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LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTAME SON EXAMEN DES QUESTIONS SE RAPPORTANT AU RACISME ET À LA DISCRIMINATION RACIALE

22 Mars 2001



Commission des droits de l'homme
57ème session
22 mars 2001
Soir



Elle achève son examen du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et son application aux peuples assujettis à une domination coloniale ou étrangère


La Commission des droits de l'homme a entamé ce soir l'examen de son point de l'ordre du jour consacré au racisme, à la discrimination raciale, à la xénophobie et à toutes les formes de discrimination. Elle a été saisie dans ce cadre du rapport du Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l'intolérance qui y est associée.

La Commission a entendu sur cette question les représentants des pays suivants : Suède (au nom de l'Union européenne et des pays associés), Madagascar, Mexique (au nom du Groupe des États d'Amérique latine et des Caraïbes), Norvège, Chine, Sénégal, Lettonie et République tchèque. Le représentant du Comité international de la Croix rouge a également pris la parole.

Les délégations ont toutes reconnu l'importance de l'organisation à Durban de la Conférence mondiale contre le racisme, qui donnera l'occasion à la communauté internationale de se mobiliser sur cette question prioritaire et de proposer des mesures concrètes. La plupart des délégations a souligné la responsabilité primordiale des gouvernements dans la lutte contre le racisme. Certains représentants ont évoqué la nécessité d'établir une meilleure coordination des stratégies, des politiques et des actions entreprises au niveau national, régional et international. De nombreuses délégations ont estimé que la promotion de la tolérance et du respect de la diversité sont des facteurs de stabilité et cohésion sociale. Des représentants ont regretté que le racisme, loin de diminuer, prend des formes pernicieuses qui sont souvent aggravées par la propagation de la haine raciale, notamment par le biais de nouvelles technologies comme l'internet.

La Commission a par ailleurs achevé ce soir son débat sur le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et son application aux peuples assujettis à une domination coloniale ou étrangère, ou à l'occupation étrangère. Elle a ainsi entendu dans ce cadre les représentants des organisations non gouvernementales suivantes: Fédération mondiale de la jeunesse démocratique, Cairo Institute for Human Rights Studies, Pax Romana, Congrès du monde islamique, Muslim World League, Indigenous World Association, Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples, International Educational Development, International Islamic Federation of Student Organizations et Conseil international de traités indiens.


Les intervenants des organisations non gouvernementales ont pour la plupart évoqué des situations particulières comme celles des peuples du Sahara occidental, des territoires palestiniens, du Jammu-et-Cachemire, de la Tchétchénie, de l'Alaska, notamment. Ils ont regretté que certains peuples ne peuvent toujours pas exercer leur droit à l'autodétermination mais continuent au contraire à être victimes de pratiques discriminatoires et de répression de la part de puissances d'occupation.

Les représentants des pays suivants ont exercé leur droit de réponse au titre de ce point : Inde, Pakistan et Maroc.

Clôturant le débat sur le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, le Rapporteur spécial sur la question de l'utilisation de mercenaires, M. Enrique Bernales Ballesteros, a rappelé que les mercenaires figurent parmi les mécanismes qui portent atteinte au droit à l'autodétermination des peuples. Il importe donc de se pencher de façon urgente sur la question de l'impunité de mercenaires, a-t-il estimé.

Au cours de sa prochaine réunion plénière, qui se tiendra demain à 10 heures, la Commission poursuivra son débat consacré au racisme, à la discrimination raciale, à la xénophobie et à toutes les formes de discrimination.

