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Le Comité tient un débat à l'occasion des 40 ans de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes
08 juillet 2019
Comité pour l'élimination de la discrimination
à l'égard des femmes
8 juillet 2019
En partenariat avec l’Union interparlementaire (UIP) et l’Institut des Nations Unies pour la formation et la recherche (UNITAR), le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a tenu, ce matin, un débat sur le thème de « la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes: 40 ans de promotion et d’autonomisation des femmes ». Le débat a porté sur trois thèmes principaux: la participation politique des femmes ; les droits de l’homme des femmes en situation de risques ; et la valeur ajoutée de la Convention et du Comité.
Animé par M. Orest Nowosad, Chef de la Section des groupes cibles à la Division des traités du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, le débat a compté avec la participation des panélistes suivants: Mme Rosemary McCarney, Représentante permanente du Canada auprès des Nations Unies à Genève ; Mme Nicole Ameline, Vice-Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes ; et M. Martin Chungong, Secrétaire général de l’Union interparlementaire (UIP).
Suite aux interventions de ces panélistes, un dialogue s’est noué, auquel ont notamment pris part des experts du Comité et des représentants de pays ou d’organisations.
À 16 heures 10 cet après-midi, le Comité entendra des organisations de la société civile au sujet de la mise en œuvre de la Convention dans les pays dont les rapports doivent être examinés cette semaine, à savoir la République démocratique du Congo, l’Autriche, le Cabo Verde et le Guyana.
Aperçu du débat
S’agissant de la participation politique des femmes
MME ROSEMARY MCCARNEY, Représentante permanente du Canada auprès des Nations Unies à Genève, a expliqué qu’elle avait travaillé dans tous les secteurs de la société, aussi bien dans le public que dans le privé, ce qui lui a permis de bien appréhender la question du genre dans ces différents contextes. Elle a souligné que même dans le secteur des nouvelles technologies, il reste beaucoup de défis à relever dans le domaine de la parité. Le seul secteur où les femmes sont davantage représentées, c’est au sein des organisations de la société civile, a poursuivi la Représentante permanente, ajoutant que les organisations non gouvernementales (ONG) travaillent dans des environnements qui rassemblent des femmes et qui font avancer les politiques dans différentes directions. Mme McCarney a ensuite rappelé que les diplômes et les éléments de reconnaissance peuvent renforcer la position des femmes. Elle a aussi expliqué que les femmes devaient prendre les postes difficiles dès le début de leur carrière ; ainsi, il n’y aura ensuite plus de doutes quant à leur capacité de répondre aux attentes.
Mme McCarney a souligné que les gouvernements peuvent jouer un rôle de chef de file, dans la société, dans le domaine de la parité. Les mesures temporaires spéciales sont très importantes, mais il faut également mettre en place des processus transparents qui permettent aux femmes d’entrer dans les organisations ou autres entités visées, a-t-elle ajouté. Le Canada a ainsi fait en sorte que toutes les nominations au Gouvernement se fassent sur la base d’un processus basé sur le mérite. La Représentante permanente a fait observer que les changements peuvent se faire rapidement si les États se dotent de bons mécanismes.
MME NICOLE AMELINE, Vice-Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, a déclaré que la question du leadership des femmes en politique était la clé de l’égalité. Aujourd’hui plus que jamais, face aux défis actuels, il est absolument nécessaire que les femmes partagent la décision, y prennent part ; or, c’est en politique que la plupart des décisions se prennent. Les femmes doivent plus que jamais s’exprimer dans les décisions prises dans le domaine de la paix et de la sécurité, a poursuivi Mme Ameline, avant d’ajouter que le Comité dont elle est membre devait faire en sorte que les États accélèrent le changement. Il faut avoir en tête le concept de codécision, a-t-elle insisté. Le Secrétaire général des Nations Unies a observé avec déception que seulement 2% des médiateurs de paix sont des femmes, a relevé Mme Ameline, plaidant pour que l’accent soit mis sur la question du leadership des femmes dans les processus de paix. Il est indispensable que le monde se construise avec les femmes et non pas sans elles, a-t-elle déclaré.
Mme Ameline a fait observer que la Convention elle-même assure le leadership des femmes ; mais pour accélérer l’évolution, a-t-elle ajouté, il faut une vision ou un code de conduite qui consiste à réellement partager le pouvoir. Les quotas constituent une réponse, car ils permettent un changement de paradigme ; mais ce n’est pas suffisant, a expliqué l’experte. Il faut changer les modes de scrutin en instaurant des listes paritaires de manière à créer une classe politique de femmes sur le terrain, a-t-elle indiqué. La réponse à l’ensemble de cette problématique doit être politique, culturelle, et économique, a-t-elle conclu.
