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Communiqués de presse Commission des droits de l'homme

LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE DES RAPPORTS SUR LES DÉCHETS TOXIQUES ET SUR LE LOGEMENT CONVENABLE

30 Mars 2004

Commission des droits de l'homme
MATIN
30 mars 2004


Elle est également saisie d'un rapport sur les disparitions forcées ou involontaires


La Commission des droits de l'homme a poursuivi, ce matin, son examen des questions se rapportant aux droits économiques, sociaux et culturels en entendant les présentations des rapports sur le logement convenable et sur les conséquences néfastes des mouvements et déversements illicites de produits et déchets toxiques, ainsi que sur l'élaboration d'un protocole sur la présentation de plaintes au Comité des droits économiques, sociaux et culturels. Une vingtaine de délégations sont par ailleurs intervenues dans le cadre du débat général. A également été présenté, au titre des droits civils et politiques, le rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires.
Mme Fatma-Zohra Ouhachi-Vesely, Rapporteuse spéciale sur les conséquences néfastes des mouvements et déversements illicites de produits et déchets toxiques et nocifs pour la jouissance des droits de l'homme, a notamment appelé le Gouvernement britannique à interdire l'exportation de produits chimiques dont l'utilisation est interdite ou restreinte dans le pays et à renforcer l'action civile et pénale contre les contrevenants. Elle a précisé qu'un additif à son rapport rapporte notamment 13 incidents nouveaux concernant la France, le Canada, les États-Unis, le Royaume-Uni, Israël, les Pays-Bas, en tant que pays présumés d'origine des déchets. La Rapporteuse spéciale a notamment déploré que, les produits électroniques obsolètes n'étant pas encore sur la sellette, certains en profitent pour les envoyer dans le Tiers-monde. Le démantèlement des navires continue de susciter de graves préoccupations, a-t-elle poursuivi. Les produits chimiques et les pesticides causent 3 millions d'empoisonnements chaque année et 220 000 décès, a indiqué la Rapporteuse. Suite à la présentation de ce rapport, les délégations de la Turquie et du Royaume-Uni sont intervenues en tant que pays concernés. Un dialogue interactif s'est ensuite engagé avec la Rapporteuse spéciale.

Présentant son rapport sur le logement convenable en tant qu'élément du droit à un niveau de vie suffisant, qui rend compte notamment de missions effectuées au Pérou et en Afghanistan, M. Miloon Kothari, Rapporteur spécial, a dénoncé les expulsions forcées comme constituant autant de violations du droit à un logement convenable. M. Kothari a jugé particulièrement préoccupante la pénurie de logement au Pérou. S'agissant de l'Afghanistan, il a souligné que le principal problème réside dans la confiscation et l'occupation des terres et dans le climat d'impunité qui entoure ceux qui se livrent à de telles actions. Pour ce qui est du Kenya, il a souligné que la définition de principes directeurs concernant les expulsions forcées s'impose dans ce pays. Les délégations du Kenya et du Pérou ont fait des déclarations en tant que pays concernés. Un bref dialogue interactif a suivi la présentation de ce rapport.

Mme Catarina de Albuquerque, Présidente-Rapporteuse du Groupe de travail chargé d'examiner les options qui s'offrent en ce qui concerne l'élaboration d'un protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, a présenté le rapport de la première session du Groupe de travail qui a porté son attention sur la nature et la portée des obligations contractées par les États parties en vertu du Pacte; la justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels; et l'utilité et la faisabilité d'un mécanisme d'examen de plaintes et sa complémentarité entre les différents mécanismes.

Reprenant le débat général sur les droits économiques, sociaux et culturels, la Commission a entendu les représentants des pays suivants : Pakistan, Inde, Ukraine, Soudan, Argentine (au nom du Groupe des pays d'Amérique latine et des Caraïbes - GRULAC), Mauritanie, Afrique du Sud, Népal, Bhoutan, Arménie, Iraq, Algérie, Canada, Nicaragua, Venezuela et Koweït. Les représentants de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) sont également intervenus.

En début de séance, présentant un rapport dans le cadre de l'examen des questions relatives aux droits civils et politiques, le Président-Rapporteur du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, M. Diego García-Sayán, a indiqué que le nombre total de nouveaux cas signalés aux États représente presque le double de ce qu'il était l'année précédente; cela s'explique en grande partie par les efforts déployés par le Secrétariat pour s'occuper de l'arriéré des cas non traités, a-t-il souligné. L'Iraq représente le plus grand nombre de cas non élucidés signalés au Groupe de travail dans un seul et même État, soit 16 386 cas, a ajouté M. García-Sayán.


La Commission poursuivra cet après-midi, à 15 heures, son débat sur les droits économiques, sociaux et culturels.


Présentation d’un rapport sur les disparitions forcées ou involontaires

M. DIEGO GARCÍA-SAYÁN, Président-Rapporteur du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, a rappelé que son Groupe a acquis une expérience considérable : 50 000 cas de disparitions ont été portés à son attention, dont plus de 41 000 restent à résoudre. Le nombre total de nouveaux cas portés à l’attention des États représente presque le double de ce qu’il était l’année précédente, a indiqué le Président-Rapporteur; mais cela s’explique en grande partie par les efforts déployés par le Secrétariat pour s'occuper de l'arriéré des cas non traités. L'Iraq représente le plus grand nombre de cas non élucidés signalés au Groupe de travail dans un seul et même État, soit 16 386 cas. Au cours de l’année, le Groupe de travail a écrit à M. Kofi Annan, Secrétaire général des Nations Unies, et à M. Paul Bremer, Administrateur de l’Autorité provisoire de la Coalition en Iraq, pour exprimer sa profonde préoccupation face au fait que les éléments de preuve concernant les disparitions antérieures, tels que les fosses communes et les documents officiels, étaient peut-être en cours de destruction. En même temps, le Groupe de travail a appelé l’attention des Nations Unies et de l’Autorité provisoire sur l’importance qu’il y avait à préserver toutes preuves matérielles concernant les disparitions passées.
Le rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires (E/CN.4/2004/58), montre que, lorsque les gouvernements prennent des mesures pour créer ou renforcer des organismes et institutions chargés des cas de disparition, les résultats sont très positifs. Ainsi, la création d’organismes spécialement chargés d’enquêter sur les disparitions ou de commissions de la vérité est une mesure concrète qui peut conduire à l’élucidation des cas et à une politique d’indemnisation des victimes. Le Groupe de travail encourage et soutient énergiquement ce genre de mesures. Le Groupe estime aussi qu’il convient de privilégier les mesures de prévention efficaces suivantes : établir des registres d’écrou qui soient accessibles et à jour; garantir aux familles et aux avocats des personnes privées de liberté l’accès aux informations appropriées et aux lieux de détention; veiller à ce que les personnes concernées soient déférées à une autorité judiciaire peu après leur arrestation; traduire en justice toutes les personnes accusées d’avoir commis des actes conduisant à des disparitions forcées et faire en sorte qu’elles ne soient jugées que par une juridiction civile compétente et qu’elles ne bénéficient d’aucune loi d’amnistie spéciale ni d’autres mesures analogues qui auraient pour effet de les exonérer de toute poursuite ou sanction pénale; enfin, accorder réparation aux victimes et à leur famille, et les indemniser de façon adéquate. Le Groupe de travail réaffirme par ailleurs son appui aux mesures prises pour élaborer un projet de convention sur les disparitions. Il tient aussi à souligner une fois encore l’importance qu’il y a à mettre un terme à l’impunité des auteurs de disparitions forcées ou involontaires : c’est là une démarche capitale non seulement pour faire prévaloir la justice mais également pour favoriser une prévention efficace.


