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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT DU CHILI

10 août 1999



APRÈS-MIDI


HR/CERD/99/45
10 août 1999



Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a entamé, cet après-midi, l'examen du rapport périodique du Chili sur l'application, par ce pays, des dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Présentant le rapport du Chili, M.Alejandro Salinas, Conseiller aux droits de l'homme auprès du Ministère des affaires étrangères, a indiqué qu'à ce jour, environ 2500 communautés et 350 associations autochtones ont été constituées dans le pays en vertu de la Loi autochtone de 1993. L'amélioration récente de leur situation est également due à la mise en oeuvre, en 1998, d'un plan de consultation et de soutien juridique. Au cours de l'année passée, la qualité des services de la Société nationale de développement autochtone (CONADI) a été améliorée. M.Salinas a fait valoir que le 24 juin a été officiellement proclamé Journée des populations autochtones. Il a ajouté que le Congrès est actuellement saisi d'un projet de loi portant sur la discrimination raciale, visant à la modification du code pénal.

La délégation chilienne est également composée de Mme Andrea Aravena, chef du Bureau des affaires autochtones de la CONADI, ainsi que de représentants du Ministère chilien des affaires étrangères.

L'expert chargé de l'examen du rapport du Chili, M.Luis Valencia Rodríguez, a estimé que la Loi autochtone de 1993 constitue un élément très positif. Il a cependant évoqué un certain nombre de cas de violations des droits de minorités, en particulier à l'égard des Mapuches. Quant à la migration péruvienne, son intégration à la société chilienne et au marché du travail a attiré l'attention du Comité. À cet égard, des experts ont estimé discriminatoire la pratique voulant que le permis de travail ne soit accordé aux Péruviens que si «aucun Chilien ne postule l'emploi ou ne satisfait les critères requis».

Les membres suivants du Comité sont également intervenus : M.Eduardo Ferrero Costa, M.Theodoor Van Boven, M.Rüdiger Wolfrum, M.Mahmoud Aboul-Nasr, M.Régis de Gouttes, M.Michael Parker Banton, M.Mario Jorge Yutzis et M.Ivan Garvalov.

Le Comité achèvera l'examen du rapport du Chili demain matin, à partir de 10 heures.

Présentation du rapport du Chili

Présentant le rapport de son pays, M.Alejandro Salinas, Conseiller aux droits de l'homme auprès du Ministère des affaires étrangères du Chili, a procédé à une mise à jour des informations fournies dans le rapport. Depuis 1990 jusqu'à ce jour, les gouvernements démocratiques ont adopté des mesures visant à protéger les cultures autochtones. La loi promulguée en 1993 reconnaît officiellement qu'il existe plusieurs ethnies et établit la nécessité de procéder à des recensements afin d'évaluer la situation à cet égard. Elle reconnaît également une structure, appelée la «communauté autochtone». Ainsi, à ce jour, environ 2500 communautés et 350 associations autochtones ont été légalement constituées dans le pays. En outre, de 1994 à 1998, 5304 familles autochtones ont bénéficié d'une politique de cession de terres en faveur des autochtones. Par ailleurs, en vertu d'une loi sur un Fonds de développement autochtone, l'État a investi environ 8 millions de pesos en 1999 en faveur de programmes de développement socio-économique. Dans ce cadre, la délégation a indiqué que le 5 août dernier, le Président de la République a annoncé la création de deux nouvelles zones de développement.

Dans le domaine de l'éducation, 48 200 bourses ont été octroyée depuis 1993 à des enfants de familles autochtones pour l'enseignement de base et professionnel. Un effort a également été accompli pour assurer une éducation interculturelle bilingue et pour le développement des langues vernaculaires. En vue de pallier les situations historiques de discrimination, les gouvernements démocratiques ont procédé à la création de Bureaux des affaires autochtones. Ainsi, les communautés kawashkar (Alacalufes), composée de 101personnes, et yámana, composée de 74 personnes, font l'objet d'un programme de valorisation culturelle et de développement économique. En ce qui concerne la communauté rapa nui de l'île de Pâques, elle bénéficie d'une école bilingue, qui emploie 12 professeurs rapa nui. Le premier dictionnaire rapa nui/espagnol a été publié en 1998, a ajouté la délégation.

