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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité contre la torture examine le rapport de l'Arménie

Le rapport de l'Armenie

24 novembre 2016

Comité contre la torture

24 novembre 2016

Le Comité contre la torture a examiné, hier matin et cet après-midi, le rapport présenté par l’Arménie sur les mesures prises par ce pays pour appliquer la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Présentant ce rapport, M. Artak Asatryan, Ministre adjoint de la justice de l’Arménie, a a rappelé que l’ensemble des lois érigeant la torture en infraction a été adopté en 2015 par le Parlement; le Code pénal a été modifié pour y intégrer une définition de la torture conforme à l’article premier de la Convention, a-t-il précisé.  Des peines allant de quatre à huit années d’emprisonnement sont prévues pour les auteurs d’actes de torture et la peine peut aller de sept à douze ans d’emprisonnement s’il y a des circonstances aggravantes.  Les poursuites peuvent être engagées directement par le Procureur et non plus seulement à l’initiative de la victime, a précisé le chef de la délégation arménienne.

M. Asatryan a souligné qu’une longue liste de peines alternatives (ou peines de substitution) avait été récemment adoptée afin de réduire le recours à la détention préventive en Arménie.  Il a par ailleurs expliqué que la législation régissant le régime pénitentiaire a été revue pour être mise en conformité avec les normes internationales en la matière. M. Asatryan a ensuite souligné que la loi sur les indemnisations avait été revue et a indiqué que quatorze affaires en première instance ont donné lieu à une indemnisation pour dommages non pécuniaires.  Le Ministre adjoint de la justice a d’autre part fait valoir qu’une nouvelle unité de huit enquêteurs avait été créée au sein de l’Unité spéciale d’enquête afin d’enquêter sur tous les cas de mauvais traitements imputés à des agents de l’État. Les conditions de vie dans les centres de détention ont été améliorées, a également assuré M. Asatryan. 

La délégation arménienne était également composée de Mme Hasmik Tolmajian, Représentante permanente adjointe de l’Arménie auprès des Nations Unies à Genève, ainsi que de représentants du Ministère de la justice, de la Police et du Procureur général.

La délégation a répondu aux questions des membres du Comité en ce qui concerne, notamment, le projet de nouveau Code de procédure pénale ; l’imprescriptibilité du crime de torture ; la question de la compétence extraterritoriale, s’agissant en particulier du Haut-Karabakh ; le bilan du dernier plan national d’action pour les droits de l'homme ; les questions d’indemnisation des victimes ; la formation des personnels concernés par la prévention et la lutte contre la torture ; le projet de loi sur le Médiateur ; la surpopulation carcérale et les conditions de détention ; les décès en prison ; le placement de mineurs à l’isolement ; les décès dans l’armée en dehors des combats ; les violences domestiques ; ou encore les avortements sélectifs.

M. Sébastien Touzé, rapporteur du Comité pour l’examen du rapport de l’Arménie, s’est félicité des nombreuses modifications apportées à la législation interne suite aux dernières recommandations du Comité.  Il faut cependant que ces modifications aient des répercussions pratiques sur le terrain, a-t-il souligné.  Le nouveau Code de procédure pénale n’est pas encore entré en vigueur et il est en discussion depuis plus de six ans, a en outre fait observer le rapporteur.  Il a ensuite estimé qu’en Arménie, les peines encourues pour acte de torture n’étaient pas en adéquation avec la gravité de cet acte. 

Le rapporteur a par ailleurs relevé que le champ d’application de la législation permettant de poursuivre des agents de la fonction publique qui se seraient livrés à des actes de torture ne permet pas d’envisager que cette législation soit invoquée pour poursuivre des agents des établissements pénitentiaires ou des membres des forces armées, par exemple.  M. Touzé s’est en outre inquiété de la pratique, courante en Arménie, des avortements sélectifs.  De nombreux actes de torture sont observés et dénoncés en Arménie, a déclaré le rapporteur.  De nombreux rapports émanant de la société civile font état de la persistance de pratiques prohibées, notamment dans le cadre d’arrestations, de détentions ou d’interrogatoires, a-t-il précisé.  Il a en outre regretté l’absence de justice spécialisée pour mineurs en Arménie.  M. Touzé a ensuite indiqué que le Comité avait reçu des informations faisant état de violations importantes des garanties fondamentales, dont celles associées au droit d’avoir accès à un avocat et à un médecin et au droit de contacter des proches dès la privation de liberté.

