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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité pour l'élimination de la Discrimination à l'égard des femmes auditionne la société civile

10 Février 2020

Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes

CEDAW/20/2
10 février 2020

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a auditionné, cet après-midi, des représentants de la société civile au sujet de la mise en œuvre de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes dans les quatre pays dont les rapports seront examinés cette semaine, à savoir la Lettonie, le Pakistan, le Zimbabwe et l’Érythrée.  Le Comité a par ailleurs entendu une déclaration de la Commissaire de la Commission zimbabwéenne de l’égalité des sexes. 

Pour ce qui concerne la Lettonie, l’attention a notamment été attirée sur la situation des femmes et des filles vulnérables, notamment les femmes et les filles roms ou encore celles qui sont handicapées.  Ont également été dénoncées les violences sexistes dans le pays et l’absence de ressources suffisantes pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention.

S’agissant du Pakistan, ont notamment été déplorés la diminution de l’espace accordé à la société civile ; les mariages et les conversions forcés ; les violences sexuelles à l’encontre des détenues ; l’absence de droit à la santé génésique et sexuelle pour les jeunes ; ou encore la sous-représentation des femmes au Parlement.  

Pour ce qui est du Zimbabwe, les organisations de la société civile ont dénoncé la sous-représentation des femmes au sein des collectivités locales ; les violences sexistes ; et les violences à l’encontre des travailleuses du sexe.  

Enfin s’agissant de l’Érythrée, une organisation a dénoncé la mobilisation forcée des filles au sein de l’armée et les violences sexuelles dont elles sont victimes.  A aussi été déplorée la dissolution d’organisations de la société civile par les autorités. 


Demain matin, à 10 heures, le Comité entamera l’examen du rapport de la Lettonie (CEDAW/C/LVA/4-7).


Audition de la société civile

S’agissant de la Lettonie

Women’s NGOs Cooperation Network of Latvia a affirmé que si la Lettonie a certes pris une mesure importante en ratifiant la Convention, elle n’a pas prévu assez de ressources pour la mettre en œuvre.  Le dernier rapport du pays devant le Comité remonte à 15 ans, a déploré l’ONG, avant de souligner qu’un quart de la population de la Lettonie continue à vivre en dessous du seuil de pauvreté et que le système fiscal est inéquitable.  La pauvreté et le désespoir sont particulièrement présents parmi les femmes âgées, a poursuivi l’ONG, regrettant que ces dernières n’aient pas accès à un renforcement de leurs compétences en matière de maîtrise des techniques de communication.  Les femmes handicapées sont exposées à la violence, a en outre indiqué l’ONG, déplorant que les femmes et les filles handicapées ne soient pas reconnues comme un groupe cible en vue d’aboutir à l’égalité. 

La communauté rom est aussi un groupe très vulnérable en Lettonie, notamment pour ce qui concerne l’emploi.  Les filles roms souffrent davantage de la déscolarisation, car elles arrêtent l’école dès qu’elles tombent enceintes, a également souligné l’ONG. 

MARTA Centre a indiqué travailler avec des milliers de victimes de violences, notamment sexuelles.  La violence sexuelle n’est pas un délit spécifique dans le Code pénal letton, ce qui entraîne de nombreux cas d’exploitation sexuelle.  Le Centre a en outre dénoncé des affichages sexistes dans les rues de Riga.  Il a recommandé que soient mises à jour les données statistiques concernant l’application de la loi contre les discriminations liées au genre dans le domaine du travail.  Il faut que les crimes sexuels soient davantage visibles et sanctionnés, a ajouté l’ONG, plaidant pour que le viol conjugal soit inscrit comme un délit distinct dans le Code pénal.   

S’agissant du Pakistan

Shirkat Gah – Women’s Resource Centre a déclaré qu’un grand nombre de promesses n’avaient pas été tenues dans ce pays s’agissant de la mise en œuvre de la Convention.  Elle a notamment relevé que l’espace public s’amenuisait pour les femmes et que le travail des ONG était entravé en raison de nombreuses formalités administratives et du nouveau système d’enregistrement.  L’inflation crée davantage de pauvreté, plus particulièrement chez les femmes, a en outre souligné l’ONG.  

