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Le Conseil dialogue avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés

18 Mars 2019

Conseil des droits de l'homme
MATIN 

18 mars 2019

Il dialogue aussi avec la Commission d’enquête sur les manifestations de 2018 dans les territoires, qui a documenté la mort de 189 Palestiniens et a compté 6106 blessés

Le Conseil des droits de l'homme a tenu, ce matin, un débat interactif avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, M. Michael Lynk, puis un autre avec les membres de la Commission d’enquête internationale indépendante sur les manifestations de 2018 dans les territoires palestiniens occupés, présidée par M. Santiago Canton.

Après avoir regretté qu’Israël ait, une fois de plus, refusé de coopérer avec son mandat, M. Lynk a présenté son rapport qui, cette année, se concentre sur le droit à l’eau, aux ressources naturelles et à l’environnement.  Le Rapporteur spécial a rappelé que le droit international garantit aux populations vivant sous occupation un accès aux ressources naturelles.  Or, alors que « l’occupation étend ses tentacules », Israël n’honore pas ses responsabilités et considère le territoire palestinien comme son propre territoire où il peut aller se servir.  La situation à Gaza approche de la catastrophe humanitaire, a en outre averti M. Lynk.

Pour sa part, M. Canton a expliqué que la Commission d’enquête avait réalisé un travail méticuleux et objectif et a eu à l’esprit le contexte dans lequel se sont déroulées ces manifestations, notamment le blocus de Gaza et les combats de longue date entre Israël et les groupes armés; cependant, a-t-il souligné, les manifestations devant la frontière entre Israël et la bande de Gaza ne relevaient pas d’une opération militaire, mais de manifestations civiles.  Les éléments d’enquête relevés montrent que les manifestants n’étaient pas armés, même s’ils n’étaient pas en toutes circonstances pacifiques. 

La Commission a documenté la mort de 189 Palestiniens, dont 183 par munitions; parmi les 35 enfants morts, 60% l’ont été par balle en pleine tête.  À ces morts s’ajoutent celles de 39 journalistes qui portaient pourtant clairement des vêtements indiquant leur profession et de 39 professionnels médicaux tués alors qu’ils prodiguaient des soins aux manifestants.  La Commission d’enquête a également compté 6106 blessés.  Elle dresse une série de recommandations, parmi lesquelles celles visant à lever le blocus de Gaza, permettre que les manifestants blessés puissent être extirpés des zones de manifestations pour recevoir une assistance médicale.  La Commission recommande également que l’armée israélienne revoie ses règles d’engagement et n’use de la force létale qu’en dernier recours.  Elle recommande aussi aux autorités de facto de Gaza de cesser d’utiliser les ballons et autres outils incendiaires, entre autres, a conclu M. Canton. 

L’État de Palestine est intervenu après la présentation de chacun de ces deux rapports, pour dénoncer la politique d’occupation illégale d’Israël, affirmant qu’Israël amplifiait désormais ses crimes pour faire partir les Palestiniens de leurs terres et les remplacer par des colons, qui à leur tour commettent des crimes et attaques contre les Palestiniens, avec l’appui du Gouvernement israélien.  La Commission indépendante des droits de l'homme de l’État de Palestine a également pris la parole.

De nombreuses délégations sont intervenues dans le cadre de ces deux dialogues avec le Rapporteur spécial* et avec la Commission d’enquête**.  Elles ont condamné les pratiques israéliennes dans les territoires palestiniens occupés et estimé que la communauté internationale ne devait plus assister sans réagir à la spoliation des ressources du peuple palestinien; elles se sont en outre inquiétées de l’aggravation sans fin de la situation humanitaire.  Quelques intervenants, en particulier des ONG, ont jugé partial le Rapporteur spécial, déplorant qu’il ne s’intéresse qu’aux violations et abus d’Israël – ce à quoi M. Lynk a répondu que si toute violation commise par le Hamas ou l’Autorité palestinienne devait être condamnée, cette question devait être adressée au Conseil – qui a défini le périmètre de son mandat – et non pas à lui.

Les intervenants se sont aussi inquiétés de l’escalade de la violence et de la perte de vies humaines en 2018 à Gaza.  Ont été plusieurs fois déplorées les conséquences de la décision du Gouvernement des États-Unis de transférer son ambassade à Jérusalem. De nombreux intervenants ont plaidé pour que le rapport de la Commission d’enquête soit transmis à la Cour pénale internationale. 

En début d’après-midi, le Conseil doit poursuivre ses travaux en entamant son débat général sur la situation des droits de l'homme en Palestine et dans les autres territoires arabes occupés, après avoir entendu la présentation des rapports du Secrétaire général et du Haut-Commissariat aux droits de l'homme au titre de cette question.

Dialogue avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967

Présentation du rapport

Le Conseil était saisi du rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967 (A/HRC/40/73 , version préliminaire en anglais).

M. MICHAEL LYNK, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, a rappelé que, depuis trois ans qu’il occupe ce mandat, Israël ne l’a pas autorisé à se rendre dans les territoires, contrairement aux obligations de ce pays.  Face à la non-coopération de la part d’Israël avec plusieurs mécanismes des droits de l'homme de l’ONU, M. Lynk a prié le Conseil de prendre les mesures nécessaires.

En venant à la situation à Gaza, le Rapporteur spécial a alerté sur la crise humanitaire dans ce qui reste un territoire occupé au regard du droit international: en effet, même si les colons israéliens ont quitté Gaza, le territoire fait toujours l’objet d’un blocus terrestre, maritime et aérien qui fait qu’Israël conserve donc un contrôle.  L’économie de Gaza s’est effondrée: 54% de la population est au chômage, soit le taux le plus élevé au monde, 68% de la population est en insécurité alimentaire et le taux de pauvreté dépasse 50%.  Le Rapporteur spécial a aussi jugé inique le recours à la force contre des manifestants ne représentant pas une menace immédiate.  Israël doit renoncer à ce blocus qui étouffe Gaza et est contraire au droit humanitaire, a insisté le Rapporteur spécial.

La situation en Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, est également préoccupante, a poursuivi M. Lynk.  Israël ne cesse d’étendre son territoire par le biais des colonies de peuplement et, malgré les résolutions des Nations Unies, n’a jamais remis en question l’annexion de Jérusalem-Est, où les expulsions forcées se poursuivent dans les quartiers palestiniens. 

