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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité contre la torture examine la situation au Cabo Verde en l'absence de rapport

Cabo Verde

24 Novembre 2016

Comité contre la torture 

24 novembre 2016 

Le Comité contre la torture s’est penché, ce matin, en l’absence de rapport du pays, sur la mise en œuvre de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants au Cabo Verde, alors que le rapport initial de l'archipel est attendu depuis 1993. Cabo Verde n’a pas envoyé de délégation à l’occasion de cet examen.

M. Jens Modvig, Président du Comité et rapporteur pour l'examen de la situation au Cabo Verde, a regretté l’absence de la délégation et de rapport, rappelant que le Cabo Verde avait ratifié la Convention le 4 juin 1992.  Alors que le rapport initial de cet État partie 
devait être soumis en juillet 1993, le Comité déplore l’absence de réaction du Cabo Verde malgré les nombreuses tentatives d’établir un dialogue avec les autorités du pays, a indiqué M. Modvig, exprimant l’espoir que ce dialogue pourrait s’ouvrir à l’avenir.

Le rapporteur a en outre expliqué que le Comité avait informé le pays de la possibilité qui lui était offerte de recourir à la procédure simplifiée de remise de rapport.  Il a en outre rappelé que le pays pouvait solliciter une coopération technique des agences et organes des Nations Unies.

M. Modvig a ensuite relevé que la population carcérale avait été multipliée par deux ces deux dernières années et que le taux d’occupation des prisons atteignait aujourd’hui 121%. Il a souligné que le Comité aurait souhaité entendre les autorités sur les raisons de cette surpopulation et les solutions alternatives à la privation de liberté qu’elles proposaient afin de lutter contre la surpopulation carcérale.

M. Abdelwahab Hani, corapporteur du Comité pour l’examen de la situation au Cabo Verde, a lui aussi regretté l’absence de la délégation alors que l’État avait déclaré avoir développé un cadre pour permettre la poursuite de la coopération avec les mécanismes internationaux et régionaux des droits de l’homme.  Il a dit espérer que le Gouvernement allait rétablir le contact avec le Comité.

M. Hani a ensuite dénoncé la prévalence des châtiments corporels à la maison et à l’école.  Des ONG ont souligné des cas d’abus physiques et sexuels ainsi que des mauvais traitements à l’encontre de personnes handicapées dans le milieu familial, a-t-il ajouté.  Il a souhaité que le pays prenne toutes les mesures législatives, administratives et éducatives nécessaires pour assurer le plein respect des droits de l’enfant, notamment l’interdiction des châtiments corporels.

Le Cabo Verde a en outre été prié de dire ce qu’il en était de la reconnaissance par l’État de la compétence du Comité à recevoir et examiner des plaintes individuelles.

D’autres membres du Comité ont posé de nombreuses questions portant, entre autres, sur l’invocation de la Convention devant les tribunaux; sur les conditions de détention et la surpopulation carcérale ; sur la définition de la torture ; sur les abus commis par la police ; et sur la question des réfugiés.

Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le Cabo Verde et les rendra publiques à l’issue de la session, qui doit clore ses travaux vendredi 7 décembre.

Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entendra les réponses de la délégation arménienne aux questions que lui ont posées les membres du Comité hier matin. 

Examen de Cabo Verde


M. JENS MODVIG, Président du Comité et rapporteur pour l’examen de la situation au Cabo Verde, a regretté l’absence de la délégation et de rapport. Il a rappelé que le Cabo Verde avait ratifié la Convention le 4 juin 1992.  Le rapport initial devait parvenir en juillet 1993, a-t-il souligné, avant d’indiquer que le Comité déplore l’absence de réaction du Cabo Verde malgré les nombreuses tentatives d’établir un dialogue avec les autorités du pays.  M. Modvig a exprimé l’espoir que ce dialogue pourrait s’ouvrir à l’avenir.

Le rapporteur a d’autre part indiqué que le Comité avait informé le pays de la possibilité qui lui était offerte de recourir à la procédure simplifiée de remise de rapport.  Il a en outre rappelé que le pays pouvait solliciter une coopération technique des agences et organes des Nations Unies.

M. Modvig a ensuite relevé que le Cabo Verde se classait au second rang des pays africains concernant la liberté de la presse et était considéré comme un pays libre.  Il a également relevé qu’une fois ratifiés, les traités internationaux prévalaient sur le droit interne. Il a alors demandé si les dispositions de la Convention étaient invoquées devant les tribunaux caboverdiens.

Le rapporteur a également constaté que la Constitution caboverdienne contenait l’interdiction de la torture et des traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il a toutefois souhaité que soit intégrée dans la Constitution une définition de la torture conforme à celle énoncée à l’article premier de la Convention.

Les peines de prisons prévues dans le Code pénal pour sanctionner les actes de torture manquent de clarté, a poursuivi M. Modvig.  Il a insisté pour que les crimes de torture ne bénéficient d’aucune prescription et que les auteurs de ce type d’actes ne puissent pas être amnistiés, ni graciés comme cela peut encore être le cas actuellement.