National Forum for Women with Disability a dénoncé les mariages et les conversions forcés au Pakistan.  L’âge minimum du mariage dépend de la religion ; ainsi, pour certaines religions, cet âge est-il de 16 ans.  Dans le système éducatif, les religions minoritaires sont dépeintes de façon péjorative, a ajouté l’ONG.  En outre, les femmes et les filles handicapées sont privées de leurs droits les plus fondamentaux.  Par ailleurs, le Pakistan semble incapable de protéger les femmes dalits contre les enlèvements, les conversions et les mariages forcés, ainsi que contre la traite.  Le pays a fait fi des recommandations des organes des Nations Unies créés en vertu de traités relatifs aux droits de l’homme, s’agissant notamment du délit de blasphème, a par ailleurs déploré l’ONG. 

Justice Project a dénoncé la torture endémique dans les prisons du Pakistan et a précisé que les femmes sont victimes en prison d’un type particulier de torture : les violences sexuelles.  Une enquête de la Commission nationale des droits de l’homme a constaté qu’aucun de ces cas n’a entraîné une réparation pour les victimes.  Les femmes handicapées ont par ailleurs dix fois plus de risques d’être victimes de violences sexuelles, a ajouté l’ONG.

Forum for Dignity Initiatives a souligné que le Pakistan possède la population jeune la plus importante de la région et que c’est néanmoins cette population qui est la plus touchée par l’absence de droit à la santé génésique et sexuelle.   L’ONG a en outre dénoncé la stérilisation forcée des femmes handicapées au Pakistan. 

Shirakat – Partnership for Development a dénoncé l’absence d’un climat macroéconomique bénéfique pour les femmes au Pakistan.  Les crédits accordés par le Fonds monétaire international (FMI) et par la Banque mondiale ont eu des effets néfastes sur les femmes, notamment en raison des surcoûts qu’ils ont engendrés dans la vie courante.  Il n’y a aucune protection juridique s’agissant des droits, notamment économiques, des travailleurs domestiques ou encore dans le domaine de l’agriculture, a dénoncé l’organisation.

Aurat Foundation a fait observer que seuls 17,7% des parlementaires à l’Assemblée nationale du Pakistan sont des femmes.  La représentation des femmes au sein des collectivités locales est en baisse ces dernières années, a-t-elle ajouté.  Aucun quota n’existe pour ce qui est de la représentation des femmes parmi les juges ou les membres des forces de l’ordre, deux secteurs où les femmes sont sous-représentées, a en outre déploré l’ONG. 

Dans le cadre du dialogue qui a suivi ces présentations, une experte a demandé s’il y avait des signes positifs avant-coureurs d’un dialogue avec les autorités pakistanaises en vue de la levée de l’interdiction de l’avortement dans le cas d’un viol ou d’un inceste.  Elle s’est en outre enquise de la situation du VIH/sida au Pakistan. 

Une autre experte a demandé s’il existe dans le pays un système de surveillance du respect, par les partis politiques, des quotas de genre et si des sanctions sont prévues en cas de non-respect de ceux-ci. 

Une experte a souhaité savoir si les autorités pakistanaises envisageaient de relever l’âge du mariage pour le porter à 18 ans et comment elles mettaient en œuvre le principe de l’égalité entre hommes et femmes dans le domaine du mariage. 

Une autre experte a relevé qu’aucune organisation n’avait traité de la question de la présence des femmes sur le marché de l’emploi, alors que subsiste un écart très important entre hommes et femmes dans ce domaine.  Elle a en outre souhaité savoir si la loi interdisant le travail des enfants était mise en œuvre sur le terrain. 

Un expert s’est enquis du taux d’enregistrement des cas de violences domestiques. 