Présentation du rapport sur l'élaboration d'un protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels

MME CATARINA DE ALBUQUERQUE, Présidente-Rapporteuse du Groupe de travail chargé d'examiner les options qui s'offrent en ce qui concerne l'élaboration d'un protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, a rappelé que le Groupe de travail s'est réuni pour sa première session à Genève du 23 février au 5 mars 2004. Les travaux du Groupe se sont concentrés sur la nature et la portée des obligations contractées par les États parties en vertu du Pacte; la justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels; et l'utilité et la faisabilité d'un mécanisme d'examen de plaintes et sa complémentarité entre les différents mécanismes. Les recommandations qui ont réuni le plus large assentiment sont désormais soumises à la Commission, a précisé la Présidente-rapporteuse, exprimant l'espoir qu'elles seront adoptées par la Commission. Mme Albuquerque a par ailleurs relevé les difficultés que certaines délégations rencontrent pour participer aux réunions du Groupe de travail et a souhaité que la prochaine session puisse se tenir juste avant la session de la Commission.

Le rapport du Groupe de travail (E/CN.4/2004/44) présente l'organisation de la session, les déclarations liminaires, un compte-rendu des dialogues interactifs ainsi que des discussions sur les trois questions abordées durant la session (la déclaration ci-dessus). Dans ses recommandations, la Présidente-Rapporteuse indique que le Groupe de travail n'est pas parvenu à un consensus quant au lancement des travaux de rédaction d'un protocole facultatif. Elle recommande donc un approfondissement du débat et la reconduction du mandat du Groupe de travail en l'autorisant à se réunir pendant 10 jours avant les soixante et unième et soixante-deuxième sessions de la Commission. Elle demande également l'établissement d'un rapport du Secrétaire général contenant un récapitulatif des procédures de communication et d'enquête existantes et des pratiques au titre d'instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme et dans le système des Nations Unies.


Présentation du rapport sur le logement convenable

M. MILOON KOTHARI, Rapporteur spécial sur le logement convenable en tant qu'élément du droit à un niveau de vie suffisant, a déclaré que le droit à un logement convenable va au-delà du droit à un simple toit. Le droit à un logement convenable est en effet indissociable du droit à l'alimentation, du droit à l'eau potable, du droit au travail et du droit à la sécurité. Le Rapporteur spécial a par ailleurs précisé que les expulsions forcées constituent autant de violations du droit à un logement convenable. L'Observation générale n°7 adoptée par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels constitue un outil fondamental précisant les responsabilités étatiques en la matière, a-t-il ajouté. Toutefois, ce texte n'est pas suffisamment exhaustif pour appréhender et couvrir la question des expulsions forcées dans sa globalité. Aussi, l'élaboration de nouvelles normes s'impose avec urgence, a estimé M. Kothari.

S'agissant du Pérou, où il a effectué une mission, le Rapporteur spécial a déclaré que la pénurie de logement est particulièrement préoccupante dans ce pays. Le Rapporteur spécial est conscient des efforts déployés par le Gouvernement pour résoudre la question du logement mais constate que ces efforts n’ont pas pris en compte tous les aspects du problème. Comme c'est le cas dans nombre d'autres pays, il est urgent de revoir les programmes de logement pour qu'ils prennent davantage en compte la situation des plus pauvres, a estimé M. Kothari.

S'agissant du droit à un logement convenable en Afghanistan où il s'est rendu en septembre 2003, le Rapporteur spécial a souligné que le principal problème réside dans la confiscation et l'occupation des terres et dans le climat d'impunité qui entoure ceux qui se livrent à de telles actions. M. Kothari a également fait état d'expulsions forcées accompagnées d'actes de violence qui interviennent dans tout le pays. Il a également relaté l'existence de nombreux cas de destruction de logements sans préavis. À cet égard, le Rapporteur spécial a salué la mise en place d'une commission d'enquête indépendante sur ces faits, qui a pu établir un rapport. Malheureusement, ce rapport n'a pas pu être rendu public, a-t-il regretté.

Le Rapporteur spécial a enfin souligné que la définition de principes directeurs concernant les expulsions forcées s'impose au Kenya. L'un des problèmes les plus importants réside dans l'absence de règles procédurales relatives aux expulsions forcées et à la destruction d'habitations, ce qui est incompatible avec les normes des droits de l'homme. En conclusion, M. Kothari a invité la Commission des droits de l'homme à condamner fermement la pratique des expulsions forcées. Il a encouragé les États à soutenir la mise en œuvre du programme conjoint de l'ONU-Habitat et du Haut Commissariat aux droits de l'homme sur les droits en matière de logement.

Dans son rapport sur le logement convenable en tant qu'élément du droit à un niveau de vie suffisant (E/CN.4/2004/48 et Add.1 et 2), M. Kothari suggère notamment à la Commission d'organiser un séminaire d'experts chargés de mettre au point des directives claires à l'intention des États sur les expulsions forcées. De nouvelles normes, sous la forme de principes directeurs, sont en effet nécessaires pour appréhender globalement les mesures préventives et compensatrices qui doivent être prises pour mettre un terme aux expulsions forcées. Le Rapporteur spécial invite également la Commission à inscrire de manière plus explicite la question des expulsions forcées dans son mandat. Elle pourrait d'autre part demander au Haut-Commissaire aux droits de l’homme de mettre au point des indicateurs sur les expulsions forcées en se fondant sur les indicateurs existants au sein du Programme des Nations Unies sur le droit au logement, entre autres. La Commission pourrait également engager les États à adopter sur les expulsions forcées des politiques et des législations fondées sur les dispositions des instruments internationaux. Compte tenu de l'importance qu'il y a à protéger les femmes, le Rapporteur spécial estime que les lois et politiques doivent être réformées de manière à garantir une protection efficace des femmes contre les expulsions forcées; de la même manière, le Rapporteur spécial engage les États à veiller à ce que des mesures destinées à assurer l'égalité des sexes soient intégrées dans les programmes de réinstallation et de réinsertion, de façon à ce que les femmes ne se voient pas refuser l'accès aux avantages de ces programmes.