Tout en se réjouissant que le pays ait adopté le Protocole facultatif à la Convention, M. Modvig a estimé que les autorités caboverdiennes devaient encore prendre davantage de mesures pour prévenir la torture et les mauvais traitements.  Il a notamment relevé que le droit des personnes détenues à un examen médical pratiqué par un médecin indépendant n’était pas garanti dans la Constitution. Or, ce droit est très important dans la prévention de la torture, a-t-il souligné.  Il s’est en outre inquiété que le délai maximum de 48 heures pour présenter un détenu devant un juge ne soit pas toujours respecté.

Le rapporteur a souhaité que le Cabo Verde mette en place un registre national consignant l’ensemble des détenus et leur lieu de détention.  Il a demandé des informations sur les plaintes de prisonniers qui disent ne pas avoir pu jouir de toutes les garanties fondamentales.

M. Modvig a par ailleurs relevé que 30% des détenus se trouvent en détention provisoire et a estimé qu’il fallait que le Cabo Verde réduise les périodes de détention préventive trop longues.

Le rapporteur a ensuite regretté que la Commission nationale pour les droits de l'homme et la citoyenneté ne respecte pas les Principes de Paris.  Il semble être prévu qu’un mécanisme national de prévention y soit inclus, mais il n’y a pas de calendrier concernant la création d’un tel mécanisme, a-t-il en outre fait observer.  Par ailleurs, le Comité a reçu des informations selon lesquelles la Commission ne disposerait pas de fonds suffisants pour s’acquitter de son mandat.  M. Modvig a souhaité savoir si cette Commission avait accès aux centres de détention et, plus généralement, dans quelles conditions les organisations de la société civile avaient accès aux lieux de détention et quel était le suivi des recommandations de ces organisations.

M. Modvig a relevé que la population carcérale a été multipliée par deux ces deux dernières années et que le taux d’occupation des prisons atteint aujourd’hui 121%. Il a souligné que le Comité aurait souhaité entendre les autorités caboverdiennes sur les raisons de cette surpopulation et les solutions alternatives à la privation de liberté qu’elles proposaient pour lutter contre la surpopulation carcérale.

Le rapporteur a par ailleurs demandé si les détenus pouvaient porter plainte contre leurs conditions de détention, ainsi qu’en cas de torture ou de mauvais traitements; s’il y avait un médecin à temps plein dans les établissements pénitentiaires ; comment les détenus toxicomanes étaient pris en charge ; et si les détenus ayant un handicap physique avaient accès à des sanitaires adaptés.

Les procédures judiciaires accusent parfois des retards de six mois voire davantage, ce qui peut nuire à l’accès à la justice, a poursuivi M. Modvig.  Il a par ailleurs souhaité savoir s’il y avait des cas de corruption dans le système judiciaire, notamment concernant des affaires de torture.

M. Modvig s’est inquiété que le statut de réfugié ne soit pas reconnu dans la législation nationale caboverdienne; c’est le Haut-Commissariat pour les réfugiés qui se charge de cette question, a-t-il fait observer.  Le Comité craint que les victimes de la torture pouvant se trouver parmi les demandeurs d’asile ne se voient pas offrir les services adaptés, a indiqué le rapporteur.  Il a souhaité savoir quel organisme allait gérer la question des demandeurs d’asile à l’avenir.  Il a d’autre part regretté que le recours contre une décision de renvoi ne fût pas suspensif (de l’exécution du renvoi), ce qui peut être très problématique s’il y a un risque de torture pour la personne renvoyée.

Le rapporteur a aussi regretté l’absence d’informations concernant la prise en charge des personnes ayant besoin de protection internationale et l’absence de clarté quant à la possibilité d’exercer une juridiction universelle sur tous les cas de torture.

La Convention a-t-elle été invoquée dans une décision de justice relative à l’extradition, a enfin demandé M. Modvig, souhaitant par ailleurs en savoir davantage au sujet des traités, notamment bilatéraux, signés par le Cabo Verde en matière d’extradition?

M. ABDELWAHAB HANI, corapporteur pour l’examen de la situation au Cabo Verde, a regretté l’absence de la délégation caboverdienne alors que l’État avait déclaré avoir développé un cadre pour permettre la poursuite de la coopération avec les mécanismes internationaux et régionaux des droits de l’homme. Il a dit espéré que le Gouvernement allait rétablir le contact avec le Comité.

Le corapporteur s’est enquis de la nature des formations dispensées aux personnels concernés en matière de droits de l’homme et notamment d’interdiction absolue de la torture, avant de regretter l’absence de formation spécialisée destinée aux professionnels directement impliqués dans les enquêtes sur des actes présumés de torture.  Il a insisté sur la nécessité pour les autorités caboverdiennes de veiller à ce que tous les fonctionnaires en lien avec des détenus connaissent parfaitement les dispositions de la Convention et de son Protocole facultatif.  Il faut améliorer régulièrement les programmes de formation sur la Convention, le Protocole à celle-ci et le Protocole d’Istanbul, a-t-il souligné.

