Déclarations Procédures spéciales
Allocution de M. Michel MOUSSALLI Répresentant Spécial pour le Rwanda
13 avril 1999
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55ème Session de la Commission des Droits de l’Homme,
Genève, 22 mars - 30 avril 1999
point 9 de l'ordre du jour: Question de la violation des droits de l'homme
et des libertés fondamentales, où qu'elle se produise dans le monde
Genève, le 31 mars 1999
Madame la Présidente,
Excellences,
Mesdames, Messieurs,
C’est la deuxième fois que j’ai le plaisir et l’honneur de m’adresser à vous en tant que votre Représentant Spécial pour le Rwanda et ce deuxième rapport qui vous est soumis (E/CN.471999/339 reflète l’essentiel de mes observations recueillies au cours des 4 visites que j’ai effectuées au Rwanda depuis avril passsé. J’espère vivement que les recommendations que j’ai développées, dans le cadre du mandat que vous m’avez confié, recevront votre soutien et l ‘appui de la Communauté internationale.
Rentrant dimanche dernier, 28 mars, d’une courte mission au Rwanda, permettez-mos d’attirer plus particulièrement votre sur les observations, constatations, et recommendations suivantes, et de vous informer de nouveaux développements positifs.
Première constatation
Une première constatation fondamentale dont il faut pleinement prendre consceince quand on traite de la situation des droits de l’homme au Rwanda, est le proffond traumatisme qui hante et poursuit toute la sociètè rwandaaise depuis ce terrible génocide de 1994. Malgré le courage et les efforts du Gouvernement et de différents éléments de la société civile, ce traumatisme reste constamment présent dans les esprit et affecte les actions et le comportement d’une grande partie de la population. Ceci explique l’atmosphère de peur, de méfiance, qui continue d’exister au sein de la société, aussi bien dans les campagnes que dans les villes, et aussi certaines violations des droits de l’homme commises par des agents de l‘Etat qui ne peuvent supprimer leurs sentiments de vengeance.
Deuxième constatation
Une autre constatation fondammentale est que ce génocide de 1994 a pratiquement anéanti toute la structure administrative du pays et tout sond dondement économique. Certe, des progrès notables ont été réalisés depuis 1994, et le Gouvernement et les autorités nationales ont pu commencer à reconstruire et à reconstituer cette structure et ce fondemment économique. Mais il est évident que des efforts considérables restent encore à accomplir et que le soutien de la Communauté internationale rest indispensable.
Comme je le détaille dans mon rapport, l’appareil judiciare est une des structures qui a particulièrement souffert de cette tragédie. Mais il a pu enfin être graduellement reconstitué grâce aux énormes efforts consentis par le Gouvernement et la Communauté internationale.
Et l’énorme défi qui se pose aux autorités rwandaises est le suivant : Comment ramener le calme et la coexistence au sein de la société rwandaise si ne sont pas jugés et punis les auteurs reconnus de ces crimes? Mais comment le faire avec un appareil judiciare encore très affaibli alors que près de 125,000 personnes sont détenues, dont certaines attendent depuis 2, 3, ou 4 ans, que leurs dossiers soient constituès?
C’est pourquoi le Gouvernement a procédé à de nombreuses consultations sur le plan national et international en vue de trouver des solutions satisfaisantes à cette situation apparemment inextricable. Comme je l’indique dans mon rapport, il s’efforce de puiser dans le système de justice traditionnel, qu’on appelle Gracaca, en lui apportant les garanties appropriées. Il a constitué une commission qui a procédé é de nombreuses recherches et études sur la question. Elle devrait très bientôt faire connaitre ses conclusions et nous attendons avec un vif intérêt le résultat de ses travaux.
Troisième constatation
Une troisième constatation fondamentale qu’il ne faut jamais perdre vue est que les femmes et les enfants sont deux catégories de la population qui méritent une attention toute particulière. En effet, la majorité des rescapés du génocide sont des femme qui ont perdu leurs maris ou leurs familles et des enfants qui se sont retrouvés orphelins, et tous dans d’atroces conditions. C’est ainsi que dans certaines préfectures plus de 60% de la population est constituée de femmes et que près dde 3000.000 enfants dont on n’a pas retrouvé les parents, vivent dans 48.000 foyers composés uniquement d’enfants. D’ après le Représentant de l’Unicef au Rwanda, plus d’un million d’enfants sont actuellement descolarises. Et les femmes veuves et les enfants orphelins sont souvent dans un dénuemment total et sans grande protection juridique notamment en matière de succession. Le Gouvernement, les organisations internationales, et certains pays donateurs, s’efforcent de remedier à cet état de choses et doivent être vivement encouragés et soutenus.
Développements récents
Mais venons-en maintenant, si vous le voulez bien, aux développements, dont certains sont très positifs, que j’ai pu constater au cours de mes deux dernières missions, en janvier et en mars 1999.