En réponse à ces questions, la société civile a fait observer qu’il n’y avait aucun dialogue concernant l’avortement et qu’il y avait beaucoup de résistances des autorités sur cette question.  Étant donné qu’il n’y a pas de code civil commun au Pakistan applicable indifféremment aux diverses religions, les règles régissant l’âge du mariage sont différentes (selon les religions).  Le Gouvernement du Pakistan n’a pas amendé la loi sur le mariage et n’ose pas aborder les questions polémiques, a-t-il été souligné.  Cette question reste donc en souffrance, a déploré la société civile.  

S’agissant du Zimbabwe

Women’s Coalition of Zimbabwe a dénoncé la sous-représentation des femmes élues au sein des collectivités locales et dans les institutions publiques.  Elle a également dénoncé l’absence de mesures pour prévenir les violences à l’égard des femmes, que ce soit dans les écoles, sur les lieux de travail ou dans l’espace public.  L’ONG s’est en outre dite troublée par l’absence de mesures visant à lutter contre les violences policières à l’encontre des femmes.  Le Zimbabwe devrait par ailleurs élargir la liste des conditions sous lesquelles une femme peut avoir accès à l’avortement, a estimé l’ONG. 

ZIMSWA a dénoncé les violences à l’encontre des travailleuses du sexe et la criminalisation de ces travailleuses, qui sont en outre la cible de détentions arbitraires.  Les travailleuses du sexe sont défavorisées au niveau économique et sont contraintes de s’exiler vers des pays voisins.  Elles sont en outre victimes de discrimination lorsqu’il s’agit d’avoir accès à des prêts et elles rencontrent également de grandes difficultés pour accéder aux médicaments.  L’ONG a recommandé au Gouvernement zimbabwéen d’abroger les lois incriminant les travailleuses du sexe. 

Pakasipiti Zimbabwe a dénoncé la violence sexiste au Zimbabwe.  L’ONG a en outre déploré que ce pays n’ait pris aucune mesure pour lutter contre les discriminations à l’encontre des personnes LGBTI, alors que le pays traverse une crise de violences et de discriminations visant des individus en raison de leur identité de genre.  La police a procédé à de multiples arrestations arbitraires de représentants LGBTI lors de réunions, a insisté l’ONG, soulignant en outre que l’accès aux soins de santé est devenu très compliqué pour les personnes LGBTI en raison des discriminations à leur encontre. 

Au cours du dialogue qui a suivi ces présentations, une experte a demandé si les quotas de genre dans le domaine de l’emploi étaient respectés au Zimbabwe.  Elle s’est en outre enquise du lien pouvant exister entre la croissance du nombre de prostituées dans le pays et la crise économique.  

Une autre experte a relevé que malgré la législation, des mariages précoces étaient prononcés dans les zones rurales, alors que la polygamie reste également une réalité dans le pays. 

En réponse à ces questions, la société civile a expliqué que la crise économique avait effectivement été la cause de l’augmentation du nombre de travailleuses du sexe au Zimbabwe.  Plus de 30% des travailleuses du sexe sont victimes de différentes formes de violences, a-t-il en outre été souligné.  Aucune sanction n’est prévue en cas de non-respect des quotas de genre par les partis politiques, a par ailleurs indiqué la société civile.  S’agissant du mariage des enfants, la loi sur les mariages coutumiers doit encore être mise en conformité avec l’âge de consentement au mariage prévu dans la nouvelle Constitution.

MME NAOME CHIMBETE, Commissaire de la Commission zimbabwéenne de l’égalité des sexes, a indiqué que la responsabilité globale de la Commission est de faciliter la promotion de l'égalité et de l'équité entre les sexes, ainsi que de veiller au respect des dispositions de la Constitution et des autres cadres normatifs régionaux et internationaux en matière d'égalité des sexes. 

Le 10 juin 2019, la Commission a soumis au Comité le rapport parallèle qui a attiré l'attention sur des préoccupations et des mesures à prendre s’agissant de la réalisation de l'égalité des sexes au Zimbabwe.  Le rapport met en évidence les lacunes existantes et les zones d'ombre qui requièrent une attention particulière afin de garantir la réalisation de l'égalité entre les sexes au Zimbabwe. 