Dans l'additif 1 à son rapport, qui concerne sa mission au Pérou, le Rapporteur spécial constate que la situation du logement y est très grave. On estime à l’heure actuelle qu’il y a un déficit de 1,2 million d’unités de logement. Il faut, selon M. Kothari, axer davantage les politiques d’aide publique sur les couches les plus pauvres et adopter une plus grande flexibilité dans les programmes consacrés au logement. Il faut aussi renforcer bien davantage les droits des femmes en ce qui concerne la propriété foncière et le logement dans les politiques du logement. Il conviendrait également d’accorder une attention plus soutenue à d’autres groupes, tels que les enfants, les personnes handicapées et les populations autochtones. D’une manière générale, il est nécessaire de mieux intégrer les droits de l’homme dans les politiques nationales. Le Rapporteur spécial a également constaté que la Constitution ne reconnaît pas encore le droit à un logement convenable mais cette question fait actuellement l’objet d’un débat au Congrès. Le Rapporteur spécial se félicite par ailleurs d’un certain nombre de faits nouveaux positifs. Parmi ceux-ci, on peut citer l’invitation qui a été faite aux titulaires de mandat au titre des procédures spéciales de la Commission des droits de l’homme par le Gouvernement péruvien, ce qui atteste de son intérêt à trouver des solutions. Un autre point positif réside dans le fait que, dans les ministères avec lesquels il a été en contact, le Rapporteur spécial a constaté que des initiatives positives avaient été prises par des personnes résolues. Néanmoins, le Rapporteur spécial souligne qu’il convient de s’attaquer aux difficultés dans le secteur du logement au Pérou en adoptant une démarche fondée sur le caractère indivisible des droits de l’homme.
Les recommandations de l'additif 2 du rapport de M. Kothari, qui concerne sa mission en Afghanistan, portent sur les points suivants : élaboration d’une politique nationale globale du logement et de la propriété foncière; répartition claire des responsabilités au sein du Gouvernement et des institutions en ce qui concerne la prise de décisions, une attention particulière étant accordée aux besoins et aux droits des femmes et des groupes vulnérables; instauration d’un moratoire sur les expulsions forcées en attendant la définition d’une politique; mise en place de mécanismes appropriés pour contrôler la mise en oeuvre du droit à un logement convenable, par le biais, par exemple, du renforcement des capacités de la Commission afghane indépendante des droits de l’homme. Il est également recommandé que le Tribunal spécial chargé du règlement des différends fonciers récemment créé soit doté de ressources suffisantes, notamment en ce qui concerne sa capacité d’examiner les plaintes émanant de personnes vivant en zone rurale. Le Rapporteur spécial souligne en outre la nécessité de renforcer les capacités du Ministère des affaires féminines et du Fonds de développement des Nations Unies pour la femme (UNIFEM), et il engage le Gouvernement transitoire, en particulier, et la communauté internationale à adopter une stratégie d’ensemble commune pour garantir les droits et la satisfaction des besoins des femmes en matière de logement et de propriété foncière.


Déclarations concernant le rapport sur le logement convenable

S'exprimant en tant que pays directement concerné par le rapport de M. Kothari, M. PHILLIP RICHARD O. OWADE (Kenya) a souligné que son pays croyait fermement à l'interdépendance entre droits économiques, sociaux et culturels, d'une part, et droits civils et politiques, de l'autre, les premiers étant tout aussi importants que les seconds. Le nouveau Gouvernement kényen a donc lancé un programme d'éducation généralisée; il a également mis sur pied un système d'assurance maladie pour tous les Kényens. D'autre part, 60% des habitants de Nairobi vivant dans des bidonvilles, le Gouvernement a lancé une campagne de construction de logements à l'intention des classes moyennes, initiative qui devrait avoir des répercussions favorables sur l'ensemble du marché du logement. Les employeurs (État compris) sont en outre encouragés à fournir des logements à leurs employés. Le Gouvernement investit dans les logements à faible loyer; le niveau des hypothèques est par ailleurs en train de baisser, ce qui favorisera l'accession à la propriété, a précisé le représentant du Kenya.

Le représentant kényen a souligné que M. Kothari avait reconnu l'engagement du Gouvernement, lequel s'est notamment manifesté par la création du Ministère du logement et par la révision de la Constitution, qui reconnaît désormais le droit au logement. Il est regrettable, a poursuivi le représentant du Kenya, que la visite de M. Kothari, qui aurait pu donner lieu à une interaction positive, ait été compromise par les destructions d'habitations déplorées par le Rapporteur spécial au moment de son séjour. Il s'agissait là d'une circonstance exceptionnelle et d'une décision motivée par le fait que les personnes visées s'étaient installées illégalement sur des espaces publics affectés à une autre utilisation, a expliqué le représentant.

MME ELIANA BERAÚN ESCUDERO (Pérou), s'exprimant également en tant que pays concerné, a indiqué que la lutte contre la pauvreté et pour l'accès à un logement convenable est l'une des priorités de la politique nationale de son pays, comme en témoigne l'Accord national de juillet 2002. La visite de M. Kothari a permis de souligner la pertinence des droits économiques, sociaux et culturels comme facteur de cohésion nationale, a-t-elle souligné. Les conclusions et recommandations du Rapporteur spécial sont essentielles pour permettre aux autorités de renforcer leur stratégie dans le domaine du logement. La représentante péruvienne a jugé pertinent que le Rapporteur spécial mette en exergue le peu d'attention dont les zones rurales font l'objet. Elle s'est par ailleurs réjouie de la reconnaissance par le Rapporteur spécial des efforts déployés par le Pérou pour le renforcement institutionnel du secteur de l'habitat. La préoccupation exprimée par le Rapporteur spécial face à l'absence de mention du droit au logement dans la Constitution est partagé par le Gouvernement péruvien; ce droit sera consacré dans le cadre de la réforme de la Constitution réformée à laquelle le Congrès œuvre en ce moment, a indiqué la représentante.