M. Martin Chungong, Secrétaire général de l’Union interparlementaire (UIP), a affirmé qu’il y avait des progrès en termes de représentation politique des femmes ; les parlements dans le monde comptent 24,3% des femmes parmi leurs membres, ce qui représente une hausse sensible (de la part des femmes au sein des parlements) depuis la Conférence de Beijing. Néanmoins, il ne faut pas se reposer sur ses lauriers, a souligné le Secrétaire général de l’UIP. Il faut établir un lien entre l’égalité des sexes et la paix et la sécurité dans le monde, a-t-il recommandé. Il est important qu’il y ait une participation effective des hommes et des femmes dans ce domaine, a-t-il insisté.
Quelque 130 pays ont désormais adopté une forme ou une autre de quotas pour les femmes, afin de rectifier le déséquilibre historique dont elles pâtissaient dans les domaines de la participation et de la prise de décisions, a poursuivi M. Chungong. Au Rwanda, c’est grâce à certaines mesures positives (d’action affirmative) qu’aujourd’hui, le pays atteint pratiquement l’égalité et la parité, a-t-il notamment fait observer. L’UIP, quant à elle, joint les actes à la parole par la mise en place de mécanismes et de mesures qui assurent la parité, notamment au sein des délégations, n’hésitant pas à avoir recours à des sanctions en cas de non-respect de ces règles. M. Chungong a ajouté qu’à l’UIP, il existe un forum des femmes parlementaires, auquel les hommes peuvent participer. Quant aux partis politiques, qui doivent ouvrir la voie à la représentation paritaire des femmes, il faut pouvoir imposer des sanctions à ceux qui ne passent pas des mots à l’action dans ce domaine, a indiqué le Secrétaire général de l’Union interparlementaire.
Dans le cadre du débat qui a suivi ces déclarations, l’attention a notamment été attirée sur le rôle des médias dans le domaine de la parité, sur les reculs observés dans le domaine de la participation des femmes dans certaines régions du monde ou encore sur le fossé entre New-York et Genève quant à l’approche de la parité. Une experte du Comité a demandé comment faire en sorte que les femmes elles-mêmes s’intéressent à la question de leur représentation.
En réponse à ces questions, Mme McCarney a expliqué que les jeunes jouaient un rôle essentiel pour atteindre la parité. Il faut que les femmes soient prises au sérieux et pour ce faire, renforcer leurs capacités dans le domaine de la négociation, a-t-elle indiqué. S’agissant du fossé entre New-York et Genève pour ce qui est de l’approche de ces questions, elle a reconnu qu’il y avait un défi à relever dans ce domaine, soulignant que des décisions se prenaient au sein de la Cinquième Commission de l’Assemblée générale sans que soit pris en compte le point de vue de Genève ; il faut que les représentants de Genève s’intéressent davantage aux travaux qui se déroulent à New York.
M. Chungong a quant à lui évoqué le rôle des médias dans le domaine de la parité en soulignant qu’il ne faut pas seulement se concentrer sur les médias traditionnels, mais aussi prendre en compte les réseaux sociaux, qui jouent un rôle important s’agissant de la question de la participation des femmes. Les médias sociaux sont souvent porteurs de messages sexistes, a-t-il en outre regretté.
Mme Ameline a souligné l’importance de promouvoir la Convention (sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes) dès le plus jeune âge, en affirmant qu’elle devrait être affichée dans les salles de classe. Elle a par ailleurs estimé qu’il fallait renforcer le leadership du Comité au sein de la Cinquième Commission de l’Assemblée générale.
S’agissant des droits de l’homme des femmes en situation de risques
MME AMELINE a déclaré que le Comité devrait évaluer les plans nationaux d’action de sortie de crise sous l’angle de la question du genre. Elle a insisté sur l’importance d’engager la transformation politique et sociale en même temps que la réponse aux défis sécuritaires. Les femmes ne doivent pas être uniquement consultées ; elles doivent pouvoir prendre des décisions sur l’ensemble des questions liées à la paix et la sécurité – et non pas seulement sur les questions qui les concernent, a souligné la Vice-Présidente du Comité.
MME MCCARNEY a indiqué que le Canada avait élaboré un plan d’action s’agissant des femmes et de la sécurité. C’est un document très important, a-t-elle souligné, jugeant primordiale la question de la sécurité des femmes et des jeunes filles dans le contexte des crises humanitaires. Il manque un certain travail normatif dans ce domaine, a-t-elle relevé. Elle a également relevé qu’il y avait d’importantes divergences au Conseil de sécurité sur les questions liées, notamment, à l’accès à la santé génésique et sexuelle, tout en soulignant qu’il ne fallait pas perdre du terrain face à ces attaques.