Fin du débat sur le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes

M. ABBA SALEK (Fédération mondiale de la jeunesse démocratique) a déclaré que le Sahara occidental continue de faire face à une situation unique en son genre et très douloureuse. Les droits de l'homme du peuple sahraoui continuent à être bafoués. Le plan des Nations Unies prévoyait la tenue d'un référendum et a abouti à l'accord de Houston. D'après cet accord, les deux parties devaient respecter toutes les dispositions de celui-ci ainsi que les résolutions adoptées par l'ONU pour parvenir à un règlement juste et global. Le processus a permis le recensement de la population. Trois Secrétaires généraux se sont succédé à la tête de l'ONU. Nombreux ont été les Représentants spéciaux et nombreuses les résolutions adoptées par l'ONU. Était-ce pour donner un caractère légal à l'occupation? L'ONU a laissé l'avenir du peuple du Sahara occidental en suspens. Le royaume du Maroc est responsable et n'a pas reconnu ses droits au peuple sahraoui. Le conflit est fondé sur la décolonisation et le peuple sahraoui attend avec impatience d'exercer son droit à l'autodétermination.
MME DIANNE LUPING (Cairo Institute for Human Rights Studies) a déploré que certains considèrent que la réalisation du droit à l'autodétermination des Juifs implique la subjugation des droits des Palestiniens. Il ne s'agit pas ici d'antisémitisme ou de racisme mais de respect des droits et de la nécessité de mettre un terme à l'occupation et aux pratiques discriminatoires à l'encontre des Palestiniens. La puissance occupante israélienne n'a eu de cesse depuis les accords d'Oslo de poursuivre ses activités de colonisation. La représentante a également rappelé que les attributions de l'Autorité palestinienne restent extrêmement limitées et que la responsabilité de la sécurité incombe toujours essentiellement à l'armée israélienne. Israël maintien le contrôle sur tous les déplacements et poursuit son étranglement de l'économie palestinienne, a déclaré la déléguée, appelant la communauté internationale à oeuvrer pour mettre un terme à cette situation.

M. R. J. RAJKUMAR (Pax Romana) a déclaré que le droit à l'autodétermination est fondamental pour pouvoir jouir de tous les autres droits, le déni de ce droit est l'une des causes majeures de conflits. La réalisation de ce droit exige que l'on mette fin à la distinction artificielle entre la «colonisation classique» et la «colonisation interne». L'application moderne du droit à l'autodétermination implique le partage du pouvoir entre les peuples par le biais de formes diverses d'autonomie et n'implique pas nécessairement l'indépendance. Les Nations Unies doivent aider à mettre un tel processus à la portée des parties impliquées dans un différend. Pax Romana demande à la Commission des droits de l'homme de demander à la Sous-Commission pour la promotion et la protection des droits de l'homme de préparer un projet sur la mise en oeuvre du droit à l'autodétermination en tant que contribution à la paix et la sécurité internationale, y compris dans le contexte de colonisation interne.

M. M. AHMAD (Congrès du monde islamique) a déploré la tendance persistante à nier ou à minimiser le droit à l'autodétermination et a évoqué en particulier les situations telles que le Jammu-et-Cachemire, la Palestine, le Kosovo ou la Tchétchénie. Il a notamment demandé l'évacuation sans délai des territoires palestiniens, la mise en oeuvre par le Gouvernement russe des accords signés à l'issue de la première guerre en Tchétchénie, la fin de l'autorité de Belgrade sur le Kosovo et la restauration des droits fondamentaux du peuple cachemirien.


M. ALTAF HUSSAIN QADRI (Muslim World League) a déclaré que le déni du droit à l'autodétermination fait obstacle au plein respect des droits de l'homme. Les peuples doivent pouvoir déterminer librement leur statut politique et jouir de leurs droits politiques, sociaux et culturels. Mais le droit des peuples à l'autodétermination n'est toujours pas respecté, que ce soit dans les territoires palestiniens, ou encore au Jammu-et-Cachemire. Le respect de ce droit est nécessaire pour permettre d'instaurer une paix et une stabilité durable au Moyen-Orient. Les dirigeants du Cachemire ont proposé aux autorités pakistanaises et indiennes d'engager un dialogue constructif. L'Inde a toutefois poursuivi sa politique de répression tout en déclarant des cessez-le-feu. La Commission doit demander à l'Inde qu'elle permette à des mécanismes des droits de l'homme puissent se rendre au Jammu-et-Cachemire.