Vous le savez, le départ du Rwanda, en juillet 1998, de la mission droits de l’homme avaait été profondément regretté par la population en général, car, par sa présence, elle rassurait et apaisait les craintes et les appréhensions. Ce départ avait été aussi regretté par les autorités rwandaises qui, certes, voulaient mettre fin à la fonction de “monitoring” de la mission, mais qui souhaitaient vivement accroitre tous les autres aspects du mandat de la mission des droits de l’homme et, notamment, renforcer l’assistance technique et la formation des agents et des institutions de l’Etat en matière de droits de l‘homme.
L’argument invoqué pour mettre fin à la fonction de “monitoring” de la mission est que cette fonction devait être exercée par l’institution nationale prévue par les Accords d’Arusha e t la Loi Fondamentale du Rwanda, à savoir, la Commission nationale des droits de l’homme. Je dois dire que je partage le point de vue que la meilleure façon d’ancrer, danss tous pays, une culture et le respect des dro its de l’homme, est de confier cette tâche à une institution nationale qui peut mieux appreécier les réalités et le potentiel national et devenir ainsi un mécanisme national, permanent et incontournable. Encore faut-il que cette institution nationale soit en place, ce qui n’était pas encore le cas au Rwanda lors du départ de la mission des droits de l’homme.
C’est pourquoi je n’ai eu de cesse d’encourager et de soutenir les efforts de toutes les autorités qui souhaitaient établir, comme le leur demande la Loi Fondamentqle du pays, deux commissions absolument essentielles en matière de droits de l ‘homme et d’unité et de réconciliation, à savoir, la Commission nationale des droits de l’homme et la Comission pour l’unité et la réconciliation nationale. Et je vous remercie vivement de nous avoir constament appuyés dans cette voie.
Il y a eu, évidemment, des hautes et des bas dans les nombreuses discussions que j’ai eues, à ce sujet, avec les autorités. Je plaidais instamment pour que tous les éléments soient introduits afin de garantir l’independence et l’efficacité de ces institutions en fonction des normes internationales reconnues. Le Gouvernement souhaitait, de son côté, avancer aussi vite que possible, mais voulait également procéder à de vastes et longues consultations en vue d’identifier les membres susceptibles de recueillir le plus large consensus.
Je suis heureux de vous annoncer aujourd’hui que la Commission pour l’Unité et la Réconciliation Nationales vient d’être constituée et est maintenant en place. La loi adoptée par l’Assemblée Nationale, en janvier 1999, a été signée par le Président de la République le 12 mars 1999 et elle esdt entrée en viguer, à sa parution au Journal Officiel, le 15 mamrs 1999. Les 12 membres ont été désignés par le Gouvernement et sont également en place. Deux dames, dont la Vice-Présidente de la Commission, en font partie en une dame que vous avez connu et apprécié ici, l’an passé, Madame Aloyse Inyumba, a été designée comme Secretaire Généraaaale de la Commission.
A noter que le projet de loi soumis par le Gouvernement à l’Assemblée Nationale, en est sorti considérablement renforcé, notamment dans son Article 3 qui énumère maintenant 9 responsabilités bien précises de la Commission. Permettez-moi de vous en citer deux: “denoncer et combattre les actes, les écrits et languages suscesptible de promouvoir toute sorte de discrimination” et “veiller au respect par les Forces Politiques, les Dirigeants ainsi que toure persone, de l’Idéologie de l’Unité et la Réconciliation Nationales”. A noter aussi que tous les membres ont été mis en place par le Président de la République et conservent leurs occupations précedentes. Certains esxercent de hautes fonctions au Gouvernement, à l’Assemblée Nationale, ou dans l’Administration, Madame Inyumba, par contre, exerce ses fonctions de Secrétaire Générale de la Commission à temps plein.
La loi portant création de la Commission Nationale pour les Droits de l’Homme qui avait Été débattue et adoptée par l’Assemblée Nationale lors de ma visite en janvier, vient elle aussi d’être récemment signée par le Président de la République, le 12 mars 1999. L’autorité et l’independance de la Commission ont été renforcéess par l’Assemblée Nationale. La Commission a “pour mission d’examiner et de poursuivre les violatins des droits de l’homme comises par qui que ce soit sur le territoire rwandais, particulièrement par des organes de l’Etat et par des individus sous le couvert de l’Etat ainsi que par toute organisatioin oeuvrant au Rwanda” (art.3). De façon particulière la Commission est chargée de “sensibiliser et former la population rwandaise en atière des droits de l’homme” et de déclencher éventuellement des actions judiciares en cas de violations des droits de l’homme par qui que ce soit” (art.4).
C’est l’Assemblée Nationale quui droit choisir les 7 membres de la Commission parmi la liste des 10 noms proposés par le Président de la République. Lors du Conseil du gouvernment de vendredi passé, le 26 mars, et après avoir procédér depuis de nombreux mois à de larlges consultantions à ce sujet, le Président de la République a arrête la liste des 10 noms qui sont maiantenant officiellement connus. Cette liste a été transmise à l’Assemblée Nationale - qui est actuelllement en vacaaaances - et le Préssident de l’Assemblée Nationale m’a promis d d’daccorder à ce débat la priorité aabsolue dès la r eprise des travaux d e l’Assemblàe, le 12 avril.
