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LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT DE LA BULGARIE

17 Mai 2004



17 mai 2004

Le Comité contre la torture a entamé, ce matin, l'examen du troisième rapport périodique de la Bulgarie sur les mesures prises par ce pays pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Présentant le rapport de son pays, M. Dimiter Tzantchev, Représentant permanent de la Mission de la Bulgarie auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, a déclaré que des progrès significatifs ont été réalisés par son pays, particulièrement ces deux dernières années, s'agissant de la mise en œuvre des dispositions de la Convention contre la torture. Des étapes importantes ont été franchies afin d'assurer la protection adéquate de tous les citoyens contre les traitements cruels, inhumains ou dégradants, a souligné M. Tzantchev.

La délégation bulgare était également composée de représentants du Ministère des affaires étrangères, d'un jurite et de membres de la Mission de la Bulgarie à Genève. Elle a notamment informé les membres du Comité de l'adoption d'un Code de bonne conduite des forces de police qui interdit le recours à la torture et aux traitements cruels, inhumains ou dégradants. La délégation a par ailleurs exprimé des doutes quant à la fiabilité des allégations émanant d'organisations non gouvernementales d'après lesquelles les membres de minorités ethniques, particulièrement les Roms, continueraient d'être victimes de mauvais traitements à travers le pays. Consciente de l'existence de cas isolés de mauvais traitements, la Bulgarie multiplie les efforts en vue de remédier à ces situations et a créé, au sein de la police nationale, une Commission des droits de l'homme dotée de coordinateurs aux niveaux régionaux, a-t-elle souligné.

La rapporteuse pour ce rapport, Mme Felice Gaer a noté que la définition actuelle de la torture dans la législation bulgare ne tient pas pleinement compte des exigences de l'article 1er de la Convention. Mme Gaer a en outre fait état d'allégations émanant d'organisations non gouvernementales d'après lesquelles les investigations relatives à des actes de torture ou de traitements cruels inhumains ou dégradants ne seraient pas systématiques. Elle a par ailleurs demandé pourquoi la Bulgarie avait limité cette année la possibilité d'accès des organisations non gouvernementales aux lieux de détention.


Le corapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Bulgarie, M. Alexander Yacovlev, a estimé qu'il ne fait pas de doute que la Bulgarie déploie des efforts importants pour donner plein effet aux dispositions de la Convention contre la torture. Il a demandé à la délégation d'apporter des éclaircissements sur l'étendue des compétences de l'ombudsman, institution qui vient d'être créée.

Lors de la prochaine réunion publique du Comité, demain matin à 10 heures, la délégation bulgare répondra aux questions soulevées ce matin.


Présentation du rapport de la Bulgarie

M. DIMITER TZANTCHEV, Représentant permanent de la Mission de la Bulgarie auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, a déclaré que son pays, qui préside actuellement l'Organisation pour la coopération et la sécurité en Europe, participe activement à la lutte contre la violation des droits de l'homme dans les pays membres de l'Organisation et au delà. La Bulgarie est d'avis que le renforcement des capacités nationales en vue de la promotion et de la protection des droits de l'homme est une des responsabilités premières de l'État qui se doit d'adopter les mesures législatives et administratives pertinentes. La Bulgarie a adopté nombre de mesures en vue de donner effet aux conventions internationales auxquelles elle est partie. Le représentant a affirmé que des progrès significatifs ont été réalisés par son pays, particulièrement ces deux dernières années, s'agissant de la mise en œuvre des dispositions de la Convention contre la torture. Des étapes importantes ont été franchies afin d'assurer la protection adéquate de tous les citoyens contre les traitements cruels, inhumains ou dégradants.


Le troisième rapport périodique de la Bulgarie (CAT/C/34/Add.16) souligne notamment l'introduction d'un nouvel article de loi dans le Code de procédure pénale d'après lequel l'extradition d'un étranger ne saurait être autorisée s'il risque d'être soumis à des violences, tortures ou autres peines cruelles, inhumaines ou dégradantes dans l'État requérant ou en l'absence des garanties relatives à la protection de ses droits que prévoit le Code. Des dispositions similaires, sous une forme appropriée, ont été incorporées dans les accords bilatéraux d'extradition que la Bulgarie a passés avec l'Azerbaïdjan, l'Arménie et la Chine. Il en ira de même dans les accords d'extradition à venir, précise le rapport. Le rapport indique en outre que parmi les mesures législatives internes, il convient de noter que les nouvelles dispositions de la loi relative à la lutte contre les comportements antisociaux des mineurs ont eu pour effet d'augmenter le nombre des institutions publiques et sociales appropriées à ce combat ainsi que d'élargir leur champ d'action en faveur d'un traitement humain et tolérant des délinquants mineurs qui ne sont pas responsables devant la loi.