S’agissant de la situation des défenseurs des droits de l'homme en Palestine et en Israël, M. Lynk a dit qu’Israël s’efforce de les réduire au silence, y compris par des campagnes de désinformation et en ciblant leurs sources de financement.  Le Rapporteur spécial a cité des attaques verbales de diplomates israéliens contre des organisations de la société civile pour essayer de délégitimer ces organisations.

En venant à la liste des entreprises ayant des activités dans les colonies de peuplement prévue par la résolution 31/36, le Rapporteur spécial a estimé que sa disponibilité est essentielle car c’est un outil permettant d’évaluer l’impact des activités de ces entreprises sur les droits de l'homme.  Il s’est dit déçu qu’il ne soit pas question de rendre cette liste publique.

Le Rapporteur spécial a souligné, d’autre part, que l’Autorité palestinienne et le Hamas ont aussi des responsabilités en matière des droits de l'homme et il a condamné la violente répression, par le Hamas, de manifestations contre les conditions de vie à Gaza ces derniers jours.

M. Lynk a ensuite exposé le thème principal de son rapport cette année: le droit à l’eau, aux ressources naturelles et à l’environnement.  Le Rapporteur spécial a rappelé que le droit international garantit aux populations vivant sous occupation un accès aux ressources naturelles. 

Or, alors que « l’occupation étend ses tentacules », la distribution injuste de l’eau par Israël témoigne du manque de contrôle des Palestiniens sur leur vie quotidienne.  Des villages dans la région d’Hébron ont vu leurs conduites d’eau détruites par la sécurité civile israélienne, a-t-il dénoncé.  D’autre part, la mer Morte et ses abondantes ressources naturelles, dont une partie se trouve dans le territoire palestinien occupé, sont interdites à tout développement palestinien, tandis que les entreprises israéliennes sont autorisées à exploiter les minerais dans un acte qui ressemble à du pillage, a mis en garde le Rapporteur spécial.  Il a aussi déploré que les oliveraies de Cisjordanie soient régulièrement détruites par les colons israéliens, et en toute impunité.  Quant au transfert de déchets industriels vers des zones palestiniennes, il contribue à la destruction de l’environnement, a aussi relevé l’expert. 

La situation à Gaza approche de la catastrophe humanitaire, a averti M. Lynk.  Israël n’honore pas ses obligations en tant que puissance occupante et considère le territoire palestinien comme son propre territoire où il peut se servir.  L’impunité, et non pas la reddition de comptes, semble la marque de cette occupation, qui ne cessera que lorsque la communauté internationale prendra de réelles mesures face au déni israélien de l’autodétermination palestinienne.

Parties concernées

L’État de Palestine a condamné le refus de coopération d’Israël avec le Rapporteur spécial.  C’est une stratégie pour « cacher ce qui lui est reproché », c’est-à-dire les violations du droit international, du droit international humanitaire et des conventions internationales auxquelles Israël est partie contractante, a dit la délégation. 

La délégation palestinienne a également affirmé qu’Israël amplifiait désormais ses crimes pour expulser les Palestiniens de leurs terres et les remplacer par des colons, qui à leur tour commettent des crimes et attaques contre les Palestiniens, avec l’appui du gouvernement.  Ce dernier a fait partir la Présence internationale temporaire à Hébron pour donner ainsi « le feu vert à ces criminels d’intensifier leurs activités », a encore déclaré la délégation. 

Par ailleurs, et toujours selon elle, « le gouvernement occupant pille » les ressources des Palestiniens en accordant à des entreprises internationales des droits d’exploitation des ressources et en retenant 147 millions de dollars appartenant au peuple palestinien.  À ces crimes s’ajoutent la judaïsation forcée de Jérusalem-Est et l’adoption de loi racistes.  Israël a en effet adopté 180 lois aggravant l’apartheid contre les Palestiniens, notamment la loi Israël, État-nation du peuple juif, a encore la délégation.

Mais cela ne doit pas rester impuni, a demandé la Palestine, ajoutant que « nier la justice aux Palestiniens, c’est nier la justice tout court »: il faut donc que la communauté internationale prenne des mesures efficaces pour que cesse cette situation, a-t-elle conclu. 

Débat

Outre du fait que la communauté internationale ne devait plus assister sans réagir à la spoliation des ressources du peuple palestinien, et de l’aggravation sans fin de la situation humanitaire, les membres du Conseil ont débattu de la question de savoir si un point entier de l’ordre du jour devait ou non concerner l’occupation israélienne.

La Turquie s’est félicitée que le rapport de M. Lynk mette plus particulièrement l’accent sur les effets dévastateurs de l’occupation sur les ressources naturelles.  Elle estime que la communauté internationale doit enjoindre Israël de coopérer avec le Rapporteur spécial dans l’accomplissement de son mandat.  Les Maldives ont fait part de leur consternation face à la gravité de la crise de l’eau à Gaza, alors que l’ONU estimait il y a deux ans que plus de 96% des ressources hydriques n’étaient pas potables.  Les Maldives ont appelé la communauté internationale à fournir un financement suffisant pour prévenir un nouveau désastre humanitaire. 

La Bolivie a, de son côté, relevé que les conflits internationaux ont souvent pour cause les ressources naturelles.  Or, on constate que des entreprises exploitent les ressources naturelles palestiniennes, a dit la représentante, ajoutant que la question qu’il faut se poser est de savoir à qui profite le conflit et qui conserve les ressources.  Le Venezuela a condamné la captation des ressources hydriques des Palestiniens par Israël, de même que « l’impérialisme arrogant » du gouvernement des États-Unis et de Donald Trump, qui ont décidé de transférer leur ambassade à Jérusalem. L’Égypte aussi déplore les conclusions du rapport quant à la question des ressources palestiniennes qu’Israël exploite illégalement.  Il faut, dans ce contexte, que les recommandations du rapport et les résolutions des Nations Unies soient appliquées, a ajouté l’Algérie

Le Pakistan, au nom de l’Organisation de la coopération islamique, a déploré la non-collaboration d’Israël avec le Rapporteur spécial et estimé qu’une telle attitude ne devait plus être permise.  Il a appelé à ce qu’une action soit prise sans tarder par l’ONU pour y remédier et contraindre la puissance occupante à s’y plier.  Israël doit être tenu pour responsable de toutes les politiques et pratiques illicites par lesquelles il a exproprié et colonisé la terre palestinienne.  Quelles mesures le Rapporteur spécial propose-t-il à cet égard, a demandé l’Organisation de la coopération islamique ?