M. RONALD BARNES (Indigenous World Association) a affirmé que les populations indigènes d'Alaska sont sous la menace d'un effondrement économique s'ils ne se conforment pas au «Pacte unilatéral» connu sous le nom de «Alaska Native Claims Settlement Act» qui prévoit que l'État de l'Alaska, les États-Unis, les groupes environnementaux et les organismes publics créés par le Gouvernement des États-Unis peuvent acquérir des terres sans le libre consentement des populations autochtones. L'annexion de l'Alaska est une violation de la Constitution des États-Unis, a déclaré le représentant.

M. BANDETTINI DI POGGIO (Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples) a dénoncé le rejet par le Gouvernement du Sri-Lanka des offres de paix et du cessez-le-feu unilatéral décrété par les Tigres tamouls, ainsi que les actes de répression à l'encontre des manifestants en faveur de négociations entre le gouvernement et les Tigres tamouls. De nombreux conflits actuels démontrent que les frontières internationales héritées du passé ne correspondent pas à la réalité et doivent être réactualisées pour correspondre aux aspirations à l'auto-détermination des peuples. Le représentant a appelé la Commission a demander instamment au Gouvernement sri-lankais de respecter l'appel au cessez-le-feu du LTTE, de lever le blocus et d'entamer des négociations en vue de parvenir à la paix.

MME. KAREN PARKER (International Educational Development) a déclaré que le peuple du Sahara occidental ne doit accepter rien de moins qu'une souveraineté pleine et entière. Il ne doit pas être victime d'un chantage politique. Ce qui se passe actuellement contribue à saper les droits du peuple du Sahara occidental à l'autodétermination. On cherche à intimider la population en menaçant de prendre des mesures anti-terroristes. L'emploi irresponsable de ces termes va à l'encontre des mesures qui doivent être prises pour lutter contre le vrai terrorisme. La représentante a par ailleurs insisté pour que les droits du peuple cachemirien soient respectés. Il ne faut pas que les Cachemiriens continuent d'être les victimes d'un conflit entre le Pakistan et l'Inde.

M. GHULAM MOHAMMAD SAFI (International Islamic Federation of Student Organizations) a attiré l'attention de la Commission sur les violations des droits de l'homme dans le Jammu-et-Cachemire et sur la violation du droit à l'autodétermination du peuple cachemirien, qui avait pourtant été reconnu par l'Inde et le Pakistan. Mais le droit à l'autodétermination ne disparaît ni avec le temps ni par l'utilisation brutale de la force. L'organisation demande par conséquent à la Commission des droits de l'homme que les obstacles à la réalisation du droit à l'autodétermination du peuple cachemirien soit identifiés et surmontés sans délai et sans nouvelles pertes de vies humaines. Le délégué a demandé que la Haut-Commissaire aux droits de l'homme soit chargée d'un rapport d'évaluation des progrès faits par les Nations Unies dans la mise en oeuvre des résolutions sur le Cachemire et sr la situation en ce qui concerne les toutes les formes de violations des droits de l'homme contre les hommes, les femmes, les enfants, les leaders politiques et les défenseurs des droits de l'homme.

M. MAKIO IBARRA (Conseil international de traités indiens) a rappelé que l'auto-détermination est la condition sine qua non pour que les peuples autochtones puissent jouir de leurs droits fondamentaux et déterminer leur futur. Il a souligné que, dans le monde d'aujourd'hui se déroulent cinquante conflits dont la cause est directement ou indirectement liée à la question de l'autodétermination. Le délégué a mis en garde contre toute lecture restrictive de ce droit. Le déni du droits à l'autodétermination revient à nier le droit à la terre et le droit fondamental de préserver et transmettre le patrimoine culturel autochtone aux générations futures.

Droit de réponse

Le représentant de l'Inde a déclaré que l'autodétermination n'est pas applicable dans le cadre d'États souverains. Il est par conséquent ironique qu'un État comme le Pakistan, régime militaire au pouvoir après avoir renversé les institutions démocratiques, qui forme des terroristes et qui nie lui-même le droit d'autodétermination à ses populations, puisse l'invoquer pour les autres. Il a invité l'Organisation de la Conférence islamique (OCI) à mieux choisir les représentants qui parlent en son nom.