Sur les 10 noms proposés figurent les n oms de 4 dames connues et respectées dans le pays. Le nom propossés du Président de la Commission Nationale des Droits de l’Homme, M. Ndoba Gasana, est également connu et respecté dans le pays et au sein de l’Assemblée Nationale. J'ai eu l’occasion de m’entretenir pendant de longues heures avec lui et j’ai vivement apprécié son engagement pour la caause des droits de l’homme. A noter ici que les membres de la Commission devront abandonner leurs précédentes fonctiions pour se consacrer entièrement à la Commission. A noter également que l’Assemblée Nationale pourrait refuser d’acepter tel ou tel nom figurant sur la liste proposée par le Gouvernment.
J’ai informé le Gouvernement, et en particulier les nouveaux ministres des Affaires Etrangères et de la Justice - que j’ai été très heureux de rencontrer et d ‘écouter - que, comme nous l’avions envisagé ici même, je souhaitais dès que possible et en coopératiion avec le Haut Commissariat aux Droits de l’Homme, organiser une Table ronde ou pourraient être invité des membres compétents de la société civile ainsi que deux ou trois Présidents de Commissions Nationale de pays voisins. La Table rode aurait pour but de permettre à la nouvelle Commission National Rwadaise de bénéficier de l’expérience de Commissions Nationale de pays voisins et amis et de développer un plan de travail qui établirait les priorités décidées par les membres de la Commission ainsi que les structures et resources requises pour permettre à la Commissin de fonctionner en toute indépendance et de manière efficace que posible.
Le gouvernement et le Président proposé de lal Commision Nationale sone entièrement d’accord avec cette approche. Je suis également heureux de vous informer que la Haute Commissaire aux Droits de l’Homme, Madame Mary Robinson, est pète à apporter son soutien à cette initiative ainsi d’ailleurs que le Représentant Résident du PNUD au Rwanda, Monsieur Stephen Browne. Je suis aussi sûr que l’on pourra disposer du soutien de différents Centres pour les Droits de l’homme, en Europe et ailleurs.
Il sera évidemment essentiel d’établir une étroite coordination avec la Commission pour l’unité et la Réconciliation Nationales afin d’assurer une pleine complémentaire et un soutien réciproque entre les deux Commissions. Là aussi je suis heureux de vous annoncer que cela rejoint entièrement les préoccupations et le désir de la Commission pour l’Unité et la Réconciliation nationales.
Un autre développement extrêmement positif qui vient de se dérouler an Rwanda est sans aucun doute ces premières éelections qui vont permettre de metre en place dans tout de pays des milliers de personnes ayant le soutien de leur cellule et de leur secteur eet qui auront diverses tâches d’assistance administrative.
Cela aura certainement un impact positif sur l’atmosphère générale dans le pays et devrait contribuer également à rèsoudre certains aspects touchant à l’administration de la justice et à la situation dans les prisons.
Madame la Présidente,
Excellencies,
Mesdames, Messieurs,
Je n’aimerais pas conclure sur des notes aussi positives sans vous faaire part d’une situation qui me préoccupe gravement et qui mérite. à mon avis, la plus grande atention et l’action décissive de la Communauté internationale.
Il faut en effet, hélas, savoir que le nomnreux gènocidaires, des tristement célèbres milices Interahamwe, sont déterminés à poursuivre leurs actions criminelles et sauvages afin d’empêcher que se développe le climat de confiance et de réconcilation que le Gouvernment s’efforce d’établir au sein de la population rwandaise. Ils espèrent, sans doute, qui’ils parviendront ainsi un jour à atteindre leur objectif fondamental qui est la reconquête du pouvoir au Rwanda et lélimination de tous ceux qui ne partagent pas leur obsession criminelle.
Et malheuresement ces milices Interahamwe utilisent le Congo voisin comme base arrrière de leurs attaques et y recoivent du soutien et de l’aide qui leur permettent de mener ces actions criminelles. C’est ce qui explique l’intervention rwandaise au Congo et c’est un des aspects majeurs de la crise qui règne actuellement dans la région des Grands Lacs. Tant que durera cette crise et ce conflit, une culture et une promotion des droits de l’homme dans la région ne pourront réellement se développer et la région risque de s’enfoncer dans un drame sans limites.
Il est donc absolument essentiel que les pays de région, avec l’appui de la Communauté internationale, arrivent à se mettre d’accord sur un plan de paix et sur une solution régionale à long terme permettant à toute les populations de coexister en paix et de disposer de l’assistance et du développement économique nécessaire. Seule cette solution régionale à long terme permettra d’ancrer définitivement dans la region, la paix, la prospérité, et le respect des droits de l’homme.
Je vous remercie de votre attention.
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