Skip to main content

Communiqués de presse Commission des droits de l'homme

LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTAME SON DÉBAT SUR LES QUESTIONS RELATIVES AUX POPULATIONS AUTOCHTONES

12 Avril 2001



Commission des droits de l'homme
57ème session
12 avril 2001
Soir et nuit




Elle achève en outre son débat sur les groupes et individus particuliers


La Commission des droits de l'homme a entamé, ce soir, au cours d'une séance qui s'est prolongée jusqu'à minuit, l'examen des questions relatives aux populations autochtones. Elle a par ailleurs achevé son débat sur les groupes et individus particuliers en entendant les déclarations de plus d'une trentaine d'organisations non gouvernementales.

S'agissant des populations autochtones, la Commission a notamment entendu M. Luis Enrique Chávez, Président-Rapporteur du Groupe de travail chargé d'élaborer un projet de déclaration sur les droits des populations autochtones. Il a affirmé que les débats qui ont eu lieu lors de la dernière session du Groupe de travail se sont déroulés dans un véritable climat de dialogue qui a permis d'examiner six nouveaux articles du projet de déclaration.

Les activités du Fonds de contributions volontaires pour les populations autochtones et du Groupe consultatif du Fonds de contributions volontaires pour la Décennie internationale des populations autochtones ont été présentées par Mme Tove Petersen, qui est membre de ces deux organes. Elle a notamment lancé un appel à de nouvelles contributions pour 2002, indiquant qu'un montant d'environ 724 000 dollars serait nécessaire pour le premier fonds et d'environ 550 000 dollars pour le second.

Plusieurs ONG ont préconisé la nomination d'un rapporteur spécial sur les droits des populations autochtones, apportant ainsi leur soutien au projet de résolution que le Guatemala et le Mexique présenteront cette année à cet effet. Certaines ont déploré la polarisation, en deux blocs opposés, des points de vue au sein du Groupe de travail chargé d'élaborer un projet de déclaration sur les droits des peuples autochtones. Il a notamment été estimé que la question de l'autodétermination constituerait la principale pierre d'achoppement des négociations au sein du Groupe de travail.

Ont pris la parole les représentants de l'Estonie, de la Suisse et de Chypre, ainsi que le représentant de la Banque mondiale et les représentants des organisations non gouvernementales suivantes : Mouvement indien «Tupaj Amaru»; Université spirituelle des Brahma-Kumaris; Fédération internationale des mouvements d'adultes ruraux catholiques; Interfaith International;Indian Council of South America; Groupe pour la solidarité internationale; Aboriginal and Torres Strait Islander Commission; Organisation néerlandaise pour la coopération internationale au développement; Association latino_américaine pour les droits de l'homme; Franciscain international; Franciscain international; Conseil international de traités indiens; Conférence circumpolaire inuit; Saami Council; Asociación Napguana; Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples et Indigenous World Association.

S'agissant des groupes et individus particuliers, la plupart des organisations non gouvernementales qui sont intervenues ont attiré l'attention sur les violations de droits de l'homme dont sont victimes nombre de minorités à travers le monde. L'accent a également été mis sur la situation dramatique que subissent des millions de personnes déplacées. S'agissant des travailleurs migrants, plusieurs ONG ont insisté sur la nécessité d'assurer une protection adéquate de leurs droits dans les pays d'accueil, tout en luttant contre les réseaux de trafic et les mafias qui profitent de leur détresse. La nécessité de prendre des mesures visant à promouvoir le développement et à améliorer la situation socio_économique dans les pays d'origine a été soulignée comme constituant un moyen efficace de retenir chez eux les candidats à l'émigration. À cet effet, la coopération internationale s'avère indispensable.

La Commission a entendu dans ce cadre les représentants des ONG suivantes: Société anti-esclavagiste; Conseil canadien des églises; Organisation de solidarité des peuples d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine; Asian Legal Resource Centre; Conférence asiatique des bouddhistes pour la paix; Fédération des associations pour la défense et la promotion des droits de l'homme; Groupe pour la solidarité internationale; Fédération mondiale de la jeunesse démocratique; France Libertés : Fondation Danielle Mitterrand; Aids Information Switzerland; International Work Group for Indigenous Affairs; Institut catholique pour les relations internationales; All for Reparations and Emancipation; Indian Council of Education; Fédération internationale de journalistes libres; International Federation for the Protection of the Rights of Ethnic, Religious, Linguistic and Other Minorities; Pax Romana; South Asia Human Rights Documentation Centre; Société chinoise d'études des droits de l'homme; Union internationale des Roms; Fédération syndicale mondiale; Organisation néerlandaise pour la coopération internationale au développement; Australian Council for Overseas Aid; Commission colombienne de juristes; Association latino_américaine pour les droits de l'homme; Conférence générale des adventistes du septième jour; International Worldview Foundation; Fédération internationale d'Helsinki pour les droits de l'homme; Comité d'action pour les droits de l'enfant et de la femme; Aliran Kesedaran Negara - National Consciousness Movement; Islamic Women's Institute of Iran; Franciscain international; Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté; et Médecins du Monde et Commission africaine des promoteurs de la santé et des droits de l'homme.

La Fédération de Russie et la Thaïlande ont exercé leur droit de réponse.

La Commission reprendra ses travaux en séance publique mardi 17 avril, à 10 heures, afin de poursuivre l'examen des questions relatives aux populations autochtones.



Suite du débat sur les travailleurs migrants, les minorités, les personnes déplacées et autres groupes vulnérables

MME CHRISTIANE DEHOY (Société anti-esclavagiste) a attiré l'attention de la Commission sur la situation des apatrides, en particulier en Asie. Elle a évoqué le cas des musulmans Rohingya de Birmanie qui sont privés de leur citoyenneté depuis 1982 et soumis à des travaux forcés, des déplacements forcés, le viol et autres sévices de la part des militaires. Du fait de l'absence de statut légal, ils souffrent de restrictions à leur liberté de mouvement et cela affecte directement leur situation économique. La représentante a également évoqué la situation des migrants birmans sans papiers en détention notamment en Thaïlande ou au Bangladesh. Elle a demandé que la Commission et le nouveau Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar prennent cette question en considération. Elle demande également que la Commission s'occupe de la question des travailleurs migrants en détention et qu'elle recommande l'inscription de la question des apatrides à l'ordre du jour de la Conférence mondiale sur le racisme.

M. TIMOTHY WICHERT (Conseil canadien des églises) a attiré l'attention de la Commission sur la situation des réfugiés et des requérants d'asile dont le droit à la vie et les libertés fondamentales sont menacés à maints égards à travers le monde. Il a demandé à la Commission d'adopter une nouvelle résolution qui se concentrerait sur la surveillance et la promotion des droits de l'homme de ces personnes. La situation des travailleurs migrants mérite de recevoir une plus grande attention de la part de la communauté internationale dans la mesure où, chaque année, des millions d'individus franchissent les frontières à la recherche de meilleures conditions de vie et d'une plus grande sécurité pour eux et pour les membres de leurs familles. Le Conseil canadien des églises est préoccupé par le fait que la communauté internationale s'intéresse uniquement au cadre juridique de la lutte contre le trafic des personnes sans sembler se soucier de la protection des victimes. Le problème n'est pas simplement une question d'ordre publique consistant à punir ceux qui se livrent à de tels trafics. D'ailleurs, tous les migrants ne sont pas victimes d'un trafic. Il ne faut donc pas oublier de se pencher sur la question des droits des migrants victimes ou non de tels trafics. Dans ce contexte, il est choquant que la Convention sur les droits des migrants et de leurs familles ne soit toujours pas entrée en vigueur.

M. CIPRIANO CASTRO SAEZ (Organisation de solidarité des peuples d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine) a déploré la sélectivité des politiques migratoires des pays développés. Les motivations principales des mouvements migratoires doivent être recherchées dans le niveau de pauvreté qui atteint des niveaux sans précédent, sans compter le nombre important de réfugiés suite à des conflits armés. Il est important que les nations industrielles s'interrogent sur la façon de résoudre les mouvements migratoires. Mettre des murs autour de leurs frontières ne réduira en rien le phénomène mais contribuera à accroître le niveau de vulnérabilité des migrants. Aucun État ne doit être autorisé à maltraiter ou à réserver un traitement discriminatoire à l'égard des migrants. Le représentant a évoqué les difficultés auxquelles sont confrontés les migrants d'origine sud_américaine aux États-Unis. Les lois de ce pays visent à décourager les mouvements migratoires. Pourtant, certains groupes sont privilégiés comme les Cubains. Il est nécessaire de garantir aux travailleurs migrants leurs droits économiques, sociaux et culturels.