Mme Ana Racu, corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport de l’Arménie, a quant à elle notamment dénoncé le recours à la violence généralisée et aux mauvais traitements à l’encontre des détenus.  La corapporteuse a d’autre part regretté que les personnes LGBTI soient victimes de discriminations, de harcèlements et d’agressions en Arménie.   

Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport de l’Arménie et les rendra publiques à l’issue de la session, qui doit clore ses travaux vendredi 7 décembre.

Mardi prochain, 29 novembre, à 15 heures, le Comité se penchera sur le suivi des articles 19 et 22 de la Convention.


Présentation du rapport


Le Comité était saisi du quatrième rapport périodique établi par l’Arménie (CAT/C/ARM/4) sur la base d’une liste de points à traiter (CAT/C/ARM/Q/4) que lui avait adressée le Comité.

M. ARTAK ASATRYAN, Ministre adjoint de la justice de l’Arménie, a assuré que son pays accorde une grande importance aux différents organes conventionnels des Nations Unies.
L’ensemble des lois érigeant la torture en infraction a été adopté en 2015 par le Parlement; le Code pénal a été modifié pour y intégrer une définition de la torture conforme à l’article premier de la Convention, a-t-il indiqué.  Des peines allant de quatre à huit années d’emprisonnement sont prévues pour les auteurs d’actes de torture et la peine peut aller de sept à douze ans d’emprisonnement s’il y a des circonstances aggravantes.  Les poursuites peuvent être engagées directement par le Procureur et non plus seulement à l’initiative de la victime, a précisé le chef de la délégation arménienne.

M. Asatryan a souligné qu’une longue liste de peines alternatives (ou peines de substitution) avait été récemment adoptée afin de réduire le recours à la détention préventive en Arménie.  Il a par ailleurs expliqué que la législation régissant le régime pénitentiaire a été revue pour être mise en conformité avec les normes internationales en la matière. La législation a également été revue en ce qui concerne les libérations conditionnelles.  En outre, le mécanisme permettant de garantir les droits des personnes privées de liberté a été modifié.  Ainsi, la personne privée de liberté peut-elle désormais recevoir la visite de son avocat en toute confidentialité à tout moment durant sa détention, a par exemple indiqué le Ministre adjoint de la justice.

M. Asatryan a ensuite rappelé que la loi sur les indemnisations avait été revue et a indiqué que quatorze affaires en première instance ont donné lieu à une indemnisation pour dommages non pécuniaires.

Le Ministre adjoint a d’autre part fait valoir qu’une nouvelle unité de huit enquêteurs avait été créée au sein de l’Unité spéciale d’enquête afin d’enquêter sur tous les cas de mauvais traitements imputés à des agents de l’État. Des mesures ont été prises pour assurer l’indépendance de cette unité, a-t-il souligné.

Tous les rapports émanant du Comité européen (du Conseil de l’Europe) pour la prévention de la torture (CPT) ont été publiés dans le pays, ce qui prouve la bonne coopération du pays avec les organes conventionnels des Nations Unies, a ajouté le chef de la délégation arménienne.

Le pays a redoublé d’efforts dans la lutte contre les violences intrafamiliales a poursuivi M. Asatryan.  Il n’existe pas d’infraction spécifique couvrant ce type de violences, mais toute violence physique et psychologique peut être poursuivie devant la justice, a-t-il souligné. Les autorités arméniennes étudient actuellement l’opportunité d’intégrer dans le Code pénal une infraction distincte de violence intrafamiliale, a précisé le Ministre adjoint de la justice.

Un poste de juge spécialisé dans la justice juvénile a été créé au sein des tribunaux de première instance, a poursuivi le chef de délégation.