M. Hani a ensuite relevé que si la Constitution interdisait la torture et les mauvais traitements, de nombreux rapports d’ONG n’en signalent pas moins des cas de violences physiques et de nombreux abus de la part de la police.  Le corapporteur s’est dit fortement préoccupé par les informations concordantes faisant état de la persistance de pratiques de torture et de mauvais traitements dans les centres de police. Ces pratiques s’apparenteraient à une sorte de peines extrajudiciaires, a-t-il insisté.  Il a donc demandé qu’il soit mis fin aux brutalités policières et aux peines extrajudiciaires dans les locaux de la police et que les victimes obtiennent réparation.

M. Hani s’est également dit préoccupé par les informations faisant état d’un sentiment d’impunité généralisé au sein de la population – un sentiment qui n’est pas sans rapport avec la lenteur de la justice, a-t-il souligné, ajoutant que cette situation n’encourage pas les victimes à porter plainte. M. Hani s’est donc enquis des mesures prises pour garantir le droit des victimes de torture et de mauvais traitements de porter plainte et a souhaité savoir si une enquête impartiale était ouverte à chaque fois qu’il y avait des motifs de croire qu’un acte de torture avait été commis.  M. Hani s’est en outre enquis des résultats des enquêtes instruites par le Conseil national de la police et le Conseil de discipline nationale pour violence excessive.

Aucune information ne permet de mesurer le respect du principe de l’irrecevabilité des preuves obtenues par la torture, a également déploré le corapporteur, avant d’insister sur la nécessité de veiller à ce que tous les personnels travaillant avec les détenus respectent les dispositions du « Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants » (Protocole d’Istanbul).

M. Hani a ensuite souhaité obtenir des données sur tous les cas de décès ou d’abus résultant d’affrontements policiers et militaires avec des immigrants d’Afrique de l’Ouest.  Qu’en est-il des mesures prises pour remédier à ces violences?

M. Hani a d’autre part dénoncé la prévalence des châtiments corporels à la maison et à l’école.  Des ONG ont attiré l’attention sur des cas de violences physiques et d’abus sexuels ainsi que de mauvais traitements à l’encontre de personnes handicapées dans le milieu familial, a-t-il ajouté.  Il a souhaité que le Cabo Verde prenne toutes les mesures législatives, administratives et éducatives nécessaires pour assurer le plein respect des droits de l’enfant, notamment l’interdiction des châtiments corporels.

Qu’en est-il de la reconnaissance par l’État de la compétence du Comité pour recevoir et examiner des plaintes individuelles.

Un autre expert s’est lui aussi inquiété de l’augmentation constante de la population carcérale, qui a doublé ces deux dernières années.  Le manque de gardiens de prison favorise la propagation de pratiques illicites comme le trafic de drogues, a-t-il souligné.  Il s’est enquis des mesures prises pour réduire la surpopulation carcérale, mettre un terme aux pratiques illicites et améliorer les conditions de détention dans les prisons de Cabo Verde.

Saluant l’initiative prise d’élaborer un nouveau plan d’action national sur les droits de l’homme sur une base participative en mobilisant différents acteurs de la société civile, une experte s’est enquise des résultats concrets, sur le terrain, de ces plans d’action.  Le
Gouvernement du Cabo Verde a participé à un programme pour éliminer le travail des enfants et ses pires formes, mais différentes sources indiquent que le travail des enfants est encore très répandu dans l’archipel, surtout dans les zones rurales, a-t-elle fait observer.  Les enfants sont également exposés à des risques de traite des êtres humains, a-t-elle ajouté.  Le problème reste l’application effective de la législation prise pour lutter contre ce phénomène, a-t-elle indiqué, avant de s’enquérir des mesures concrètes prises pour éliminer les pires formes de travail des enfants.

Une autre experte a à son tour déploré la surcharge et la lenteur du système judiciaire. La justice du pays n’est pas indépendante, a-t-elle en outre estimé.  Les juges sont sous-payés, ce qui entraîne des risques graves de corruption et peut entraver le travail de la justice, a-t-elle expliqué.  Elle s’est enquise du statut des juges, de la procédure afférente à leur nomination, de la durée de leur mandat et de l’éventuelle possibilité de les révoquer.  L’experte a par ailleurs regretté que les enfants de plus de 16 ans soient de plus en plus fréquemment incarcérés avec des adultes.  Les personnes placées en détention préventive sont-elles séparées des détenus condamnés, a-t-il par ailleurs été demandé?

Un expert a souhaité savoir si les personnes qui sont exposées à des risques de violences ou de discriminations au motif de leur orientation sexuelle étaient suffisamment protégées.  Qu’en est-il des résultats des plans d’actions nationaux contre les violences fondées sur le genre, a-t-il été demandé?  Des informations ont été requises sur les cas de violences à l’encontre des personnes LGBTI et sur les éventuelles plaintes déposées pour ce type de délits.
 
Conclusion

M. JENS MODVIG, Président du Comité et rapporteur pour l’examen de Cabo Verde, a souligné que des observations finales concernant le pays seraient publiées à la fin de la session. Il a dit espérer que ce serait le début d’un dialogue constructif avec le Cabo Verde quant à l’application des dispositions de la Convention dans cet archipel.

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Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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