Des obstacles structurels à l'égalité entre les sexes et à l’élimination de la discrimination fondée sur le sexe persistent au Zimbabwe, a insisté la Commissaire.  Les barrières structurelles et les écarts entre les sexes sont enracinés dans des relations de pouvoir historiquement inégales entre les femmes et les hommes, a-t-elle rappelé, soulignant que dans ce contexte, s’avèrent nécessaires des mécanismes durables permettant aux femmes de revendiquer leurs droits conformément à la Constitution. 

La question du réalignement des lois sur la Constitution est une autre question urgente, alors que cela fait sept ans que Constitution a été adoptée et que très peu de lois ayant un impact sexospécifique ont, depuis, été alignées sur celle-ci.  Il est urgent de renforcer la législation sur l'égalité entre les sexes par une législation spécifique traitant des questions de genre.  Malgré l'existence de la politique nationale en matière de genre, qui n'est qu'un cadre directeur sans force juridique, les institutions publiques et privées omettent ou négligent délibérément de mettre en œuvre les dispositions de la Constitution relatives à l'égalité entre les sexes, notamment l'article 17, qui prévoit l'équilibre entre les sexes s’agissant des nominations aux postes décisionnels dans le secteur public.

Pour conclure, la Commissaire a déclaré que le Gouvernement zimbabwéen devrait accélérer les actions visant à faciliter la réalisation de l'égalité entre les sexes et la réalisation des droits des femmes ; trouver des moyens de s'attaquer aux principaux obstacles structurels qui freinent les progrès des femmes et des filles, tels que les normes discriminatoires, les stéréotypes sexistes, ainsi que la faible application des lois existantes ; et renforcer les institutions travaillant sur l'égalité entre les sexes et sur les droits humains des femmes. 

S’agissant de l’Érythrée

Network of Eritrean Women a déclaré que l’Érythrée n’est pas un État de droit.  Depuis son accession à l’indépendance, le pays est gouverné par un seul Président et la Constitution n’a en fait jamais été mise en œuvre.  L’ONG a ensuite dénoncé la détention de nombreuses femmes qui ont lutté pour la libération d’opposants politiques.  Elle a également dénoncé la mobilisation des filles au sein de l’armée, soulignant que le seul moyen pour elles d’être révoquées est de tomber enceinte.  Les femmes sont donc mariées très jeunes pour éviter leur enrôlement dans l’armée.  La violence sexuelle et le harcèlement ne sont pas sanctionnés par la justice, a en outre déploré l’ONG.

Presque toutes les organisations internationales ont quitté le pays et la plupart des organisations nationales ont été dissoutes, a poursuivi l’ONG.  Depuis la levée des sanctions qui frappaient le pays et l’accord conclu avec l’Éthiopie, rien n’a changé pour les femmes érythréennes : elles sont encore enrôlées contre leur gré (dans l’armée) et victimes de violences sexuelles, a insisté l’ONG.  

Au cours du dialogue qui a suivi cette présentation, une experte s’est enquise du cadre règlementaire applicable à la société civile et de ce qu’il en était de l’existence des partis politiques en Érythrée.  Cette experte a également demandé ce qu’il en était de la représentation des femmes suite aux dernières élections locales. 

Une autre experte s’est inquiétée de la surmilitarisation de l’Érythrée. 

En réponse à ces questions, la société civile a souligné que la Constitution actuelle du pays avait surgi dans des circonstances particulières et qu’il n’existait actuellement aucune initiative pour changer le système politique existant.  La Constitution a ainsi été mise entre parenthèses par le Gouvernement érythréen, a-t-il été affirmé.  S’agissant de la militarisation du pays, il y a 26 ans, le Gouvernement a déclaré que tous les jeunes érythréens en bonne santé devaient être disponibles pendant 18 mois pour le service militaire, a-t-il été rappelé ; ensuite, il y a eu la guerre et même ceux qui avaient été renvoyés chez eux ont été rappelés au sein de l’armée.  Il y a des personnes qui à partir du début de la guerre n’ont jamais pu arrêter leur service militaire.

 

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