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Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes auditionne la société civile s’agissant des Maldives et de la Suède
18 octobre 2021
Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a auditionné, cet après-midi, des représentants de la société civile au sujet de la mise en œuvre de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes dans les deux pays dont les rapports seront examinés cette semaine, à savoir les Maldives et la Suède.
S’agissant des Maldives, ont notamment été dénoncés les discours religieux fondamentalistes qui prônent le recours aux mutilations génitales féminines. Ont également été évoqués les problèmes d’accès au logement et aux terres que rencontrent les femmes dans l’archipel, ainsi que les conséquences du développement du secteur touristique qui ne prend pas en compte les besoins des populations locales.
S’agissant de la Suède, il a notamment été déploré que le pays s’oppose à ce que le vaccin contre la COVID-19 soit exempté des règles de propriété (intellectuelle) actuelles, ce qui n’a pas manqué d’avoir des répercussions pour les femmes dans les pays à revenu faible ou modéré. Il a également été regretté que la Suède exporte des armes vers des pays où les droits des femmes sont limités et où les violences sexuelles sont nombreuses, ce qui – a-t-il été relevé – va à l’encontre de la politique étrangère féministe proclamée par le Gouvernement suédois.
Mercredi matin, à partir de 10 heures, le Comité entamera l’examen du rapport des Maldives (CEDAW/C/MDV/6).
Audition de la société civile
S’agissant des Maldives
L’organisation non gouvernementale (ONG) Uthema s’est réjouie de la nomination de femmes juges aux Maldives, tout en relevant qu’aujourd’hui, seules 7% des juges soient des femmes dans ce pays. Par ailleurs, la loi des Maldives permet à une femme d’être présidente, mais pas d’être témoin à un mariage, a fait observer l’ONG, appelant à ce qu’il soit mis fin à de tels paradoxes. Il faut par ailleurs lutter contre le fondamentalisme religieux dans le pays et protéger l’intégrité des femmes et des filles.
L’ONG Hope for Women s’est inquiétée de l’appel lancé par un nombre sans cesse croissant de religieux qui prônent en ligne les mutilations génitales féminines – une pratique qui persiste dans le pays, malgré les déclarations des autorités. Les services de contraception ne sont pas disponibles pour les jeunes qui ne sont pas mariés, a déploré l’organisation. Les enseignants ne sont pas suffisamment formés pour enseigner les cours d’éducation sexuelle, a-t-elle ajouté. La violence sexuelle et le harcèlement sur le lieu de travail sont un phénomène encore trop présent aux Maldives, a regretté l’organisation. Les opérations d’un certain nombre d’organisations sont entravées, voire cessent, en raison de la pandémie ; les organisations manquent d’aide pour assurer leur pérennité dans ce contexte, a en outre souligné l’ONG.
Landsea Maldives a souligné que pour assurer une économie inclusive, il fallait tenir compte de la situation des femmes. Aux Maldives, les femmes rencontrent des problèmes d’accès au logement et aux terres, a indiqué l’ONG. Empêcher les communautés locales de gérer leurs îles a des répercussions sur la qualité de la vie des communautés autochtones, a-t-elle poursuivi, avant de dénoncer la malnutrition dans les petites îles de l’archipel. Un tiers des îles habitées sont consacrées au tourisme en faisant fi des besoins de la population locale, a regretté l’organisation. A aussi été dénoncée la vente d’îles et de lagons aux étrangers, sans prendre en compte l’écosystème ; ces ventes se font souvent en ayant recours à la corruption, a dénoncé l’ONG.
Mme Moomina Waheed, Commissaire en charge de la Commission des droits de l’homme des Maldives, a souligné que des recherches avaient été menées en 2017 sur les causes de la violence sexiste aux Maldives. La violence domestique fait certes l’objet d’une loi, mais, malheureusement, les victimes n’ont quasiment aucun soutien et les poursuites s’éternisent, amenant trop souvent les victimes à retirer leur plainte face à des auteurs qui conservent une position de pouvoir sur elles. Il faudrait que des fonds suffisants soient alloués afin que des abris pour les victimes puissent fonctionner partout sur le territoire. Par ailleurs, il existe certes aux Maldives une législation pour l’égalité entre les hommes et les femmes, mais en cas de manquement, il y a très peu de poursuites, a regretté Mme Waheed. Elle a aussi dénoncé le discours religieux fondamentaliste et extrémiste qui prône le recours aux mutilations génitales féminines ; ces mutilations doivent être interdites explicitement par la loi, a-t-elle plaidé. De plus, en raison du discours religieux ambiant, les femmes pensent qu’il est obligatoire qu’elles obéissent à leur mari et qu’elles sont obligées d’avoir des relations sexuelles quand le mari le décide.
Au cours du dialogue qui a suivi ces présentations, une experte a demandé si l’institution nationale des droits de l’homme [la Commission des droits de l’homme des Maldives] avait un rôle d’appui aux défenseuses des droits des femmes et si cette Commission pouvait être renforcée, notamment dans le domaine de l’égalité.
En réponse à cette question, Mme Waheed a expliqué que la Commission veillait à soutenir les ONG dans leur combat pour la défense des droits des femmes. Pour renforcer la Commission, il faudrait renforcer ses capacités à travailler sur les différents droits – notamment ceux des femmes, des enfants et des migrants – et cela requiert une coopération avec les organisations internationales, a-t-elle ajouté.