Les conditions de vie dans les centres de détention ont été améliorées, a ensuite assuré M. Asatryan.  Des travaux d’agrandissement de certains centres pénitentiaires ont permis de lutter contre la surpopulation carcérale.  Le CPT, lors de sa dernière visite dans le pays, a constaté des progrès dans ce domaine, a fait valoir le Ministre adjoint.
L’emprisonnement est aujourd’hui une peine de dernier recours et l’actuel projet de Code de procédure pénale, une fois adopté, réduira effectivement le recours aux peines d’emprisonnement, a ajouté M. Asatryan.  Le 4 juillet 2016, le Service de liberté conditionnelle a vu le jour; il doit permettre une meilleure réinsertion des anciens détenus, a-t-il indiqué. 

Enfin, les services de santé ont été modernisés au sein des centres de détention, a déclaré le Ministre adjoint de la justice, soulignant qu’il s’agissait d’une priorité pour le Gouvernement.  Tous les lieux de privation de liberté font l’objet d’un suivi par le Défenseur des droits de l’homme, a conclu M. Asatryan.

 
Examen du rapport


Questions et observations des membres du Comité


M. SEBASTIEN TOUZE, rapporteur du Comité pour l’examen du rapport de l’Arménie, s’est félicité des nombreuses modifications apportées à la législation interne suite aux dernières recommandations du Comité.  Il faut cependant que ces modifications aient des répercussions pratiques sur le terrain, a-t-il souligné.

Le rapporteur a relevé que la révision du Code pénal opérée en juin 2015 avait permis de reprendre les dispositions de la Convention concernant, notamment, l’incrimination de la torture.  Il a toutefois déploré l’absence d’information précise sur les poursuites engagées et condamnations  prononcées pour de tels actes suite à cette modification.  Les associations de la société civile remettent en cause la pertinence pratique de ces changements, a fait observer M. Touzé.

Le nouveau Code de procédure pénale n’est pas encore entré en vigueur et il est en discussion depuis plus de six ans, a poursuivi le rapporteur, déplorant que les réformes en discussion servent souvent d’arguments massues permettant de couper court à toute discussion sur les questions en jeu.  Il a souhaité savoir quand le nouveau Code de procédure pénale entrerait en vigueur et si cela interviendrait avant les élections prévues en 2017.

Le rapporteur a par ailleurs souhaité savoir si l’imprescriptibilité du crime de torture était inscrite dans le droit arménien.  Il a ensuite estimé qu’en Arménie, les peines encourues pour acte de torture n’étaient pas en adéquation avec la gravité de cet acte.

M. Touzé a d’autre part demandé si le droit interne arménien prévoyait une compétence des juridictions de l’État pour poursuivre des personnes s’étant livrées à des actes de torture hors du territoire arménien. Cette question est importante pour les éventuels cas de torture commis dans des territoires sur lesquels l’Arménie exerce un contrôle effectif, comme le Haut-Karabakh, a souligné le rapporteur.

M. Touzé s’est ensuite enquis du nombre de cas dans lesquels les tribunaux ont jugé irrecevables en tant que preuves des aveux obtenus sous la torture.  Qu’en est-il également du nombre de révisions de condamnations fondées sur de tels aveux?

Le rapporteur a par ailleurs relevé que le champ d’application de la législation permettant de poursuivre des agents de la fonction publique qui se seraient livrés à des actes de torture ne permet pas d’envisager que cette législation soit invoquée pour poursuivre des agents des établissements pénitentiaires ou des membres des forces armées, par exemple.

M. Touzé a en outre rappelé que les autorités ont l’obligation d’empêcher la violence contre les femmes, y compris dans le contexte domestique. Il s’est enquis des mesures prises pour lutter contre les stéréotypes sexistes encore bien ancrés dans le pays.  Les femmes et les enfants sont encore soumis à des abus en tous genres, a-t-il souligné, avant de s’enquérir des mesures de protection prévues pour ces victimes.

M. Touzé a souhaité recevoir de la délégation un état des lieux de la question des avortements sélectifs – une pratique courante dans le pays.  L’Arménie est le troisième pays au monde à pratiquer l’avortement sélectif au prorata de sa population, avec comme conséquence un ratio record de 114 garçons pour 100 filles, a insisté le rapporteur.  Il s’est enquis des mesures prises pour limiter cette pratique.