Bahreïn, au nom du Groupe arabe, a appelé le Conseil à mettre un terme à la situation dans laquelle Israël continue d’ignorer ses obligations.  Les Palestiniens doivent pouvoir jouir de leur droit à l’autodétermination et du droit au retour.  Alors que l’occupation illégale se poursuit depuis plus d’une cinquantaine d’années, le Groupe arabe appuie toute mesure visant à mettre un terme immédiatement à l’occupation.  La Tunisie a insisté sur le droit du peuple palestinien à exploiter ses ressources naturelles, y compris l’eau.  La communauté internationale doit assumer ses responsabilités et ne pas rester les bras croisés en regardant le peuple palestinien mourir à petit feu.

Il semble bien que les pratiques israéliennes montrent que ce pays ne croit pas en la solution des deux États, a regretté pour sa part la représentante du Qatar, ajoutant que ces agissements relèvent des crimes de guerre.  En effet, a poursuivi l’Arabie saoudite, le rapport montre qu’Israël continue d’expulser les populations palestiniennes de leurs territoires.  Cette situation appelle à la pleine mise en œuvre de la résolution 2334 du Conseil de sécurité (2016), a dit la délégation.  Le Botswana fait le même constat et condamne cette politique.  Il demande également la mise en œuvre de ladite résolution.

La Jordanie a rappelé que toute occupation était illégitime par définition.  La meilleure façon de mettre un terme aux violations envers les Palestiniens consiste par conséquent à mettre un terme à l’occupation, en permettant l’émergence d’un État palestinien dans les frontières du 4 juin 1967.  La Jordanie condamne toutes les initiatives unilatérales d’Israël et rappelle la responsabilité morale de la communauté internationale, notamment en finançant correctement l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient, l’UNWRA.

L’Angola, au nom du groupe africain, a fait part de sa profonde préoccupation face à l’absence de protection effective des droits des Palestiniens vivant sous occupation israélienne, ainsi que par l’absence de coopération d’Israël avec le mandat.  La communauté internationale ne peut continuer à absoudre ce pays de ses responsabilités pour les violations commises.  Le Zimbabwe a réaffirmé le droit du peuple palestinien à l’autodétermination et à l’indépendance.  Le Zimbabwe s’est dit préoccupé par la violation du droit à l’autodétermination des Palestiniens par Israël, de même que par les restrictions à la liberté de circulation et par les conséquences du blocus.

Le Bangladesh a critiqué le mépris d’Israël pour les mécanismes des droits de l'homme de l’ONU et regretté le silence des « champions autoproclamés » des droits de l'homme sur ce point.  Le représentant a condamné le recours excessif et disproportionné à la force contre les manifestants à Gaza de la part d’Israël ainsi que le blocus qui entraîne des souffrances inacceptables.  Il a condamné les colonies d’expansion en Cisjordanie et les graves violations des droits de l'homme commises par les forces de sécurité israélienne.  L’Indonésie a salué la coopération de la Palestine avec le Rapporteur spécial et regretté l’absence de coopération de la part d’Israël.  Le représentant a noté l’avancée des colonies de peuplement et la situation préoccupante des défenseurs des droits de l'homme, déplorant qu’Israël continue d’échapper à ses responsabilités juridiques.

Soulignant l’importance des recommandations contenues dans le rapport, le Liban a craint qu’elles ne restent lettre morte en raison de l’inaction de la communauté internationale.  La représentante a demandé comment mettre fin à la détresse du peuple palestinien face au mépris d’Israël pour le droit international.  L’Afghanistan s’est dit très alarmé par les morts et blessés durant les manifestations en raison de l’usage disproportionné de la force par l’armée israélienne.  La représentante a appelé la communauté internationale à faire tout son possible pour mettre un terme aux colonies de peuplement et faire lever le blocus contre Gaza.

La Libye a condamné les tortures, détentions et autres exactions, y compris des assassinats, commises par Israël.  Une autre violation par Israël consiste à interdire l’accès de la mosquée Al-Aqsa, a déploré la Libye.  Bahreïn et Oman se sont félicités des efforts du Rapporteur spécial et du grand intérêt de son travail, particulièrement illustré par son rapport.  Bahreïn a souligné la nécessité de mettre un terme à toutes les restrictions – économiques notamment – imposées par Israël; pour Oman, Israël commet des actes assimilables à des crimes contre l’humanité face auxquelles la communauté internationale se doit de réagir. 

S’agissant précisément de l’urgence humanitaire, le Venezuela, au nom du Mouvement des non-alignés, a dit partager les préoccupations du Rapporteur spécial selon lesquelles les développements survenus à Gaza, associées à un blocus illégal imposé depuis 2007, créaient une situation d’urgence grave menaçant l’ensemble de la population gazaouie.  Le Pakistan a noté que 68% des foyers gazaouis étaient en situation d’insécurité alimentaire.  Israël, en tant que puissance occupante, a des responsabilités en vertu du droit international, notamment celle de protéger la population et de gérer correctement les ressources naturelles.  L’Iraq a estimé que le peuple palestinien souffrait d’une forme de torture, alors que le blocus affecte ses conditions de vie, de santé et d’éducation.

La République islamique d’Iran a voulu savoir quelles étaient, selon le Rapporteur spécial, les mesures à prendre pour lever le blocus de Gaza, permettre le retour des Palestiniens sur leurs terres et faire en sorte que le « régime israélien » soit tenu responsable de ses actes. 

Pour ce qui concerne la légitimité de l’ordre du jour, Cuba a estimé que la situation dans les territoires palestiniens occupés, déjà condamnée par la communauté internationale, devait rester à l’agenda du Conseil aussi longtemps qu’elle perdurerait.  La délégation cubaine a ajouté que la tentative de certains de retirer cette question de l’ordre du jour était une manière de légitimer l’occupation israélienne.  Or selon Cuba, la seule solution à cette situation est la création de deux États et le retrait d’Israël derrières les frontières de 1967.  Le Koweït a dit craindre qu’une éventuelle suppression des débats au titre du point 7 de l’ordre du jour du Conseil n’encourage Israël à persévérer dans ses actes illégaux.  Le Soudan s’est dit lui aussi favorable au maintien du point 7 de l’ordre du jour, convaincu que sa suppression saperait la crédibilité du Conseil. 