MME ESTER INDAHYANI JUSUF (Asian Legal Resource Centre) a indiqué que les nombreux problèmes concernant les minorités ethniques et religieuses, la ségrégation politique et la xénophobie en Indonésie perdurent. À cet égard, elle a indiqué que 62 lois discriminatoires sont toujours en vigueur, la plupart visant les Chinois. Elle a en particulier dénoncé les règlements discriminatoires qui leur ont dérobé leur citoyenneté, précisant que cette disposition affecte quelques 98 000 Chinois. Elle a demandé que la Haut_Commissaire aux droits de l'homme exhorte le Gouvernement indonésien à pleinement ratifier la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination et à mettre en oeuvre des législations antidiscriminatoires. Elle a aussi exhorté le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme à enquêter sur les émeutes de mai 1998 et d'autres émeutes raciales en Indonésie.

M. MOHAMMAD AHSAN (Conférence asiatique des bouddhistes pour la paix) a attiré l'attention de la Commission sur la situation des Mohajirs et des Sindhis du Sindh qui, avec les Balouches et les Pachtounes du Baloutchistan, sont victimes au Pakistan de persécutions de la part du groupe majoritaire au pouvoir, à savoir l'oligarchie du Pendjab. La Commission devrait prendre des mesures visant à encourager le gouvernement militaire du Pakistan à rétablir une véritable démocratie dans ce pays et à empêcher toute ingérence des services secrets de l'État (en particulier l'ISI) dans les partis politiques et la gestion des affaires publiques. Il faudrait que soit entrepris au Pakistan un nouveau recensement sous la supervision d'observateurs internationaux afin de déterminer le nombre exact de membres de toutes les nations et de tous les groupes dans le pays.

M. MIKEL MANCISIDOR (Fédération des associations pour la défense et la promotion des droits de l'homme) a évoqué la réforme de la loi sur les étrangers qui est entrée en vigueur le 23 janvier dernier et qui a conduit à un durcissement des conditions de vie des travailleurs migrants en Espagne. Le représentant a déploré le fait que la nouvelle loi prévoie des mécanismes facilitant l'expulsion des personnes qui se trouvent sur le territoire espagnol de façon illégale. Le rapatriement des personnes en situation illégale est également prévu dans d'autres instruments juridiques. Le représentant a dénoncé le caractère arbitraire du rapatriement des migrants et les abus de l'administration espagnole. Il a demandé à la Commission de prier le Gouvernement espagnol d'agir en conformité avec tous les instruments internationaux des droits de l'homme.

M. OM GURUNG (Groupe pour la solidarité internationale) a dénoncé la grave discrimination raciale et le traitement inégal dont sont victimes les soldats Gurkhas, d'origine népalaise, de la part du Gouvernement britannique. Les Gurkhas demandent des pensions pour ceux qui ont été victimes de réductions d'effectifs et ont été renvoyés chez eux sans pension; que les pensions des soldats gurkhas soient équivalentes à celles des soldats britanniques à rang et ancienneté égaux; qu'une aide soit accordée à la création d'institutions d'éducation et de formation pour les enfants des Gurkhas et que les Gurkhas se voient attribuer un permis de travail au Royaume-Uni après leur retraite. Le Gouvernement britannique a refusé de répondre à ces demandes; a indiqué le représentant, qui a demandé à la Commission d'enquêter sur cette question et mettre un terme aux pratiques discriminatoires contre les Gurkha et leurs familles.

M. MEHRAN BALUCH (Fédération mondiale de la jeunesse démocratique) a attiré l'attention de la Commission sur la situation du peuple du Baloutchistan qui, à la suite de l'invasion de ce territoire par l'armée coloniale du Pakistan dès 1947, a été réduit à l'état d'esclave dans son propre pays. En raison de ses richesses naturelles et minérales, le Baloutchistan est une région qui revêt une importance stratégique. Le représentant a par ailleurs dénoncé la «talibanisation» du Baloutchistan par les services secrets pakistanais de l'ISI. Il a fait observer que les autorités pakistanaises ont toujours recouru à la solution militaire pour réaliser leurs objectifs au Baloutchistan et dans les centres urbains du Sindh.

M. GUILLAUME BONDI (France Libertés : Fondation Danielle Mitterrand) a attiré l'attention de la Commission sur le problème du déplacement et de l'expulsion de la population kurde de la zone pétrolifère de l'Irak. Il a déclaré que la politique d'expulsion, de déplacement et d'arabisation de la zone pétrolifère habitée par les Kurdes est poursuivie sans relâche par les autorités iraquiennes. Les témoignages font état de la violation flagrante des droits de la population kurde. Le représentant a déploré qu'aucune mesure de protection internationale n'ait été prise afin de venir en aide à cette population chassée de sa terre natale. France Libertés demande à la Commission des droits de l'homme de prendre des mesures nécessaires afin de protéger la population kurde de la zone pétrolifère en Irak, et de mettre un terme à la violation de ses droits les plus élémentaires, à savoir le droit de vivre librement sur son propre territoire. Attirant l'attention également sur la situation des Kurdes de Turquie, France Libertés demande à la Commission d'intervenir afin que les mesures nécessaires soient prises en vue de faciliter le retour dans leurs villages d'origine des populations kurdes déplacées du fait d'un conflit vieux de 15 ans.

MME BARBARA BULAMBO (Aids Information Switzerland), a déclaré que son organisation s'inquiétait de la distribution injuste de médicaments pour le traitement du sida entre le Nord et le Sud. Le représentant a souligné qu'il fallait assurer la distribution équitable de médicaments aux victimes du sida dans les pays en voie de développement. La lutte contre l'épidémie de VIH/sida doit être menée dans tous les pays sur un pied d'égalité, a insisté le représentant. En outre, l'information scientifique sur la maladie doit atteindre toutes les populations du monde sans distinction. Le représentant a indiqué que son organisation avait proposé un projet de résolution sur la protection des personnes menacées par le sida dans laquelle il est demandé à tous les États d'allouer davantage de ressources à la recherche concernant le VIH/sida.

MME SAW KWE HTOO WIN (International Work Group for Indigenous Affairs) a déclaré que les instruments juridiques de protection des droits de l'homme ne sont pas toujours suffisants lorsqu'il s'agit de faire valoir la participation des minorités. Tous les peuples doivent bénéficier du droit inaliénable à l'autodétermination. Évoquant la situation des minorités au Myanmar, la représentante a déclaré qu'elles se sont vues refuser leurs droits par le Gouvernement du Myanmar. Plus de 120 000 réfugiés Karen vivent le long de la frontière entre la Thaïlande et le Myanmar et plusieurs d'entre eux sont victimes de persécutions par les militaires. Il faut faire valoir les droits consacrés par des nombreux traités et conventions internationaux. La situation des Karen est extrêmement difficile, a réitéré le représentant, qui a demandé à la Commission d'encourager le Gouvernement du Myanmar à cesser de persécuter les minorités, ce qui permettrait d'ouvrir la voie à un véritable processus de paix.

MME NANG LAO LIANG WON (Institut catholique pour les relations internationales) a attiré l'attention de la Commission des droits de l'homme sur la situation des travailleurs migrants birmans sans papiers en Thaïlande qui font face à des conditions économiques très dures et sont l'objet d'abus et de violence de la part de leurs employeurs. Les femmes sont particulièrement vulnérables à cet égard et sont souvent victimes de viols. Les victimes sont peu enclines à dénoncer ces abus et d'engager des poursuites en raison de leur situation précaire. La représentante a ajouté que le conflit armé en Birmanie est à l'origine de la fuite de nombreux Birmans de leur pays. En outre, les travailleurs migrants qui retournent dans leur pays sont immédiatement arrêtés, sont accusés d'être des traîtres et forcés de travailler sans salaire. La représentante a demandé que la Commission exhorte les autorités birmanes de mettre fin aux abus et de permette le retour volontaire des travailleurs migrants.

M. SILIS MOHAMMAD (All for Reparations and Emancipation) a rappelé que le peuple afro-américain se voit dénier en permanence le droit de parler sa langue maternelle, en violation flagrante de l'article 27 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques que le Gouvernement des États-Unis a pourtant ratifié. Alors qu'il prétend respecter les droits de l'homme, le Gouvernement des États-Unis commet chaque jour le forfait de nier l'existence même du peuple afro-américain. Pour les souffrances endurées pendant quatre siècles d'esclavage dans les plantations, nous recommandons aux Nations Unies et à leurs États membres d'imposer au Gouvernement des États-Unis de prendre une mesure de réparation.

