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Examen du Qatar devant le CERD : la situation des non-nationaux, et en particulier celle des travailleurs migrants, est au cœur du dialogue

18 avril 2024

Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD, selon l’acronyme anglais) a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport présenté par le Qatar au titre de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Au cours du dialogue noué entre les experts membres du Comité et une délégation qatarienne conduite par M. Turki Abdulla Al-Mahmoud, Directeur du Département des droits de l’homme du Ministère des affaires étrangères du Qatar, un membre du Comité s’est félicité des réformes adoptées par le Qatar en vue de l'abolition totale du système de parrainage (kafala) et en faveur de l'amélioration des droits des travailleurs migrants et des conditions de travail. Persistent cependant entre les employeurs et les travailleurs migrants des déséquilibres de pouvoir et des pratiques enracinés dans le système de la kafala, a-t-il toutefois relevé, soulignant notamment que les employeurs interdisent toujours aux travailleurs migrants de passer à un employeur concurrent, et que certains travailleurs migrants sont toujours tenus d'avoir un permis de sortie de l'employeur pour pouvoir quitter le pays.

Alors qu’environ 90% de la population du Qatar est constituée de non-ressortissants, les travailleurs expatriés constituent le groupe de non-nationaux qui subit le plus l'impact des pratiques discriminatoires raciales, a souligné l’expert. Il a notamment relevé que les travailleurs migrants, en particulier les travailleurs à bas salaire dans les secteurs de la construction, des services, de la sécurité privée et du travail domestique, étaient souvent confrontés à des non-paiements ou à des retards de paiement de leurs salaires, et que les entreprises traitaient les employés différemment en fonction de leur nationalité, de leur race et de leur langue.

L’expert a par ailleurs souligné que, d'après les informations reçues, les apatrides et les migrants sans papiers rencontrent des difficultés pour accéder aux soins de santé. De plus, a-t-il constaté, on compte un nombre limité de places pour les non-Qatariens dans les écoles publiques et communautaires au Qatar.

Ce même expert s’est par ailleurs enquis des mesures prises pour modifier la loi sur la nationalité afin de permettre aux femmes qatariennes mariées à des non-ressortissants de transmettre sans discrimination leur nationalité à leur conjoint étranger et à leurs enfants dès la naissance, en particulier pour les enfants qui, autrement, seraient apatrides.

L’expert a d’autre part relevé que l'État n'avait pas encore adopté de définition de la discrimination raciale conforme à l'article premier de la Convention.

Une experte membre du Comité a pour sa part souligné que, selon les rapports dont dispose le Comité, les travailleurs migrants sont victimes de discrimination dans les tribunaux et de la part de la police. Elle a en outre relevé que de nombreux rapports remis au Comité soulignent que les stéréotypes raciaux et ethniques prévalent au Qatar, tant dans la sphère publique que privée, en particulier à l'encontre des personnes originaires d'Asie du Sud et d'Afrique subsaharienne. Elle a d’autre part fait remarquer que les non-nationaux ne bénéficient d'aucune protection, constitutionnelle ou autre, en matière de liberté d'association. L’experte a mentionné d’autres informations selon lesquelles les non-nationaux appartenant à des minorités religieuses sont confrontés à une discrimination croisée fondée sur la nationalité et la religion.

Les tests médicaux obligatoires pour travailleurs migrants, y compris le dépistage obligatoire du VIH/sida, ne sont pas acceptables au regard de la Convention, a-t-il en outre été rappelé.

Le Comité a été informé de plusieurs cas de mauvais traitements et de discrimination à l’encontre de ressortissants étrangers et de membres de minorités nationales au Qatar, a ajouté un expert.

Un expert a pour sa part jugé positif l’accueil de nombreux étrangers par le Qatar et a estimé que l’on ne pouvait pas parler de discrimination raciale ni de racisme dans ce pays.

Présentant le rapport de son pays, M. Al-Mahmoud a notamment indiqué que, pour son pays, le respect des observations et recommandations formulées par le Comité était une priorité. L'État du Qatar traverse une phase remarquable de son histoire, à savoir son évolution vers un développement complet, inclusif et accéléré, qui lui permet d'enregistrer des taux de croissance et de redressement économique sans précédent, a-t-il poursuivi. Les travailleurs migrants jouent un rôle essentiel dans ce développement, et l'État du Qatar apprécie les contributions de ces travailleurs, qu’il considère comme de véritables partenaires de son projet de développement, a souligné M. Al-Mahmoud. C'est donc un choix stratégique pour le Qatar de protéger et de promouvoir les droits des travailleurs migrants, a-t-il déclaré.

