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Communiqués de presse Organes conventionnels

Comité des droits de l’enfant : examen du rapport de la Fédération de Russie au titre du protocole facultatif concernant la vente d'enfants

22 Mai 2018

GENEVE (22 mai 2018) - Le Comité des droits de l’enfant a examiné, ce matin, le rapport de la Fédération de Russie sur les mesures prises par ce pays pour donner effet aux dispositions du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

Présentant ce rapport, M. Igor Zubov, Vice-Ministre de l’intérieur de la Fédération de Russie, a affirmé que l’enfant avait toujours été au cœur des préoccupations de son pays et de son modèle de famille.  Cela a expliqué l’adhésion de la Fédération de Russie à la Convention relative aux droits de l’enfant et à son Protocole facultatif.  Aujourd’hui, toutes les mesures pour appliquer ces deux instruments ont été prises, notamment en ce qui concerne la prévention du fléau de la pornographie en ligne mettant en scène des enfants, prévention qui est une priorité pour les autorités russes, a assuré le Vice-Ministre.  Les autorités ont ainsi, à ce jour, fait bloquer 10 000 sites pornographique mettant en scène des enfants et lancé, entre 2015 et 2017, environ 94 procédures pénales.

La société russe, a expliqué le Vice-Ministre, est préoccupée par l’agressivité de certains médias et de certaines organisations utilisant ou promouvant des images ou des concepts qui peuvent affecter les droits de l’enfant, notamment la nudité et la prostitution des enfants à des fins d’avantages matériels.  Ce problème, s’il touche également la Fédération de Russie, n’en ébranle cependant pas encore les valeurs ni les mœurs sociales, a affirmé M. Zubov.

La délégation russe était composée de plusieurs représentants des Ministères de l’intérieur, de la santé, des affaires étrangères, de l’éducation et des sciences, ainsi que des communications et des mass médias.  Le Bureau du Procureur général était aussi représenté.  

La délégation a répondu aux questions et observations des membres du Comité s’agissant, notamment, de la compatibilité des mesures législatives prises par la Fédération de Russie avec la Convention et avec le Protocole facultatif ; de la production de statistiques ventilées ; des mariages forcés d’enfants dans le Caucase ; du tourisme sexuel ; du risque d’exploitation sexuelle d’enfants pendant la prochaine Coupe du monde de football, qui aura lieu en Fédération de Russie ; de l’absence de définition dans la loi russe de la vente ou de la prostitution  d’enfant ; ou encore du manque de protection spécifique des enfants migrants.  

M. Hatem Kotrane, rapporteur du Comité pour l’examen du rapport de la Fédération de Russie, a regretté que le rapport ne donne pas de statistiques ventilées en ce qui concerne, notamment, la nationalité, l’origine ethnique et le statut socio-économique des enfants victimes des crimes couverts par le Protocole facultatif, ni concernant la nature des infractions constatées et des peines prononcées.  M. Kotrane a recommandé que la Fédération de Russie considère les enfants migrants comme un groupe vulnérable et crée à leur intention une catégorie statistique spécifique.  Il a regretté en outre que la loi russe ne donne pas de définition de la prostitution enfantine ni de catégorisation de la possession de matériels pornographiques mettant en scène des enfants.  

Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport de la Fédération de Russie, qu’il rendra publiques à l’issue de la session, le 1er juin prochain.


Le Comité reprend ses travaux à 15 heures pour examiner le rapport du Lesotho (CRC/C/LSO/2) au titre de la Convention.  


Présentation du rapport

Le Comité était saisi du rapport initial présenté par la Fédération de Russie (CRC/C/OPSC/RUS/1, à paraître en français) au titre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant, concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, ainsi que de ses réponses à une liste de points à traiter préparée par le Comité.  

Présentant ce rapport, M. IGOR ZUBOV, Vice-Ministre de l’intérieur de la Fédération de Russie, a commencé par assurer que l’enfant avait toujours été au cœur des préoccupations de son pays et de son modèle de famille.  Cela a expliqué l’adhésion de la Fédération de Russie à la Convention relative aux droits de l’enfant et à son Protocole facultatif.  Aujourd’hui, toutes les mesures pour appliquer ces deux instruments ont été prises, notamment en ce qui concerne la prévention du fléau de la pornographie en ligne mettant en scène des enfants, prévention qui est une priorité pour les autorités russes, a assuré le Vice-Ministre.

Au titre de ces mesures, M. Zubov a cité le Cadre d’action concernant les mesures éducatives de prévention de la délinquance ainsi que le Cadre de prévention de l’abandon de l’enfant.  Par ailleurs, à l’initiative du Président russe, la période 2018-2027 a été déclarée « Décennie de l’enfance ».  Pour soutenir ces mesures, le Gouvernement russe a consacré 228 milliards de roubles (environ 3,15 milliards d’euros) en 2017 aux politiques liées à l’enfance, un budget augmenté de 4% en 2018, a indiqué le Vice-Ministre.  