M.Salinas a indiqué que la situation des autochtones au Chili s'est récemment améliorée grâce à la mise en oeuvre en 1998 d'un plan de consultation et de soutien juridique. Au cours de l'année passée, la qualité des services de la Société nationale de développement autochtone, CONADI, a en outre été améliorée. De plus, un service autochtone in situ assuré par les délégués municipaux a été mis en place. Le représentant a informé le Comité sur la constitution, le 23 avril 1999, de la Commission autochtone de l'île de Pâques. En outre, le 24 juin a été officiellement proclamé Journée des populations autochtones par décret suprême du Président de la République. La délégation a indiqué que le Congrès est actuellement saisi d'un projet de loi relatif à la discrimination raciale, visant à la modification du Code pénal, qui stipule que tout acte discriminatoire à l'égard des autochtones constitue un délit. La loi sur les abus dans le domaine de la publicité incorpore également les références à l'origine ethnique comme nouvelle catégorie de délit. Cependant, il n'existe pas de cas de discrimination raciale commise par un fonctionnaire de l'État dans le cadre de ses fonctions.

Le rapport du Chili (CERD/C/337/Add.2) en date du 29 octobre 1998, réunit les onzième, douzième, treizième et quatorzième rapports périodiques. Il présente tout d'abord les aspects généraux de la discrimination raciale au Chili, en communiquant les informations recueillies par des organismes publics et privés et par des universités, résultats qui n'avaient pas été mis en relief jusqu'à la restauration du système démocratique de gouvernement au début des années 90. Cependant, le rapport indique que le préjugé entourant les populations autochtones a diminué grâce à la conjonction de trois facteurs principalement: l'action des organisations autochtones, la reconnaissance des autochtones par l'État, qui a adopté une législation leur reconnaissant des droits et leur octroyant des prestations, et un climat plus propice dans toute l'Amérique latine à la reconnaissance des groupes autochtones, de leur passé, de leurs valeurs et de leurs cultures par l'ensemble des populations non autochtones.

Au titre des mesures prises par le Gouvernement pour résoudre les problèmes nés de la discrimination raciale, un recensement démographique entrepris en 1992 a permis de dénombrer les Mapuches, les Aimaras et les Rapa Nui. Au total, 7,4% de la population résidant sur le territoire national s'est déclarée autochtone. En 1993, un loi relative aux autochtones a été votée, qui assure la protection et le développement des autochtones, et instituant des mesures d'encouragement à cette fin. Elle a donné lieu à la création de la Société nationale de développement autochtone (CONADI), qui est devenue pleinement opérationnelle en 1994. Elle procède notamment à l'acquisition et à la cession de terres en faveur des communautés autochtones. Elle défend également les intérêts des autochtones dans différents litiges concernant les travaux d'infrastructure notamment. Les politiques de l'État en faveur des groupes autochtones comprennent également l'octroi de bourses, la mise en place d'un enseignement interculturel bilingue, de jardins d'enfants autochtones et des programmes de développement.

Le rapport fait également état de nouveaux flux migratoires, d'une composition très variée, la plus grande part correspondant aux pays voisins, en particulier le Pérou. Le rapport étudie en particulier l'émigration coréenne et l'émigration péruvienne.


Examen du rapport du Chili

L'expert chargé de l'examen du rapport du Chili, M.Luis Valencia Rodríguez, a pris note que l'existence de la discrimination raciale au sein de la société chilienne soit reconnue. Cette transparence permet un examen en profondeur de la situation dans le pays.