Depuis la présentation du présent rapport, en septembre 2021, l'État a pris des mesures pour promouvoir et renforcer l'infrastructure des droits de l'homme aux niveaux législatif, institutionnel, stratégique et de la coopération internationale. Ainsi, convaincu de l'importance du rôle effectif des conventions et traités internationaux, en particulier ceux relatifs aux droits de l'homme, l'État du Qatar a adhéré aux deux Pactes internationaux relatif aux droits de l’homme, a rappelé M. Al-Mahmoud. L'État du Qatar a également entrepris récemment des réformes législatives importantes, y compris l’adoption d’un cadre réglementaire régissant les droits des travailleurs expatriés, a-t-il en outre souligné.

Complétant cette présentation, un représentant de la Commission nationale des droits de l’homme (institution nationale de droits de l’homme) du Qatar a salué des évolutions positives dans le domaine du travail et de la protection des droits des travailleurs, en particulier l'abolition des autorisations de sortie et du système de parrainage (kafala). Il a toutefois recommandé à l’État d’accélérer la promulgation de lois compatibles avec les normes internationales pertinentes, de favoriser la création d'associations, de donner plus d'espace à la société civile et enfin d’envisager d'élaborer une stratégie nationale des droits de l'homme.

La délégation qatarienne était également composée, entre autres, de représentants des Ministères des affaires étrangères, de l’intérieur, de la justice, de la santé publique, de l’éducation et des sciences, ainsi que du développement social et de la famille.

Pendant le dialogue, la délégation a précisé que le Qatar collaborerait avec les parties prenantes pour adopter une définition de la discrimination raciale conforme à la Convention. Les concepts d’égalité et de non-discrimination sont d’ores et déjà mentionnés dans les textes juridiques, a-t-elle ajouté, avant de souligner que la loi s’appliquait à tous, sans aucune discrimination.

Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport du Qatar et les rendra publiques à l’issue de sa session, le 26 avril prochain.

Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l’examen du rapport de la République de Moldova.

Examen du rapport du Qatar

Le Comité est saisi du rapport valant vingt-deuxième et vingt-troisième rapports périodiques du Qatar (CERD/C/QAT/22-23).

Présentation

Présentant le rapport de son pays, M. TURKI ABDULLA AL-MAHMOUD, Directeur du Département des droits de l’homme du Ministère des affaires étrangères du Qatar, a notamment indiqué que, pour son pays, le respect des observations et recommandations formulées par le Comité était une priorité. L'État du Qatar s’efforce d'appliquer lesdites recommandations sur le terrain, avec pour effet de sensibiliser les Qatariens à l’importance de respecter la Convention et de renforcer les réformes législatives en cours qui garantissent les droits de l'homme en général, en particulier l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

L'État du Qatar traverse une phase remarquable de son histoire, à savoir son évolution vers un développement complet, inclusif et accéléré, qui lui permet d'enregistrer des taux de croissance et de redressement économique sans précédent, a poursuivi le Directeur. Les travailleurs migrants jouent un rôle essentiel dans ce développement, et l'État du Qatar apprécie les contributions de ces travailleurs, qu’il considère comme de véritables partenaires de son projet de développement, a souligné M. Al-Mahmoud. C'est donc un choix stratégique pour le Qatar de protéger et de promouvoir les droits des travailleurs migrants, a-t-il déclaré.

Depuis la présentation des rapports périodiques combinés en septembre 2021, l'État a pris des mesures pour promouvoir et renforcer l'infrastructure des droits de l'homme aux niveaux législatif, institutionnel, stratégique et de la coopération internationale. Ainsi, convaincu de l'importance du rôle effectif des conventions et traités internationaux, en particulier ceux relatifs aux droits de l'homme, l'État du Qatar a adhéré aux deux Pactes internationaux relatif aux droits de l’homme, a rappelé M. Al-Mahmoud.

L'État du Qatar a également entrepris récemment des réformes législatives importantes, y compris l’adoption d’un cadre réglementaire régissant les droits des travailleurs expatriés. De plus, la Commission nationale de lutte contre la traite des êtres humains a été créée en 2017. Elle est chargée d'élaborer le Plan national de lutte contre la traite des êtres humains et de préparer et publier un rapport annuel sur les efforts de l'État du Qatar en matière de lutte contre la traite des êtres humains.