Le Pérou est en outre en accord avec l'approche globale adoptée par M. Kothari qui met en relief l'interconnexion entre les différents droits, a précisé la représentante péruvienne. À cet égard, elle a mis l'accent sur les mesures prises par le Gouvernement péruvien visant notamment à améliorer l'accès à l'eau et à l'assainissement et accélérer le développement rural, tout en ciblant en priorité les groupes les plus vulnérables. En revanche, elle a exprimé son désaccord avec le Rapporteur spécial quant à son appréciation du programme d'officialisation des titres de propriété selon laquelle ceux-ci n'auraient pas offert les garanties nécessaires de sécurisation de la propriété. Pour le Pérou, la rigueur de ce processus permet de générer des droits de propriété juridiquement sûrs et durables. La représentante a par ailleurs mis l'accent sur le fait que les politiques nationales d'amélioration des conditions de vie sont élaborées avec la participation active de la société civile.

Au cours du dialogue interactif qui a suivi, MME MARY WHELAN (Irlande, au nom également de l’Union européenne) s'est demandée si les personnes qui sont victimes d'une atteinte à leur droit à un logement adéquat connaissaient bien l'étendue de leurs droits en la matière. L'éducation aux droits de l'homme n'a-t-elle pas un rôle important à jouer dans ce domaine, a-t-elle demandé?

M. MILOON KOTHARI, Rapporteur spécial sur le droit à un logement convenable, a souligné que l'Observation générale n° 7 du Comité des droits économiques, sociaux et culturels (sur le droit à un logement convenable et les expulsions forcées) pourrait constituer un fondement utile pour la politique mise en œuvre par le Gouvernement kényen. Il s'est félicité de la volonté du Gouvernement kényen d'envisager l'adoption de principes directeurs régissant les procédures d'expulsions forcées. Le Rapporteur spécial a par ailleurs souligné qu'au Pérou, il serait utile d'adopter des programmes de logement au bénéfice des secteurs les plus vulnérables de la population. Répondant à la question posée par la représentante de l'Irlande, il a reconnu qu'il y a des bonnes pratiques qui apparaissent en matière de droit à un logement convenable. Nous sommes en train de compiler ces bonnes pratiques, a-t-il précisé. Il a reconnu que beaucoup de personnes ne sont pas au courant de leurs droits dans ce domaine. Aussi, est-il important que les gouvernements mettent en place des programmes d'éducation aux droits de l'homme, a-t-il déclaré.


Présentation du rapport sur les déversements illicites de déchets toxiques

Présentant son rapport, MME FATMA-ZOHRA OUHACHI-VESELY, Rapporteuse spéciale sur les mouvements et déversements illicites de déchets toxiques, a indiqué que les deux visites qu'elle a effectuées au Royaume-Uni et en Turquie se sont bien déroulées; elle a pu y prendre la mesure des efforts normatifs accomplis pour lutter contre le trafic illicite, encore que ses constations se trouvent réduites du fait qu'elles sont basées que sur des textes en voie de révision et des projets en cours de discussion. En ce qui concerne le Royaume-Uni, la Rapporteuse spéciale appelle notamment le Gouvernement à interdire l'exportation de produits chimiques dont l'utilisation est interdite ou restreinte dans le pays; à renforcer l'action civile et pénale contre les contrevenants, en prêtant attention aux droits et intérêts des victimes; et à assurer davantage de transparence en matière de transport de déchets toxiques. L'additif 1 du rapport rapporte les incidents nouveaux et le suivi de cas déclarés. Treize nouveaux cas concernent la France, le Canada, les États-Unis, le Royaume-Uni, Israël, les Pays-Bas, en tant que pays présumés d'origine des déchets; la Turquie, la Chine, l'Éthiopie, le Nigéria, l'Inde et d'autres pays en développement étant les pays touchés, a précisé la Rapporteuse spéciale.

Mme Ouhachi-Vesely a déclaré qu'en l'absence de mesures sérieuses de réduction des déchets à la source, les mouvements transfrontières restent d'actualité et s'ils paraissent diminuer, c'est qu'ils adoptent des filières frauduleuses plus sophistiquées et changent de caractère à mesure qu'une forme est connue et dénoncée et enfin réglementée. Les produits électroniques obsolètes n’étant pas encore sur la sellette, on en profite pour les envoyer dans le Tiers-monde avec en plus la conscience de faire une bonne action car ils pourraient être réutilisés par de pauvres enfants qui pourront enfin s'offrir un portable, a expliqué la Rapporteuse. Quelques producteurs, ainsi que l'Union européenne, se sont engagés à assurer la récupération des portables, a-t-elle précisé. Mais qu'en est-il des ordinateurs hors d'usage qui seront aux États-Unis de l'ordre de 700 millions d'ici 2007, un écran d'ordinateur pouvant contenir jusqu'à 3,6 kg de plomb, s'est-elle interrogée?

Quant au démantèlement des navires, bien que de plus en plus réglementé, il continue de susciter de graves préoccupations, notamment en ce qui concerne la santé des travailleurs qui s'y consacrent, a ajouté Mme Ouhachi-Vesely. À cet égard, la suspension par les États-Unis du moratoire sur l'exportation décrété en 1998 suscite de graves préoccupations, a-t-elle déclaré. Quatre navires furent exportés en 2003 vers le Royaume-Uni, a-t-elle précisé. Les navires proposés à l'exportation seraient actuellement au nombre de 13 mais pourraient selon certaines estimations atteindre le chiffre de 162, a par ailleurs indiqué la Rapporteuse spéciale.

Quant aux pesticides et autres produits chimiques, ils constituent une autre source de grave préoccupation. Les produits chimiques et les pesticides, dont la consommation est estimée à 400 millions de tonnes par an et dont la production mondiale est le fait de 16 pays - majoritairement des pays de l'OCDE, causent 3 millions d'empoisonnements chaque année et 220 000 décès, 99% des cas se produisant dans les pays en voie de développement. Enfin, la Rapporteuse spéciale a souligné la persistance de plaintes sur l'attitude irresponsable et les pratiques illicites d'entreprises opérant dans les pays en développement et les difficultés de les traduire en justice. Ces pratiques illicites portent atteinte aux droits de l'homme comme le droit à la vie et à la santé; d'un autre côté, les violations de droits comme la liberté d'expression, de réunion, le droit à l'information favorisent les transferts illicites qui, à leur tour, suscitent d'autres violations des droits de l'homme. La Rapporteuse spéciale a donc demandé à la Commission de proroger son mandat.