Le représentant du Pakistan, répondant à l'Inde, a estimé que celle-ci nie les principes fondamentaux du droit international. Il a déclaré que le concept d'intégrité territoriale ne s'applique pas à des territoires occupés. Il a en outre déclaré que le peuple pakistanais a choisi d'exercer son droit à l'auto-détermination le même jour où l'Inde en a privé le Cachemire. Il a fait valoir que toutes les initiatives du Pakistan pour trouver une solution au conflit ont été rejetées par l'Inde qui préfère qualifier les combattants de la liberté cachemiriens de terroristes.

Le représentant du Maroc a tenu à répondre à la déclaration faite par l'organisation non gouvernementale «International Educational Development». Comment peut-on parler d'autodétermination en ne prévoyant qu'un seul résultat possible? La prétention et les préjugés de la représentante de cette organisation est regrettable. Qui est-elle au demeurant pour parler au nom de la population du Sahara occidental? Pour que le travail puisse se faire dans des conditions raisonnables il faut que les intervenants soient mandatés, a par ailleurs estimé le représentant.

Le représentant de l'Inde a déclaré apprécier la disponibilité du représentant du Pakistan au dialogue. Il a toutefois suggéré que les activités terroristes du Pakistan ne fassent pas obstacle à la poursuite de ce dialogue.

Le représentant du Pakistan, en réponse au représentant de l'Inde, a indiqué que les négociations engagées entre les deux pays ont échoué à plusieurs reprises du fait de l'attitude de l'Inde. Quant au cessez-le- feu, il a estimé que l'Inde ne fait que jouer pour la galerie et utilise ce prétexte pour couvrir ses exactions et éviter de s'engager dans de réelles négociations.

Présentant ses conclusions sur le débat, le Rapporteur spécial de la Commission sur la question de l'utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l'homme et d'empêcher l'exercice du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, M. ENRIQUE BERNALES BALLESTEROS, s'est félicité que les délégations aient affirmé que le respect du droit à l'autodétermination était au coeur des principes qui régissent les droits de l'homme. Il a rappelé que les mercenaires figurent parmi les mécanismes qui lèsent le droit à l'autodétermination des peuples. Les mercenaires ne sont pas punis pour les crimes qu'ils ont commis et il importe donc de se pencher de façon urgente sur la question de l'impunité. Il existe une vraie lacune juridique même si une Convention sur la lutte contre les mercenaires a été approuvée. Le Rapporteur spécial a appelé les États à ratifier cet instrument sans plus attendre afin de pouvoir mieux défendre et appliquer le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes.

Examen des questions relatives au racisme, à la discrimination raciale, à la xénophobie et à l'intolérance qui y est associée

Le Secrétariat de la Conférence a donné lecture d'un message du Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l'intolérance qui y est associée, M. MAURICE GLÈLÈ-AHANHANZO, dans lequel celui-ci met l'accent sur les enjeux de la prochaine Conférence mondiale contre le racisme, estimant qu'elle offre à l'humanité l'occasion de se confronter aux démons qui hantent son passé, qui altèrent son présent et obscurcissent son futur. Car en réalité, pour tous les peuples, le temps n'a pas de structure rigide et une course linéaire, il est une totalité permanente et malléable qui garde les empreintes de nos actes. Il faut un minimum de reconnaissance des faits qui ont existés et une repentance pour que s'allège le poids du passé.