L’Union européenne a estimé que la « situation des droits de l’homme en Palestine et dans les autres territoires arabes occupés » (point 7 de l’ordre du jour du Conseil) devait être abordée au même titre que n’importe quelle situation spécifique de pays figurant au point 4, qui concerne les « situations relatives aux droits de l’homme qui requièrent l’attention du Conseil ».  L’Union européenne rappelle aussi ses réserves s’agissant d’un mandat qui s’intéresse uniquement aux violations et abus d’Israël.  Toute dérive, quel qu’en soit l’auteur, doit faire l’objet de l’attention nécessaire conformément avec les normes internationales, a-t-elle rappelé. 

La Commission indépendante des droits de l'homme de l’État de Palestine a dénoncé toutes les violations des droits de l'homme commises par Israël, avant d’ajouter que tant qu’Israël estimera bénéficier d’une immunité, il se sentira encouragé à perpétrer encore plus de crimes.  Pour cette raison les Hautes Parties contractantes à la quatrième Convention de Genève (relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre) à remplir leurs obligations au titre de l’article premier de ladite Convention.  Selon la Commission, la communauté internationale doit assumer ses responsabilités politiques, morales et juridiques pour faire « sérieusement » en sorte qu’Israël cesse ses violations systématiques et ses attaques contre les droits des Palestiniens.  La Commission appelle la Haute-Commissaire à transmettre les rapports à la Cour pénale internationale et appelle la Procureure de la Cour à ouvrir des enquêtes sur les violations des droits de l'homme commisses par Israël dans les territoires palestiniens occupés.

Plusieurs organisations non gouvernementales (ONG) sont ensuite intervenues.  Le Conseil norvégien pour les réfugiés a affirmé que les politiques israéliennes nient les droits économiques et sociaux des Palestiniens, de même que leurs droits au développement et à l'autodétermination.  Israël refuse même l’acheminement de l’aide humanitaire, a déploré l’ONG.  Al-Haq, Law in the Service of Man a de son côté affirmé que 95% de l’eau dans les territoires palestiniens est impropre à la consommation.  Par ailleurs, 75% des pierres extraites dans les territoires palestiniens occupés le sont illégalement.  Selon l’ONG, pendant que le Haut-Commissariat tarde, depuis trois ans, à publier la liste des entreprises impliquées dans ces activités de colonisation, ces dernières continuent illégalement leurs activités.  L’Organisation internationale pour l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale a souhaité savoir comment faire en sorte qu’Israël soit tenu pour responsable de ses actes. 

Un représentant d’Ingénieurs du Monde a dit se joindre à la position de l’Union européenne et a demandé au Rapporteur spécial pourquoi il ne condamnait que les violations des droits de l'homme commises par Israël et non celles commises par d’autres parties, comme le Hamas, qui incite à la haine contre les Israéliens, ou comme l’Autorité palestinienne, qui commet des actes de torture.  Prenant de nouveau la parole au nom de United Nations Watch a demandé au Rapporteur spécial pourquoi il n’avait jamais demandé l’élargissement de son mandat, afin qu’il traite également des violations des droits de l'homme commises par les parties palestiniennes. 

Institute for NGO Research a affirmé que dans son rapport, le Rapporteur spécial dépeignait Israël comme « rapace » et citait des organisations palestiniennes proches du terrorisme; cela rappelle une rhétorique antisémite et devrait être condamné, a ajouté l’ONG.  Touro Law Center, The Institute on Human Rights and The Holocaust a accusé le Rapporteur spécial de « mentir » et a déclaré que l’on cherchait à « diaboliser Israël » au sein du Conseil.

The Palestinian Return Centre Ltd a qualifié d’alarmante la situation dans les territoires occupés, s’agissant notamment de la ressource en eau.  Dans le même temps, est encouragée l’expansion des colonies, ce qui constitue un obstacle majeur à la jouissance par les Palestiniens de leurs ressources naturelles.

Réponses et conclusion du Rapporteur spécial

Au sujet de la redevabilité, M. LYNK a souligné l’énorme écart entre les promesses internationales et la protection.  Selon lui, la liste des entreprises permettra de mieux appréhender l’occupation.  Le Rapporteur spécial a insisté sur l’importance de mettre un terme aux colonies de peuplement, qui sont le moteur de cette occupation.  M. Lynk a cité l’article 25 de la Charte des Nations Unies, qui rappelle à tous les États Membres leur obligation de respecter les résolutions du Conseil de sécurité, dont plusieurs dizaines portent justement sur l’occupation.

S’agissant des questions posées par les délégations sur les conditions de vie dans les territoires palestiniens occupés, le Rapporteur spécial a souligné le désespoir profond derrière les barrières de Gaza.  Le blocus étouffe le peuple palestinien et bâillonne son économie, et il viole le droit international, a-t-il rappelé. 

Quant aux responsabilités de la puissance occupante, M. Lynk a indiqué qu’elles sont au nombre de quatre: elle doit agir en tant qu’administrateur provisoire et rendre le contrôle au peuple palestinien dans les plus brefs délais; elle n’acquiert aucun droit souverain sur ce territoire; elle doit agir de bonne foi et comme tuteur de la population concernée.  Israël contredit ces quatre principes et est un occupant illégal de ces territoires, a fait observer M. Lynk, suggérant au Conseil d’envisager une étude sur un État qui refuse de coopérer. 

M. Lynk a estimé que Gaza avait besoin d’un nouveau plan Marshall afin de rénover ses infrastructures tout en créant de l’emploi pour ses quelque deux millions d’habitants.  S’agissant de savoir pour quelles raisons il ne condamnait pas la partie adverse, il a répondu que si toute violation commise par le Hamas ou l’Autorité palestinienne devait être condamnée, cette question devait être adressée au Conseil – qui a défini le périmètre de son mandat – et non pas à lui.  Le Rapporteur spécial a enfin noté que la population des colonies israéliennes augmentait de vingt à vingt-cinq mille personnes par an et que refuser de qualifier ce phénomène d’«expansionniste» constituait un défi à la langue anglaise.  

Dialogue avec la Commission d’enquête sur les manifestations de 2018 dans les territoires palestiniens occupés

Présentation de rapport

Le Conseil était aussi saisi du rapport de la Commission d’enquête internationale indépendante chargée d'enquêter sur les manifestations dans les territoires palestiniens occupés (A/HRC/40/74 version préliminaire en anglais).  La Commission avait été créée par une résolution adoptée au terme d’une session extraordinaire du Conseil des droits de l’homme le 18 mai 2018.