M. A. S. NARANG (Indian Council of Education) a souligné que la mise en application du multiculturalisme est apparue, dans certaines sociétés, comme un moyen efficace de favoriser la coexistence pacifique et la réduction des conflits ethniques. Ce concept, que l'on peut aussi appeler pluralisme culturel, met l'accent sur l'intégration des différences fondées sur la race, la religion, la langue, la culture et l'habitat des citoyens des sociétés modernes plurielles. Il a permis aux groupes sociaux divers de préserver et renforcer leurs identités culturelles séparées en participant en tant qu'associés égaux dans la société. Le multiculturalisme a ainsi été opposé à un «amalgame» dans lequel chaque groupe ethnique apporte sa contribution, mais a perdu son identité en trouvant une identité nouvelle. Dans la sphère politique, le multiculturalisme vise à entretenir l'harmonie entre les groupes ethniques différents et entre l'État et les minorités ethniques. Le représentant a ajouté que le multiculturalisme reconnaît les contributions de groupes ethniques minoritaires à l'héritage culturel et scientifique national.

M. ALGIS TOMAS GENIUSAS (Fédération internationale de journalistes libres) a déclaré que la désinformation était souvent utilisée par des régimes répressifs pour influencer l'opinion publique dans le monde et empêcher ainsi le droit à l'autodétermination des minorités nationales, des peuples autochtones et d'autres groupes vulnérables comme les Tchétchènes, les Tibétains, les Ingouches, les Cachemiriens et autres. De nombreuses minorités nationales et des peuples autochtones, tels les Tatars de Crimée, les Kalmouks et les peuples Finno-ougriens se voient en grande partie refuser l'accès aux médias et à l'information dans leurs langues maternelles. Ils sont soumis au déni de leur identité nationale et de leurs droits sociaux et culturels. En Fédération de Russie, les Finno-ougriens ne sont pas vraiment reconnus comme minorité ethnique ou comme peuple autochtone. Leur administration locale et leur éducation continue de se faire en russe.

M. KYRIACOS KALATTAS (International Federation for the Protection of the Rights of Ethnic, Religious, Linguistic and Other Minorities) a dénoncé les atrocités commises par la Turquie pendant l'invasion de Chypre. Le résultat de l'invasion et de l'occupation est que la population chypriote grecque du Nord de l'île a dû abandonner ses possessions et s'est trouvée déplacée. Le représentant a déploré le fait que des centaines de personnes sont encore portées disparues. La Turquie continue de refuser de reconnaître sa responsabilité et de donner des informations sur les disparus. Le représentant a évoqué les politiques de harcèlement et de discrimination menées à l'encontre des Chypriotes grecs et le transfert illégal de colons sur le territoire chypriote occupé afin de modifier la composition démographique de l'île. La Turquie a par ailleurs appliqué une politique de destruction du patrimoine culturel et religieux de Chypre. Compte tenu de toutes les violations flagrantes commises par la Turquie à Chypre, le représentant s'est dit déçu par le rapport du Secrétaire général sur les droits de l'homme à Chypre qui ne mentionne rien au sujet des réfugiés, des colons turcs, et des tragédies des familles des personnes disparues.

MME KANG EUN_KYUNG (Pax Romana) a dénoncé l'adoption par l'Espagne d'une nouvelle loi d'immigration qui impose des restrictions aux droits fondamentaux des immigrés sans papiers et au regroupement familial, en violation des instruments internationaux de protection des droits de l'homme. À cet égard, elle a exhorté les pays de l'Union européenne à réviser leurs lois d'immigration et à assurer qu'elles sont conformes au Conventions internationales sur les droits de l'homme et les libertés fondamentales; à mettre en oeuvre des politiques d'intégration; et à renforcer la protection des travailleuses migrantes contre la discrimination, la violence et les traitements dégradants. Évoquant la situation des migrants en Corée du Sud, elle a en outre demandé que le Gouvernement sud-coréen ratifie la Convention sur les travailleurs migrants et invite le Rapporteur spécial sur la question à effectuer une visite dans le pays.

M. PETRADU LOUW (South Asia Human Rights Documentation Centre) a attiré l'attention de la Commission sur la situation de la minorité hindoue au Bangladesh, qui constitue «l'ennemi juridiquement identifié». Des milliers d'hindous, qui constituent au Bangladesh une minorité religieuse, ont été dépossédés de leurs terres en vertu d'une loi sur la propriété qui est indiscutablement discriminatoire. Le Gouvernement du Bangladesh prétend qu'il n'y a pas d'«ennemi juridiquement identifié» du pays alors que cette notion est implicite dans le titre même de la Loi sur les propriétés ennemies (Ennemy Properties Act) du Gouvernement pakistanais d'alors, c'est-à-dire d'avant la scission entre le Pakistan et le Bangladesh, ainsi que dans la Loi de 1974 du Gouvernement du Bangladesh sur cette même question.

M. YOU XUEYUN (Société chinoise d'études des droits de l'homme) a évoqué la situation des droits de l'homme au Tibet et a précisé que les Tibétains jouissent pleinement de leur droit de pratiquer leur religion. Aujourd'hui, il existe plus de 1 700 monastères, temples et autres lieux de culte, plus de 46 000 lamas et religieux. Chaque année, des activités religieuses ont lieu et de nombreux festivals sont célébrés qui correspondent à des fêtes tibétaines. Il existe un Institut de théologie bouddhiste et une maison d'édition des textes tibétains. De nombreux monastères ont été reconstruits et les fresques, les écrits et les instruments rituels tibétains ont été conservés ou restaurés. Le représentant a déclaré que, bien que le Tibet reste sous- développé sur le plan économique et social du fait de conditions géographiques naturelles défavorables, des améliorations importantes ont pu être introduites dans le domaine des droits de l'homme du peuple tibétain qui peut jouir pleinement de ses droits fondamentaux.

M. PAOLO PIETROSANTI (Union internationale des Roms) a insisté sur le fait que la nation rom a besoin de lois adéquates qui sont d'ailleurs les mêmes que celles dont tout le monde a besoin et que tout le monde mérite. Le représentant a précisé que, s'agissant des Roms, qui constituent une nation transétatique, il faut des lois transétatiques. À cet égard, il a indiqué que lors du Cinquième congrès mondial de l'Union internationale des Roms, une Déclaration de la nation rom a été adoptée qui demande la reconnaissance non d'un État mais d'une représentation en tant que «Nation», y compris au sein des «Nations» Unies. Cette déclaration a été envoyée à plusieurs chefs d'État et des rencontres ont été organisées au cours desquelles a été proposé la création d'une citoyenneté européenne pour les Roms, citoyenneté européenne qui est du reste prévue dans les traités. Le représentant a informé la Commission que le 4 avril dernier un Mémorandum d'accord et de coopération a été signé avec le Gouvernement tchèque. L'Union internationale des Roms offre une chance à la communauté internationale de répondre de façon adéquate aux besoins concrets d'une société en changement.

MME AIDA AVELLA (Fédération syndicale mondiale) a souligné que le nombre de travailleurs migrants augmente actuellement dans le monde en raison du manque de possibilités d'emploi dans leurs pays d'origine. Elle a souligné que le monde est actuellement confronté à des migrations provoquées par les pratiques néolibérales qui entraînent chaque jour la fermeture de petites et moyennes entreprises incapables de résister à la concurrence des grandes sociétés transnationales et aux politiques de privatisation appliquées par nombre de pays. La Fédération syndicale mondiale demande aux pays récepteurs de se pencher non seulement sur les effets mais aussi sur les véritables causes de l'immigration qui ne sont autres que l'extrême pauvreté et le manque d'emploi, et d'accepter leurs responsabilités face à ces millions de personnes qui abandonnent leurs pays d'origine à la recherche d'un avenir meilleur.

M. SARA EMARINA SOSELISA (Organisation néerlandaise pour la coopération internationale au développement) a évoqué le phénomène des personnes déplacées dans les Molluques indonésiennes. Depuis janvier 1999, plus de 5 000 personnes ont été tuées aux Molluques dans le cadre des violences entre les différentes communautés. Les forces militaires et de police se sont également rendues coupables de nombreuses violations des droits de l'homme. Le démantèlement de l'économie a contribué au déplacement de personnes. Environ 100 000 personnes sont allées dans d'autres régions de l'Indonésie et en Papouasie. Le grand nombre de personnes déplacées à mis à mal tous les secteurs d'activité de la société aux Molluques. Les personnes déplacées sont confrontées à de mauvaises conditions sanitaires, n'ont pas accès aux soins médicaux de base ni à une alimentation suffisante. Les États ont la responsabilité de protéger toutes les personnes qui tombent sous le coup de leur juridiction. Le représentant s'est félicité de la visite en Indonésie du Représentant spécial sur les personnes déplacées, mais a demandé qu'il se rende également dans les camps de réfugiés.