Dans son rapport sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l'intolérance qui y est associée (E/CN.4/2001/21), le Rapporteur spécial souligne qu'il a mis l'accent sur les manifestations d'antisémitisme qui ont eu lieu en Autriche, en Allemagne, en Australie, au Royaume-Uni, en Russie et en Ukraine. Il traite également de la violence raciste et des activités des organisations d'extrême droite et néonazies en Autriche et en Norvège. Le Rapporteur spécial y fait également état de la discrimination raciale dans l'application de la peine de mort aux États-Unis, ainsi que du racisme environnemental et de la discrimination raciale dans la lutte contre la drogue dans ce pays. Le rapport comporte aussi des informations sur la situation des Dalits en Inde. Quant aux allégations examinées par le Rapporteur spécial, elles concernent l'Autriche, le Canada, la Colombie et Israël. En ce qui concerne le suivi des missions sur le terrain, le rapport comporte des éléments d'information sur les mesures envisagées en Afrique du Sud pour éliminer les conséquences de l'apartheid, sur la situation des Roms en Hongrie et en République tchèque et sur la montée de l'extrême droite en Roumanie. Le Rapporteur spécial a également exposé les mesures prises par les Gouvernements allemand et suisse pour lutter contre la propagande raciste et les activités des organisations ou individus qui incitent à la haine raciale.

Le rapport indique que plusieurs impondérables ont entraîné le report de la visite du Rapporteur spécial en Australie mais que le Gouvernement australien a informé le Rapporteur de son désir de le recevoir dans le courant du mois d'avril 2001. Cette visite portera sur les principaux sujets de préoccupation déjà soulevés par le Rapporteur, à savoir les effets des amendements à la loi sur l'accès à la propriété foncière des aborigènes, le processus de réconciliation intra-australien, les mesures prises en faveur des aborigènes séparés de leur famille pendant leur enfance et forcés à l'assimilation au mode de vie européen et la situation des jeunes aborigènes face au système judiciaire. Suite à des allégations reçues concernant la situation de plusieurs groupes ethniques au Canada, notamment dans la province de la Nouvelle-Ecosse, le Rapporteur spécial a fait part aux autorités canadiennes de son souhait d'examiner sur place les cas portés à sa connaissance. Le Gouvernement canadien s'est montré favorable à cette démarche.

En conclusion, le Rapporteur spécial juge préoccupant que le racisme se pratique au quotidien et emprunte de plus en plus la forme de la xénophobie par le rejet de l'autre et la défense du communautarisme, l'ethnocentrisme et par des conflits interethniques, ainsi que par la recrudescence inquiétante des mouvements d'extrême droite et néonazis. Dans la perspective de la Conférence mondiale contre le racisme qui se tiendra à Durban cette année, le Rapporteur spécial réitère les recommandations faites devant l'Assemblée générale - à savoir que les États qui ne l'ont pas encore fait devraient ratifier la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale avant la Conférence et créer des institutions nationales de protection et de promotion des droits de l'homme en mettant un accent particulier sur la lutte contre le racisme. Il conviendrait en outre que la Commission se penche sur la question de mettre en place, au sein du Haut-Commissariat aux droits de l'homme, un programme majeur ou un service qui se consacrerait à la lutte contre les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale et de l'intolérance qui y est associée.

Débat sur le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qui y est associée

M. JOHAN MOLANDER (Suède, au non de l'union européenne et des pays associés) a déclaré qu'aucun pays n'est à l'abri du fléau du racisme, qui constitue une offense à la dignité de l'homme. Les gouvernements ont la responsabilité de protéger toute personne contre le racisme et la discrimination raciale. De surcroît, la promotion de la tolérance et du respect de la diversité sont des facteurs de stabilité et de cohésion sociale. Dans cette perspective, il est essentiel de respecter les droits civils et politiques ainsi que les droits économiques sociaux et culturels. La Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale représente la base de toute coopération internationale et de ce fait, l'Union européenne et les pays associés se félicitent du nombre croissant de ratifications. Ainsi, l'Union européenne insiste auprès des pays qui ont émis des réserves à la Convention afin qu'ils retirent celles qui sont incompatibles avec la Convention, et qu'ils acceptent la compétence du Comité pour recevoir les plaintes individuelles.