M. SANTIAGO CANTON, Président de la Commission d’enquête internationale indépendante chargée d'enquêter sur les manifestations de 2018 dans les territoires palestiniens occupés, a déclaré que la Commission avait mené des enquêtes méticuleuses et objectives sur les « incidents » survenus sur les sites des manifestations qui se sont déroulées du 30 mars au 31 décembre 2018.  La Commission a eu à l’esprit le contexte dans lequel se sont déroulées ces manifestations, notamment le blocus de Gaza et les combats de longue date entre Israël et les groupes armés, a-t-il précisé.  Cependant, les manifestations devant la frontière entre Israël et la bande de Gaza ne relevaient pas d’une opération militaire, mais de manifestations civiles, a-t-il souligné.  Les éléments d’enquête relevés montrent que les manifestants n’étaient pas armés, même s’ils n’étaient pas en toutes circonstances pacifiques.  Pour cette raison, le cadre légal qui s’applique à cette situation est le droit international des droits de l'homme.  Les éléments permettant d’aboutir à cette conclusion sont contenus dans le rapport, a indiqué le Président de la Commission d’enquête.

M. Canton a ensuite déploré qu’Israël n’ait pas voulu coopérer avec la Commission d’enquête, ni même lui permettre un accès aux territoires palestiniens occupés.  C’est la raison pour laquelle la Commission s’est appuyée sur des images et enregistrements fournis par des manifestants, les médias ou les forces israéliennes elles-mêmes.  Toutes ces données ont été vérifiées et analysées.  La Commission d’enquête a également pu interviewer 325 témoins, victimes et autres individus et avoir accès à d’autres types de sources tant à Gaza qu’en Israël, soit un total de 8000 documents, qui peuvent être partagés aux plans national et international, dans l’intérêt de la justice internationale, a précisé le Président. 

Sur la base de l’analyse de ces documents, a ensuite affirmé M. Canton, les membres de la Commission d’enquête sont parvenus à la conclusion que les violations survenues devaient faire l’objet d’enquêtes criminelles.  Pour cette raison, ils appellent Israël à conduire de telles enquêtes.  Compte tenu que ces violations ne sont survenues que l’an dernier, Israël a encore le temps de le faire, a insisté le Président, se félicitant de l’annonce du Gouvernement israélien d’ouvrir des enquêtes.  La Commission espère que ces enquêtes seront étendues, a-t-il insisté. 

En ce qui la concerne, la Commission a documenté la mort de 189 Palestiniens, dont 183 par munitions, incluant des femmes, des enfants, des personnes handicapées, des journalistes et des travailleurs médicaux.  Parmi les 35 enfants morts, 60% l’ont été par balle en pleine tête, dont un enfant de 14 ans qui se tenait à 100 mètres de la barrière.  Les soldats israéliens ont également tué par balle une personne double-amputée assise dans son fauteuil roulant, ainsi que deux personnes avec des béquilles, par des balles en pleine tête.  À ces morts s’ajoutent celles de 39 journalistes qui portaient pourtant clairement des vêtements indiquant leur profession et de 39 professionnels médicaux tués alors qu’ils prodiguaient des soins aux manifestants.  La Commission d’enquête a également compté 6106 blessés; à la fin de l’année, 122 d’entre eux avaient été amputées, dont 20 enfants.  La Commission a également comptabilisé quatre soldats israéliens blessés et un autre mort, mais pas sur les lieux des manifestations.

Du point de vue de la Commission d’enquête, il ne peut y avoir de justification à la tuerie d’enfants et de personnes handicapées, qui ne posent aucune menace imminente de mort ou ne représentent aucun danger pour leur environnement.  Par ailleurs, les journalistes et personnels des médias doivent être protégés et leur travail facilité, a ajouté M. Canton, indiquant que cela conduisait à se poser la question des règles d’engagement qu’Israël utilise et continue encore d’utiliser; elles permettent aux soldats de tirer dans les jambes de personnes identifiées comme « instigateurs clés », c’est-à-dire toute personne brûlant des pneus, défiant la barrière ou haranguant la foule.  A cause de ces règles, 4903 personnes ont été la cible de tirs, certaines se tenant non armés à des centaines de mètres des tireurs d’élite, a précisé le Président de la Commission d’enquête. 

La Commission a conclu que cibler un manifestant non armé sur la seule base de son affiliation politique était illégal.  Des dizaines de personnes parmi celles qui ont été tuées étaient membres de groupes armés basés à Gaza, mais ne sont pas identifiées comme telles dans le rapport pour des raisons de protection, a précisé M. Canton.  Même si un tel ciblage était licite, dans le contexte de ces manifestations et compte tenu de la présence importante de civils, il serait extrêmement difficile de respecter les principes de proportionnalité et de précaution fondés sur le droit humanitaire, a-t-il expliqué.  Les blessures infligées par ces tirs étaient d’un niveau de gravité et de complexité médicale et chirurgicale élevé, que les Hôpitaux de Gaza ne pouvaient traiter, a-t-il en outre souligné. 

Dans ce contexte, la Commission d’enquête dresse une série de recommandations, parmi lesquelles celles visant à lever le blocus de Gaza, permettre que les manifestants blessés puissent être extirpés des zones de manifestations pour recevoir une assistance médicale, permettre un accès aux travailleurs médicaux ou encore faire en sorte que les États Membres des Nations Unies et les organisations non gouvernementales assistent les services de santé de Gaza ou y assurent une coordination de l’entrée des services et équipements médicaux.  La Commission recommande également que l’armée israélienne revoie ses règles d’engagement et n’use de la force létale qu’en dernier recours.  Elle recommande aussi aux autorités de facto de Gaza de cesser d’utiliser les ballons et autres outils incendiaires, entre autres, a conclu M. Canton. 

Parties concernées

L’État de Palestine a rappelé que la Commission d’enquête est la troisième depuis 2009 et qu’Israël a refusé toute coopération, empêchant notamment l’accès pour rencontrer les victimes de toutes parts.  Israël se considère comme un pays au-dessus de la loi, a déploré la délégation palestinienne, soulignant que le meurtre de civils par la puissance occupante a été documenté par la Commission d’enquête.  Israël cible tous les manifestants sans distinction et viole le droit de rassemblement pacifique, a poursuivi la délégation, ajoutant que les soldats (israéliens) ont commis des violations des droits de l'homme, certaines constituant des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité.  Aussi, la délégation palestinienne a-t-elle demandé à la Haute-Commissaire de transférer ces informations à la justice internationale, faute de quoi l’impunité continuera à encourager les pratiques sanglantes de la puissance occupante.

