégrité territoriale des États. Il est donc essentiel que l'on combatte le terrorisme en parvenant à s'entendre sur les bases juridiques de la lutte contre le terrorisme. Le recours au terrorisme à des fins politiques est injustifiable car son impact est dévastateur. Il est évident que les actes terroristes sont contraires à tous les droits de l'homme, a-t-il ajouté et il doit être donc balayé de la surface de la terre. À cet égard, M. Kodagoda a exprimé le souhait que les travaux entrepris par la sixième Commission des Nations Unies (Commission juridique) permettront d'aboutir à l'élaboration d'une convention internationale de lutte au terrorisme. Il a toutefois souligné que des régimes mise en oeuvre par certains gouvernements dans la lutte contre le terrorisme offrent déjà des éléments pour des instruments juridiques dans ce domaine. Le représentant sri-lankais a ensuite tenu à mettre en garde s'agissant d'un élément qui peut porte atteinte à la crédibilité de la Commission, à savoir que des personnes ayant des liens avec des groupes terroristes prennent part aux sessions de la Commission sous le parrainage de certaines organisations non gouvernementales ou d'au moins à cause de dysfonctionnements de ces ONG.

M. LAMYANG CHOEPHEL (Union internationale de la jeunesse socialiste) a dénoncé le fait que les manifestations pacifiques au Tibet constituent un motif habituel de détention en Chine. Le fossé qui sépare le droit international et leur application en Chine est immense. Ce pays compte actuellement plus de 450 prisonniers politiques tibétains, accusés de menaces contre la sécurité de l'État. Des discours du Dalaï Lama, des affiches ou même des textes religieux sont considérés comme des tracts politiques. L'information sur les détenus est officiellement limitée mais il ne fait aucun doute qu'ils sont détenus pour avoir exercé leur liberté d'expression et de religion. Des sources fiables confirment le nombre important de sentences prononcées contre des tibétains. Le représentant a en outre estimé que la Commission devait se pencher sur la pratique de la rééducation par le travail en vue de l'abolir car elle constitue une grave violation des droits de l'homme des détenus.

M. JOSEPH ASSAD (Freedom House) a indiqué que son organisation a publié plusieurs études sur différents pays où se produisent de nombreuses violations de la liberté d'expression et notamment la liberté religieuse. Au Soudan, le gouvernement réprime ceux qui ne souscrivent pas à la sa version de l'Islam. Ceux qui sont considérés comme des opposants au régime sont persécutés et réduits à l'esclavage. Le conflit civil du Soudan a repris il y a 17 ans lorsque le régime extrémiste de Kharthoum a essayé d'islamiser une nation multiethnique aux nombreuses religions. Deux millions de personnes ont été tuées et 4,5 millions de personnes expulsées de leurs foyers. Des dizaines de milliers de femmes et d'enfants du Sud du pays ont été réduits à l'esclavage dans le Nord. Nombreuses sont les femmes qui ont été violées par des milices gouvernementales. En Égypte, les coptes continuent de souffrir de persécution et à être victimes de pratiques discriminatoires. M. Assad a regretté que la Fédération de Russie continue de mener une politique de punition collective contre le peuple tchétchène. Au Vietnam, le gouvernement réprime toutes les religions qui ne sont pas contrôlées par l'État. En Chine, la campagne pour éliminer les groupes religieux non enregistrés s'est intensifiée depuis la fin des années 90. Le représentant a dénoncé la campagne discriminatoire menée contre les Falun Gong. Ceux-ci sont envoyés dans des camps de travail forcé, sans même avoir été jugés. Des familles entières ont été décimées. Les tortures à l'encontre des Falun Gong se sont intensifiées. Le représentant a demandé à la Commission de nommer un rapporteur spécial ou un comité spécial pour enquêter sur et mettre fin à la persécution brutale dont sont victimes les Falun Gong.

M. RAÚL SANTIAGO MANTILLA RAMÍREZ (Union nationale des juristes de Cuba) a dit que la démocratie ne répond pas à un seul modèle. À Cuba, par exemple, les responsables politiques tiennent des réunions dans leurs circonscriptions pour rendre compte de la manière dont ils ont géré la chose publique. Dans le cadre ce cet exercice dans lequel les élus rendent des comptes, ils doivent répondre dans des délais précis aux questions que les électeurs leur posent. Tous les habitants ont le droit d'être élus. Une forte société civile s'est constituée à Cuba. Ainsi, les syndicats constituent une organisation forte qui défend les droits des travailleurs. Les femmes sont organisées au sein de la fédération des femmes et des mères, qui s'occupe de défendre les acquis obtenus au cours des ans par les femmes. D'autres organisations réunissent des catégories professionnelles.