De nombreux actes de torture sont observés et dénoncés en Arménie, a poursuivi le rapporteur.  De nombreux rapports émanant de la société civile font état de la persistance de pratiques prohibées, notamment dans le cadre d’arrestations, de détentions ou d’interrogatoires, a-t-il souligné.

M. Touzé a par ailleurs regretté l’absence de justice spécialisée pour mineurs en Arménie.  Il s’est donc enquis de la durée légale maximale de la détention préventive de mineurs.  Il a relevé que les mineurs pouvaient être soumis à l’isolement pendant plus de dix jours à titre de sanction.  Il s’est en outre enquis des mesures prévues pour surveiller la situation des enfants placés dans des pensionnats spéciaux et des établissements fermés ou partiellement fermés.

M. Touzé a ensuite demandé des renseignements sur le nombre de décès de soldats en dehors du combat et sur le nombre de cas de bizutage ou autres mauvais traitements infligés par des officiers sur d’autres soldats.

Le rapporteur a d’autre part souhaité savoir pourquoi sur les 784 cas de violence familiale enregistrés par les autorités, 634 n’ont donné lieu à aucune poursuite.

Le rapporteur a également souhaité avoir davantage d’informations sur les plaintes déposées pour actes de torture ou mauvais traitements imputés aux agents de forces de l’ordre et a demandé si les familles des victimes avait reçu une réparation adéquate.

Entre juillet 2015 et décembre 2015, 75 affaires ont été portées à la connaissance du Service d’enquête spéciale, mais 30 seulement de ces affaires ont donné lieu à des enquêtes, a poursuivi M. Touzé.  Il s’est demandé si une corruption importante dans le système de justice ne permettait pas d’expliquer en partie ces chiffres et si l’indépendance des magistrats chargés d’instruire ces affaires était une réalité.

Le rapporteur s’est en outre inquiété de nombreux retards dans la pratique d’examens médicaux, aboutissant à la disparition de preuves importantes, les blessures sur les corps des victimes ayant disparu avant que l’examen médical légal n’ait été réalisé.

M Touzé a regretté l’absence de base juridique permettant le séjour en Arménie pour les personnes qui ne peuvent pas être refoulées mais qui ne satisfont pas aux exigences de la définition de réfugié en vertu de la loi arménienne sur les réfugiés et l’asile. Il s’est également enquis des conditions d’accueil réservées par les autorités aux réfugiés.

M. Touzé a ensuite indiqué que le Comité avait reçu des informations faisant état de violations importantes des garanties fondamentales, dont celles associées au droit d’avoir accès à un avocat et à un médecin et au droit de contacter des proches dès la privation de liberté. Qu’en est-il des enregistrements audio et vidéo dans les salles d’interrogatoire des commissariats et centres de détention de la police, a-t-il demandé?

Le rapporteur s’est par ailleurs enquis des mesures concrètes prises pour réduire le nombre et la durée des détentions préventives, soulignant notamment que la détention préventive avait des répercussions graves sur la santé des détenus.
M. Touzé a souhaité avoir des clarifications concernant plusieurs actes de violences à l’encontre de journalistes et de défenseurs des droits et a demandé si des enquêtes avaient été ouvertes pour faire la lumière sur ces affaires.  Il s’est en outre inquiété de rapports faisant été de violences subies par des personnes LGBTI et des défenseurs des droits de ces personnes.

Enfin, M. Touzé a demandé à la délégation quand serait mis en œuvre le nouveau cadre législatif concernant la réparation pour les victimes de torture.

MME ANA RACU, corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport de l’Arménie, a souhaité en savoir davantage sur la formation des juges, des procureurs et des agents de la police aux dispositions de la Convention.  Le personnel médical reçoit-il systématiquement une formation relative au Protocole d’Istanbul existe-t-il un outil de suivi global de l’ensemble de ces formations?  Qu’en est-il également de la formation concernant la prévention de la torture et le recours à la force chez les militaires, a demandé la corapporteuse?

Mme Racu s’est ensuite enquise du fonctionnement du Défenseur des droits de l’homme, faisant observer qu’aujourd’hui, c’est à titre bénévole qu’il devait réaliser les visites dans les centres de détention.