La Commission indépendante des droits de l'homme de l’État de Palestine s’est félicitée du rapport de la Commission d’enquête, qui rappelle les pratiques arbitraires d’Israël et ses violations des droits de l'homme des Palestiniens et du droit international humanitaire de façon quotidienne depuis le début de l’occupation en 1967.  L’institution nationale des droits de l'homme palestinienne a de nouveau prié la Haute-Commissaire de présenter le rapport à la Cour pénale internationale (CPI) et à la Procureure de la CPI d’ouvrir une enquête sur les crimes de guerre d’Israël, qui sont imprescriptibles.

Débat

L’Union européenne est gravement préoccupée par l’escalade de la violence et la perte de vies humaines en 2018.  Elle appelle Israël à la retenue et le Hamas à éviter toute provocation.  Elle se félicite du travail de la commission d’enquête et est préoccupée par ses graves conclusions sur l’éventualité du caractère illégal de l’usage de munitions par les forces israéliennes.  Le Pakistan, au nom de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), a condamné l’agression barbare commise par les forces d’occupation israéliennes, ainsi que le refus de donner accès et de coopérer avec la Commission.  Cibler intentionnellement des civils peut être considéré comme un crime de guerre en vertu du droit international, a rappelé le Pakistan.  L’Angola, au nom du Groupe africain, a souligné la nécessité que la Commission étudie les racines et le contexte du conflit de façon impartiale et objective. 

De son côté, la Belgique a estimé que le Conseil avait fait preuve de responsabilité en créant la Commission d’enquête et note les graves conclusions de cette dernière s’agissant de possibles violations du droit international humanitaire susceptibles de constituer des crimes internationaux.  Utiliser à dessein une force meurtrière contre des civils en l’absence de menace immédiate à la vie est interdit par le droit international humanitaire, a rappelé la Belgique.  Le Conseil de coopération du Golfe a pris note des remarques de la Commission d’enquête selon laquelle le ciblage des secours, des journalistes et des personnes handicapées par des tireurs embusqués constituait de potentiels crimes de guerre.  Quelles mesures propose-t-elle pour garantir la mise en œuvre des propositions que la Commission formule dans son rapport ?

Bahreïn, au nom du Groupe arabe, a souligné l’importance de l’établissement des responsabilités, notant que le rapport soulignait aussi l’importance que la communauté internationale prenne des mesures tangibles afin de remédier à la situation du siège de Gaza.  Le Pakistan a noté pour sa part que le monde était témoin des atrocités perpétrées contre le peuple palestinien et qu’il est du devoir de la communauté internationale d’y mettre un terme.  Les responsables doivent être tenus comptables de leurs actes.  La Tunisie, qui a estimé que l’attitude d’Israël ne constituait en rien une nouveauté, s’est demandée quand la communauté internationale agirait pour mettre un terme aux violations israéliennes.  Le Conseil a une responsabilité juridique à cet égard, a souligné la Tunisie.  Le Qatar a stigmatisé l’absence de coopération d’Israël avec la Commission et a condamné la grave violation par Israël des conventions internationales.  Il a appelé la communauté internationale à prendre toutes les mesures nécessaires afin de faire cesser la commission de crimes dont les auteurs doivent être tenus de rendre des comptes.  L’Iraq a déploré le manque de coopération des forces d’occupation, ce qui dénote un mépris total de la part de la puissance occupante. 

La Slovénie estime qu’une enquête internationale indépendante et transparente sur les violations des droits de l’homme est nécessaire pour faire la lumière sur les événements et appelle toutes les parties concernées à coopérer avec la Commission.  La Slovénie a expliqué qu’elle fournissait un appui au renforcement des capacités sanitaires dans la bande de Gaza, s’agissant des soins à l’enfance.  Elle a indiqué avoir aussi fait un don de 500 000 euros pour l’usine de désalinisation de l’eau de mer. 

Cuba a réitéré que la seule garantie d’une solution juste et durable au conflit israélo-palestinien résidait dans la solution fondée sur deux États et dans le respect du droit des Palestiniens à la vie, à la paix et à la souveraineté sur leur terre, délimitée dans les frontières d’avant 1967 et avec Jérusalem-Est pour capitale.  La République arabe syrienne a condamné la répression sanglante de manifestations pacifiques à Gaza par Israël et l’absence de coopération d’Israël avec les mandats du Conseil.  Le fait que les soldats israéliens visent les enfants, les femmes et les secouristes montre leurs crimes délibérés et l’impunité qui prévaut.  La Syrie a appelé à lever le blocus contre Gaza et a demandé des comptes aux responsables de ces tueries délibérées. 

La Fédération de Russie a rappelé que l’une des principales raisons des manifestations était la décision des États-Unis de transférer leur ambassade à Jérusalem. La délégation russe a condamné fermement les actions disproportionnées et aveugles des forces israéliennes et les violations des droits de l'homme.  Elle a demandé une enquête indépendante.  L’Arabie saoudite a condamné l’agression des forces israéliennes et appelé la communauté internationale à mettre un terme à ces pratiques et à demander des comptes aux responsables de ces crimes. 

La Namibie a condamné fermement les massacres de manifestants en 2018 à Gaza et a estimé qu’Israël devrait enquêter sur ses forces de sécurité et traduire en justice les auteurs éventuels de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre.  La communauté internationale, notamment le Conseil, devrait tenir Israël pour responsable des atrocités commises dans les territoires palestiniens occupés.  La Namibie a demandé que les informations de la Commission d’enquête soient transférées à la Procureure de la CPI.  Le Venezuela a exprimé son vif rejet des actions criminelles contre le peuple palestinien en réaction aux manifestations à Gaza dues à la décision illégale, unilatérale et arbitraire du Gouvernement des États-Unis de transférer son ambassade à Jérusalem. Le Venezuela a plaidé pour la fin de l’agression militaire, la reddition de comptes et l’indemnisation des victimes face aux graves violations des droits de l'homme commises par la puissance occupante.

Le Costa Rica s’est dit préoccupé par les conclusions du rapport de la Commission d’enquête, rappelant que le droit international des droits de l'homme protège les libertés d’expression, de réunion pacifique et d’association.  La délégation costaricienne a attiré l’attention sur le fait que la moitié de la population de Gaza est mineure.  Les Maldives ont condamné les violations systématiques des droits de l'homme et des normes internationales des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés par Israël et ont appelé Israël à s’abstenir de recourir à la force contre la population civile, en particulier les enfants.                        