Le rapport précise par ailleurs que des changements importants ont été apportés au statut des personnes non encore jugées pour mieux tenir compte du principe de la présomption d'innocence. Un nouveau règlement a été publié énonçant les droits et obligations des gardiens de prison, qui ne les autorise à faire usage des matraques qu'en dernier recours et en interdit l'utilisation en cas d'insubordination, de refus d'obtempérer et de comportement arrogant de la part des détenus. Plusieurs dispositions adoptées ces dernières années ont fait évoluer de façon radicale la philosophie des fonctions des organes du Ministère de l'intérieur, lesquels sont désormais au service de la société qui, pour sa part, exerce sur eux un contrôle civil. Depuis la mise en route des changements socioéconomiques en 1989, le Ministère de l'intérieur s'est constamment efforcé d'améliorer les conditions de garde à vue. Conformément à la Constitution et au Code de procédure pénale, la garde à vue dure 24 heures, ou au maximum 72 heures si elle a été ordonnée par un procureur; à l'expiration de ce délai, la personne placée en garde à vue doit comparaître devant un tribunal. La plupart des installations de détention recevant des personnes à l'encontre desquelles des moyens auxiliaires de police sont utilisés ont été restructurées de manière à ne pas causer d'inconfort ou de sensation de traitement inhumain ou dégradant. Il a notamment été ordonné aux fonctionnaires de police de vérifier le menottage des détenus toutes les heures pour garantir une circulation du sang normale. Un contrôle fiable de l'observation des droits des détenus est exercé, tant en ce qui concerne leur enregistrement que l'ensemble de leurs droits découlant des réglementations internes. Des mesures visant à améliorer la gestion des plaintes ont été prises en octobre 1997. Des boîtes aux lettres spéciales où les détenus peuvent déposer librement (à l'abri du regard de l'administration pénitentiaire) leurs requêtes et plaintes adressées au Vice-Ministre de la justice, responsable des établissements pénitentiaires, ont été placées dans chaque prison. Environ 600 requêtes et plaintes parviennent tous les ans au Ministère de la justice; chacune d'entre elles est examinée et reçoit l'attention nécessaire afin de trouver des solutions aux problèmes soulevés.


Examen du rapport de la Bulgarie

Fournissant des renseignements complémentaires aux membres du Comité, la délégation bulgare a notamment affirmé que la législation relative à la garde à vue garantit la confidentialité des communications entre le prévenu et son avocat. En outre, la présence d'un policier lors de la visite médicale n'est possible que sur demande expresse du médecin. La délégation a affirmé que, contrairement aux allégations de certaines organisations non gouvernementales, la présence de l'avocat est obligatoire et effective pendant la phase qui précède le procès proprement dit.

La délégation a attiré l'attention sur l'adoption d'un Code de bonne conduite des forces de police. Ce code, entré en vigueur en 2003, est disponible sur le site internet du Ministère de l'intérieur. Il contient des dispositions qui interdisent expressément le recours à la torture, aux traitements cruels, inhumains ou dégradants. Tout fonctionnaire qui aurait été témoin de violences policières sur une personne placée en garde à vue est tenu d'informer ses supérieurs.

La délégation a mis en doute la fiabilité des allégations émanant d'organisations non gouvernementales d'après lesquelles les membres de minorités ethniques, particulièrement les Roms, continueraient d'être victimes de mauvais traitements à travers le pays. Elle a souligné que les enquêtes menées à la suite de la visite en Bulgarie de membres du Comité européen pour la prévention de la torture ont montré que les prétendues victimes de mauvais traitements n'ont pas été à même de prouver leurs allégations par des certificats médicaux. L'enquête menée dans une Direction de la police qui était particulièrement visée par les plaintes a montré l'absence de preuve de mauvais traitements, a précisé la délégation. Toutefois, la Bulgarie est consciente que des cas isolés de mauvais traitements peuvent intervenir. Aussi, la Bulgarie multiplie-t-elle les efforts en vue de remédier à ces situations. À cet égard, la délégation a attiré l'attention sur la mise en place au sein de la police nationale en août 2000, d'une Commission des droits de l'homme, dotée de coordinateurs aux niveaux régionaux.