En ce qui concerne la Conférence mondiale de Durban contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qui y est associée, M. Molander a affirmé que pour qu'elle aboutisse à un résultat tangible pour tous, il faut qu'elle soit ambitieuse, concrète et orientée vers une action contre les formes contemporaines de racisme et discrimination raciale. Dans cette perspective, elle devrait traiter de manière complète la dynamique de la discrimination contre les femmes et développer des stratégies pour éradiquer les discriminations fondées sur le sexe. Le respect pour la diversité et la tolérance constituent un défi pour tout gouvernement et société, et la Conférence mondiale contre le racisme qui se tiendra en Afrique du Sud offre l'occasion de réitérer les engagements pour lutter et éradiquer toute forme de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et d'intolérance qui y est associée.

M. MAXIME ZAFERA (Madagascar) a déclaré que sa délégation se félicitait de la prochaine tenue à Durban de la Conférence mondiale contre le racisme et la discrimination raciale. Le succès de cette Conférence dépendra non seulement de la volonté de la communauté internationale de lui accorder son soutien mais aussi du sérieux apporté à sa préparation. Madagascar regrette que le projet de Déclaration et de Programme d'action préparé par le Secrétariat ne reflète pas complètement les positions clefs exprimées lors des conférences régionales. S'agissant de la Conférence régionale de Dakar, l'essentiel de la position africaine n'a pas été pris en considération dans le document du Secrétariat, a regretté le représentant. L'Afrique est la région qui a le plus souffert du racisme, de la discrimination raciale, du colonialisme et la délégation malgache ne saurait accepter un projet de Déclaration et de Programme d'action qui occulterait certaines injustices historiques telles que la traite négrière transatlantique qui, par sa monstruosité, son caractère barbare et son ampleur, constitue un crime contre l'humanité et le colonialisme dont les conséquences néfastes continuent toujours de se faire sentir. Madagascar estime légitime le droit des victimes de ces injustices de réclamer et d'obtenir réparation et exprime l'espoir qu'au cours des travaux futurs du Comité préparatoire, un large consensus se dégagera à ce sujet.

Madagascar reconnaît que des efforts ont été accomplis sur le plan national, régional et international mais estime qu'ils n'ont pas suffi pour éliminer les fléaux du racisme et de la discrimination raciale qui, au lieu de diminuer, prennent des formes pernicieuses, parfois violentes, aggravées par la propagation de la haine raciale par le biais de nouvelles technologies, y compris l'internet. La délégation malgache convient que la lutte contre le racisme et la discrimination raciale est une oeuvre très ardue et de longue haleine qui doit mobiliser non seulement les autorités nationales mais aussi les différents éléments de la société civile, y compris les organisations non gouvernementales, ainsi que les médias qui ont un grand rôle à jouer dans la sensibilisation de l'opinion publique. Cette lutte requiert aussi la prise de mesures vigoureuses pour renforcer les actions déployées au niveau national. Madagascar partage entièrement les propositions faites au cours des travaux du Comité préparatoire tendant à renforcer la coopération internationale et les différents mécanismes des Nations Unies oeuvrant pour le combat contre le racisme et la discrimination raciale.

MME MARICLAIRE ACOSTA (Mexique, s'exprimant au nom du Groupe des États d'Amérique latine et des Caraïbes) a indiqué que pour son continent, la Conférence mondiale est un véritable défi à relever dans la recherche de sociétés plus intégrées où le respect de l'autre et la valorisation de la diversité constituent la base de la convivialité, de la cohésion sociale et un facteur clé pour la préservation de la paix et de la sécurité internationales. À cet égard, la Conférence régionale de Santiago, à travers sa Déclaration finale et son Plan d'action, a identifié certaines préoccupations centrales de la région. Mme Acosta a cité en particulier la proposition de reconnaître que l'esclavage et autres formes de servitude des personnes d'origine africaine et des peuples autochtones des Amériques sont moralement répréhensibles, qu'elles ont pu constituer des crimes au regard du droit international et que leurs conséquences actuelles nécessitent réparation.