M. Al-Mahmoud a mentionné d’autres plans et stratégies visant à soutenir et à renforcer le rôle des femmes dans tous les domaines. Il a enfin affirmé que l'État du Qatar ferait tout son possible, par le biais de son adhésion à des organisations régionales et internationales, pour soutenir activement les efforts de promotion et de protection des droits de l'homme et de lutte contre la discrimination raciale.

Complétant cette présentation, un représentant de la Commission nationale des droits de l’homme (institution nationale de droits de l’homme) du Qatar a constaté que le pays avait connu des évolutions positives dans le domaine du travail et de la protection des droits des travailleurs. Les plus notables de ces réalisations, a affirmé le représentant, sont l'abolition des autorisations de sortie et du système de parrainage (kafala), de même que la création d’un fonds de soutien aux travailleurs.

Le représentant a insisté sur l'importance de revoir la législation, les lois, les réglementations et les pratiques. Il a recommandé à l’État d’accélérer la promulgation de lois compatibles avec les normes internationales pertinentes, de favoriser la création d'associations, de donner plus d'espace à la société civile et enfin d’envisager d'élaborer une stratégie nationale des droits de l'homme.

Questions et observations des membres du Comité

M. IBRAHIMA GUISSÉ, rapporteur du groupe de travail du Comité chargé d’examiner le rapport du Qatar, a d’abord fait observer que, depuis le dernier dialogue, il y avait eu au Qatar des développements positifs, tels que les réformes législatives visant à abolir le système de la kafala. L’expert a ensuite voulu savoir quel était le statut de la Convention dans l'ordre juridique du Qatar, et en particulier si toutes les dispositions de la Convention ont été incorporées dans le droit interne et si la Convention était directement applicable par les juridictions nationales.

M. Guissé a noté que l'État n'avait pas encore adopté de définition de la discrimination raciale conforme à l'article premier de la Convention. Il a demandé si l'État partie adopterait une législation anti-discrimination définissant clairement la discrimination raciale, y compris ses formes directes, indirectes, multiples et structurelles, couvrant tous les motifs de discrimination interdits, à savoir la race, la couleur, l'ascendance et l'origine nationale ou ethnique.

L’expert a ensuite demandé quelles mesures le Qatar avait prises pour ériger en infraction pénale les actes de discrimination raciale et les comportements prohibés au sens de l'article 4 de la Convention, comme l'a recommandé le Comité dans ses précédentes observations finales, ainsi que pour inclure la motivation raciale parmi les circonstances aggravantes des infractions au Code pénal. M. Guissé a aussi voulu connaître les mesures prises pour prévenir et combattre les discours de haine racistes, les crimes de haine et l'incitation à la discrimination raciale et à la xénophobie, y compris dans les médias, sur Internet et sur les plates-formes de médias sociaux.

M. Guissé a ensuite voulu savoir quelles mesures ont été prises pour modifier la loi n°38 de 2005 sur la nationalité, afin de permettre aux femmes qatariennes mariées à des non-ressortissants de transmettre sans discrimination leur nationalité à leur conjoint étranger et à leurs enfants dès la naissance, en particulier pour les enfants qui, autrement, seraient apatrides.

M. Guissé a aussi prié la délégation de dire s’il était prévu d'adopter un plan d'action national de lutte contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qui y est associée, et de créer un organe indépendant chargé de prévenir et de combattre le racisme, la xénophobie et d'autres formes de discrimination. L’expert s’est en outre enquis des activités organisées au Qatar dans le cadre de la Décennie internationale des personnes d'ascendance africaine.

L’expert a aussi fait part de préoccupations relatives à l’indépendance de l’institution nationale de droits de l’homme du Qatar et à l’impact de ses travaux sur l'égalité raciale et la lutte contre le racisme et la xénophobie.

D’autres questions de M. Guissé ont porté sur le processus en cours de rédaction d’un plan national pour les droits de l’homme, en particulier s’agissant de la participation de la société civile à ce processus.

Alors qu’environ 90% de la population du Qatar est constituée de non-ressortissants, les travailleurs expatriés constituent le groupe de non-nationaux qui subit le plus l'impact des pratiques discriminatoires raciales, a par la suite souligné M. Guissé. Dans ce contexte, a-t-il rappelé, la Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines de racisme a estimé, en 2020, que le Gouvernement du Qatar devait « prendre des mesures urgentes pour démanteler ce qui est en fait un système de quasi-castes fondé sur l'origine nationale ».

