Skip to main content

Des solutions porteuses de changement pour l’inclusion du handicap

Une femme blanche souriante aux cheveux blonds, portant une veste verte et un col roulé noir. © 2015 Steve LLamb & Images Burnside/Keely Cat-Wells/C Talent

« J’ai perdu mon travail à cause du capacitisme », a déclaré Keely Cat-Wells.

Cette citoyenne britannique est partie vivre à Los Angeles, aux États-Unis, pour poursuivre une carrière dans l’industrie du divertissement. Une fois sur place, elle s’est vu offrir un emploi, mais l’offre a été retirée lorsqu’elle a révélé son handicap.

Ayant récemment emménagé aux États-Unis, Keely Cat-Wells ignorait qu’elle pouvait intenter un procès pour discrimination contre son ancien employeur en vertu de la loi relative aux personnes handicapées (Americans with Disabilities Act). Elle ne voulait pas non plus risquer de perdre son statut d’immigrante et avait peur d’être mise sur liste noire à Hollywood.

Loin de se décourager, elle a fondé C Talent, une société de conseil et de gestion de talents qui représente des créateurs en ligne, des artistes et des professionnels de l’industrie du divertissement handicapés très en vue.

L’entreprise aide ses clients à trouver un emploi dans des rôles diversifiés et milite pour le recrutement de personnes chargées des questions de handicap afin de garantir l’accessibilité des studios. Elle aide également des entreprises à devenir plus accessibles, au-delà du respect des lois. En partenariat avec le HCDH et d’autres organisations, C Talent est également un membre fondateur de #WeThe15, une campagne visant à promouvoir une plus grande inclusion et un meilleur accès pour les personnes handicapées.

Dans son observation générale no 8, le Comité des droits des personnes handicapées des Nations Unies décrit le « capacitisme » comme étant « un système de valeurs selon lequel certaines caractéristiques physiques et mentales sont jugées essentielles pour que la vie ait de la valeur. Parce qu’ils se fondent sur des normes strictes d’apparence, de fonctionnement et de comportement, les modes de pensée capacitistes assimilent le handicap à une fatalité qui est source de souffrances et d’inconvénients et dévalorise inéluctablement la vie humaine », ce qui nuit aux chances de nombreuses personnes handicapées d’avoir un travail et un emploi utiles.

La promotion de l’inclusion et de la représentation dans les industries créatives s’est révélée être un moyen innovant pour Keely Cat-Wells de provoquer un changement à plusieurs niveaux et de lutter contre les stéréotypes sur les personnes handicapées.

Keely and her team with some distance between each other, looking at the camera © 2015 Steve LLamb & Images Burnside/Keely Cat-Wells/C Talent

Keely Cat-Wells et l’équipe de C Talent. Elle porte une robe bleue et se tient au soleil. Son équipe, à l’ombre, comprend une personne en fauteuil roulant. Chaque personne se tient à distance des autres et fixe l’objectif. © 2015 Steve LLamb & Images Burnside/Keely Cat-Wells/C Talent

« Je veux qu’il y ait de nouveaux récits et je suis ravie de voir davantage d’écrivains et d’artistes handicapés derrière la caméra mettant activement en œuvre ce changement, car on ne peut pas se contenter d’histoires écrites selon un seul type d’expérience », a-t-elle déclaré, ajoutant qu’elle souhaitait également voir la représentation de ce qu’elle appelle le pan-disability, soit le concept de handicap dans sa globalité, qui couvre non seulement les handicaps physiques, mais aussi les handicaps cachés.

« Personnellement, je n’ai jamais vu mon vécu reflété à l’écran. Si j’avais vu cette représentation avant de me faire opérer, je serais probablement une personne très différente. La représentation est tellement importante ; elle change vraiment votre point de vue sur les gens », a-t-elle expliqué.

Vers une véritable protection juridique

Il y a 75 ans, des représentants provenant de contextes juridiques et culturels différents et de toutes les régions du monde ont rédigé la Déclaration universelle des droits de l’homme, qui est un ensemble de droits universels, indivisibles et inaliénables reconnaissant la dignité et la valeur de chaque personne sur un pied d’égalité.

Pour la première fois, la communauté internationale a convenu d’un ensemble de valeurs communes et a reconnu que les droits sont inhérents à tout être humain du simple fait de sa naissance, et non pas accordés par les États.

L’article 2 de la Déclaration stipule que chaque personne peut se prévaloir de ces droits « sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation ». Les derniers mots de cette phrase (« toute autre situation ») ont souvent été cités pour élargir la liste des personnes spécifiquement protégées.