Dans son rapport sur les conséquences néfastes des mouvements et déversements illicites de produits et déchets toxiques et nocifs pour la jouissance des droits de l'homme, (E/CN.4/2004/46 et add.1 à 3) Mme Ouhachi-Vesely souligne que la quantité de déchets qui font l'objet de mouvements transfrontières augmente, même si le nombre de cas signalés a diminué. La tendance générale est à l'augmentation constante des mouvements entre pays développés, en particulier entre les pays de l'Union européenne. Le rapport fait état d'une dynamique des transferts dangereux, les efforts déployés pour arrêter une forme de trafic donnant naissance à d'autres formes de trafic. Ainsi, les lois destinées à interdire l'élimination de déchets toxiques dans les pays en développement ont amené les sociétés à expédier des sous-produits vers les pays en développement à des fins de «recyclage». Selon le Secrétariat de la Convention de Bâle, insiste le rapport, la majeure partie des déchets exportés des pays industrialisés vers les pays en développement relève soit du «recyclage fictif», soit du «recyclage sale». La fluidité accrue des échanges sur le marché mondial actuel facilite les mouvements de déchets dangereux, poursuit le rapport. La criminalité environnementale est l'un des secteurs les plus rentables et les plus dynamiques de la criminalité internationale, souligne-t-il.

Au titre des nouvelles tendances, bon nombre d'entreprises de recyclage de déchets électroniques se servent du label «recyclage» pour exporter des produits hors d'usage. Des sources bien informées du secteur du recyclage estiment qu'entre 50 et 80% des déchets électroniques collectés aux fins de recyclage dans l'ouest des États-Unis ne sont pas recyclés dans ce pays mais au contraire rapidement chargés sur des porte-conteneurs à destination de l'Asie. S'agissant des pesticides et autres produits chimiques, le rapport indique que la consommation de produits chimiques industriels est montée en flèche au cours des dernières décennies pour atteindre environ 400 millions de tonnes par an. Le Ministère brésilien de la santé a estimé en 2000 que le pays avait connu 300 000 cas d'empoisonnement, dont 5 000 décès, imputables aux produits chimiques.

En ce qui concerne les sociétés transnationales, le rapport relève que, dans ce que d'aucuns considèrent comme un effort pour empêcher que ne soient prises des mesures juridiquement contraignantes visant à imposer aux sociétés une obligation de rendre des comptes, le secteur privé s'engage de plus en plus dans des initiatives volontaires destinées à renforcer le caractère citoyen des sociétés. C'est pourquoi la Rapporteuse se félicite de l'avancée importante qu'a constitué, dans le domaine du renforcement de la responsabilité internationale des entreprises privées, l'adoption par la Sous-Commission des normes sur la responsabilité en matière de droits de l'homme des sociétés transnationales et autres entreprises.

En conclusion, le rapport souligne que les pays de l'OCDE restent les principaux producteurs et exportateurs des déchets dangereux et produits toxiques. Les législations rigoureuses qu'ils ont adoptées ont induit un accroissement du coût du traitement et de l'élimination des déchets dans ces pays et ont engendré les mouvements transfrontières, initialement vers l'Afrique, puis vers l'Amérique latine, l'Asie du Sud et plus récemment vers les États baltes, la Russie, l'Ukraine, la Géorgie, la Slovénie, la Roumanie, la Pologne et l'Albanie.

L'additif 3 au rapport indique que la Rapporteuse «effectuera une mission en Turquie du 10 au 19 mars 2004» et présentera un rapport écrit à la prochaine session de la Commission.

L'additif 2 au rapport, qui traite de la mission de la Rapporteuse spéciale au Royaume-Uni, n’était pas encore disponible.


Déclarations concernant le rapport sur les déchets toxiques

M. TÜRKEKUL KURTTEKIN (Turquie), s'exprimant en tant que pays concerné, s'est félicité de la visite dans son pays de la Rapporteuse spéciale, qui témoigne de la politique de coopération de la Turquie avec les mécanismes des Nations Unies. Il s'est dit conscient du fait que vivre dans un environnement sain et propre constitue un élément important des droits de l'homme. En tant que pays de transit, la Turquie souffre du transport illicite de matières dangereuses et tente de trouver des solutions avec les pays d'origine ainsi qu'avec le Secrétariat de la Convention de Bâle, a-t-il déclaré. Il a souligné que, durant la visite de Mme Ouhachi-Vésely, différents aspects ont été évoqués dont il espère qu'ils seront reflétés dans le rapport à venir, lequel fera l'objet de plus amples commentaires de la part de la Turquie une fois qu'il aura été publié.

M. NICHOLAS THORNE (Royaume-Uni), s'exprimant en tant que pays concerné, a remercié la Rapporteuse spéciale et s'est dit heureux d'avoir pu l'accueillir. Le Royaume Uni consent toujours aux visites des rapporteurs spéciaux et s'est acquitté de ses obligations en informant la Rapporteuse spéciale des lois et pratiques britanniques se rapportant aux déchets toxiques. Le représentant britannique a indiqué qu'il examinerait de près les directives ainsi que les suggestions concernant l'élaboration de nouveaux textes, en particulier en ce qui concerne la protection des citoyens contre les déchets dangereux. Le Royaume-Uni se félicite des suggestions relatives à la participation de la société civile à la prise de décision. Le représentant britannique s'est toutefois dit préoccupé par le fait que les mouvements illicites de produits et déchets toxiques soient abordés dans le cadre de la Commission plutôt que dans une enceinte environnementale, dont la compétence serait plus appropriée.

Au cours du dialogue interactif qui a suivi la présentation du rapport de Mme Ouhachi-Vésely, M. PHILLIP RICHARD O. OWADE (Kenya) s'est félicité de l'appel lancé par la Rapporteuse spéciale aux États afin qu'ils adhèrent aux instruments internationaux sur les mouvements de déchets dangereux et qu'ils adoptent des législations nationales visant à interdire le transport illicite de substances toxiques. Il a espéré que la Commission adoptera une résolution forte dans ce sens.

MME CLAUDIA PÉREZ ÁLVAREZ (Cuba) a apporté le plein appui de son pays aux recommandations de Mme Ouhachi-Vésely, en particulier en ce qui concerne l'organisation de séminaires de formation. Elle a souhaité savoir quels moyens ou mécanismes seraient les plus efficaces pour faire appliquer par les sociétés transnationales les normes en matière de droits de l'homme.

Répondant à ces interventions, MME OUHACHI-VESELY s'est dite heureuse que le Royaume-Uni soit disposé à examiner ses recommandations. Elle s'est également félicitée de l'accueil qui lui a été réservé en Turquie et a pris bonne note des problèmes qui lui ont été soumis lors de sa visite. Elle a rappelé que son mandat était complexe et qu'elle a dû faire face à de nombreuses difficultés; mais elle a insisté sur la nécessité de continuer à se concentrer sur les aspects environnementaux qui affectent les droits de l'homme. Il importe à cet égard d'élaborer un code de bonne conduite obligatoire pour les sociétés transnationales, a-t-elle affirmé. Elle a également insisté sur la nécessité de parfaire l'assistance et l'indemnisation des victimes de violations des droits économiques, sociaux et culturels. Elle a regretté de n'avoir pu se rendre en Asie-Pacifique, où aucun pays n'a répondu à ses demandes d'invitation. En conclusion, indiquant qu'elle a tenté de remplir son mandat en toute objectivité, elle a établi une distinction entre objectivité et neutralité, insistant sur la nécessité d'être objectif mais l'impossibilité d'être neutre quand on est résolument engagé en faveur des droits de l'homme.


Débat sur les droits économiques, sociaux et culturels

M. SHAUKAT UMER (Pakistan) a déclaré que le sous-développement n'est pas seulement le résultat de la mauvaise gouvernance. Il s'agit d'un problème multidimensionnel qui doit être traité par une amélioration du contexte social, économique et politique. Les injustices historiques ont certes contribué à la pauvreté actuelle, mais il reste à démontrer que la mondialisation sera la solution à ces maux. Le Pakistan quant à lui a récemment augmenté les budgets consacrés au secteur social et s'apprête à signer le Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels, entre autres mesures nationales pour réduire la fracture sociale. Le Pakistan croit d'autre part que les États ont le devoir de coopérer en matière de réalisation des droits liés au développement. Cependant, un déficit démocratique au niveau mondial constitue un obstacle majeur. La Commission devrait faire preuve, dans ses délibérations, d'honnêteté intellectuelle fondée sur une approche de la mondialisation centrée sur l'humain. Elle doit reconnaître que la bonne gouvernance de la mondialisation garantit la participation de tous les pays aux décisions économiques et rechercher des moyens innovants de générer les ressources nécessaires au développement, comme par exemple l'annulation des dettes sociales pour répondre aux attentes des pays en développement et de leurs partenaires des pays industrialisés.

M. HARDEEP SINGH PURI (Inde) a fait remarquer que la réalisation concrète des droits économiques, sociaux et culturels est étroitement liée au niveau de développement économique d'un pays. Les États ont le devoir d'adopter des politiques économiques visant à améliorer le bien être de leurs populations. L'Inde espère doubler le revenu par habitant en dix ans. Si la mondialisation est un phénomène porteur de croissance économique pour tous les pays du monde, elle est aussi un facteur d'accroissement de la vulnérabilité et de l'insécurité. Aussi, les institutions multilatérales ont-elles un rôle important à jouer pour minimiser les effets négatifs de la mondialisation. À cet égard, le représentant a dit avoir pris note avec intérêt du rapport du Haut-Commissariat aux droits de l'homme sur le principe de non-discrimination dans le contexte de la mondialisation. Nous devons nous demander si les institutions multilatérales opérant dans le domaine du commerce favorisent suffisamment le développement humain. Le représentant a affirmé que la pleine réalisation des droits économiques dépend en grande partie de la coopération internationale. L'allocation de ressources suffisantes pour le développement et la création d'un environnement économique favorisant leur participation relèvent de la responsabilité conjointe des États et de la communauté internationale. Enfin, le représentant indien a émis des réserves quant à l'opportunité de créer un mécanisme de plainte individuelle devant le Comité des droits économiques, sociaux et culturels.

M. VOLODYMYR BELASHOV (Ukraine) a estimé que l'absence de droits sociaux et économiques est étroitement liée à la pauvreté. Le manque de droits politiques et de libertés est à la fois une cause et une conséquence de la pauvreté. La plupart des droits contenus dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels doivent être réalisés progressivement par les États, ce qui signifie que ces derniers doivent placer le bien-être économique et social et l'accès à l'alimentation, à la santé et à l'éducation en tête de leurs priorités nationales et éviter qu'un abîme se creuse entre les plus riches et les plus pauvres. Le Gouvernement de l'Ukraine considère la prévention de la pauvreté comme un de ses objectifs prioritaires. Un programme a été élaboré dans ce sens qui inclut la garantie des droits constitutionnels des citoyens à travers un système de normes nationales minimales, la motivation à l'efficacité du travail, des activités de création d'entreprise et l'augmentation du niveau de revenus des citoyens. L'Ukraine poursuit son développement et son processus de réforme du travail, de l'emploi et de la législation sociale tout en faisant de son mieux pour minimiser l'impact social de ces transformations et maintenir la stabilité économique. En dépit de ces efforts, l'Ukraine fait face à de grandes difficultés dans son processus de développement social et subit encore les conséquences aggravantes de Tchernobyl qui absorbent des millions de dollars chaque année. Un autre problème urgent pour l'Ukraine est le rapatriement des victimes de la répression stalinienne et en particulier des Tatars de Crimée. Mais un des problèmes majeurs de l'Ukraine reste le chômage, a rappelé M. Belashov, qui a souligné l'importance de soutenir et d'éliminer les obstacles à la participation des pays en transition à l'économie mondialisée. Il a également souligné le rôle clé de l'éducation pour favoriser le développement économique et social, la paix, la stabilité et la démocratie.

M. ELSADIG ALMAGLY (Soudan) a déclaré que son pays respectait pleinement les dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. C'est pourquoi des mesures ont été prises pour améliorer la santé publique et favoriser l'éducation. Le développement des zones rurales et l'amélioration des conditions de vie des paysans sont aussi des cibles prioritaires du gouvernement. La santé n'est pas considérée au Soudan comme un secteur commercial, mais bien social et prioritaire: des services de santé de base et de conseils nutritionnels sont offerts aux femmes et aux enfants, de même que des programmes de formation à la diététique élémentaire des enfants, notamment. Quant au programme d'action contre le paludisme, il a notamment permis la distribution généralisée et gratuite de matériel de protection contre ses vecteurs. Les femmes enceintes se sont vu offrir des prestations de congé-maternité. La distribution d'eau potable à l'ensemble du pays, toutes régions confondues, est quant à elle au centre de toute la politique de développement. Le Gouvernement du Soudan garantit d'autre part le respect de la propriété privée, a enfin fait valoir son représentant.