M. Guissé s’est ensuite félicité des réformes adoptées par le Qatar en vue de l'abolition totale du système de parrainage (kafala) et en faveur de l'amélioration des droits des travailleurs migrants et des conditions de travail. Persistent cependant entre les employeurs et les travailleurs migrants des déséquilibres de pouvoir et des pratiques enracinés dans le système de la kafala, a-t-il relevé, soulignant notamment que les employeurs interdisent toujours aux travailleurs migrants de passer à un employeur concurrent, et que certains travailleurs migrants sont toujours tenus d'avoir un permis de sortie de l'employeur pour pouvoir quitter le pays. M. Guissé a demandé quelles mesures le Qatar avait adoptées pour parvenir à l'abolition totale du système de kafala, en droit et en pratique.

M. Guissé a par ailleurs salué les mesures adoptées par le Qatar pour renforcer la protection des droits des travailleurs migrants. Mais il a aussi relevé que les travailleurs migrants, en particulier les travailleurs à bas salaire dans les secteurs de la construction, des services, de la sécurité privée et du travail domestique, étaient souvent confrontés à des non-paiements ou à des retards de paiement de leurs salaires, et que les entreprises traitaient les employés différemment en fonction de leur nationalité, de leur race et de leur langue.

D’autres préoccupations de l’expert ont porté sur la vulnérabilité des travailleuses domestiques migrantes, de même que sur l’exposition disproportionnée des travailleurs migrants des secteurs de plein air, comme la construction, à la chaleur extrême, avec un risque élevé de maladie ou de décès.

M. Guissé a aussi souligné que, d'après les informations reçues, les apatrides et les migrants sans papiers rencontrent des difficultés pour accéder aux soins de santé, car le Qatar ne garantit pas l'accès aux soins de santé essentiels aux personnes qui n'ont pas de documents d'identité valides. De plus, a constaté l’expert, on compte un nombre limité de places pour les non-Qatariens dans les écoles publiques et communautaires au Qatar.

MME CHINSUNG CHUNG, corapporteuse du groupe de travail du Comité chargé d’examiner le rapport du Qatar, a demandé à la délégation des informations sur le nombre et le type de plaintes pour discrimination raciale déposées devant les tribunaux et autres institutions, ainsi que sur les résultats des enquêtes menées, les sanctions infligées et les réparations accordées aux victimes.

Selon les rapports dont dispose le Comité, a poursuivi l’experte, les travailleurs migrants sont victimes de discrimination dans les tribunaux et de la part de la police. Mme Chung a demandé ce qui avait été fait pour améliorer l'accès des victimes de discrimination raciale, en particulier pour ce qui est des migrants, à la justice et à des recours efficaces, de même que pour prévenir et combattre les attitudes racistes et la discrimination raciale dans le système judiciaire et dans la police.

Mme Chung a aussi relevé que les autorités qatariennes avaient très souvent recours aux systèmes et technologies d'intelligence artificielle. Elle a voulu savoir quelles mesures l'État partie avait adoptées, dans ce contexte, pour prévenir la discrimination raciale et le profilage racial à l'encontre des minorités ethniques et religieuses, des migrants et des demandeurs d'asile de la part des forces de l'ordre lorsqu’elles utilisent les technologies numériques et l'intelligence artificielle.

Plusieurs rapports, y compris celui de la Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines de racisme en 2020, indiquent une forte prévalence du profilage racial et ethnique de la part des agents de la police, des autorités routières et de sociétés de sécurité privées, a mis en garde l’experte. Les allégations concernent par exemple la détention et des fouilles corporelles invasives de non-ressortissants ayant fait l'objet d'un profilage racial par les autorités de sécurité de l'aéroport de Doha, a-t-elle souligné. De plus, a ajouté Mme Chung, la Rapporteuse spéciale a pointé un manque de sensibilisation de la population et des institutions de l'État sur ce qui constitue une discrimination raciale interdite.