MME SURAIYA KAMARUZZAMAN (Australian Council for Overseas Aid) a évoqué les problèmes de déplacement interne dans la province d'Aceh en Indonésie résultant du conflit armé entre les forces armées indonésiennes et le Mouvement Aceh Libre. Le conflit a eu un impact très profond sur la sécurité des civils, les poussant à fuir et à se réfugier en ville ou dans des camps provisoires qui n'offrent pas la sécurité nécessaire, comme le prouvent les incidents d'Idi Rayeuk en mars dernier. Les travailleurs humanitaires font également l'objet d'attaques et d'intimidations, a_t_elle précisé ajoutant que le Gouvernement indonésien n'accorde pas d'importance à ce problème. Elle a demandé à la Commission d'exhorter le Gouvernement indonésien à diffuser et appliquer les Principes directeurs sur les déplacements internes, d'assurer une protection particulière aux travailleurs humanitaires, d'autoriser une visite du Représentant spécial sur les personnes déplacées, de mettre fin à l'impunité et d'initier un processus de dialogue pacifique pour résoudre le conflit en Aceh.

MME NATALIA LÓPEZ ORTIZ (Commission colombienne de juristes) a rappelé qu'entre janvier et décembre 2000, plus de 315 000 personnes ont été déplacées en Colombie. Chaque année, le nombre de personnes déplacées augmente considérablement dans ce pays sans que rien ne soit fait pour inverser cette tendance ou pour s'occuper des personnes concernées. Les groupes paramilitaires - qui bénéficient de la complicité ou de la tolérance des agents de l'État - sont responsables de 71% des cas de déplacements forcés rapportés au premier semestre 2000. La Commission devrait exhorter l'État colombien à assumer sa responsabilité s'agissant de cette situation. Elle devrait également attirer l'attention des États voisins afin qu'ils accordent le traitement de réfugiés aux personnes déplacées qui se voient obliger de franchir les frontières.

M. MARCELLO ORELLANA (Association latino_américaine pour les droits de l'homme) a évoqué la situation des peuples autochtones de la Colombie, de l'Équateur et du Panama qui souffrent énormément des conflits armés. En Équateur, certaines communautés autochtones ont dû quitter leurs terres ancestrales en raison de menaces proférées par des hommes armés cagoulés. Certaines communautés autochtones déplacées en Équateur sont retournées chez elles grâce aux efforts menés notamment par la Croix Rouge internationale et Médecins sans frontières. Leurs maisons et leurs écoles avaient été détruites. La sécurité des peuples autochtones doit être garantie. Les disparitions forcées, notamment des personnes autochtones, sont un phénomène grave. Les peuples autochtones de l'Amazonie colombienne ont été gravement menacés par une politique de déforestation. Des communautés entières sont forcées de se déplacer. Le représentant a déploré que les peuples autochtones doivent accepter l'invasion de leurs terres par des troupes armées et a demandé à la communauté internationale de prendre des mesures appropriées pour lutter contre ce phénomène et protéger les droits inaliénables des populations autochtones.

M. JONATHAN GALLAGHER (Conférence générale des adventistes du septième jour) a souligné que les croyances religieuses minoritaires subissent des intimidations et des persécutions de la part de l'État au Turkménistan, qui détruit des lieux de culte, saisit des biens, met des personnes en détention arbitraire, impose des amendes prohibitives, commet des violences physiques contre des personnes, confisque des appartements. Citant plusieurs cas de personnes emprisonnées ou mal traitées, il a souligné que les droits de l'homme des minorités religieuses dans les républiques d'Asie centrale sont de plus en plus menacés, citant les cas du Kazakhstan, du Kirghizistan et de la Chine où les violations ont lieu à grande échelle. Il a en outre évoqué la situation en Indonésie. Le représentant a appelé tous les États à s'engager à nouveau à respecter les droits de leurs minorités et à prévenir les violations.

MME SENG HURNG (International Worldview Foundation) a fait observer que la situation des droits de l'homme dans l'État de Shan, en Birmanie, reste aussi mauvaise que les années précédentes. Les réinstallations forcées massives, les déplacements de population et d'autres types de mouvements involontaires de populations perpétrés par le régime militaire birman se poursuivent dans cet État depuis 1996. Près de 300 000 personnes ont ainsi été dépossédées de leurs terres et de leurs foyers et ont été déplacées de force par l'armée. Des milliers d'entre elles ont été saisies par l'armée afin de travailler à la construction de route et à d'autres projets sans recevoir le moindre salaire en retour. La Commission et la communauté internationale devraient exhorter le régime militaire birman à cesser sa campagne de réinstallations forcées dans le Shan ainsi que toutes les autres formes de violations de droits de l'homme.

MME TIJANA VUKOJICIC (Fédération internationale d'Helsinki pour les droits de l'homme) a déclaré, en évoquant la violence en Macédoine, que la situation est complexe et que le dialogue inter-ethnique reste difficile. L'idée du binationalisme a provoqué de nombreuses réactions des autres minorités. La question non réglée du statut du Kosovo est une source constante d'instabilité dans la région qui a vu le développement de structures para-militaires. La représentante a souligné que de nombreux citoyens albanais de la Macédoine s'identifient avec la population du Kosovo. L'intégration des relations inter-ethniques n'a pas été une priorité pour la Macédoine. La majorité des personnes manquent de confiance dans le gouvernement et les partis politiques. La représentante a regretté l'orientation ethnocentriste de l'éducation, de la maternelle à l'université, qui divise plutôt qu'elle n'intègre. Elle a déploré que l'on soit les témoins d'une nouvelle vague de discours qui incitent à la haine. Les habitants de la Macédoine et les Albanais de souche se diabolisent mutuellement. Le gouvernement doit encourager un dialogue inter-ethnique qui ne doit exclure aucune personne appartenant à une ethnie particulière.

MME HAPPY AZIAH (Comité d'action pour les droits de l'enfant et de la femme) a évoqué la situation de la femme en Afrique soulignant qu'elle demeure inférieure à celle de l'homme pour ce qui est de l'accès à l'éducation ou aux soins. La femme africaine travaille plus durement que les hommes et sa position reste marginalisée sur les plans politique et économique. La re connaissance des droits de la femme n'apparaît pas comme une priorité. La représentante a dénoncé les pratiques discriminatoires dans le monde du travail en Afrique, renvoyant à l'étude complète menée par le Comité d'action pour les droits de l'enfant et de la femme sur ce sujet.

MME DEBORAH CHRISTINE STOTHARD (Aliran Kesedaran Negara - National Consciousness Movement) a attiré l'attention de la Commission sur l'oppression que subissent les minorités ethniques et religieuses en Birmanie et le recours massif aux réinstallations forcées dans ce pays, deux phénomènes qui trouvent leur origine dans les mêmes causes et qui ont provoqué une augmentation du nombre de personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays. Le problème des enfants birmans victimes de trafic pour être amenés à travailler comme agriculteurs, travailleurs du sexe ou aide domestique est déjà bien connu de cette Commission, a déclaré la représentante. Il est donc étonnant de voir que le régime birman nie l'existence de violations des droits de l'homme au Myanmar. En Malaisie, M. Peter Hee Man, un homme de nationalité ethnique Chin de Birmanie, risque d'être déporté pour avoir protesté lors d'un événement public organisé par l'Ambassade du Myanmar à Kuala Lumpur. ALIRAN exhorte le Gouvernement malaisien à ne pas déporter cette personne.

MME BAGHERI (Islamic Women's Institute of Iran) a fait remarquer qu'il restait beaucoup à faire pour obtenir le plein respect des droits des groupes et des minorités ethniques en Iran. L'Iran accueille de nombreux travailleurs migrants et cette situation contribue à créer certaines tensions. La représentante a souligné que le pays d'accueil des travailleurs migrants et des personnes déplacées devrait fournir des conditions d'accueil satisfaisante. Cela n'est malheureusement pas le cas en Iran où les travailleurs migrants et les personnes déplacées n'ont souvent pas accès à des conditions d'hygiène et de santé satisfaisants et où de nombreux travailleurs migrants n'ont toujours pas de papiers. La représentante a appelé la communauté internationale à apporter son assistance à l'Iran afin qu'il puisse accueillir dans de meilleures conditions les travailleurs migrants et les personnes déplacées.

M. BOBBY VADAKKAL (Franciscain international) a exprimé sa préoccupation face au déplacement de populations vulnérables au nom du développement, évoquant les cas du groupe tribal de l'État de Jharkhand en Inde et des membres du Mouvement des personnes affectées par les barrages au Brésil. Franciscain international demande aux États d'accorder leurs législations internes avec les dispositions des Conventions internationales qu'ils ont ratifiées et en particulier du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, d'adopter les recommandations de la Commission mondiale sur les barrages et d'appliquer les Principes directeurs sur les personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays.