M. SERGIO CERDA (Argentine, au nom des pays membres du Groupe des pays d'Amérique latine et des Caraïbes - GRULAC) s'est réjoui de l'accord obtenu à la suite à d'intenses négociations dans le but d'établir le Groupe de travail sur l'élaboration d'un protocole facultatif au Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels. Il importe, a affirmé le représentant, de donner à ce processus toute son efficacité. À cette fin, le Groupe de travail devrait analyser toutes les options relatives à l'élaboration du protocole en entendant les contributions des gouvernements, des représentants d'organisations non gouvernementales et également des membres du Comité des droits économiques, sociaux et culturels. Il conviendrait par ailleurs de fixer une date butoir aux travaux du Groupe afin qu'il puisse accomplir son mandat de façon appropriée. C'est seulement en agissant de la sorte que nous nous donnerons les moyens de réduire les déséquilibres qui continuent d'exister entre les différentes catégories de droits de l'homme, qui sont interdépendants. Maintenir la situation actuelle équivaut à récuser le caractère indivisible des droits de l'homme et donne le sentiment que les droits économiques, sociaux et culturels ne constitueraient pas des aspirations légitimes, au même titre que les droits civils et politiques.

M. MOHAMED YAHYA OULD SIDI HAIBA (Mauritanie) a estimé que chercher à promouvoir et protéger les droits économiques, sociaux et culturels passe nécessairement par une perspective active visant à réduire, voire éliminer, la pauvreté. Le Gouvernement mauritanien s'est résolument engagé dans une dynamique de rénovation politique, économique, sociale et culturelle de grande envergure qui a favorisé l'émergence d'un contexte positif et permis de créer des conditions favorables à l'épanouissement des personnes ainsi qu'au développement global de la société. Les politiques de développement intègrent la dimension économique et sociale dans la perspective générale de promotion des droits de l'homme. C'est ainsi que le bien-être social est considéré comme la finalité de toute l'action gouvernementale et de tout le processus de développement. Les efforts déployés par le Gouvernement ont visé la satisfaction des besoins fondamentaux, en particulier ceux liés à l'éducation, à la santé, au travail, à la sécurité alimentaire et à l'habitat et ont permis une amélioration substantielle dans de multiples domaines, a fait valoir le représentant, chiffres à l'appui. Soulignant que le défi est important et que la lutte exige davantage d'efforts, le représentant mauritanien a affirmé l'engagement de son pays dans le développement d'un partenariat international seul susceptible de concrétiser les droits économiques, sociaux et culturels. Bénéficiaire de l'Initiative en faveur des pays pauvres très endettés, la Mauritanie estime, à l'instar du Rapporteur spécial sur les politiques d'ajustement structurel et la dette extérieure, qu'elle doit être renforcée par d'autres actions et initiatives en faveur du développement. C'est à ce prix seulement que les Objectifs du millénaire pour le développement seront atteints et que les déséquilibres structurels qui caractérisent le monde et empêchent des centaines de millions d'êtres humains de tirer parti des avantages de la mondialisation, pourront être corrigés.

M. LESLIE GUMBI (Afrique du Sud) a déclaré que toutes les actions de son gouvernement en matière d'éradication de la pauvreté sont fondées sur la ferme conviction que les droits économiques, sociaux et culturels ne doivent pas être traités différemment des droits civils et politiques. Pour l'Afrique du Sud, ces deux séries de droits sont intimement liés. De même, la communauté internationale doit être convaincue que ce ne sont pas seulement les États signataires des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme qui ont l'obligation de faire progresser les droits économiques, sociaux et culturels. La communauté internationale doit créer un environnement favorable à la réalisation du droit au développement et des Objectifs du millénaire pour le développement. Le représentant sud-africain s'est inquiété du manque apparent de consensus, au sein de la Commission, sur le protocole optionnel au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Il a également cité comme motif d'inquiétude le manque de soutien, au niveau international, en faveur du Nouveau partenariat pour le développement économique de l'Afrique (NEPAD).

M. GYAN CHANDRA ACHARYA (Népal) a estimé que les déclarations d'intention sur la pleine réalisation des droits économiques, sociaux et culturels ne sont pas suffisantes. Les efforts déployés au niveau national par les pays en développement devraient être appuyés par des actions résolues des pays industrialisés et des institutions financières internationales sur deux points principaux : allègement de la dette et respect des engagements pris en matière d'aide au développement. Le représentant a par ailleurs souligné les efforts déployés par son pays pour promouvoir les droits économiques, sociaux et culturels. Le Plan national de réduction de la pauvreté constitue le pilier de l'action menée dans ce domaine. Comme l'éducation est l'élément clé de toute action efficace en matière de réduction de la pauvreté, le Népal s'efforce d'augmenter le taux de scolarisation des enfants. Le Népal n'épargne aucun effort pour promouvoir les droits économiques de ses habitants mais en appelle à la coopération et à la solidarité internationales pour que son action soit couronnée de succès.

M. SONAM T. RABGYE (Bhoutan) a souligné les succès notables de son pays dans les secteurs économiques et sociaux au cours des deux dernières décennies, grâce essentiellement au fort engagement du Gouvernement en faveur du développement et grâce à des investissements importants dans le secteur social. Le Bhoutan se trouve ainsi très proche des Objectifs du millénaire pour le développement. En dépit des difficultés liées à un environnement montagneux, le Gouvernement a établi des services sociaux de façon équitable et uniforme dans tout le pays et les services de santé ainsi que l'éducation sont fournis gratuitement à toute la population. L'extrême pauvreté a été éliminée et le Gouvernement se concentre sur le développement d'infrastructures dans les zones rurales isolées afin de lutter contre la pauvreté des plus vulnérables dans les zones les plus isolées. Toutefois, le Bhoutan reste un des pays parmi les moins avancés et est menacé de voir ses valeurs traditionnelles balayées par les forces de la mondialisation.

M. ZOHRAB MNATSAKANIAN (Arménie) a indiqué que son pays avait adopté un plan de réduction de la pauvreté destiné à améliorer les conditions socio-économiques à travers le redressement de l'économie et un renforcement de la gouvernance. Les droits économiques, sociaux et culturels ne doivent certes pas seulement servir à fixer les directions politiques. Cependant, il faut faire une distinction claire entre ces droits et les droits civils et politiques. Quoi qu'il en soit, l'Arménie, qui a déjà réfléchi à l'importance d'une stratégie de croissance favorable aux pauvres, insiste sur la corrélation directe entre éradication de la pauvreté et bonne gouvernance. De la même manière, l'Arménie a beaucoup progressé ces dernières années en matière de formation aux droits de l'homme, dans le primaire, par exemple, où un manuel spécifique a été introduit. La question du financement des écoles reste une préoccupation du Gouvernement, qui espère parvenir, en 2006, à consacrer 3,1% de son produit national brut à ce poste.