Quels sont les mandats et les priorités du nouveau Conseil d’experts sur la prévention de la torture, a par ailleurs demandé Mme Racu?

La corapporteuse a salué les avancées positives enregistrées par l’Arménie concernant les conditions de vie des détenus, se félicitant notamment de la construction d’une nouvelle prison.  Elle a toutefois relevé que les douze prisons du pays accueillaient plus de 5000 détenus pour 4400 places disponibles, ce qui s’explique notamment par le recours très important à la détention préventive. Mme Racu a ensuite dénoncé le recours à la violence généralisée et aux mauvais traitements à l’encontre des détenus et a relevé que les détenus homosexuels ou condamnés pour des délits sexuels devaient se livrer à des tâches humiliantes.  L’experte a aussi regretté que le manque de ressources humaines au sein des prisons donnait de fait du pouvoir aux meneurs parmi les prisonniers, ce qui constitue une menace pour la sécurité et est à l’origine d’une situation explosive au sein des établissements pénitentiaires. Elle a souhaité savoir si les autorités envisageaient un recrutement de personnels pénitentiaires.

Mme Racu a ensuite souhaité en savoir davantage sur le programme de réinsertion proposé aux anciens prisonniers et s’est enquise des formations professionnelles auxquelles ils avaient accès.

La corapporteuse a par ailleurs regretté que la confidentialité des examens médicaux ne soit pas garantie dans les prisons et les commissariats.  Le personnel de santé concerné ne demande pas explicitement les raisons des traces de lésions visibles sur le corps des détenus et lorsque la question leur est posée, les détenus lui fournissent des explications stéréotypées en invoquant un accident, a ajouté Mme Racu.  Elle s’est en outre enquise des mesures prises pour limiter la propagation des maladies transmissibles au sein des établissements pénitentiaires.

Mme Racu a par ailleurs souhaité savoir combien de mineurs étaient emprisonnés et combien étaient placés à l’isolement dans le pays.

La corapporteuse a en outre demandé s’il existait un mécanisme de dépôt de plaintes auprès du Service d’enquête spéciale en regrettant que ce Service ne soit pas impliqué directement lors du dépôt plaintes pour mauvais traitements imputés à la police.

La corapporteuse s’est également enquise des mesures prises pour garantir réparation et indemnisation aux victimes d’actes de torture ou de mauvais traitements.  Elle a regretté qu’il n’y ait pas de centre de réhabilitation (pour les victimes) en Arménie.

Mme Racu s’est en outre enquise des mesures prises pour prévenir la traite des personnes en Arménie et pour lutter contre la stigmatisation des victimes.  Elle a souhaité savoir si les juges, les procureurs et les services d’immigration étaient suffisamment formés au droit pénal concernant la traite et à l’approche sexospécifique s’agissant de cette question.

La corapporteuse a d’autre part regretté que les personnes LGBTI soient victimes de discriminations, de harcèlements et d’agressions en Arménie.  Elle a souligné qu’aucune mesure pour garantir la sécurité de ces personnes et pour promouvoir la tolérance à leur égard n’avait été prise par les autorités arméniennes.  L’accès à la justice est difficile pour les toxicomanes, les personnes victimes de handicaps sociaux et les personnes LGBTI, a-t-elle ajouté.

Un autre membre du Comité a demandé à la délégation comment fonctionnait le système informatisé de lutte contre la corruption.

Une experte a souhaité avoir des éclaircissements sur les dispositions permettant de garantir l’indépendance du judiciaire.  Cette même experte a souligné qu’il n’y avait pas de protection pour les enfants victimes de la prostitution et qu’au contraire, ceux-ci sont soumis à des amendes administratives.

Un expert a souhaité connaître le salaire d’un gardien de prison et savoir si ce salaire suffisait à lui garantir une vie décente ou bien s’il avait alors besoin de revenus complémentaires pour pouvoir avoir un mode de vie digne.  Ce même expert a en outre souhaité avoir des informations complémentaires concernant les nombreux cas de suicides de détenus dans les prisons arméniennes.