MME PATRICIA GUERRERO (Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté) a rappelé qu'en Colombie, 300 000 nouvelles personnes déplacées sont venues gonfler le flot de la population humaine dont les droits de l'homme fondamentaux ont été violés. Selon le rapport de la Haut_Commissaire aux droits de l'homme, les paramilitaires sont responsables de 71% des déplacements forcés dans ce pays. Ces déplacements sont devenus l'une des infractions les plus graves au droit humanitaire international en Colombie et les organisations de femmes ont subi des discriminations systématiques, leurs propositions de stabilisation économique ayant en outre sans cesse été ignorées. La communauté internationale exhorte les autorités colombiennes à mettre fin à l'impunité dont bénéficient les responsables de crimes contre l'humanité.

MME GRACIELA ROBERT (Médecins du Monde) a évoqué la situation des réfugiés en Guinée qui subissent de plein fouet les conséquences d'un conflit dans lequel les principes fondamentaux du droit international humanitaire sont méconnus par l'ensemble des parties. Ils sont en outre victimes de violations répétées des droits de l'homme imputables aux autorités guinéennes. Les équipes de Médecins du monde constatent presque quotidiennement les atteintes à l'intégrité physique, au droit à la sûreté, au droit à la liberté de circulation et au droit au respect de la propriété privée subies par les réfugiés. L'état sanitaire de la population réfugiée de Guinée est alarmant. Faute d'un accès suffisant à l'aide humanitaire en raison des combats, la population civile est fragilisée. Tout déplacement implique dès lors une aggravation importante de l'état de santé. Médecins du monde demande à la Commission de rappeler au Gouvernement guinéen ses obligations internationales en matière de protection physique et juridique des réfugiés, de l'inviter à collaborer pleinement avec le Haut Commissariat aux réfugiés et de cesser toute entrave nuisant au travail entrepris par les institutions humanitaires du système des Nations Unies et par les organisations non gouvernementales présentes sur le terrain. Au sujet du Kosovo, la représentante a déclaré que la situation des minorités serbe et rom reste particulièrement préoccupante. Le désengagement programmé de l'administration internationale du Kosovo ne doit pas intervenir avant que les minorités serbe et rom jouissent des conditions de sécurité permettant l'accès aux services essentiels, et en particulier aux services de santé. Le mandat de l'UNMIK doit être prolongé aussi longtemps que les minorités sont en danger. Médecins du Monde sollicite par conséquent de la Commission une réaffirmation forte du rôle de l'UNMIK dans la protection des minorités serbe et rom.

Médecins du Monde attire l'attention de la Commission sur la situation particulièrement inquiétante de la minorité rom/tsigane dans l'ensemble des pays d'Europe. Les Roms/Tsiganes constituent une minorité stigmatisée fortement marquée par le sceau de l'ostracisme. Leurs droits fondamentaux ne sont pas respectés. La plupart des membres de cette minorité ne bénéficient ni de scolarisation, ni de logement, ni de travail. L'accès aux soins est très limité et les obstacles restent nombreux. La représentante a évoqué la protection des droits de l'homme dans le contexte de l'infection par le virus VIH/sida. Aujourd'hui première cause de mortalité en Afrique, le VIH/sida est un facteur majeur de déstructuration des systèmes de santé et du tissu social. En frappant d'abord les plus vulnérables, le VIH/sida est facteur d'exclusion, il aggrave et perpétue la pauvreté. Médecins du Monde demande à la Commission de réaffirmer avec force le droit de tout individu vivant avec le VIH/sida d'avoir accès aux soins et à toute thérapie avancée afin d'améliorer la durée et la qualité de sa vie.

M. GODEFROID MARUME MULUME (Commission africaine des promoteurs de la santé et des droits de l'homme - CAPSDH) a formé le voeu le plus ardent pour que les résolutions qui seront adoptées sur les groupes vulnérables puissent refléter la volonté et la détermination en faveur d'une protection concrète des travailleurs migrants et des personnes déplacées à l'intérieur ou hors de leurs frontières. Il a en particulier évoqué les personnes déplacées de la République démocratique du Congo et rappelé que les conflits qui déchirent les pays d'Afrique mettent aux prises des communautés ethniques mais cachent la confiscation du pouvoir politique et des intérêts économiques occultes. La CAPSDH est certaine que les membres de la Commission traiteront ces questions avec courage et sans atermoiements afin que la situation puisse s'améliorer.


Droit de réponse

Le représentant de la Fédération de Russie a déclaré que son pays ne souhaite pas utiliser cette tribune pour se livrer à une confrontation avec la Lettonie. En ce qui concerne la question du respect par la Lettonie des normes internationales, le représentant russe a fait état de certains rapports dans lesquels sont mentionnés un certain nombre de manquements graves en la matière, notamment du point de vue des restrictions linguistiques. Pourquoi le Parlement letton refuse-t-il
encore de signer la Convention-cadre du Conseil de l'Europe sur la protection des minorités, s'est interrogé le représentant russe? La Fédération de Russie serait heureuse de ne pas avoir à soulever de nouveau le problème des minorités en Lettonie.

La représentante de la Thaïlande a répondu à certaines allégations faites par plusieurs ONG s'agissant de son pays, en rappelant que depuis plusieurs années, la Thaïlande accueille des millions de migrants illégaux, peut-être aujourd'hui 2 à 3 millions. Les migrants illégaux qui ont été enregistrés (ils sont près de 100 000) se verront accorder la même protection que les travailleurs thaïlandais en vertu de la Loi sur la protection du travail. La Thaïlande est un pays libre et démocratique qui reconnaît le droit de chacun d'entrer dans le pays et d'en sortir. La Thaïlande accorde en outre une grande importance à la question du trafic d'êtres humains et fait de son mieux pour promouvoir une coopération active en matière de lutte contre ce phénomène avec les pays voisins.


Présentation de rapports au titre des questions relatives aux populations autochtones

M. LUIS ENRIQUE CHÁVEZ, Président et Rapporteur du Groupe de travail à composition non limitée chargé d'élaborer un projet de déclaration sur les droits des populations autochtones, a présenté le rapport du Groupe de travail qui rend compte en détail les débats qui ont eu lieu lors de sa sixième session du Groupe de travail (E/CN.4/2001/85, à paraître). M. Chávez a déclaré que les réunions se sont tenues dans un véritable climat de dialogue qui a permis d'examiner six nouveaux articles du projet de déclaration. Des documents ont été reçus concernant un autre article sur lequel le Groupe de travail n'a pas eu le temps de se pencher. Les articles examinés lors de la session n'ont toutefois pas pu être adopté. Cela ne veut pas dire que l'on n'ait pas fait de réels progrès sur le projet de déclaration. M. Chávez a demandé à la Commission qu'elle renouvelle son invitation à poursuivre les consultations sur le projet de déclaration. Le Groupe de travail a fait des progrès importants mais il est conscient qu'il reste beaucoup à faire. M. Chávez s'est félicité de la pleine participation des groupes concernés, à savoir les peuples autochtones. Le Groupe de travail s'est doté de ses propres méthodes de travail. Des réunions plénières ont alterné avec des réunions informelles avec les peuples autochtones. M. Chávez a fait remarquer à la Commission que les membres des délégations autochtones ne peuvent s'exprimer que dans leurs langues et qu'il est de ce fait besoin d'avoir recours à des services d'interprétation. M. Chávez a demandé à la Commission d'accorder des ressources additionnelles au Groupe de travail en prenant en compte les difficultés particulières auxquelles il est confronté.

MME TOVE PETERSEN, Membre du Fonds de contribution volontaire des Nations Unies pour les populations autochtones et du Groupe consultatif du Fonds de contribution volontaire pour la Décennie internationale des populations autochtones du monde, a indiqué que grâce aux contributions généreuses des donateurs, il a été possible de répondre à la demande croissante des communautés autochtones à participer aux débats de cette commission et de s'y faire entendre. Cela a permis la création d'un environnement sain pour le dialogue et l'établissement de la confiance entre gouvernements et communautés autochtones. Un total de 321 700 dollars a notamment été alloué pour le voyage de représentants autochtones à la Commission. Mme Peterson a lancé un appel à de nouvelles contributions pour 2002, un total d'environ 724 000 dollars étant nécessaire pour couvrir les dépenses prévues.


S'agissant du Groupe consultatif, Mme Peterson a indiqué qu'il a examiné lors de sa session annuelle du 2 au 5 avril les rapports sur l'utilisation des prêts alloués à 66 projets entre 1997 et 1999 et exprimé sa satisfaction que la plupart aient été dépensés à bon escient. Il a en outre examiné 82 nouveaux projets et, grâce aux nouvelles contributions, a pu recommander l'approbation de financement de 30 projets pour un montant de 252 000 dollars. Le Groupe consultatif a en outre recommandé que l'équipe du Haut-Commissariat chargée des projets pour les populations autochtones organise notamment un atelier sur les populations autochtones, le secteur privé, les ressources naturelles, l'énergie et les compagnies minières et les droits de l'homme ainsi qu'une table ronde sur le thème populations autochtones et racisme à organiser comme activité parallèle à la Conférence mondiale sur le racisme.