MME DORA CARCANO (Fédération démocratique internationale des femmes) a déploré la vision fragmentaire des droits de l'homme qu'ont de nombreux hommes politiques, économistes ou spécialistes de l'environnement. Tous les droits sont indivisibles et inhérent à l'homme, a-t-elle rappelé, demandant comment on peut penser qu'il soit possible de participer activement à la vie politique d'un pays quand les droits économiques, sociaux et culturels les plus fondamentaux ne sont pas assurés. À cet égard, elle a indiqué qu'à Cuba, les droits économiques, sociaux et culturels s'appliquent sans distinction de race ou de religion et touchent tous le milieux socioculturels.

MME MARTA O. DE VÁSQUEZ (Fédération latino-américaine des associations des familles des détenus disparus) a déploré que les disparitions forcées continuent de se produire en toute impunité. Au cours de l'année écoulée, de nombreux cas ont été relevés par le Groupe de travail. Ces cas n'ont toujours pas été éclaircis. Il est impératif et urgent d'aborder la question des disparitions forcées. C'est pourquoi la représentante a regretté le manque d'intérêt manifesté par de nombreux États à ce sujet. Elle a souligné que l'État argentin a donné l'exemple en approuvant la loi sur l'absence résultant d'une disparition forcée («Ley de Ausencia por Desaparición Forzada»). Les instruments internationaux interdisant explicitement les disparitions forcées ne sont toujours pas respectés par de nombreux États. La Colombie est le pays où l'on compte le plus grand nombre de victimes du phénomène des disparitions forcées. La représentante a souligné que la Commission est saisie d'un projet de convention sur la protection des personnes contre les disparitions forcées et a espéré qu'elle prendrait des mesures dans ce sens. En effet, la communauté internationale doit créer les instruments juridiques internationaux font défaut en matière de disparitions forcées. Elle a demandé que soit créé un mécanisme souple de suivi qui soit chargé de la rédaction définitive du projet de convention.


La Représentante de l'Égypte a dit avoir déjà fourni une réponse au Rapporteur sur la liberté religieuse. La Constitution de l'Égypte prévoit la liberté de culte. Toutefois, les Baha'is s'en prennent non seulement à la religion islamique mais aussi à ses symboles. Ceci n'est pas acceptable quel que soit le pays où ceci se passe, y compris les États-Unis, car les gouvernements ont le devoir de garantir la stabilité sociale. La représentante égyptienne a ensuite affirmé que les pratiques actuelles de cette faction encouragent l'intolérance religieuse. Elle a par ailleurs regretté que certaines organisations non gouvernementales abusent, pour des motifs politiques et financiers, du temps de la Commission et a demandé que le Secrétariat s'occupe de la question.

Le Représentant du Burundi a regretté que les Rapporteurs spéciaux sur la torture, les arrestations arbitraires et les disparitions forcées ne tiennent pas compte dans leurs rapports des mesures prises par le Gouvernement burundais. Il a ajouté que l'embargo et la crise économique rendent la tâche du gouvernement beaucoup plus difficile. C'est la raison pour laquelle il a renouvelé sa requête de remplacer les différents mécanismes des droits de l'homme de la Commission par une coopération technique plus consistante.

Le représentant de la République islamique d'Iran a attiré l'attention de la Commission sur la déclaration faite par Humanitarian Law Project qui, au nombre des groupes d'opposition en Iran, a cité des organisations responsables d'actes terroristes. Il s'est inquiété que certaines ONG utilisent le bâtiment de l'ONU pour faire l'apologie du terrorisme. S'agissant de «Mojahedin Khalg Organisation», il a rappelé que ce groupe a mené des attaques chimiques contre Halabja et plusieurs attentats. Il a en outre commenté les allégations sur la liberté de religion et d'expression en Iran, indiquant que les minorités chrétiennes et autres ont des représentants au Parlement. D'autre part, l'augmentation du nombre de publications en Iran témoigne clairement des efforts du gouvernement pour favoriser la liberté d'expression, a-t-il fait valoir.

Le représentant de l'Albanie, en réponse à la Grèce, a réaffirmé que les chiffres du Gouvernement albanais se basent sur les chiffres du dernier recensement de 1989 qui comptabilise 58 758 personnes d'origine grecque. Les chiffres avancés tiennent également compte de l'accroissement de la population, a-t-il précisé.


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