Mme Chung a par ailleurs relevé que de nombreux rapports remis au Comité soulignent que les stéréotypes raciaux et ethniques prévalent au Qatar, tant dans la sphère publique que privée, en particulier à l'encontre des personnes originaires d'Asie du Sud et d'Afrique subsaharienne. Ces personnes se voient souvent refuser l'accès à certains lieux publics tels que les parcs publics, les plages et les centres commerciaux, et sont soumises de manière sélective au dépistage obligatoire du VIH/sida, a-t-elle précisé.

Mme Chung a d’autre part fait remarquer que les non-nationaux, y compris les travailleurs migrants résidents de longue durée, ne bénéficient d'aucune protection, constitutionnelle ou autre, en matière de liberté d'association, car l'article 45 de la Constitution ne garantit ce droit qu'aux citoyens qatariens.

L’experte a mentionné d’autres informations selon lesquelles les non-nationaux appartenant à des minorités religieuses sont confrontés à une discrimination croisée fondée sur la nationalité et la religion – et notamment à des licenciements et des exclusions discriminatoires dans les secteurs de l'éducation et de la fonction publique, voire à des expulsions hors du Qatar.

Mme Chung a en outre voulu savoir quelles mesures étaient prises pour garantir un espace ouvert aux défenseurs des droits de l'homme, aux journalistes et aux organisations de la société civile, notamment celles qui luttent contre la discrimination raciale et défendent les droits des migrants.

D’autres préoccupations de Mme Chung ont porté sur le fait que les citoyens d'origine et ceux qui acquièrent la citoyenneté du Qatar ne jouissent pas des même droits, ainsi que sur le fait que les bidouns ne peuvent pas bénéficier des procédures de naturalisation.

M. GUN KUT, rapporteur chargé du suivi des recommandations du Comité, a rappelé que, dans ses précédentes observations finales (2018), le Comité avait prié le Qatar de soumettre un rapport complémentaire concernant l’application des recommandations relatives à l’octroi, à l’institution nationale de droits de l’homme, des moyens nécessaires à l’accomplissement de son mandat, et à la protection des droits des travailleurs migrants. Ce rapport intermédiaire a été reçu dans le temps imparti, s’est félicité M. Kut.

Un autre expert membre du Comité a demandé à la délégation des informations statistiques ventilées au sujet des personnes d’ascendance africaine et des minorités nationales au Qatar. Le Comité a été informé de plusieurs cas de mauvais traitements et de discrimination à l’encontre de ressortissants étrangers et de membres de minorités nationales au Qatar, a ajouté l’expert.

La délégation a par ailleurs été priée de dire comment le Qatar entendait concilier, s’agissant de l’acquisition de la nationalité, certaines notions contradictoires figurant dans la Convention et dans le droit national.

Un expert a demandé si les membres des minorités nationales bénéficiaient eux aussi du droit de créer des associations.

Plusieurs experts ont fait état, dans le système judiciaire qatarien, d’un manque de services d’interprétation au détriment des justiciables non arabophones.

Les tests médicaux obligatoires pour travailleurs migrants, y compris le dépistage obligatoire du VIH/sida, ne sont pas acceptables au regard de la Convention, a-t-il été rappelé.

D’autres questions des experts ont porté sur la lutte contre la discrimination raciale et le racisme dans le milieu du sport, en particulier dans le football. Il a été demandé quels enseignements le Qatar avait tirés de l’organisation de la coupe du monde de football, s’agissant du respect des droits de l’homme des travailleurs migrants.

Un expert a jugé positif l’accueil de nombreux étrangers par le Qatar et a estimé que l’on ne pouvait pas parler de discrimination raciale ni de racisme dans ce pays. Cet expert a ensuite insisté pour que la délégation donne des explications au sujet d’une plainte reçue par le Comité concernant la condamnation à mort de M. Tayeb Ben Abdel Rahman.

Un membre du Comité a souhaité savoir combien de temps en moyenne les étrangers résidaient au Qatar.

Une experte s’est interrogée sur l’effet des stratégies utilisées par le Qatar pour éliminer la discrimination raciale, en particulier à l’encontre des personnes noires.

Réponses de la délégation

Concernant l’applicabilité de la Convention, la délégation a indiqué que, pour le Qatar, la Convention n’était pas contraire à la charia, qui est la source de toutes les lois et de la Constitution qatarienne. Les dispositions de la Convention peuvent être invoquées devant les tribunaux nationaux, mais aucun cas n’a été recensé à ce jour, a précisé la délégation.