Afin de couvrir toutes les activités prévues pour 2002, il faudra environ 550 000 dollars, ce qui signifie que le Fonds a besoin de nouvelles contributions pour un montant de 480 000 dollars avant sa prochaine session, a-t-elle précisé.


Débat sur les populations autochtones

M. LAZARO PARY (Mouvement indien «Tupaj Amaru») a déclaré que la lecture du rapport du Président du Groupe de travail sur le projet de déclaration relatif aux droits des peuples autochtones montre que l'examen du projet de la déclaration est bloqué par le manque de volonté politique des pays du Nord comme du Sud. Le Président a tenté de montrer qu'il y avait un consensus, mais en six ans, aucun progrès tangible n'a été réalisé. Les représentants autochtones sont venus au temple de droits de l'homme pour engager des négociations sérieuses, a souligné le représentant. Les gouvernements des pays du Nord et du Sud ont été incapables de convenir de concepts fondamentaux comme la souveraineté sur les ressources naturelles, le droit de l'autodétermination. Au rythme où vont les choses, la déclaration ne sera pas adoptée avant 100 ans. Est-il raisonnable de prolonger le mandat d'un mécanisme qui n'a pas travaillé ? s'est demandé le représentant. M. Pary a néanmoins recommandé à la Commission prolonge le mandat du groupe de travail afin qu'il adopte, dans un délai raisonnable, c'est à dire avant la fin de la Décennie, le texte de la déclaration afin de le transmettre à l'Assemblée générale. S'agissant de l'instance des peuples autochtones, il a noté que les propositions des représentants autochtones n'ont pas été prises en compte s'agissant de sa composition. Les peuples autochtones restent un problème pour la communauté internationale, a-t-il noté. S'agissant du projet de nommer un rapporteur spécial sur les populations autochtones, le représentant a estimé plus raisonnable de faire avancer le projet de déclaration sur les peuples autochtones.

MME HELEN SAYERS (Université spirituelle des Brahma-Kumaris) a souligné que chercher à garantir les droits des populations autochtones équivaut à assurer la préservation d'un système de valeurs dont l'humanité ne peut se passer. Ces derniers siècles, on a fait croire à beaucoup de gens que ces valeurs n'étaient pas importantes dans des sociétés en développement. Or, il faut absolument changer cette façon de voir les choses et se battre pour instaurer une société au sein de laquelle l'ancien et le moderne seraient enfin réconciliés et complémentaires et où tradition et technologie iraient main dans la main pour créer une culture de respect et d'harmonie. Il faut que tous les gouvernements reconnaissent l'inestimable héritage culturel que représentent les populations autochtones lorsqu'ils se pencheront sur l'élaboration du projet de déclaration sur les droits des peuples autochtones.


M. PIERRE MIOT (Fédération internationale des mouvements d'adultes ruraux catholiques) a rappelé que les connaissances ancestrales des populations autochtones intéressent vivement, depuis quelques années, les laboratoires et universités des pays industrialisés. Leur manière de procéder commence toujours par une enquête sur le terrain en vue d'identifier les propriétés particulières d'un produit donné. Elle se termine par le dépôt d'un brevet, au profit de l'entreprise qui a conduit la recherche et au détriment des populations autochtones et des communautés paysannes qui sont ainsi privées de toute utilisation commerciale de leurs propres produits. Ce processus d'appropriation des connaissances autochtones pour en faire une propriété privée constitue un vol manifeste de la part des institutions et compagnies (généralement situées dans les pays du Nord) et peut être qualifié de pillage du savoir millénaire des communautés paysannes et autochtones. Selon le rapport mondial du PNUD de 1999, les lois sur les brevets ne reconnaissent ni les savoirs, ni les systèmes de propriété traditionnels des populations autochtones. On estime que 75% des 7000 produits pharmaceutiques dérivés des plantes reposent sur des connaissances autochtones. En raison de la durée des brevets, l'Accord ADPIC ou TRIP rend très difficile l'accès des pays pauvres aux médicaments essentiels. Si les pays en développement veulent se procurer certains produits, comme par exemple les médicaments contre le sida, ils ne sont pas toujours en mesure de supporter les coûts qui sont déterminés par les prix fixés par les firmes pharmaceutiques.

La plainte déposée récemment à l'OMC par les États-Unis contre les médicaments génériques brésiliens met en évidence la perversité d'un accord sur la propriété intellectuelle qui ne permet plus à un pays de développer un programme public de lutte contre le sida, en produisant des médicaments à des prix nettement inférieurs à ceux de l'industrie pharmaceutique. Le taux de mortalité due au sida a pourtant été réduit de 50% et des dizaines de milliers de personnes bénéficient, gratuitement, de ces traitements. La deuxième compagnie pharmaceutique indienne (CIPLA) basée à Bombay, fabrique des médicaments génériques. Elle a décidé de proposer à MSF des traitements anti-sida à bas prix. Cela pourrait révolutionner la lutte antisida dans les pays en développement, particulièrement en Afrique subsaharienne où le sida est aujourd'hui la première cause de mortalité. Il est injuste que les pays du Sud, qui sont les gardiens d'une très grande partie des ressources biologiques mondiales, et les générations de paysans qui ont, gratuitement, sélectionné des semences pendant des siècles se voient dépossédés, sans contrepartie, de leur savoir et de leurs connaissances ancestrales par des entreprises et transnationales des pays industrialisés qui privatisent ces ressources en les brevetant, pour en tirer un profit maximum. Il faut que les pays, particulièrement les pays en développement, aient les moyens de contester certains brevets et de revendiquer les droits de leurs populations. Il est également nécessaire que les droits des communautés locales sur leurs propres ressources soient renforcés et que la loi protège ceux dont les connaissances sont exploitées aussi injustement.

MME RACHEL BRETT (Comité consultatif mondial de la société des amis) a indiqué que l'on sème la guerre lorsqu'il y a déni de justice. Pendant trop longtemps, les peuples autochtones ont été traités comme si leurs systèmes de gouvernement et leurs cultures étaient inférieurs. En fait, la planète entière a une dette envers les autochtones pour les bénéfices tirés de leurs terres et de leurs ressources, souvent à leurs dépens. Depuis qu'ils sont entrés en contact avec d'autres populations, les autochtones sont victimes de la guerre. Pour pouvoir vivre en paix, il faut écouter leur vérité sur les événements passés. Dans cette optique, la représentante s'est prononcée en faveur de l'instance permanente sur les questions autochtones et pour l'établissement d'un rapporteur spécial pour ces questions. Les peuples autochtones ont attendu trop longtemps pour obtenir justice, a déclaré le représentant.


M. CHARLES GRAVES (Interfaith International) a déclaré que le Groupe de travail sur les populations autochtones a remporté d'importants succès au cours des 17 dernières années. Toutefois, certains des groupes autochtones ont été menacés d'exclusion sous prétexte que les autochtones n'existeraient pas en Afrique et en Asie. Le Sindh, une terre de paix et l'harmonie, couvre un grand territoire au Pakistan. Les 45 millions de Sindhis survivent toujours dans des villages et villes du Sindh. Ils ont une relation étroite avec leur terre. Mais de grandes parties de leurs terres ont été prises de force aux Sindhis et allouées aux généraux et d'autres colons venus de l'extérieur, forçant les autochtones sindhis à abandonner des maisons héréditaires et des villages anciens de plusieurs siècles. En outre, de grandes parties des zones côtières ont été occupées par les forces armées, qui ont expulsé les pêcheurs locaux, privant plus de 2 000 familles de leur gagne_pain. Le Sindh contribue pour 60 % au budget du Pakistan, mais ne reçoit à peine que 2% des dépenses. Au vu de la violation constante des droits de l'homme dans le Sindh, une mission d'enquête impartiale des Nations Unies est indispensable et serait bien accueillie par les autochtones du Sindh. Le représentant a fait appel à la communauté internationale pour son appui dans la lutte pacifique contre la néo-colonisation et l'occupation de la terre et le massacre du peuple sindh.