La Déclaration de Santiago a également exprimé la détermination des pays de la région à tempérer les effets de la mondialisation tels que, en particulier, l'homogénéisation culturelle et l'exclusion de certains groupes. Elle a aussi décrit et caractérisé les différentes catégories de victimes. Mme Acosta a en outre insisté sur la nécessité de déboucher sur des recommandations concrètes et des actions visant à informer, éduquer et prévenir toute forme de discrimination raciale mais aussi sur l'importance d'atteindre un accord qui intègre les apports des différentes régions du monde.

M. SVERRE BERGH JOHANSEN, Ambassadeur de la Norvège a déclaré que la lutte contre le racisme est loin d'être acquise et que le racisme est un problème qui concerne tous les pays. Alors que l'apartheid fait partie désormais de l'histoire, pogroms et génocides ont fait leur réapparition, ce qui démontre que la tolérance et le respect sont à la base de la coexistence pacifique. La lutte contre la pauvreté et pour l'égalité des chances en faveur du développement, a-t-il poursuivi, sont à la base de toute tentative pour éradiquer le racisme car il menace la démocratie et les droits de l'homme sur le plan national, et est un obstacle aux relations amicales entre les nations sur le plan international. C'est la raison pour laquelle la Conférence mondiale constitue un moment très important et mérite toute notre attention et engagement. Alors que les enfants et les jeunes représentent le futur, le Gouvernement norvégien se félicite que la Conférence y portera toute son attention.

M. LA YIFAN (Chine) a souligné l'importance de la Conférence mondiale contre le racisme qui doit se tenir à Durban. Le représentant s'est félicité de la tenue de réunions régionales préparatoires. La Conférence doit passer en revue l'expérience historique et proposer de nouvelles stratégies et des objectifs concrets. L'apartheid a été éliminé, ce qui est bien évidemment une victoire énorme. Pourtant, de nouvelles formes de racisme voient le jour comme la xénophobie, la discrimination contre les travailleurs migrants et le néo-fascisme. La mondialisation de l'économie a contribué à créer des problèmes nouveaux pour les pays en développement. Ces pays sont confrontés à des problèmes qui menacent leur souveraineté nationale et leur sécurité économique. La Conférence mondiale constitue un événement majeur et va contribuer à attirer une attention particulière de la communauté internationale sur ce fléau. Le contenu de la Déclaration et le Programme d'action ne doit pas être dilué. Les États doivent créer les conditions nécessaires pour le succès de la Conférence. La Chine se félicite de la contribution importante des ONG. Le représentant a fait valoir que la Chine a signé la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. En outre, la délégation chinoise a pris une part active aux différents travaux préparatoires de la Conférence et a apporté une contribution financière à la Conférence mondiale.

MME ABSA CLAUDE DIALLO (Sénégal) a déploré que le bilan des deux décennies consacrées par l'Organisation des Nations Unies à la lutte contre le racisme soit loin d'être satisfaisant. Dès lors, la prochaine Conférence de Durban apparaît comme une incitation à réfléchir et une invitation à se mobiliser pour envisager des solutions concrètes. Elle devra permettre d'améliorer sensiblement la rapidité, l'efficacité et la flexibilité des actions entreprises notamment avec la mise en place de systèmes d'alerte et d'un mécanisme adapté de coordination des stratégies, des politiques et des actions nouvelles. Mme Diallo a mis l'accent à cet égard sur la nécessité d'accroître les ressources consacrées à la lutte contre le racisme.

Mme Diallo a rappelé le lourd tribut payé par le continent africain au racisme et à la discrimination raciale. À cet égard, elle a estimé que la communauté internationale devrait être incitée à reconnaître l'esclavage comme crime contre l'humanité. Indiquant que l'Afrique sera au rendez-vous de Durban dans un esprit de tolérance et de partage, elle a rappelé que cela implique également la capacité à faire sa propre introspection, exercice qui dans le cas de l'Afrique, renvoie les images de tensions et d'affrontements inter-ethniques. Mme Diallo, citant le Président Wade, a invité à se pencher sur l'histoire pour affronter l'avenir et vaincre le cycle infernal de la résurgence du racisme.