M. ALI-HOUSSAIN ALI (Iraq) a affirmé que les Iraquiens ont été privés pendant plus d'un quart de siècle de leurs droits économiques, sociaux et culturels les plus élémentaires. Longtemps, la plus grande partie du budget du pays a été consacrée à l'armement, plongeant le pays dans un grand état de pauvreté. Nous avons connu une grande corruption administrative, la société civile s'est trouvée effondrée et l'analphabétisme a atteint le taux record de 60%. Le régime de Saddam Hussein a par ailleurs privé les minorités du pays de leurs droits culturels. Le taux de chômage est aujourd'hui en baisse. Le Conseil de Gouvernement espère que la croissance pourra revenir en Iraq et que la reconstruction lui permettra de mieux assurer la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels de la population.

M. LAZHAR SOUALEM (Algérie) a relevé que la situation des populations en matière d'accès aux droits économiques, sociaux et culturels ne s'est pas améliorée, rapportée aux bénéfices tirés de la mondialisation par les tenants de l'ordre économique international. Il a notamment insisté sur le fait que le travail des enfants ne peut être combattu que par un enseignement obligatoire et gratuit. Il a en outre souligné que la notion de droit implique immanquablement sa justiciabilité et a appelé de ses vœux l'élaboration d'un protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels sur l'examen de plaintes. Reconnaissant que la question des ressources est un handicap pour certains pays, il a fait valoir que l'invoquer en toute occasion est une preuve d'inaction et de négligence. Il a par ailleurs estimé que la quête du dialogue interculturel doit reposer sur la capacité de s'exprimer, la capacité d'écouter et la capacité de comprendre l'autre. Les droits culturels doivent être un facteur de rassemblement des pluralités et le vecteur d'un rapprochement entre les composantes de la société humaine.

M. HENRI-PAUL NORMANDIN (Canada) a déclaré que le VIH/sida, la tuberculose, le paludisme et d'autres épidémies constituent une tragédie qui menace aussi la stabilité politique, économique et sociale des sociétés. Ces épidémies ralentissent la réalisation des Objectifs de développement du millénaire et compromettent la réalisation progressive du droit qu'a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible. Un élément essentiel à ce titre est l'accessibilité des médicaments par ceux qui en ont besoin ( y compris pour le traitement du sida); il s'agit d'un facteur essentiel pour la réalisation des droits de l'homme. Le Canada accueille donc favorablement la décision prise par l'Organisation mondiale du commerce en matière de santé publique et s’agissant des aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce. Il faut veiller à donner un caractère mondial aux efforts visant à répondre aux besoins en matière de santé publique dans les pays en développement, a conclu le représentant du Canada.

MME JENIFER ROWE (Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge) a exprimé sa volonté de travailler de pair avec les gouvernements et les organisations internationales pour parachever la pleine réalisation des droits économiques, sociaux et culturels et s'assurer que la satisfaction des besoins des plus vulnérables figure en bonne place des agendas politiques nationaux et internationaux. Nous pensons, a affirmé la représentante, que nous devons nous engager encore davantage dans la définition et la mise en œuvre des services destinés à ces catégories de population. Selon la représentante, la politisation du débat sur la place des droits économiques, sociaux et culturels dans la hiérarchie des droits de l'homme a malheureusement porté atteinte à ces droits. La Fédération se tient prête à accorder tout son concours à la pleine réalisation des engagements du millénaire.

M. NÉSTOR CRUZ TORUÑO (Nicaragua) s'est félicité que l’attention ait été attirée sur l'affaiblissement des capacités des pays très endettés. Il a indiqué que son gouvernement prend des mesures pour remédier à cet état de choses et pour promouvoir les services sociaux de base. Ainsi, le Gouvernement du Nicaragua a-t-il pris des mesures pour améliorer l'accès à la santé ainsi que pour améliorer les indicateurs principaux tels que la mortalité infantile et la prévention de maladies qui peuvent être soignées. Il a en outre mis l'accent sur l'action entreprise pour lutter contre le VIH/sida avec la participation de la société civile et d'institutions d'État.

MME BLANCANIEVE PORTOCARRERO (Venezuela) a souligné que l'État vénézuélien protégeait les créateurs de valeurs culturelles, de même qu'il garantit la diffusion de leurs œuvres, dans le cadre du respect de la propriété intellectuelle. L'État soutient également le secteur productif respectueux de la justice sociale, de la démocratie et de la protection de l'environnement. L'État bolivarien du Venezuela favorise par ailleurs les consultations ouvertes pour la redistribution de la richesse nationale. La représentante a notamment fait valoir que les autorités ont lancé un programme de micro-financement qui permet de répondre aux besoins locaux de financement. Le Venezuela accorde la plus grande importance à la protection du droit de la famille, du droit à la santé, du droit au travail, du droit à la propriété privée et du droit d'association, a assuré la représentante.

MME MIRIAM MALUWA (Programme commun coparrainé des Nations Unies sur le VIH/sida - ONUSIDA) a souligné les effets néfastes de la pandémie du VIH/sida sur le développement, soulignant que l'Afrique sub-saharienne reste la région la plus affectée. Cette pandémie détruit les tissus économiques et sociaux de pays entiers. En outre, les malades du sida sont soumis à la discrimination et se voient privés de leurs droits économiques, sociaux et culturels essentiels. Les traitements ne sont accessibles qu'à une minorité. L'ONUSIDA préconise la constitution de partenariats aux plans régional, national et international pour mieux lutter contre la maladie. La représentante a enfin salué les campagnes mises en œuvre contre la stigmatisation et la discrimination liée à la maladie en Afrique et en Asie.

M. TALMEES AL-AJMI (Koweït) a souligné toute l'importance du rapport de M. Jean Ziegler sur le droit à l'alimentation dans les territoires palestiniens occupés où il constate que les violations du droit à l'alimentation sont causées par l'occupation. Des appels ont été lancés pour que cessent l'occupation israélienne et les mesures de sécurité extrêmement dures imposées à la population palestinienne. Il a souligné sa préoccupation face à la pauvreté dans les territoires occupés et a mis l'accent sur la nécessité pour Israël de prendre des mesures pour mettre fin à la crise humanitaire et respecter ses obligations en vertu du droit international.


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