M. TOMAS CONDORI CAHUAPAZA (Indian Council of South America) a rappelé que dans sa résolution 2000/87, la Commission avait recommandé au Conseil économique et social d'approuver un projet de résolution établissant une instance permanente pour les questions autochtones en tant qu'organe subsidiaire de l'ECOSOC. Cette résolution fut prise unilatéralement par les gouvernements sans tenir compte des discussions qui s'étaient déroulées entre les populations autochtones et les gouvernements au sein du groupe de travail chargé de la question. Ce fut donc une surprise d'entendre les représentants du Danemark et du Guatemala exposer les propositions du Groupe de travail comme si elles étaient le fruit d'un consensus. L'Indian Council of South America a dénoncé cette manoeuvre mais le vote des gouvernements avait néanmoins abouti à la création d'une instance permanente. Les gouvernements, par ce coup de main, ont réussi à retirer du titre le qualificatif «peuples autochtones» et, sans même employer le terme de «populations autochtones», avaient réduit le tout à la qualification de «questions autochtones», niant ainsi à l'instance son rôle politique et son rôle d'intervention dans les conflits et agressions dont sont victimes les peuples autochtones. Si cette instance est créée au plus bas niveau de l'ONU, elle restera un simple office bureaucratique. Cette Commission doit par ailleurs être informée que le Chili poursuit sa répression et ses violations des droits de l'homme fondamentaux des peuples autochtones. Le Chili n'a d'ailleurs toujours pas ratifié la Convention nE169 de l'OIT, a fait observer le représentant.

MME MAGGIE BOWDON (Conférence asiatique des bouddhistes pour la paix) a évoqué l'Accord de paix signé le 2 décembre 1997 entre le Gouvernement du Bangladesh et le Parbatya Chattagram Jana Samhati Samiti, le seul parti politique des peuples autochtones des Jumma des Chittagong Hill Tracts (Chittagong Hill Tracts). L'Accord de paix, qui donne une autonomie limitée aux peuples autochtones, a mis fin à plus de vingt ans de conflit armé dans la région. La plupart des dispositions de l'accord, telles que la réhabilitation des Jumma réfugiés et déplacés et le retrait des colons Bengalis, n'ont toujours pas été respectées. La question de la terre et des colons est cruciale pour les populations autochtones des Chittagong Hill Tracts. Les droits terriens traditionnels des peuples autochtones ne sont toujours pas protégés dans les Chittagong Hill Tracts. Des violations des droits de l'homme continuent à être commises dans la région. Le Gouvernement du Bangladesh a justifié la présence des militaires dans les Chittagong Hill Tracts en prétextant qu'il voulait assurer l'ordre public. Les militaires ont arrêté et maltraité de nombreux Jumma. La représentante a appelé le Bangladesh à mettre pleinement en oeuvre toutes les dispositions de l'Accord de paix afin de restaurer la paix et la stabilité dans les Chittagong Hill Tracts.

M. RAJAN KUMAR DAHAL (Groupe pour la solidarité internationale) a attiré l'attention de la Commission sur la situation des populations kamayas asservies pour dettes au Népal et soumises à une nouvelle forme d'esclavage. Avec la restauration de la démocratie, nombre de problèmes sociaux ont été résolus mais ce système de servitude a perduré. Suite à la pression de la société civile, le gouvernement a annoncé des programmes de discrimination positive en faveur des Kamayas et notamment l'attribution de terres, mais la plupart n'ont rien reçu car, pour pouvoir posséder des terres, ils doivent présenter des documents de citoyenneté que la plupart n'a pas. Il a demandé que le gouvernement prenne des mesures immédiates en faveur des Kamayas, libère ceux qui ne l'ont pas encore été et leur verse un salaire pour le travail qu'ils fournissent. Il a demandé en outre que des informations précises soient recueillies sur cette population.

MME NEVA COLLINGS (Aboriginal and Torres Islander Commission) a fait part de sa tristesse face à la confrontation des approches au sein du Groupe de travail chargé d'élaborer un projet de déclaration sur les droits des peuples autochtones, ainsi que face à la polarisation croissante des points de vue des délégations autochtones et étatiques en deux blocs distincts et opposés. À cet égard, il convient de dénoncer la mesure rétrograde que constitue la mise entre parenthèses les termes «peuples autochtones» sur insistance de quelques États seulement alors même que cette terminologie est couramment acceptée par les organes indépendants de traités des droits de l'homme des Nations Unies. La représentante a par ailleurs apporté son soutien au projet de résolution présenté par le Guatemala et le Mexique afin de demander la nomination d'un rapporteur spécial sur les droits des populations autochtones. Elle a en revanche rejeté le texte alternatif proposé par le Gouvernement canadien.

MME NUR AMALIA (Organisation néerlandaise pour la coopération internationale au développement) a évoqué les problèmes des communautés autochtones en Indonésie. L'existence et les droits des populations autochtones indonésiennes n'est pas pris en considération par le gouvernement. Les communautés autochtones sont isolées et leurs droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels continuent ne sont toujours pas respectés. L'État indonésien néglige les droits des peuples autochtones aux terres et à une tradition culturelle particulière. Diverses législations nationales ont réglementé les forêts, les mines, les pêches et ont transféré des propriétés des populations autochtones à des compagnies privées dont sont propriétaires certains représentants politiques. Les pratiques de corruption concernant les ressources naturelles ont provoqué des conflits dans tous les coins de l'archipel. Sur 300 licences de propriété forestières accordées sous la présidence de Suharto et de Habibi, seulement 11% des terres qui appartenaient aux populations autochtones leur ont été rendues. La représentante a prié le Gouvernement indonésien de respecter les droits des populations autochtones, qui sont parmi les groupes les plus vulnérables de la société.

M. MARCELO ORELLANA (Association latino_américaine pour les droits de l'homme) a salué les progrès réalisés pour l'établissement d'une instance permanente sur les questions autochtones et insisté sur la nécessité de faire de l'adoption du projet de déclaration sur les droits des populations autochtones une réalité. Il a en outre demandé la nomination d'un Rapporteur spécial sur ces questions. Il a estimé que l'acceptation par l'Organisation des États américains d'utiliser le terme «peuples» autochtones est un progrès indéniable. Il s'est également félicité du fait que l'Union européenne ait reconnu que la protection des communautés autochtones qui vivent en Équateur est une priorité de la politique de l'Union européenne dans les pays andins. L'adoption du projet de déclaration sur les populations autochtones pourrait être un instrument pour construire la paix et intégrer les droits et spécificités des autochtones par exemple en Colombie. Elle pourrait également servir à la promotion de la justice sociale et de prévention des conflits, a-t-il indiqué citant en particulier le cas du Mexique. Elle pourrait enfin favoriser la construction de sociétés multiculturelles respectueuses de la diversité. Le représentant a en outre exprimé son soutien à la nomination d'un Rapporteur spécial pour les peuples autochtones.

M. PHILIPPE LEBLANC (Franciscain international) a souligné que la situation d'exclusion et de misère dans laquelle se trouvent les populations autochtones dans nombre de pays reste l'une des questions de droits de l'homme non résolues les plus dramatiques. En dépit des récents changements intervenus au Mexique, plusieurs faits attestent la persistance de problèmes de droits de l'homme durables et systématiques liés aux populations autochtones. La mise en oeuvre des dispositions des accords de San Andrés constituent l'un des moyens de procéder aux changements fondamentaux qui s'imposent en la matière. Le Gouvernement mexicain devrait en outre adopter le projet de loi sur les droits et la culture des autochtones qui a été élaboré par la Commission de concorde et de pacification.

M. ALBERTO SALDAMANDO (Conseil international de traités indiens) a demandé une plus grande protection des droits civils, politiques, sociaux, économiques et culturels des populations autochtones. Il a souligné l'importance de disposer d'un Rapporteur spécial sur les droits des populations autochtones. Il est regrettable que certains États continuent à ignorer les souffrances des populations autochtones. Ces populations ont le droit à la dignité. Elles ont le droit de vivre selon la culture et les croyances qui sont les leurs. Il est urgent que la Commission adopte la résolution proposée notamment par le Guatemala et le Mexique sur la création d'un poste de rapporteur spécial sur les droits humains des peuples autochtones.

M. HJALMAR DAHL (Conférence circumpolaire inuit) a exprimé la vive préoccupation des Inuits d'Alaska, du Canada, du Groenland et du Nord russe face à la discrimination raciale systématique dont sont l'objet les populations autochtones au sein même des Nations Unies. Il a estimé qu'il est particulièrement illégitime, immoral et anticonstitutionnel pour les États de chercher à saper les droits fondamentaux et les obligations mentionnés dans le projet de déclaration sur les droits des peuples autochtones considéré par les autochtones comme recueillant les conditions minimales de leur survie. M. Dahl a notamment dénoncé la tentative de sous-évaluer leur statut de peuples et leur droit à l'autodétermination.

