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Déclarations

Discours d'ouverture d’Emmanuel Decaux lors de la 27ème réunion des présidents des organes des traités

21 Juin 2015

San José, Costa Rica, 22 juin 2015

Mes chers collègues,

Je tiens tout d’abord à vous remercier très chaleureusement pour votre soutien et votre confiance, au nom du Comité des disparitions forcées, comme en mon nom personnel. C’est un honneur et un privilège pour moi d'assumer la présidence de la 27e réunion des présidents. Je me réjouis de travailler en étroite collaboration avec le vice-président de la réunion, Fabian Salvioli, comme avec chacun de vous, individuellement et collégialement.

Cette réunion est particulièrement riche et prometteuse, grâce notamment à Claudio Grossman qui, en sa qualité de président de l'Institut interaméricain des droits de l’homme, a joué un rôle essentiel dans sa bonne organisation pratique et son ouverture sur le monde extérieur, avec de nombreux contacts très utiles pour mieux appréhender les enjeux des droits de l’homme sur le terrain.

Je tiens à exprimer ma sincère gratitude à notre Président sortant, Malcolm Evans pour son leadership exceptionnel dans la première phase de mise en œuvre de la résolution 68/268 sur le renforcement des organes de traités qui a eu des implications majeures pour nous tous. Je tiens en particulier à saluer l'initiative qu'il a prise d'organiser une réunion informelle des présidents à Wilton Park en janvier de cette année, comme l’avait fait pour la première fois Claudio Grossman à Washington en janvier 2014, à un moment clé des négociations avec les co-facilitateurs de l’Assemblée générale, créant ainsi tous deux un précédent redoutable pour moi.

Allant encore plus loin dans le temps, je suis très fier que, ensemble, en tant que présidents, nous ayons mis en avant les principes qui ont guidé processus de renforcement des organes conventionnels, dans le respect des traités constitutifs qui créent des obligations juridiques pour les Etats parties et nous confèrent des devoirs et des responsabilités propres. Pour avoir eu le privilège, avec quelques uns, d’avoir suivi le processus depuis 4 ans, j’ai été impressionné par la convergence de vues des différents comités sur l’essentiel, en particulier notre souci commun d’effectivité et d’efficacité du système dans son ensemble pour protéger les victimes des violations des droits de l’homme partout dans le monde. La réforme ne concerne pas seulement la rationalisation des moyens, qui dépendent de la 5° commission de l’Assemblée générale, mais également et surtout la mise en oeuvre des engagements des Etats, le respect des buts et des objectifs de Nations Unies.

Avec notre unité, et grâce à l’appui du Haut-Commissariat, nous avons, de façon convaincante, influencé la substance de la résolution 68/268, à toutes les étapes, alors que cette implication n’allait pas de soi à l’origine du processus intergouvernemental lancé à New York. Cette montée en visibilité et en importance des réunions des présidents de comités constituent un défi collectif pour nous.

C’est seulement à la suite de la Conférence mondiale des droits de l’homme de 1993 que la réunion des présidents est devenue annuelle, alors qu’elle était biennale lors des toutes premières réunions. Depuis deux ans, nous avons même pu nous réunir deux fois par an, avec des réunions officieuses venant s’intercaler de manière particulièrement fructueuse entre les réunions officielles. Le format des réunions a également évolué, puisque nous sommes passés de 5 ou 6 comités à 10 depuis 4 ans, ce qui rend plus nécessaire encore la coordination à tous les niveaux. Nos réunions permettent en effet des contacts informels et des échanges d’information entre présidents qui trouvent leur prolongement dans les relations bilatérales de nos organes respectifs.

La liste des présidents a changé depuis notre réunion de Wilton Park et je suis très heureux d'accueillir les quatre présidents nouvellement nommés à leur première réunion de présidents. Je tiens à les féliciter et à leur souhaiter la bienvenue, nous comptons beaucoup sur leur apport. Cette rotation régulière est un atout, en impliquant un renouvellement et une ouverture permanente, mais c’est aussi un défi, pour consolider les acquis tout en allant de l’avant. Nous ne sommes chacun de nous que des primus inter pares, avec un rôle d’information permanent de nos collègues experts, pour préparer au mieux des décisions collectives adoptées lors de nos réunions et pour assurer leur suivi dans les meilleures conditions. Sans revenir à la pratique des réunions inter-comités, nous pourrions réfléchir à la constitution de groupes de travail ou à l’organisation de réunions thématiques, pour impliquer d’autres experts.

Ce renforcement de la continuité de la réunion des présidents et de son interaction avec les autres protagonistes, me semble d’autant plus importante que la réunion des présidents n’est pas seulement protocolaire, ou « corporatiste » si elle l’a jamais été, c’est devenu un élément fort d’une synergie entre les organes conventionnels. Depuis quelques années, nous adoptons des décisions de principe, reprises à leur compte, selon leur spécificité et conformément à leur propre procédure, par les différents organes de traités. Bien plus nous adoptons des déclarations substantiels, comme celle sur les ODD, marquant une « position commune » sur des questions d’intérêt général.

Les organes de traités relatifs aux droits de l’homme ne sont pas des « mécanismes » parmi d’autres, des variables d’ajustement en fonction de considérations budgétaires ou d’innovations politiques comme l’EPU, ils sont les garants et les gardiens du respect du noyau dur du droit international des droits de l’homme. En ratifiant des traités à vocation universelle, les Etats parties ont assumés la responsabilité première de respecter, protéger et mettre en œuvre les droits de l’homme, en coopérant de bonne foi avec les organes de contrôle. C’est dire l’importance d’une coordination poussée pour promouvoir la centralité du « système des traités des droits de l’homme» et pas seulement du « système des organes des traités ». Pour ma part, je ferai tout mon possible, avec l’aide de chacun de vous, pour préserver et approfondir l'esprit de collégialité, la recherche du consensus, l'engagement collectif et le leadership qui ont caractérisés ce forum au cours des dernières années.

La réunion de cette année est notre troisième réunion au niveau régional, après des réunions à Bruxelles (2011) et à Addis-Abeba (2012). Ceci est une occasion historique. En tenant de cette réunion dans les Amériques – avec qui plus est de nombreux présidents venant d’Amérique latine – nous rapprocherons le système du terrain où les normes, la jurisprudence et les recommandations des organes de traités sont mises en œuvre. Cette réunion nous donne également l'occasion de faire connaître notre travail au niveau local et de renforcer les liens avec les mécanismes et les institutions des droits de l'homme régionaux, ainsi que de leurs parties prenantes, à commencer par les Etats, le monde académique et la société civile.

De notre côté, en tant que présidents, nous avons beaucoup à apprendre des systèmes régionaux, notamment du système interaméricain qui fait figure de pionnier dans de nombreux domaines, vous me permettrez d’évoquer la convention interaméricaine sur la disparition forcée des personnes entrée en vigueur en 1996. Sur un plan technique, l’articulation des voies de recours internes, des mécanismes régionaux et des recours internationaux pose des questions complexes de procédure – qu’est-ce qu’un recours « devant une instance internationale d’enquête ou de règlement de même nature » - et surtout de fond, dans un souci de subsidiarité et d’efficacité au plus près des victimes.

Nous avons un programme riche en face de nous, avec d'importantes discussions de fond, des réunions de haut niveau, des échanges avec un nombre de partenaires, et des objectifs clairs dans le domaine des méthodes de travail. Par conséquent, en vous remerciant encore une fois de votre soutien et de votre confiance, et en remerciant le secrétariat pour l’excellente préparation de cette importante session, je voudrais suggérer que nous procédions à l'adoption de l'ordre du jour.

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