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Déclarations Haut-Commissariat aux droits de l’homme

Déclaration de Navi Pillay, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme sur la journée des droits de l’homme, 10 décembre 2009

Journée des Droits de l'Homme

09 Décembre 2009

Le concept de non-discrimination se trouve au cœur des droits de l’homme.
 
Pour cette raison, il a été retenu comme thème officiel de cette Journée des droits de l’homme, qui est célébrée chaque année à la date anniversaire de l’adoption de la Déclaration universelle des droits de l’homme en 1948. Et pour cette raison comme pour beaucoup d’autres, il devrait être un thème « officieux » chaque jour, chaque année, pour chacun de nous.
 
Vingt-six des trente articles de la Déclaration universelle commencent par les mots « Toute personne… », « Tout individu… », « Chacun… » ou « Nul… ». Chacun peut se prévaloir de tous les droits. Nul ne doit être exclu. Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Tous ont droit à une protection égale contre toute discrimination.
 
Nous disposons aujourd’hui d’un large éventail de traités internationaux basés sur les droits de l’homme qui sont imprégnés du concept de non-discrimination. Parmi ceux-ci figurent, par exemple, les conventions sur les droits de l’enfant, les droits des handicapés, les droits des réfugiés et des travailleurs migrants ; les conventions consacrées à l’élimination de la discrimination raciale et de la discrimination envers le femmes ; ainsi que les traités relatifs au travail, à la santé et à la religion. Ces normes juridiquement contraignantes sont complétées par d’importantes déclarations des Nations Unies qui déterminent avec précision les droits des minorités et ceux des populations autochtones.
 
Ces lois et normes internationales sont appuyées par des milliers de lois et institutions nationales et régionales. Un nombre considérable de pays ont maintenant accédé à une éducation véritablement universelle, et un nombre plus restreint possèdent des systèmes de soins de santé publique universels. Considéré globalement, tout cela constitue un extraordinaire hommage à l’aptitude et à l’aspiration de l’humanité à créer un monde d’égalité des chances et d’égalité devant la loi. Et des millions de personnes en ont bénéficié.
 
Chaque sorte de personne a quelque chose à offrir. Quand nous appréhendons la diversité, nous apportons à nos sociétés davantage de richesse et de profondeur.
 
Pourtant, la discrimination sévit toujours.
 
Les femmes effectuent les deux tiers des heures de travail et assurent la moitié de la production alimentaire dans le monde, mais elles ne gagnent que 10 pour cent des revenus mondiaux et possèdent moins de 1 pour cent de la propriété foncière dans le monde. En dépit d’importantes améliorations intervenues au cours du siècle passé, les femmes et les jeunes filles sont encore l’objet d’un certain degré de discrimination dans toutes les sociétés, et d’un degré élevé dans nombre d’entre elles. Tous les jours, innombrables sont les femmes qui subissent des violences sexuelles ou physiques : la grande majorité des auteurs de violences restent impunis, et aucune dissuasion ne fait obstacle aux violences futures.
 
Dans toutes les régions du monde, les minorités continuent de faire face à de graves menaces, à la discrimination et au racisme, et se trouvent fréquemment exclues d’une pleine participation à la vie économique, politique, sociale et culturelle offerte aux majorités dans les pays ou les sociétés où elles vivent.
 
Des problèmes semblables se posent aux populations autochtones, estimées à 370 millions, qui constituent 5 pour cent de la population mondiale, mais 15 pour cent des personnes les plus pauvres. Elles sont souvent marginalisées, privées de nombreux droits fondamentaux – y compris le droit à la terre et le droit de propriété –, et n’ont pas accès aux services de base.
 
La discrimination raciale et ethnique se manifeste également sur toute la planète et demeure une des formes de discrimination les plus dangereuses. Si elle est laissée sans contrôle ou activement encouragée, elle ne peut que trop facilement conduire à la haine, à la violence et – dans le pire des cas – s’intensifier jusqu’à susciter des conflits déclarés, des crimes contre l’humanité et des génocides.
 
La discrimination basée sur la religion ou la croyance peut être tout aussi destructrice. Dans certains pays, des membres de certains groupes subissent des restrictions à l’exercice de leur religion ou de leur croyance et sont privés de leurs droits fondamentaux. Dans des cas extrêmes, ces situations peuvent conduire à la violence sectaire, au meurtre et aux conflits. Les stéréotypes peuvent engendrer la stigmatisation et l’isolationnisme.
 
Les réfugiés et les migrants sont largement victimes de la discrimination, y compris dans les pays riches où des hommes, des femmes et des enfants qui n’ont commis aucun crime sont souvent maintenus en détention pendant des périodes prolongées. Il est fréquent qu’ils subissent la discrimination des propriétaires, des employeurs et des autorités étatiques, et qu’ils soient stéréotypés et calomniés par certains partis politiques, organisations médiatiques et membres du public.
 
Un grand nombre d’autres groupes subissent la discrimination à un degré plus ou moins important. Certains sont aisément définissables en tant que personnes handicapées, apatrides, gays et lesbiennes, membres de castes particulières ou personnes âgées. D’autres personnes peuvent appartenir à plusieurs groupes différents et par conséquent se trouver exposés à la discrimination à différents niveaux.
 
Ceux qui ne souffrent pas de la discrimination ont souvent des difficultés à comprendre les souffrances et l’humiliation que celle-ci inflige à leurs semblables. Ils ne comprennent pas toujours non plus les effets profondément corrosifs qu’elle a sur la société tout entière.
 
La discrimination engendre la méfiance, le ressentiment, la violence, le crime et l’insécurité et constitue un non-sens économique, puisqu’elle réduit la productivité. Elle n’a aucun aspect bénéfique, de quelque nature qu’il soit, pour la société. Pourtant, nous continuons presque tous de la pratiquer, souvent comme un réflexe occasionnel, sans même réaliser ce que nous faisons.
 
Je voudrais donc encourager les gens du monde entier – politiciens, pouvoirs publics, dirigeants d’entreprise, société civile, institutions nationales de défense des droits de l’homme, médias, chefs religieux, enseignants, étudiants, et chaque individu sans exception – à honorer la Journée des droits de l’homme 2009 en optant pour la diversité et en décidant de prendre des mesures concrètes et durables pour aider à mettre fin à la discrimination.

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