M. Zubov a également assuré que le code pénal russe était très répressif en ce qui concerne les atteintes aux droits de l’enfant, dont plusieurs sont érigées en crimes, notamment les atteintes sexuelles.  Des mesures ont aussi été prises contre la pornographie en ligne mettant en scène des enfants.  À ce jour, 58 000 sites pornographique mettant en scène des enfants ont été comptabilisés et 10 000 bloqués.  Entre 2015 et 2017, environ 94 procédures pénales ont été lancées, a encore chiffré M. Zubov.

Entre autres mesures couronnées de succès, le Vice-Ministre a cité en exemple l’efficacité du système de contrôle des activités sur Internet ainsi que les résultats positifs de l’introduction de psychologues de l’enfance dans les écoles maternelle et primaires.  Malgré cela, 80% des agressions sexuelles sur les enfants ne sont pas dénoncées, a dit M. Zubov, et La pédophilie est un problème latent.  

La société russe est donc préoccupée par l’agressivité de certains médias et de certaines organisations utilisant ou promouvant des images ou des concepts qui peuvent affecter les droits de l’enfant, notamment la nudité et la prostitution des enfants à des fins d’avantages matériels.  Le public demande que les mineurs soient protégés contre ces tendances et les autorités travaillent à cette fin avec les médias et les organisations publiques activement impliquées dans ce domaine.  Ce problème, s’il touche également la Fédération de Russie, n’en ébranle cependant pas encore les valeurs ni les mœurs sociales, a affirmé le chef de la délégation.  

Enfin la Fédération de Russie est consciente qu’il lui reste beaucoup à faire en matière de centres d’accueil pour les enfants, même si le nombre de ceux-ci ne cesse d’augmenter, a dit M. Zubov.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

M. HATEM KOTRANE, rapporteur du Comité pour l’examen du rapport de la Fédération de Russie, a dit que le Comité prenait note avec satisfaction des mesures prises par l’État partie, notamment la création d’institutions et d’une stratégie nationale pour les droits de l’enfant.  Cependant, le Comité observe que le rapport ne donne pas de statistiques ventilées en ce qui concerne, notamment, la nationalité, l’origine ethnique et le statut socio-économique des enfants concernés, ni concernant la nature des infractions constatées et des peines prononcées.  L’expert a recommandé que la Fédération de Russie comble cette lacune.  M. Kotrane a recommandé en particulier que la Fédération de Russie considère les enfants migrants comme un groupe vulnérable et crée à leur intention une catégorie statistique spécifique.  

En matière juridique, le Comité se félicite du nombre de lois adoptées par la Fédération de Russie pour incriminer infractions mentionnées dans la Convention et le Protocole, a dit M. Kotrane.  Mais ces législations ne saisissent pas toutes les catégories mentionnées par le Protocole facultatif, en particulier dans le domaine de la vente d’enfant.  L’expert s’est interrogé sur le fait de savoir si une adoption forcée peut être considérée comme une vente d’enfant.  Il a regretté en outre que la loi russe ne donne pas de définition de la prostitution enfantine ni de catégorisation de la possession de matériels pornographiques mettant en scène des enfants.  

Un autre membre du Comité a souhaité savoir ce que comptait faire la Fédération de Russie contre le tourisme sexuel, compte tenu du fait que si les statistiques indiquent que le nombre de contrevenants étrangers a diminué, elles montrent aussi que le nombre de contrevenant russes a augmenté.  L’expert a voulu savoir combien de poursuites judiciaires ont été intentées contre ces touristes sexuels et quelles mesures d’assistance étaient offertes aux enfants victimes.  

Un autre expert a voulu savoir si, lors de procédures d’adoption, des enquêtes et vérifications sont faites au sujet des candidats à l’adoption ; et si la Fédération de Russie avait l’intention d’adhérer à la Convention sur la protection des enfants et sur la coopération en matière d'adoption internationale (Convention de La Haye de 1993).  

Un autre expert a demandé quelles mesures de prévention les autorités prenaient contre l’exploitation sexuelle des enfants dans le contexte de la prochaine Coupe du monde de football, qui se jouera en Fédération de Russie à partir du 15 juin prochain.  Il a également interrogé la délégation sur la procréation médicalement assistée, notamment pour savoir si le prix en était fixé entre les parties et si la mère porteuse disposait d’un moyen pour garder l’enfant en cas de changement d’avis.  

Une experte s’est interrogée sur les moyens mis en œuvre par le gouvernement pour enregistrer les naissances dans les lieux les plus reculés et pour prévenir le mariage des enfants.  La Présidente du Comité, MME RENATE WINTER, a estimé que la pratique consistant, dans le nord du Caucase, à remettre des sommes d’argent à la famille de la fiancée pouvait être considérée comme une vente d’enfant.  Elle a voulu savoir quelles mesures étaient prises pour prévenir les mariages forcés.
 