M. CHUNGONG a souligné que la mission de l’Union interparlementaire est notamment de veiller à la mise en œuvre de la Convention et à ce que les parlements soient inclusifs et démocratiques. Il a rappelé l’importance qu’ont les parlements de par leur pouvoir de ratifier la Convention et de veiller à ce que les lois nationales soient harmonisées avec les dispositions de cet instrument. L’UIP travaille avec les parlements dans ce sens, a souligné son Secrétaire général.
Dans le cadre du débat qui a suivi ces déclarations, la délégation de la Gambie a soulevé la question de l’autonomisation économique des femmes. Plusieurs expertes ont quant à elles notamment évoqué l’inefficacité des mécanismes de reddition de comptes face à la discrimination et la question de la base juridique des mesures de quotas (de femmes) dans les parlements.
En réponse à ces questions, M. Chungong a souligné que les quotas étaient bien des mesures temporaires qui n’étaient pas destinées à rester en vigueur indéfiniment. En l’état actuel des choses, il faut faire quelque chose pour assurer une meilleure parité, a-t-il ajouté. L’Union interparlementaire n’a qu’un rôle « moral » sur cette question, en incitant les États à s’engager vers la parité ; elle ne peut pas prendre de sanctions à leur encontre, a précisé le Secrétaire général de l’UIP. Par contre, l’UIP peut refuser que des parlements où les femmes ne sont pas représentées adhèrent à l’Union, a-t-il souligné.
Mme Ameline a fait observer que l’accélération du changement s’agissant de ces questions était possible grâce à l’inscription de la Convention dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030. Mme McCarney a relevé qu’il était toujours plus facile de travailler dans un environnement où l’on est entouré de personnes qui pensent la même chose que soi. Or, a-t-elle souligné, il faut savoir sortir de sa zone de confort ; il faut encourager les femmes à s’engager dans des voies inconnues, dans les domaines de la prise de décision ou de l’économie, notamment.
S’agissant de la valeur ajoutée de la Convention et du Comité
M. CHUNGONG a déclaré que la volonté inscrite dans la Convention d’agir au niveau des parlements est claire. La mise en œuvre de la Convention est une priorité stratégique de l’Union, a-t-il insisté. Il a encouragé les parlements à s’engager dans la rédaction des rapports soumis au Comité. Un grand nombre des recommandations du Comité sont d’ailleurs liées à la révision ou à l’amendement de lois, a-t-il fait observer.
MME MCCARNEY a rappelé que le Canada avait été l’un des premiers pays à ratifier la Convention. Cet instrument joue un rôle essentiel et le Comité représente le multilatéralisme par excellence, a-t-elle ajouté. Elle a rappelé que les dernières recommandations du Comité (adressées à son pays) étaient notamment axées sur le renforcement des capacités des mécanismes nationaux dans le domaine des droits des femmes et sur la situation des femmes et des filles autochtones. Le Canada s’efforce de répondre à ces recommandations, a-t-elle indiqué.
MME AMELINE a notamment attiré l’attention sur l’importance du Protocole facultatif se rapportant à la Convention (qui institue une procédure de plaintes individuelles) et a souligné que le Comité avait renforcé sa coopération avec les États. Le Comité est aujourd’hui le gardien des droits des femmes, s’est-elle réjouie.
Dans le cadre du débat qui a suivi ces déclarations, une experte a attiré l’attention sur l’expérience des organisations de la société civile, qui constitue un bon indicateur pour ce qui a trait à la participation des femmes. Elle a en outre affirmé qu’il fallait réfléchir à l’extension des quotas de représentation des femmes au niveau local, notamment dans les pays les moins développés. Une autre experte s’est enquise d’exemples d’autres solutions que les quotas pour atteindre l’égalité entre les sexes.
En réponse à ces questions, Mme McCarney a déclaré qu’il fallait valider l’expérience et les compétences des ONG et les transférer dans les domaines public et privé. Elle a ajouté qu’elle croyait fermement aux mesures temporaires spéciales pour accélérer le changement. Les expériences dans le secteur public jouent un rôle essentiel et doivent être encouragées par les gouvernements afin qu’elles puissent ensuite être transposées dans le secteur privé, a-t-elle indiqué.
M. Chungong a lui aussi affirmé que les mesures temporaires spéciales étaient indispensables ; il a toutefois insisté sur la nécessité d’inciter les parlements à revoir toutes les dispositions législatives qui entravent la participation des femmes, y compris à la prise de décisions.
Mme Ameline a affirmé qu’il fallait avoir pour horizon 2030 pour asseoir l’égalité entre les sexes. Elle a ajouté que le Comité dont elle est membre démontre tous les jours sa capacité à soutenir les États.
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