M. MATTIAS AHRER (Saami Council) a fait part de sa déception de constater que le Groupe de travail chargé d'élaborer un projet de déclaration sur les droits des peuples autochtones s'est, une fois de plus, trouvé dans l'incapacité d'adopter la moindre disposition de cette déclaration. Le représentant a affirmé que le principal obstacle à l'adoption de nouvelles dispositions de la déclaration a trait à la question de l'autodétermination. Il a précisé qu'il considérait le droit à l'autodétermination comme étant la pierre angulaire de la déclaration et, bien entendu, des droits des populations autochtones en général. Il s'est par ailleurs prononcé en faveur de l'installation à New York du secrétariat de l'instance permanente sur les questions autochtones. Il a en outre exhorté les gouvernements à mettre un terme à toute tentative visant à empêcher les populations autochtones de désigner leurs propres représentants au sein de cette instance. Il s'est également prononcé en faveur de la désignation d'un rapporteur spécial sur les droits de l'homme des populations autochtones et a jugé d'une importance capitale que la situation de ces populations se voit accorder toute l'attention voulue lors de la prochaine Conférence mondiale contre le racisme. Le représentant du Conseil Saami a par ailleurs rappelé que le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a demandé à la Suède d'adopter une législation reconnaissant les droits fonciers du peuple saami.

M. MARCIAL ARIAS (Asociación Napguana) s'est félicité de la Déclaration américaine sur les droits des peuples autochtones. Il a salué la bonne volonté manifestée par les gouvernements des Amériques et les représentants des peuples autochtones. Le représentant a toutefois estimé illogique qu'autant de gouvernements continuent de revenir, s'agissant des peuples autochtones, sur des questions qui figurent déjà dans le droit international et dans les instruments des Nations Unies. Le principe d'indivisibilité des droits des peuples autochtones et du droit à l'autodétermination de ces peuples a déjà été reconnu. Les peuples autochtones attendent beaucoup des discussions du Groupe de travail sur le projet de déclaration sur les droits des peuples autochtones. Le représentant a insisté sur la nécessité de créer un poste de Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones. Il a demandé que l'on établisse des mécanismes réalistes et efficaces de protection et de promotion des droits des peuples autochtones.

MME ORETTA BANDETTINI DI POGGIO (Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples) a mis l'accent sur le principe d'autodétermination mentionné dans l'article 3 du projet de Déclaration sur les droits des populations autochtones. Cela implique de reconnaître les droits des populations autochtones à disposer librement de leurs ressources, de leur culture et de leurs traditions. Elle a préconisé une nouvelle lecture de la notion de droit à l'autodétermination et demandé l'établissement d'un poste de rapporteur spécial sur les questions autochtones.

M. KENNETH DEER (Indigenous World Association) a souligné que les populations autochtones sont les populations les plus marginalisées au monde. Or, la façon dont les choses se passent au sein de cette Commission ne fait que renforcer cet état de fait. En effet, il est insultant pour les populations autochtones de constater le peu d'intérêt qui est accordé à leurs préoccupations, comme en témoigne le fait que les organisations non gouvernementales s'expriment aujourd'hui sur les questions relatives aux populations autochtones alors que les gouvernements ne prendront la parole sur ce sujet que la semaine prochaine, de sorte que les organisations non gouvernementales, qui ne peuvent rester plusieurs jours à Genève, ne pourront réagir à ce que les gouvernements auront à dire sur la question.

M. ALFREDO SFEIR-YOUNIS (Banque mondiale) a estimé que toute politique sur les peuples autochtones devrait être étroitement liée au développement et à la réduction de la pauvreté. Le représentant a également estimé qu'il devrait y avoir une meilleure définition de ceux qui font partie des peuples autochtones. Des mesures juridiques devraient être prises afin de protéger les droits des peuples autochtones à avoir des valeurs culturelles, religieuses et sacrées qui leur sont propres. Leurs possessions devraient être reconnues et leur droit à l'utilisation des ressources naturelles devraient être juridiquement établi. L'impact de l'exploitation des ressources naturelles sur la vie des populations autochtones devrait être pris en compte. La terre n'est pas pour les populations autochtones un facteur de production mais a une valeur sacrée qu'il faut reconnaître lorsqu'il s'agit de leur exploitation par des sociétés modernes.

Le représentant de la Banque mondiale a souligné la nécessité d'intégrer les populations autochtones lorsqu'il s'agit d'élaborer et de mettre en oeuvre les programmes de développement humain, notamment dans les domaines de l'éducation, de la santé, et de la protection sociale. Ces programmes ne doivent pas uniquement renforcer l'héritage des peuples autochtones mais également fournir des moyens pratiques pour réduire leur pauvreté et minimiser l'exclusion sociale. Les personnes chargées d'élaborer des programmes de réforme judiciaire doivent prendre en compte la situation particulière des populations autochtones. Il est important d'encourager un partenariat et une coordination entre organisations représentant les populations autochtones, les institutions spécialisées internationales et les gouvernements en vue d'éliminer la pauvreté et de relever les défis économiques et sociaux. Le représentant s'est félicité de la création de l'instance des populations autochtones qui permet d'encourager le dialogue ente les peuples autochtones et les différents acteurs des sociétés modernes. M. Sfeir-Younis a déclaré que la Banque mondiale soutenait différentes initiatives devant bénéficier aux populations autochtones, notamment en Amérique latine et dans les Caraïbes, en Asie de l'Est et du Sud et dans la région du Pacifique

MME MERIKE KOKAJEV (Estonie) a évoqué le programme mis en place par le gouvernement pour les peuples autochtones ouraliens et finno-ougriens et dont les principaux domaines d'action sont la culture, l'éducation et l'information. Elle a exprimé sa satisfaction en notant qu'une des principales tâches de la Décennie internationale pour les populations autochtones, à savoir l'établissement d'une instance permanente, a été accomplie. Elle a estimé que tous les efforts doivent en outre être déployés pour parvenir à l'adoption de la Déclaration sur les droits des populations autochtones au plus vite afin de permettre un changement dans les conditions de vie d'un certain nombre de population peu nombreuses dont la survie est menacée. L'Estonie considère que les droits des populations autochtones méritent une attention particulière et que la Conférence mondiale contre le racisme pourrait examiner le droit des populations autochtones à une participation effective aux processus décisionnels et identifier des mesures concrètes pour combattre la discrimination dont elles sont victimes.

M. FRANÇOIS NORDMANN (Suisse) a rappelé que son pays s'est proposé d'accueillir à Genève l'instance permanente sur les questions autochtones ainsi que son secrétariat. M. Nordmann a attiré l'attention de la Commission sur certains peuples autochtones que l'on oublie parfois, à savoir les Pygmées de la région des Grands Lacs, les Amazigh et les Bédouins des régions arides ou semi-arides proches de la Méditerranée et les nombreux peuples autochtones de l'Asie du Sud-Est tels les Penan. Ces peuples sont particulièrement vulnérables à des problèmes qui souvent affectent l'ensemble de la population d'une région donnée, qu'il s'agisse de la violence, de la sécheresse ou de l'absence de démocratie. En cette année de dialogue entre les civilisations, il faut affirmer avec force que tous les peuples, autochtones et non autochtones, ont le droit de préserver et de développer leur identité propre.

À ce jour, la Convention nE169 de l'OIT est le seul instrument juridique international protégeant les droits des populations autochtones, a rappelé le représentant suisse. Avant d'envisager une éventuelle ratification de ladite Convention, le Gouvernement suisse a cherché à obtenir des éclaircissements sur son champ d'application. Le Bureau international du travail vient de répondre à nos demandes que les gens du voyage, notamment la minorité Jenisch, pourraient être couverts par cette Convention, non en tant que peuple indigène mais en tant que peuple tribal. En l'espèce, les gens du voyage suisses sont déjà protégés par des instruments tels que la Convention-cadre du Conseil de l'Europe sur la protection des minorités nationales, que la Suisse a ratifiée. Dès lors, sans diminuer l'importance de cette Convention pour les peuples autochtones, la Suisse considère qu'il est d'autant plus important d'aboutir à un texte consacré spécifiquement aux droits de ces peuples sur la base de l'actuel projet de déclaration sur les droits des peuples autochtones. La Suisse note avec intérêt l'idée de désigner, le cas échéant, un rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones.


M. HELENA MINA (Chypre) s'est félicité de la rédaction du projet de déclaration sur les droits des peuples autochtones et de la création de l'Instance permanente des peuples autochtones. Chypre apporte en outre son soutien au Fonds de contribution volontaires pour les populations autochtones. Le représentant a souligné l'importance de parvenir à un consensus entre les gouvernements et les populations autochtones au sujet du projet de déclaration. Le représentant a souligné la nécessité de respecter la diversité des cultures autochtones dans la construction d'une société mondiale intégrée.


* *** *

VOIR CETTE PAGE EN :