M. FERNANDO LUGRIS (Uruguay) a réaffirmé l'engagement de son pays à ne ménager aucun effort pour que la Conférence mondiale de Durban contre le racisme soit un succès. A ses yeux, la Commission doit se préoccuper avant toute chose des documents qui vont sanctionner les travaux de la Conférence lesquels doivent renfermer des mesures concrètes pour lutter contre le racisme. Le représentant uruguayen a souligné l'importance des mesures à prendre dans le domaine de l'éducation, de l'information, du développent technologique que représente l'internet et de la protection des groupes vulnérables comme par exemple les migrants. Le représentant a par ailleurs indiqué que l'Uruguay vient de déposer l'instrument de ratification de la Convention pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

M. JANIS KARKLINS (Lettonie) a souligné que le respect des droits de l'homme constitue l'essence de la sécurité humaine. Les Nations Unies ont défini des normes juridiques visant à supprimer le racisme. La jurisprudence nationale et internationale a pourtant certaines limites. La Lettonie a adopté des mesures allant dans le sens de l'intégration des droits de l'homme dans sa législation nationale. La Lettonie compte organiser une réunion préparatoire de la Conférence mondiale contre le racisme à Riga en mai prochain. Le représentant letton a ajouté que son pays adresse une invitation permanente aux différentes procédures de la Commission des droits de l'homme. La Lettonie souhaite signaler que l'éducation est un des éléments les plus importants pour remédier aux problèmes de racisme et de la discrimination. L'éducation permet une prise de conscience et l'enseignement de la tolérance à l'école constitue la pierre angulaire pour résoudre le problème du racisme. Le représentant a indiqué que le système éducatif a été réformé en Lettonie et que la société civile renforce de plus en plus son rôle dans le domaine de l'éducation.

MME IVANA SCHELLONGOVA (République tchèque) a souhaité attirer l'attention sur les stratégies visant à éliminer la discrimination, la xénophobie et l'intolérance. Elle a rappelé que cette lutte se heurte souvent à la peur et à l'ignorance et que si des mécanismes nouveaux semblent nécessaires, il faut également mettre pleinement en oeuvre les instruments déjà existants. Elle a réitéré que la responsabilité première de cette lutte relève des États et cité un certain nombre de mesures prises par son gouvernement. Elle a également estimé qu'il doit y avoir un appui plus fort des gouvernements centraux aux activités locales et régionales visant à soutenir l'intégration multi-culturelle. Au niveau international, les gouvernements devraient s'attacher à signer et ratifier les instruments internationaux fondamentaux pour l'éradication des ces phénomènes et s'acquitter de leurs obligations au titre e l'Article 9 de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Ils devraient en outre faire une déclaration au titre de l'Article 14 pour reconnaître la compétence du Comité sur l'élimination de la discrimination raciale comme l'a fait la République tchèque en octobre 2000, a ajouté la représentante.

M. UMESH PALWANKAR (Comité International de la Croix-Rouge - CICR) a attiré l'attention de la Commission sur la relation entre la discrimination raciale et les conflits. Le CICR estime que la Conférence mondiale de Durban devrait aborder de manière adéquate la question de la non-discrimination dans les conflits armés. Le principe de non-discrimination est au coeur du droit international humanitaire, dont le premier objectif est de protéger les victimes des conflits armés. Le droit international humanitaire contemporain incorporé dans les quatre Conventions de Genève de 1949 et dans les deux Protocole de 1977 interdit la discrimination dans les conflits armés, y compris dans les conflits non-internationaux. Le Comité international de la Croix-Rouge estime que la Conférence mondiale devrait refléter l'importance du principe de non-discrimination comme fondement du droit international humanitaire et prêter une attention appropriée à la lutte contre l'impunité de ceux qui violent le droit international humanitaire. Il estime que la Conférence mondiale devrait demander aux États d'adopter des législations nationales interdisant et punissant les crimes de guerre et reconnaissant le principe de juridiction universelle pour ces crimes.


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