« Nos valeurs communes [inscrites dans la déclaration] nous offrent une voie vers l’équité. Dans mon milieu, on parle constamment des données et de la dimension économique du handicap, le fait d’améliorer notre droit à la représentation grâce aux données », a déclaré Keely Cat-Wells. « Mais ce que ce document fait si bien, c’est qu’il montre que ce n’est pas une question de données, ni d’aspect économique, mais de cœur, de personnes et d’humanité. Et c’est de là que naît le véritable changement. »

L’interdiction de la discrimination inscrite dans cet article a permis la création d’autres traités, déclarations et conventions qui énoncent les droits humains des groupes protégés non spécifiquement énumérés, dont les personnes handicapées avec qui la Convention relative aux droits des personnes handicapées a été rédigée puis adoptée en 2006.

« J’aimerais tellement que le handicap soit mentionné de manière plus explicite dans l’article 2, car il arrive souvent que nous soyons considérés comme des cas autres, que nous ne soyons pas pris en compte dans la définition de la diversité, ou que nous ne soyons pas catégorisés. [Le handicap] est simplement considéré comme “autre” », a-t-elle indiqué.

Bien que la Déclaration universelle des droits de l’homme favorise un sentiment d’humanité commune qui va au-delà des différences, près de 75 ans plus tard, les personnes handicapées continuent d’être confrontées chaque jour à la discrimination et à des obstacles qui les empêchent de participer à la société sur un pied d’égalité avec les autres.

Elles sont fréquemment privées de leurs droits, notamment d’intégrer le système scolaire général et le marché du travail, de vivre de façon autonome dans la communauté, de voter, ou encore de participer à des activités culturelles et sportives. Elles sont souvent dans l’incapacité de bénéficier d’une protection sociale, d’accéder à la justice, de choisir leur traitement médical et de souscrire librement des engagements juridiques. La Convention relative aux droits des personnes handicapées vise à changer cela.

Pour être pleinement intégrées, les personnes handicapées, quel que soit leur âge, doivent avoir accès aux systèmes d’aide et de soins nécessaires leur permettant de vivre de manière autonome dans leur communauté. Ces systèmes sont également essentiels pour permettre aux personnes handicapées de participer pleinement et véritablement à la société, de pouvoir faire des choix sur un pied d’égalité et de pouvoir vivre dans la dignité et de manière autonome et indépendante, comme le reconnaît la Convention.

Une étude de l’Organisation internationale du Travail montre que le fait d’investir dans des systèmes d’aide et de soins présente de plus grands avantages à long terme pour l’économie et la société,  notamment une croissance économique liée à la création d’emplois.

Droits des personnes handicapées : un mouvement de justice sociale

Tout en contribuant à faire évoluer les mentalités et à accroître la représentation dans les industries créatives, Keely Cat-Wells espère également que les gouvernements et les entreprises créeront davantage d’environnements où les personnes handicapées recevront le soutien dont elles ont besoin.

« Embauchez des personnes handicapées, financez des personnes handicapées, laissez les personnes handicapées prendre les devants et apprendre grâce à l’expérience d’autres personnes handicapées. Mais faites aussi vos propres recherches sur le handicap et tirez parti du travail déjà accompli au sein du mouvement pour la justice des personnes handicapées », a-t-elle ajouté.

Faisant référence au travail du Disability Justice Collective, elle a décrit la justice pour les personnes handicapées comme « un mouvement de justice sociale qui se concentre sur l’examen du handicap et du capacitisme en relation avec d’autres formes d’oppression et d’identités telles que la race, la classe et le sexe ».

« Ainsi, pour créer un monde véritablement inclusif, nous devons reconnaître que le handicap recoupe les questions de justice sociale, de justice raciale, de justice économique, de justice de genre et plus encore, qu’il ne peut exister sans ces dernières, et qu’elles ne peuvent exister sans le handicap. »

Le 75e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme sera célébré le 10 décembre 2023. Ce document fondamental a inspiré de nombreux combats pour renforcer la protection des droits de l’homme et a contribué à leur reconnaissance.

Cependant, ces progrès ne signifient pas que la lutte pour les droits et l’égalité peut se terminer. Compte tenu des nombreux obstacles qui subsistent et des réactions hostiles aux droits de l’homme à travers le monde, la Déclaration universelle des droits de l’homme, qui nous appelle tous à défendre les droits de l’homme, est plus pertinente que jamais.

Le 2 décembre 2022, à la veille de la Journée internationale des droits des personnes handicapées, Keely Cat-Wells est devenue lauréate du Sommet des jeunes activistes à Genève, en Suisse, qui, cette année, était axé sur l’inclusion et la solidarité. Chaque année depuis 2019, le sommet célèbre les jeunes qui ont obtenu des résultats exceptionnels pour faire progresser la durabilité et les droits de l’homme.

Avertissement : les idées, informations et opinions exprimées dans le présent article sont celles des personnes y figurant ; elles ne reflètent pas nécessairement la politique ou la position officielle du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme.