Communiqués de presse Procédures spéciales
Tchad: des experts de l’ONU appellent à un soutien accru pour stopper les mercenaires, les combattants étrangers et mettre un terme à la crise humanitaire
Tchad
30 avril 2018
GENEVE/N’DJAMENA (30 avril 2018) – Le Groupe de travail de l’ONU sur les mercenaires a appelé à l’accroissement du soutien financier et des autres ressources pour mettre fin au conflit armé au Tchad et dans les pays avoisinants ainsi que pour mettre un terme aux violations des droits de l'homme commises par différents acteurs dont certains sont des combattants étrangers et de présumés mercenaires.
Ces violations comprennent notamment des exécutions et des actes torture. Davantage de ressources permettra également d’aider des millions de personnes ayant besoin d'aide humanitaire en raison des combats.
Dans une déclaration, au terme d’une visite d’une durée de 9 jours dans le pays, les experts de l'ONU affirment que les activités des groupes armés, dont Boko Haram notamment, ont provoqué une crise humanitaire majeure et qu'il est essentiel que les droits de l'homme soient placés au centre des efforts pour les combattre.
« Boko Haram a détruit des communautés qui vivaient dans la région du lac
Tchad depuis plusieurs années et qui en tiraient leur moyen de subsistance. Ils ont tué près de 30 000 de personnes, causé le déplacement interne de près de 2 millions d’individus et ont laissé près de 10 000 millions de personnes dans un besoin urgent d’assistance humanitaire,» a déclaré Patricia Arias, membre de la délégation du Groupe de travail.
« Les violations des droits de l'homme enregistrées qui ont été infligées à la population locale y-compris aux femmes et aux enfants comprennent notamment des exécutions, des actes de torture et des enlèvements. Les femmes ont plus particulièrement été victimes de violences sexuelles et ont été utilisées en tant que kamikazes » a-t-elle affirmé.
«La région du lac Tchad, qui est maintenant le centre des attaques et violences de Boko Haram, est au cœur d’une crise humanitaire de grande ampleur affectant non seulement le Tchad mais les pays avoisinants en l’occurrence le Cameroun, le Niger et le Nigéria. Mais le pays entier fait également face au défi que représente un certain nombre de conflits armés dans lesquels des combattants étrangers et des mercenaires sont engagés » a-t-elle ajouté.
Les experts ont indiqué que plusieurs personnes ont été recrutés de force au sein de Boko Haram y-compris des ressortissants qui proviennent des pays qui bordent le lac Tchad. Néanmoins, ils ont noté que des mercenaires en provenance de l'extérieur de la région, auraient également rejoint le groupe dans le but de fournir des formations, d’après certaines informations.
Les experts des Nations Unies ont mentionné que la compréhension des motivations des personnes qui rejoignent les groupes extrémistes et s’engagent dans des activités mercenaires est essentielle. Plus de la moitié de la population du Tchad a moins de 18 ans et environ 40% vit dans la pauvreté.
"Avec un taux de pauvreté aussi élevé, il y a de sérieux risques que les jeunes rejoignent des groupes tels que Boko Haram ou Daesh en vue d’obtenir des gains financiers ou matériels. Dans la région du lac Tchad, région où se trouvent certaines des communautés les plus pauvres et les plus marginalisées, le risque est encore plus élevé" a déclaré Mme Arias.
Néanmoins, le Groupe de travail a clairement spécifié que les menaces sécuritaires ne sont pas uniquement centrées sur la région du lac Tchad. Dans le nord, le conflit impliquant Daesh en Libye a accentué les préoccupations et ce, plus particulièrement à la suite de sa récente alliance avec des éléments de Boko Haram.
À l'est, le conflit au Soudan a entraîné l'afflux de réfugiés dans le pays, alors qu’au sud, le conflit en République centrafricaine a eu le même effet. Au cours de cette visite, certains ont décrit le Tchad comme « une île entourée d'un océan de guerres » ont noté les experts.
Les activités criminelles transfrontalières menées par des groupes armés sont répandues dans certaines parties du pays étant connues comme des «no man's land» constituant de vastes zones fournissant des routes de passage pour le trafic de drogues, d'armes et d'êtres humains.
En raison de la violence et des conflits armés, le Tchad accueille plus de 400 000 réfugiés. De plus, près de 70 000 ressortissants tchadiens sont retournés, la plupart en provenance de la République centrafricaine, et se trouvent sur divers sites à travers le pays, y compris à N’Djamena.