Réponse de la délégation

La délégation a expliqué que le travail de collecte de statistiques ventilées était assuré par des organes gouvernementaux.  Cependant, comme dans d’autres pays, notamment ceux de l’Union européenne, les données ne sont pas élaborées sur des bases discriminatoires, notamment la nationalité, pour éviter la propagation de discours de haine.  Pour cette raison, la « violence faite aux enfants migrants » n’existe pas officiellement en Fédération de Russie, car la Fédération de Russie ne fait de différence entre les migrants et non-migrants.  La délégation a indiqué qu’en 2017 le nombre de personnes condamnées pour violence faite sur des enfants représentait de 1,3% du nombre total des personnes condamnées pour des faits de violence.  La délégation a précisé en outre que l’obtention de services sexuels auprès de mineurs âgés de 16 à 18 ans était condamnable au pénal.

Par ailleurs, et contrairement à d’autres pays où le tourisme sexuel est promu par voie de publicité, la Fédération de Russie n’est pas un pays de destination du tourisme sexuel.  Il y a, certes, quelques cas liés à des organisations criminelles.  En 2017, les autorités ont arrêté sept groupes criminels actifs dans ce domaine et traduit 143 personnes en justice.  

Il n’existe par ailleurs pas de cas d’exploitation des enfants au travail en Fédération de Russie, a dit la délégation.  D’autre part, aucune plainte pour exploitation sexuelle d’un enfant examinée par la justice n’a abouti à des faits concrets, a encore assuré le chef de la délégation.  La délégation a insisté sur le fait que le phénomène de la prostitution d’enfants n’existait pas en Fédération de Russie, à l’exception de quelques cas de prostitution volontaire, un phénomène qui tend à disparaître après avoir été constaté il y a une dizaine d’années.  

Cent vingt lois fédérales traitent de la prévention de la violence faite aux enfants, a poursuivi la délégation russe.  Plusieurs commissions ont été créées à tous les niveaux administratifs, avec un effectif de plus de 6 000 personnes.  Les avis de ces commissions sont rendus sous forme d’ordonnances, qui s’imposent à toutes les structures de l’État, a indiqué la délégation.  Certes, il n’y a pas de formation spécifique pour les membres de ces commissions, a admis la délégation.  Cependant, le niveau de formation académique, technique et professionnel est très élevé en Fédération de Russie, en particulier au sein du Ministère de l’intérieur, a-t-elle assuré.

La délégation a également affirmé que si tout n’a pas encore été fait en matière de réhabilitation des victimes, le Gouvernement alloue des financements aux institutions pertinentes, y compris aux organisations de la société civile intervenant dans le domaine et qui le méritent.  D’autre part, la Fédération de Russie n’a pas encore légiféré pour établir la responsabilité de personnes morales s’agissant de la commission de crimes couverts par le Protocole facultatif, a fait savoir en outre la délégation.
 
En ce qui concerne la gestation pour autrui, elle n’est pas interdite en Russie et est de fait autorisée et pratiquée dans certains hôpitaux, a dit la délégation.  Cependant la loi ne prévoit aucun montant à verser à la mère porteuse.  Elle dispose que cette transaction doit faire l’objet d’une entente entre les parties et que la mère porteuse peut décider, sur cette base préalable, de garder l’enfant.  Dans ce cas, les tribunaux seront appelés à trancher.  Mais, à ce jour, aucun cas de vente d’enfant n’a été relevé dans ce cadre, à l’exception de quelques différends entre mères porteuses et familles.  

S’agissant des mariages d’enfants dans le Caucase, en particulier en Tchétchénie, la délégation a affirmé que c’était une pratique marginale qui ne concerne qu’un millier d’unions, survenues pour des raisons différentes, dont des naissances ou des unions de fait.  

Évoquant la prévention de la prostitution lors de la Coupe du monde, la délégation a estimé que les supporters iront en Fédération de Russie pour regarder des matches de football et non pour la prostitution.  Les autorités, a précisé la délégation, sont en train de préparer un plan pour garantir l’ordre public pendant le championnat : parmi les mesures prévues, la prostitution sera interdite.

Répondant une demande d’un expert, la délégation a précisé que les centres d’accueil pour enfants, à la différence des dortoirs, sont des centres de jour, dont le personnel comporte des psychologues chargés de la prise en charge des enfants.  
 
Remarques de conclusion
 
M. Kotrane a remercié la délégation de la Fédération de Russie pour l’échange fructueux.  Il a dit que le Comité appréciait les informations apportées par la délégation et a encouragé le Gouvernement russe à aller plus en avant dans la mise en œuvre de la protection des droits de l’enfant.

M. Zubov a demandé au Comité d’examiner son rapport en toute impartialité.  Les échanges avec le Comité montrent que la Fédération de Russie a pris le bon chemin, a dit M. Zubov.  Il a attiré l’attention du Comité sur le fait que les nouvelles technologies sont autant de menaces pour les droits de l’enfant.  Pour cette raison, la Fédération de Russie reste d’avis que les Nations Unies devraient adopter un instrument régissant l’utilisation responsable d’Internet.  La Fédération de Russie, a ajouté M. Zubov, estime aussi que les organes de traités doivent respecter les spécificités culturelles et la souveraineté des pays examinés.  

Mme Winter a assuré que le Comité était un organe de traité et non un tribunal chargé de juger les États parties.  Le Comité attend des informations complémentaires de la part de la délégation, a conclu la Présidente.

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