Le Conseil supérieur de la magistrature organise, à l’intention des juges et avocats, des formations aux instruments internationaux ratifiés par le Qatar, y compris la Convention, a fait valoir la délégation. Les membres des forces de sécurité engagés à l’aéroport international de Doha suivent des formations relatives aux droits de l’homme, a-t-elle par la suite ajouté.

Le Gouvernement n’a pas encore examiné la possibilité d’accepter la procédure de plainte prévue à l’article 14 de la Convention, a-t-il par ailleurs été indiqué.

Le Qatar collaborera avec les parties prenantes pour adopter une définition de la discrimination raciale conforme à la Convention, a assuré la délégation. Les concepts d’égalité et de non-discrimination sont d’ores et déjà mentionnés dans les textes juridiques, a-t-elle ajouté, avant de souligner que la loi s’appliquait à tous, sans aucune discrimination.

La Constitution affirme expressément l’égalité entre tous et interdit toute discrimination, a poursuivi la délégation.

Quant à l’incitation à la haine raciale et religieuse, elle est déjà criminalisée au Qatar, a précisé la délégation. Elle a mentionné à cet égard la création à Doha d’un centre pour le dialogue interreligieux.

La Fédération qatarienne de football a lancé une mise en garde publique après un incident raciste lors d’un match, a par ailleurs souligné la délégation. Les autorités ont édicté, à l’intention des forces de l’ordre, des normes relatives à la répression des discours racistes et discriminatoires lors des manifestations sportives et à la manière de gérer les supporters, a-t-elle fait valoir.

La délégation a par la suite déclaré que l’organisation de la coupe du monde de football avait aidé le Qatar à accélérer l’évolution de sa législation et à renforcer sa diversité culturelle. Un autre effet positif a été le recul des stéréotypes négatifs, a-t-elle ajouté.

Le Qatar protège toutes les religions et garantit la liberté de culte dans quelque 69 lieux de culte enregistrés, a par la suite indiqué la délégation. Les lieux de culte et les fidèles de toutes les religions sont protégés, a-t-elle insisté. Aucune discrimination n’est faite sur la base de la religion, a assuré la délégation, ajoutant que la religion n’était pas non un motif d’expulsion hors du Qatar.

La délégation a mentionné la création d’une nouvelle agence nationale de la statistique. Les données démographiques qu’elle collecte, et qui sont publiques, concernent notamment l’origine nationale et la répartition géographique, mais pas l’ethnicité, a précisé la délégation.

L’État du Qatar encourage les activités de l’institution nationale de droits de l’homme, mais tous les budgets publics, y compris celui de l’institution, ont été réduits dans le sillage de la pandémie de COVID-19, a expliqué la délégation.

Le plan national pour les droits de l’homme, élaboré par plusieurs ministères, a été soumis au Conseil des Ministres il y a quelques semaines, a-t-il par ailleurs été précisé.

La délégation a d’autre part mentionné l’adoption d’une loi facilitant les démarches d’accréditation des organisations de la société civile.

L’expression « personnes d’ascendance africaine » n’est pas utilisée au Qatar, les personnes ainsi désignées étant de fait pleinement intégrées dans la société qatarienne, a expliqué la délégation.

Le Gouvernement condamne tous les mauvais traitements infligés à des personnes, quelle que soit leur nationalité. Victimes et témoins de la violence bénéficient de mesures de protection, a par ailleurs souligné la délégation.

La Loi relative à la nationalité stipule que l’enfant né d’un père qatarien et d’une mère étrangère peut obtenir la nationalité qatarienne, a rappelé la délégation, avant de préciser que l’acquisition de la nationalité se fonde sur les liens du sang, et que la double nationalité n’est pas admise. Plus de 90% de la population résidant au Qatar est étrangère, a indiqué la délégation. Les questions relatives à la nationalité relèvent de la souveraineté de l’État, a-t-elle ajouté.

Le Qatar a ratifié la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie, a rappelé la délégation, avant d’ajouter que le Ministère de l’intérieur se plie aux normes et bonnes pratiques internationales en la matière. L’État a réussi à réduire l’apatridie par voie soit de naturalisation, soit de régularisation, a en outre indiqué la délégation.

Une seule plainte pour discrimination raciale a été transmise à la Commission nationale des droits de l’homme, qui a renvoyé le cas aux tribunaux, lesquels ont constaté qu’il s’agissait en réalité d’un litige relatif à l’obtention d’un titre de séjour, de sorte que l’affaire n’a pas eu d’autres suites, a ensuite indiqué la délégation.