M. Valencia Il a souligné l'importance du recensement national de 1992, dont les résultats fournissent des informations précises sur les différentes minorités ethniques. Il a noté que le processus de reconnaissance des droits des autochtones est long et difficile, et reste jalonné d'affrontements et d'incidents. Le recensement fait aussi apparaître la présence d'autres groupes minoritaires: coréens, arabes, juifs, péruviens et une petite population noire africaine. Un expert a demandé des informations sur les mesures prévues par le Gouvernement chilien pour modifier les comportements racistes de la population. La tenue de séminaires portant sur les questions autochtones a été encouragée, afin de diffuser la compréhension et la tolérance entre les différentes composantes de la population. De même, la question de la formation des fonctionnaires de justice et de police en matière de droit de l'homme a été soulevée par les experts. La diffusion du rapport et les conclusions du Comité par le biais d'une publication en plusieurs langues a également été conseillée.

M.Valencia Rodríguez a estimé que la Loi autochtone de 1993 constitue un élément très positif du rapport. Dans ce cadre, il a encouragé l'élargissement de la représentation des populations autochtones à la CONADI. Il serait nécessaire de préciser son rôle dans le cadre de l'application des politiques de cession des terres. Il a souligné l'importance de la création de «fonds des terres et des eaux» en faveur des autochtones, qui tiennent en outre compte de la question de l'égalité entre les sexes. La manière dont les terres sont récupérées et le pourcentage des terres agricoles remises aux autochtones ont fait l'objet de questions. Un expert a en outre demandé plus d'informations sur la politique de distribution de terres étant donné qu'elle donne parfois lieu à des incidents. Il a cependant été regretté que le rapport n'évoque pas les populations autochtones citadines, se concentrant sur les populations rurales exclusivement. De plus, des experts se sont interrogés sur les incidences effectives des lois favorables aux autochtones sur la crise identitaire des Mapuches.

Au sujet des nouveaux flux de migration, l'expert a mentionné la communauté coréenne, composée de quelque 350 familles. Cette communauté connaît encore des difficultés liées à la discrimination raciale. Ses conditions de vie, en matière d'habitat, d'éducation, de santé et de citoyenneté ont fait l'objet de nombreuses questions. M.Valencia Rodríguez a par ailleurs déclaré que le flux de migration péruvienne comporte deux facettes: une migration près des frontières, où des femmes viennent chaque semaine effectuer des travaux domestiques, et une migration plus permanente dans les terres. Cette migration demande plus de précisions quant à la manière dont ces migrants sont intégrés à la société chilienne et au marché du travail. À cet égard, des experts ont estimé discriminatoire la pratique voulant que le permis de travail ne soit accordé aux Péruviens que si «aucun Chilien ne postule l'emploi ou ne satisfait les critères requis».

Au titre de l'article 4 de la Convention, relatif à l'interdiction de la propagande raciste, les experts ont estimé que la législation chilienne est encore incomplète. Elle ne prévoit pas de sanctions pour les activités d'organisations propageant des idées racistes. Ils ont demandé des informations sur les mesures prévues afin d'assurer la pleine application des dispositions de cet article de la Convention. Les sanctions des délits de racisme ne sont que pécuniaires, ce qui en fait des délits mineurs ne conduisant à aucune peine d'emprisonnement. Cette lacune dans le code pénal a été déplorée par plusieurs intervenants.

M.Valencia Rodríguez a demandé des informations sur les procès intentés au titre de l'article 6 de la Convention. Il a ainsi évoqué un certain nombre de cas de violations des droits de minorités, en particulier à l'égard des Mapuches. Par exemple, des conflits ont opposés en avril 1998 des Mapuches et des compagnies telles que Volterra Ltd, Mitsubishi Shell et Amindus, se terminant par l'arrestation de 12 personnes à Temuco et de deux personnes à Santiago, toutes Mapuches. De même, un conflit a opposé une communauté mapuches et des entreprises forestières dans la région de Lumaco, qui a eu pour conséquence l'agression le 7 août 1998 d'une dirigeante mapuche par le Président de la région. Concernant le procès en discrimination raciale concernant une immigrée coréenne à qui on a refusé la prestation d'un service (§ 63), des experts ont demandé quelle procédure légale a été suivie dans ce cas. Des experts ont également demandé des éclaircissements sur l'existence d'une communauté néo-nazie au Chili.

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