L’Égypte s’est dite préoccupée par le recours à la force contre des manifestants et a insisté pour que les coupables des violations des droits de l'homme soient traduits en justice.  L’obligation de fournir des soins médicaux est entre les mains de la puissance occupante et la mise en œuvre des recommandations du rapport serait très utile, a ajouté la délégation égyptienne.  L’Algérie a rappelé que tirer sur des manifestants, des secouristes et des journalistes constitue une violation du droit international et a appelé la communauté internationale à prendre les mesures qui s’imposent pour mettre en œuvre les recommandations du rapport de la Commission d’enquête et mettre un terme à l’impunité.

L’Espagne a regretté la spirale de violence déclenchée en 2018 dans les territoires palestiniens occupés et a exprimé son inquiétude en raison du nombre de victimes, en particulier parmi les enfants et le personnel médical.  La délégation espagnole s’est prononcée pour le droit à la légitime défense d’Israël et pour le droit des Palestiniens de manifester.  Le Luxembourg s’est dit très préoccupé par les premiers résultats de la Commission d’enquête faisant état de snipers israéliens ayant délibérément tiré sur des enfants, des journalistes et des membres du personnel médical.  S’il reconnaît le droit d’Israël à défendre son territoire et ses ressortissants, le Luxembourg exhorte néanmoins le pays à respecter l’usage proportionné de la force et à s’engager à ce que les membres de ses forces armées ne recourent à la force létale qu’en dernier recours et uniquement en cas de menace réelle et imminente pour leur vie ou celle d’autrui. 

Le Bangladesh a salué la méthode de travail de la Commission et son rapport qu’il a jugé crédible et impartial, malgré le manque d’accès auquel elle s’est heurtée.  Le Bangladesh a relevé en particulier, à la lecture du rapport, que des crimes contre l’humanité ont été commis par Israël en mars 2018.  Le pays appuie donc l’idée de saisir la Cour pénale internationale de cette situation.  La Turquie a estimé que le rapport témoignait du mépris d’Israël et a regretté que ce pays continue de jouir d’une impunité complète pour les crimes qu’il a commis à Gaza.  La Turquie a en outre dénoncé l’occupation israélienne de Jérusalem.

Oman, après avoir rendu hommage aux travaux de la Commission, a dénoncé la mort de Palestiniens abattus de sang-froid ainsi que la poursuite de la colonisation par Israël.  Regrettant que la communauté internationale soit incapable de protéger les Palestiniens, Oman a plaidé pour une solution pacifique par le biais de la création de deux États vivant côte à côte.  Le Liban a insisté sur l’importance de demander des comptes aux auteurs des attaques délibérées contre des manifestants décrites par le rapport.  La Malaisie a demandé au Conseil de faire en sorte que les victimes des atrocités israéliennes aient des recours pour recevoir réparations et dédommagements et pour que justice leur soit rendue, en leur accordant en outre des garanties de non-répétition.

La Chine a dit prendre bonne note des préoccupations exprimées par la communauté internationale face à la situation dans les territoires palestiniens occupés.  Elle a appelé Israël surtout à faire preuve de prudence et de retenue, et à lever le plus tôt possible le blocus contre Gaza.

L’Indonésie a jugé « urgent » que la Commission d’enquête mène des enquêtes sur toutes les violations des droits de l'homme commises par Israël dans le cadre de ces manifestations, afin que les auteurs de « ces actes haineux » rendent des comptes.  L’Indonésie soutient également l’avis de la Commission selon lequel ces manifestations étaient pacifiques.  L’Irlande a rappelé qu’elle avait été choquée par l’ampleur et la nature des blessures infligées par Israël aux manifestants.  Si elle reconnaît le droit d’Israël, comme tout État, à se défendre, l’Irlande rappelle aussi que l’usage de la force létale est règlementé par le droit international.  En tant que coauteur de la résolution ayant créé la Commission d’enquête, l’Irlande déplore qu’Israël ait refusé de coopérer et souhaite savoir comment faire en sorte que les recommandations de la Commission soient suivies d’effet.  La Suisse aussi se pose la même question.  Si elle salue le fait que l’avocat général militaire d’Israël a ordonné l’ouverture d’enquêtes, elle souhaite aussi savoir comment on peut encourager les parties à se coordonner afin d’assurer un service médical aux blessés dans le cadre des futures manifestations.

L’Afrique du Sud aussi a été « choquée » par la situation qui fait que, depuis septembre 2018, Israël a lancé 2777 attaque contre des maisons palestiniennes; tué 2213 personnes, dont 184 enfants, et démoli 1936 maisons de Palestiniens.  Selon la délégation sud-africaine, la solution fondée sur deux États est en train d’être ébranlée au profit d’un seul État que la délégation a qualifié d’apartheid.  La Jordanie, qui a rappelé avoir toujours apporté son aide au peuple palestinien, notamment en déployant des unités mobiles de santé à Gaza, estime que seuls la fin de l’occupation, l’avènement de deux États et le retour aux frontières de 1967 sont garants de la paix dans la région.  La Libye a déclaré que le « terrorisme systématique » subi par le peuple palestinien de la part des forces d’occupation israéliennes est constitutif de crime contre l’humanité relevant de la Cour pénale internationale. 

Plusieurs organisations non gouvernementales (ONG) ont aussi pris part au débat.  United Nations Watch a regretté que la Commission – dont l’ONG a jugé le mandat biaisé – absolve les actes terroristes du Hamas.  Institute for NGO Research a aussi jugé biaisé le mandat de la Commission et a dénoncé ses méthodes de travail et le manque de transparence au sujet de ses travaux.  L’ONG a déploré que la Commission ait qualifié les manifestations de « festives » et qu’elle ait ignoré des preuves de l’utilisation d’armes par des manifestants.  Le Congrès juif mondial a assuré que les manifestations avaient pour objectif de faire des victimes pour nuire à l’image d’Israël.  L’ONG a dénoncé la psychose anti-israélienne qui anime les auteurs du rapport (de la Commission d’enquête).