Aucune discrimination n’est faite dans les prisons entre les détenus qatariens et non qatariens, a d’autre part assuré la délégation.

S’agissant des droits des travailleurs migrants, a par ailleurs indiqué la délégation, l’abolition du système de la kafala s’est faite de manière graduelle entre 2015 et 2020, avec en particulier l’abolition, dans le Code du travail, du permis de sortie, les employeurs n’étant plus autorisés à s’opposer à la sortie du territoire de leurs employés. Les employés ont, de même, le droit de changer d’employeur. De plus, le Gouvernement a mis en place un système complet de protection des employés contre le non-paiement des salaires, y compris la création d’un fonds d’indemnisation et de protection sociale des travailleurs lésés, a fait valoir la délégation.

Le pays dispose d’un système de médiation et de plainte solide, et le Ministère du travail poursuit en justice les entreprises qui ne respectent pas la loi, a ensuite assuré la délégation. Les travailleurs qui saisissent la justice peuvent bénéficier d’une aide juridictionnelle gratuite et de services d’interprétation. Le Gouvernement mène aussi des campagnes pour sensibiliser les travailleurs à leurs droits.

Les autorités s’attaquent toujours au problème de la confiscation des passeports, un comportement qui peut être assimilé à la traite des êtres humains selon la loi qatarienne, a poursuivi la délégation, avant d’ajouter que le phénomène était en net recul grâce en particulier aux efforts de sensibilisation des autorités.

D’autres efforts de sensibilisation ciblent explicitement les travailleurs et travailleuses domestiques, a ajouté la délégation. Le Gouvernement, a-t-elle précisé, a pris des mesures pour protéger les travailleuses domestiques contre la violence, y compris la violence sexuelle, et pour soutenir les victimes.

La délégation a également évoqué le système d’inspection des lieux de travail et les normes de sécurité au travail qui ont été mis en place par le Gouvernement avec l’aide du Bureau international du Travail (BIT). Tous les accidents mortels pendant la construction des stades destinés à la coupe du monde de football ont été recensés, a fait savoir la délégation.

La délégation a ensuite présenté les grands traits de la réforme du droit du travail, assurant en particulier que la discrimination structurelle dans l’emploi avait été éliminée et que des réformes avaient été engagées, y compris en collaboration avec l’Organisation internationale du Travail (OIT), pour assurer l’égalité au travail.

Le Ministère de la santé publique soumet tous les travailleurs migrants à des examens médicaux obligatoires avant la délivrance de leur permis de travail, a indiqué la délégation, expliquant que ces examens sont destinés à lutter contre les maladies contagieuses.

L’État défend le droit à la santé, qui est ancré dans la Constitution nationale et en vertu duquel toutes les personnes résidant au Qatar ont ainsi accès aux soins de santé, a par la suite précisé la délégation. Elle a mentionné le nouveau système d’assurance maladie en vigueur au Qatar. Le dépistage du VIH/sida est réalisé pour tout le monde, Qatariens ou non, travailleurs ou étudiants, a en outre souligné la délégation. Les personnes positives au VIH ont-elles aussi accès gratuitement aux soins de santé, a-t-elle ajouté.

Le Ministère de la justice recrute des interprètes compétents pouvant communiquer avec toutes les personnes résidant au Qatar, selon les besoins, a par ailleurs souligné la délégation, ajoutant que les justiciables peuvent aussi recruter des interprètes de leur choix par le biais de leurs consulats.

La part des écoliers d’origine étrangère dépasse désormais celle des écoliers Qatariens, a par ailleurs précisé la délégation en réponse aux observations d’un expert.

Un comité a été chargé par le Gouvernement d’encadrer tout ce qui a trait à l’exploitation de l’intelligence artificielle, y compris pour ce qui concerne les dangers liés à la discrimination dans ce contexte, a fait savoir la délégation.

La délégation a répondu à d’autres questions des experts du Comité concernant la vie associative, la gestion des manifestations, la répression de la traite des êtres humains et l’organisation d’audiences de justice électroniques.

Au cours du dialogue, la délégation a en outre indiqué ne pas pouvoir commenter les décisions de justice concernant M. Abdel Rahman.


Ce document produit par le Service de l’information des Nations Unies à Genève est destiné à l’information; il ne constitue pas un document officiel.
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