La délégation a en outre rappelé que les règles régissant la détention sont appliquées sans discrimination. Une instruction du Ministère de l'intérieur interdit expressément toute manifestation de discrimination à l'encontre des détenus. Les problèmes rencontrés par les Roms en Bulgarie sont essentiellement de nature socioéconomique, a précisé la délégation. Consciente des difficultés rencontrées par les Roms, le Gouvernement met en œuvre un Programme cadre pour l'égale intégration des Roms dans la société bulgare, s'attachant à promouvoir leurs droits dans les domaines de la santé, de l'emploi, de la sécurité sociale et de la culture. La délégation a enfin souligné que le Plan d'action en faveur des Roms a bénéficié d'un financement, pour 2003-2004, à hauteur de 28,6 millions de levas. La délégation a enfin indiqué que des programmes de formation sont dispensés aux forces de police afin d'améliorer leur compréhension de la culture de différentes minorités ethniques, dont les Roms.



La délégation a affirmé que les autorités compétentes appliquent le principe de non-refoulement prévu à l'article 3 de la Convention contre la torture. Les garanties de protection accordées aux étrangers qui entrent sur le territoire de la Bulgarie sont prévues par la loi du 1er décembre 2002. La délégation a en outre précisé qu'en 2003, 1549 personnes ont demandé le statut de réfugiés, majoritairement des personnes originaires d'Afghanistan.

La délégation a par ailleurs souligné que le personnel médical dans les établissements de détention est tenu de consigner par écrit et de manière détaillée toute blessure constatée sur les détenus. Dès lors que des blessures constatées par un médecin peuvent être attribuées à des mauvais traitements, le procès verbal est systématiquement transmis au procureur, a-t-elle souligné. En outre, les médecins bénéficient d'enseignements relatifs aux normes internationales concernant les services médicaux dans les centres de détention. Ils bénéficient également de formations sur les règles internationales relatives à l'interdiction de la torture et des autres traitements cruels, inhumains ou dégradants.

La délégation a fait valoir les mesures législatives prises par son pays pour procéder à la démilitarisation du personnel pénitentiaire. Depuis janvier 2000, les centres de détention sont passés sous la tutelle du Ministère de la justice. Seuls les gardiens en poste dans les maisons d'arrêt ou dans les centres de détention sont toujours placés sous la tutelle du Ministère des armées. La délégation a par ailleurs affirmé que tous les détenus peuvent exercer un recours contre les mesures disciplinaires dont ils sont l'objet. Conformément à la loi, ces recours ne sont pas suspensifs.

La délégation bulgare a par ailleurs indiqué qu'il n'y avait aucun obstacle politique ou juridique à la ratification par son gouvernement du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture, relatif aux visites préventives sur les lieux de détention. À cet égard, elle a notamment précisé que la législation bulgare invite toutes les entités concernées à accorder l'accès des experts internationaux aux centres de détention. La délégation a fait valoir l'adoption d'une loi en mai 2003, instituant un ombudsman (médiateur) qui devrait être très prochainement élu à bulletin secret par les députés, pour un mandat de 5 ans renouvelable une fois. Indépendant du pouvoir judiciaire, l'ombudsman bénéficiera d'une immunité comparable à celle des députés et sera compétent pour faire des recommandations en matière de droits de l'homme.

La délégation a par ailleurs affirmé qu'en vertu d'un règlement du Ministère de l'intérieur, les organisations non gouvernementales œuvrant en faveur de la promotion des droits de l'homme peuvent être autorisées à se rendre dans les lieux de détention pour contrôler le respect des droits des détenus.

La délégation bulgare a indiqué qu'en 2003, 596 lettres relatives à des allégations de mauvais traitements commis par des forces de police ont été reçues par les procureurs militaires. Sur ces 596 cas, 398 ont été jugés sans fondement, 82 cas ont fait l'objet de procédures et 56 personnes ont fait l'objet de sanctions, a-t-elle souligné. À cet égard, la délégation a précisé que la majorité des cas consistaient en des blessures légères infligées à des citoyens par les forces de police dans l'exercice de leurs fonctions.