S’agissant de la Suède
Development Alternatives with Women for a New Era a déploré que le pays s’oppose à ce que le vaccin contre la COVID-19 soit exempté des règles de propriété (intellectuelle) actuelles, ce qui n’a pas manqué d’avoir des répercussions pour les femmes dans les pays à revenu faible ou modéré. La Suède a reçu cinq fois plus de vaccins que l’ensemble des pays à faible revenu, a insisté l’ONG. Il faut que la Suède revoie sa position dans ce domaine, a-t-elle plaidé, rappelant que l’accès équitable aux vaccins est indispensable pour faire chuter la pandémie dans le monde. Cette question a des répercussions très importantes sur les femmes, notamment en termes d’accès au travail. Les mesures de confinement ont aussi eu comme conséquence l’augmentation des violences contre les femmes, a rappelé l’organisation.
Amnesty International s’est déclarée satisfaite de la nouvelle législation en matière de crimes sexuels en Suède, qui s’est traduite par une augmentation des poursuites. Les autorités de police doivent néanmoins rendre prioritaires les poursuites contre les auteurs de viols pour que les femmes aient davantage confiance dans les forces de l’ordre, a ajouté l’ONG. Le soutien aux victimes de viols ne correspond pas toujours à leurs besoins spécifiques, a-t-elle en outre observé. Amnesty International a aussi dénoncé les multiples discriminations à l’encontre des femmes roms, qui n’ont pas accès à la santé génésique et sexuelle.
Women’s International League for Peace & Freedom (WILPF)a déclaré que la Suède doit promulguer une nouvelle loi sur l’exportation des armes – une loi qui, contrairement au projet de loi actuel, intègre une perspective sexospécifique. L’organisation a mis en exergue les incohérences entre les obligations de la Suède en matière de lutte contre les violences sexuelles et les livraisons d’armes du pays : la Suède exporte en effet des armes vers des pays où les droits des femmes sont limités et où les violences sexuelles sont nombreuses, ce qui va à l’encontre de la politique étrangère féministe proclamée par le Gouvernement suédois, a-t-elle regretté.
L’organisation World of No Sexual Abuse (WONSA) a indiqué qu’elle prenait en charge les victimes de violences sexuelles et a souligné que sans service de santé acceptable pour les victimes de ce type de violence, il ne saurait y avoir de véritable égalité. En Suède, 81% des personnes venues dans les cliniques gérées par WONSA avaient déjà cherché, en vain, à bénéficier d’une prise en charge dans le service public, a dénoncé l’organisation. Dans la stratégie suédoise visant à prévenir la violence exercée par les hommes à l’encontre des femmes, il n’y a pas de mention des soins de santé pour les victimes, a regretté l’ONG.
Forum Women and Disability et the Swedish Disability Rights Federation ont expliqué que selon les règlementations en vigueur en Suède, les femmes et filles handicapées devraient jouir de droits égaux, ce qui n’est pas le cas dans de nombreux domaines, notamment en matière d’accès aux soins ou à l’éducation. Les femmes et les filles handicapées ne sont pas visibles dans les statistiques, a dénoncé l’organisation. Pour que toutes les femmes bénéficient de protection, conformément à la Convention, il faut des statistiques, faute de quoi les femmes handicapées resteront dans l’invisibilité, a-t-elle insisté.
RFSL, the Swedish Federation for Lesbian, Gay, Bisexual, Transgender, Queer and Intersex Rights a relevé avec préoccupation que les femmes LBTI n’ont pas été mentionnées dans la liste des points à traiter concernant la Suède, alors que les droits des personnes LBTI sont bien des droits des femmes et que ces personnes sont victimes de discriminations en raison de leur identité. Ont également été dénoncées les procédures d’asile très strictes à l’encontre des personnes LGBTI qui sont persécutées dans leur pays d’origine – des pays vers lesquels de nombreuses personnes LGBTI ont été rapatriées.
Swedish Women’s Lobby a salué les mesures qui, à l’instar du congé de paternité, ont permis aux femmes de s’intégrer dans le domaine du travail il y a une vingtaine d’années. Malheureusement, a poursuivi l’organisation, la Suède n’a plus pris de mesures positives depuis cette période et persiste encore aujourd’hui un écart salarial de 23% entre les hommes et les femmes, comme il y a 25 ans. De nombreuses retraitées se battent pour joindre les deux bouts, a-t-elle insisté. Les femmes sont en congé maladie deux fois plus souvent que les hommes en raison du stress et de l’anxiété que procure leur statut et les adolescentes, elles aussi, sont davantage stressées que les adolescents, a insisté l’organisation.
Au cours du dialogue qui a suivi ces présentations, une experte du Comité a demandé davantage d’informations au sujet des enquêtes sur les violences sexuelles en Suède, en faisant observer que s’il y a davantage de plaintes, il ne semble pas y avoir davantage de condamnations dans ce domaine. Davantage d’informations ont également été demandées s’agissant des femmes et des filles apatrides en Suède et des poursuites à l’encontre des auteurs de traite de personnes.
Les représentants de la société civile ont rappelé qu’une loi suédoise condamne les personnes qui recourent à la prostitution (d’autrui) et se livrent à la traite des êtres humains, mais ont fait observer que ce n’est là qu’une petite partie du problème de la traite ; il faudrait en effet que cette loi s’étende aussi aux agissements à l’étranger. S’agissant des écarts salariaux entre hommes et femmes, une organisation a expliqué que certaines femmes qui ont travaillé toute leur vie dans des emplois mal rémunérés rencontrent de grandes difficultés à joindre les deux bouts une fois à la retraite ; il faudrait donc envisager une réforme fiscale plus juste permettant des transferts plus importants au profit des femmes retraitées.
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