“La situation humanitaire associée aux menaces sécuritaires est tout simplement accablante” a déclaré Saeed Mokbil, un membre du Groupe de travail. « A N’Djamena, les attaques à la bombe de 2015 par Boko Haram et les incidents des rébellions armées internes ont mis en lumière la volatilité de la situation dans le pays. » a-t-il souligné.
Les mesures de sécurité sont essentielles, mais elles doivent être mise en œuvre en conformité avec les standards de droits de l'homme. Cela comprend la nécessité de veiller à ce que les personnes qui sont arrêtées en raison de leur lien présumé avec des groupes armés tels que Boko Haram ne soient pas détenues sans garanties procédurales. Le Groupe de travail exhorte le gouvernement à s’assurer que les droits de l'homme y-compris le droit à un procès équitable pour les détenus se trouvant dans des endroits comme Koro Toro, soient pleinement respectés.
« La promotion du développement, la réduction de la pauvreté, la construction de la paix et de la cohésion sociale sont des éléments importants en vue de fournir des solutions durables à la population locale. Cela nécessite un important soutien régional et international. Les agences humanitaires ont sérieusement besoin de davantage de ressources et de financement afin de mener à bien les programmes essentiels destinés à soutenir les populations affectées » a affirmé M. Mokbil.
Le Groupe de travail s’est félicité des initiatives positives qui ont été mises en œuvre par les autorités tchadiennes, notamment la ratification de la Convention de l'OUA sur l'élimination des mercenaires en Afrique. Un nouveau code pénal, qui a été adopté l'année dernière comporte une disposition qui criminalise le mercenariat. À ce jour, aucune poursuite n'a été intentée en vertu de cet article du code.
Les membres de la délégation ont tenu des réunions à N’Djamena et se sont rendus sur le site de Gaoui où se trouvent des retournés et réfugiés. Ils ont rencontré des représentants du Gouvernement, des membres du corps diplomatique, des organisations de la société civile, des victimes de violations des droits de l’homme ainsi que des représentants de différentes agences des Nations Unies.
Le groupe de travail présentera le rapport de sa visite au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies en septembre 2018.
Fin
Le Groupe de travail sur l’utilisation des mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes a été créé en juillet 2005 par la Commission des droits de l’homme. Son mandat a été prorogé par le Conseil de droits de l’homme en 2008. Le Groupe est composé de cinq membres experts indépendants de différentes régions du monde. Le président-rapporteur est Gabor Rona (Etats-Unis d’Amérique). Les autres membres sont Elżbieta Karska (Pologne), Patricia Arias (Chili), Anton Katz (Afrique du Sud) et Saeed Mokbil (Yémen).
Les groupes de travail font partie des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme. Les procédures spéciales, le plus grand organisme d’experts indépendants dans le système des Nations Unies relatif aux droits de l’homme, est le nom général des missions d’enquête et de surveillance des mécanismes indépendants du Conseil qui traitent soit de situations spécifiques des pays ou des questions thématiques dans toutes les régions du monde. Les experts des procédures spéciales travaillent sur une base volontaire; ils ne font pas partie du personnel des Nations Unies et ne reçoivent pas de salaire pour leur travail. Ils sont indépendants de tout gouvernement ou organisation et siègent à titre individuel.
Page du HCDH sur le pays –
Chad
Pour de toute demande d’information and ou en ce qui a trait au média, Veuillez contacter:
A N’Djamena:
Toussaint Mbaitoubam (+235 66 275 033/
toussaint.mbaitoubam@undp.org)
A Genève:
Jolene Tautakitaki, OHCHR (+41 79 444 4078) / jtautakitaki@ohchr.org) Yiyao Zhang (+41 22 917 9804 / yzhang@ohchr.org)
Ou écrire à
mercenaries@ohchr.org
Pour les demandes médias liées à d’autres experts indépendants de l’ONU:
Jeremy Laurence - Service de presse ( +41 22 917 9383 /
jlaurence@ohchr.org)
Cette année 2018 est la consécration du 70ème anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme adoptée par l’ONU le 10 décembre 1948. La Déclaration universelle, traduite en un record mondial de 500 langues, part du principe que " tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits ". Ce message reste aujourd’hui essentiel pour chaque individu, chaque jour. En l’honneur du 70ème anniversaire de ce document au caractère extraordinairement précieux, et afin d’empêcher l’érosion de ses principes vitaux, nous exhortons tous les êtres humains, partout dans le monde, à se lever pour les droits de l’homme : www.standup4humanrights.org
Mots-clés
VOIR CETTE PAGE EN :