Al Mezan Centre for Human Rights a salué le rapport de la Commission et a appelé les États membres du Conseil à soutenir le projet de résolution axé sur la responsabilité, qui condamne le recours volontaire et illégal à la force excessive ou mortelle, en violation de tous les droits que le Conseil a pour mandat de faire appliquer.  BADIL Resource Center for Palestinian Residency and Refugee Rights a appelé à la levée du blocus contre Gaza et à ce que les Palestiniens vivant sous l’occupation israélienne puissent jouir de leurs droits sans discrimination, y compris le droit à la santé. 

Al-Haq, Law in the Service of Man a demandé au Haut-Commissariat aux droits de l’homme de transmettre le rapport de la Commission d’enquête à la Cour pénale internationale et de créer un mécanisme efficace pour assurer le suivi des recommandations de la Commission.  The Palestinian Return Centre Ltd a demandé aux États membres d’appliquer les recommandations de la Commission d’enquête, en particulier celle visant l’imposition de sanctions individuelles telles que saisie d’actifs ou interdiction de voyage. 

Défense des enfants - international a pour sa part rappelé qu'en 2018, Israël avait tué 56 enfants palestiniens.  Dans les premières semaines de cette année, huit autres victimes ont été comptabilisées par l’organisation.  Ces tueries ont eu lieu dans le cadre de la marche du retour et ont ciblé des enfants qui ne représentaient aucune menace.  La représentante a demandé à Israël de s’abstenir de recourir à la force létale contre des enfants.

Réponses et conclusion de la Commission d’enquête

M. CANTON a déclaré que le plus important consiste à demander aux Gouvernement d’Israël de revoir ses règles d’engagement, afin qu’elles correspondent aux normes internationales en la matière. 

Le Président de la Commission d’enquête a en outre fait observer que la situation à Gaza était unique à bien des égards, car le territoire est contrôlé par les autorités palestiniennes, par des autorités de fait et par Israël; or, tous sont tenus respecter leurs obligations au regard du droit international et, en particulier, doivent prendre les mesures nécessaires pour laisser entrer à Gaza les produits médicaux indispensables. 

M. Canton a ensuite déclaré qu’une vingtaine ou une trentaine de commissions d’enquête avaient déjà été créées sur le conflit israélo-palestinien; toutes ont abouti à des conclusions et recommandations qui se sont succédé, a-t-il rappelé, soulignant que la Commission qu’il préside insiste, elle, sur le fait qu’il revient à la communauté internationale de s’impliquer dans la résolution de cette question.  Il ne servira à rien de créer une autre Commission d’enquête, a-t-il affirmé, insistant sur le fait que la question centrale est celle de la reddition de comptes.  C’est aux États de le faire; c’est à Israël, en tant que puissance occupante, d’assumer ses responsabilités. 

L’autre question est celle des règles d’engagement des forces israéliennes, qui selon la Commission, doivent être revues, a poursuivi M. Canton.  Or à ce jour, on n’en prend pas le chemin, a-t-il déploré, évoquant un arrêt de la Cour suprême israélienne.  M. Canton a conclu en affirmant que bon nombre de questions, remarques et critiques exprimées par les délégations trouvent des réponses dans la version longue du rapport – une version qu’il a invité les délégations à lire. 

MME SARA HOSSAIN, membre de la Commission d’enquête, a insisté sur la nécessité de faire cesser les tirs de tireurs d’élite.  Elle a aussi relevé l’importance de laisser passer non seulement des produits médicaux, mais aussi des personnels de santé.  Elle a souligné que les autorités de fait à Gaza devaient mettre fin au lancement de cerfs-volants incendiaires.

Mme Hossain a par ailleurs dit souscrire au point de vue selon lequel il convient d’exercer des pressions sur Israël pour permettre que les blessés puissent recevoir des soins à l’extérieur de la bande de Gaza.  Elle a également dit avoir entendu les critiques, mais rien sur le fond des conclusions auxquelles la Commission d’enquête parvient.  Alors que cette dernière a déjà documenté des faits qui devraient être transmis à la Cour pénale internationale, la reddition de comptes est essentielle dans ce dossier, a conclu Mme Hossain.

MME KAARI BETTY MURUNGI, également membre de la Commission d’enquête, a déclaré que la communauté internationale devait continuer de soutenir le système de santé dans la bande de Gaza, dans le contexte où personne ne peut en sortir, si ce n’est en obtenant une autorisation de la part du Gouvernement d’Israël.  Pour cela il est important que la communauté internationale fasse pression sur Israël pour permettre la sortie des blessés.

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*Délégations ayant participé au débat avec le Rapporteur spécial: Afghanistan, Algérie, Angola (au nom du groupe africain), Arabie saoudite, Bahreïn (au nom du Groupe arabe, et en son nom propre), Bangladesh, Bolivie, Botswana, Cuba, Égypte, Indonésie, Iraq, Jordanie, Koweït, Liban, Libye, Maldives, Oman, Pakistan (au nom de l’Organisation de la coopération islamique, et en son nom propre), Qatar, République islamique d’Iran, Soudan, Tunisie, Turquie, Union européenne, Venezuela (au nom du Mouvement des non-alignés, et en son nom propre), et Zimbabwe.

*Organisations de la société ayant participé au débat avec le Rapporteur spécial: Conseil norvégien pour les réfugiés; Touro Law Center, The Institute on Human Rights and The Holocaust; Al-Haq, Law in the Service of Man; Ingénieurs du Monde; Organisation internationale pour l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale; United Nations Watch; Institute for NGO Research; et The Palestinian Return Centre Ltd.

**Délégations ayant participé au débat avec la Commission d’enquête: Afrique du Sud, Algérie, Angola (au nom du Groupe africain), Arabie saoudite, Bahreïn (au nom du Groupe arabe), Bangladesh, Belgique, Chine, Conseil de coopération du Golfe, Costa Rica, Cuba, Égypte, Espagne, Fédération de Russie, Indonésie, Iraq, Irlande, Jordanie, Liban, Libye, Luxembourg, Malaisie, Maldives, Namibie, Oman, Pakistan (au nom de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), et en son nom propre), Qatar, République arabe syrienne, Slovénie, Suisse, Tunisie, Turquie, Union européenne, et Venezuela.

**Organisations de la société ayant participé au débat avec la Commission d’enquête: United Nations Watch; Al Mezan Centre for Human Rights; Institute for NGO Research; The Palestinian Return Centre Ltd; Congrès juif mondial; BADIL Resource Center for Palestinian Residency and Refugee Rights; Al-Haq, Law in the Service of Man; et Défense des enfants – international.


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