Le corapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Bulgarie, M. ALEXANDER YACOVLEV, a salué les efforts déployés par la délégation bulgare pour apporter des réponses précises et détaillées aux questions posées par les membres du Comité. Il ne fait pas de doute, a affirmé M. Yacovlev que la Bulgarie déploie des efforts importants pour donner plein effet aux dispositions de la Convention contre la torture. M. Yacovlev a ensuite demandé à la délégation d'apporter des éclaircissements sur l'étendue des compétences de l'ombudsman récemment institué. Il a par ailleurs appelé de ses vœux l'adoption d'un titre spécialement consacré à la définition de la torture dans le Code pénal bulgare. En outre, M. Yacovlev a demandé à la délégation de préciser les effets de l'adoption de mesures antiterroristes sur les droits de l'homme des réfugiés. Notant avec satisfaction l'adoption de mesures en faveur des membres de la minorité rom, il s'est demandé dans quelle mesure de tels programmes étaient effectivement mis en œuvre.

MME FELICE GAER, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la Bulgarie s'est demandée si le Parlement envisageait de se pencher à nouveau sur la question de la définition de la torture. En effet, a-t-elle précisé, il semblerait que la définition actuelle ne tienne pas pleinement compte des exigences de l'article 1er de la Convention. Mme Gaer a en outre demandé à la délégation de bien vouloir lui donner des informations supplémentaires sur la supervision des méthodes d'interrogation des personnes arrêtées ou détenues. Elle a fait état d'allégations, émanant d'organisations non gouvernementales, d'après lesquelles les investigations relatives à des actes de torture ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants ne seraient pas systématiques. En outre, est-il exact que les enquêtes relatives à de tels faits ne seraient pas menées jusqu'à leur terme, a-t-elle demandé? La corapporteuse s'est ensuite demandée pourquoi la Bulgarie avait limité cette année la possibilité d'accès des organisations non gouvernementales aux lieux de détention. La délégation bulgare aillant remis en cause la fiabilité des organisations non gouvernementales, Mme Gaer lui a demandé de préciser la position du gouvernement bulgare vis à vis des ONG. Par ailleurs, la Bulgarie a-t-elle pris des mesures pour limiter le port d'arme par le personnel de la police, a-t-elle voulu savoir.

Mme Gaer a ensuite demandé à la délégation bulgare de lui communiquer davantage d'informations s'agissant les conditions de détention en Bulgarie. Des allégations font état de l'existence de centres de détention souterrains, où les conditions d'incarcération seraient très difficiles ? Par ailleurs, la délégation pourrait-elle donner davantage d'informations sur les règles permettant de garantir les droits de la défense lors de procédures disciplinaires visant les détenus. La corapporteuse a en outre fait état d'informations selon lesquelles il y aurait trois fois plus de mauvais traitements commis contre des membres de la communauté roms que sur le reste de la population et a demandé à la délégation des précisions à ce sujet. Elle a demandé à la délégation de bien vouloir lui communiquer les résultats des mesures visant à attribuer des postes d'officiers de police à des membres de la minorité rom. Cette politique porte-t-elle ses fruits, a demandé Mme Gaer? Enfin, elle s'est demandée quelle serait la valeur juridique de déclarations obtenues sous le coup de mauvais traitements infligés par les forces de police.

Un autre expert s'est interrogé sur la conformité des conditions de détention en Bulgarie avec les normes internationales applicables en la matière. Il s'est par ailleurs demandé quelles étaient les mesures prises par la Bulgarie pour assurer la réinsertion sociale des détenus. L'expert a par ailleurs noté que la Bulgarie n'a pas procédé à la publication des conclusions du Comité européen pour la prévention contre la torture au terme de ses deux visites dans le pays. Comment, dès lors, se référer à ces conclusions pour mettre en doute la fiabilité des allégations d'organisations non gouvernementales concernant la persistance d'actes de torture et de traitements cruels, inhumains ou dégradants sur le territoire bulgare?

Un autre membre du Comité a demandé à la délégation de préciser les règles relatives à la mise au secret de détenus. Il s'est par ailleurs demandé quelle était la durée maximale de la détention préventive en Bulgarie.

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