Réponses de la délégation


Le projet de nouveau Code de procédure pénale est toujours à l’étude, a indiqué la délégation, précisant qu’il devrait être soumis en première lecture au Parlement en décembre de cette année – c’est-à-dire le mois prochain – et que le nombre d’amendements qui seront proposés sur ce texte déterminera le calendrier pour la soumission finale en deuxième lecture.

C’est dans ce projet de nouveau Code qu’est inscrite la disposition qui prévoit l’imprescriptibilité pour les crimes de torture, a indiqué la délégation.

Concernant la question de la compétence extraterritoriale, la délégation a expliqué que la République du Haut-Karabakh avait adopté sa propre législation valable pour son territoire. La République dispose également d'un système judiciaire indépendant.  L’Arménie n’a aucun pouvoir sur les tribunaux du Haut-Karabakh, a ajouté la délégation arménienne.

Il n’y a pas en Arménie de disposition juridique qui prévoie de suspendre les poursuites lorsqu’est ouverte une enquête visant à déterminer la recevabilité d’aveux qui pourraient avoir été recueillis sous la torture.  Mais dans les faits, les tribunaux repoussent la procédure en attendant qu’une telle enquête ait abouti, a fait valoir la délégation.

À ce jour, 100 des 119 mesures envisagées par le Plan national d’action pour les droits de l'homme 2014-2016 ont été mises en œuvre et les 19 autres devraient être mises en œuvre d'ici la fin de l'année, a indiqué la délégation. Le Ministère de la justice élabore actuellement le Plan national d'action pour les droits de l'homme pour la période 2017-2019, avec la collaboration de la société civile, a-t-elle ajouté.

En matière de prévention contre la torture, les autorités vont mettre en place en 2017 un projet pilote qui prévoit d’installation de caméras de vidéo-surveillance dans certaines salles d’interrogatoire des commissariats de police, a indiqué la délégation.

Des amendements ont été apportés au Code civil qui ont permis d’étendre le champ des situations dans lesquelles une indemnisation pour dommages non pécuniaires peut être obtenue, a d’autre part indiqué la délégation.  Si, à la suite d’une action ou d’une inaction de l’État, il y a eu violation des droits fondamentaux, un individu peut réclamer une indemnisation pour dommages non pécuniaires.  Les dommages non pécuniaires font l’objet d’une indemnisation quelle que soit la responsabilité de l’agent de l’État.

La formation aux dispositions de la Convention est obligatoire pour les juges, les agents de police et l’ensemble du personnel lié aux centres de détention, a par ailleurs souligné la délégation. De plus, l’ensemble du personnel pénitentiaire doit suivre une formation au Manuel dit «Protocole d’Istanbul».

Le projet de loi sur le Médiateur en est au stade de la première lecture au Parlement, a poursuivi la délégation.  Sur base de ce projet, l'Arménie a élaboré des lignes directrices et des méthodologies pour assurer le contrôle des lieux de détention. Une fois qu’aura été adopté ce projet de loi, les lignes directrices devront à leur tour être adoptées par le Médiateur, mettant ainsi en œuvre le Mécanisme national de prévention (de la torture).

Le problème de la surpopulation carcérale est au cœur de l’attention du Gouvernement, a ensuite assuré la délégation.  Le projet de nouveau Code pénal insistera plus fermement sur le principe qui prévoit que l’emprisonnement doit être une peine de dernier recours, a-t-elle indiqué.  Ce projet doit permettre de promouvoir davantage les libertés conditionnelles et les peines alternatives à l’emprisonnement. De même, des travaux sont en cours dans les prisons afin d’en augmenter la capacité et d’améliorer les conditions de détention, a ajouté la délégation. Diverses mesures d’hygiène et de lutte contre les épidémies ont été prises dans toutes les prisons du pays, a-t-elle fait valoir.  Des campagnes de désinsectisation, de lutte contre les parasites et de dératisation sont menées chaque année, a-t-elle insisté.

Il n’existe pas de statistiques officielles sur le phénomène d’automutilation chez les détenus, a en outre indiqué la délégation. En 2015, il n’y a pas eu de cas de violences entre les détenus, a-t-elle ajouté.

Le Gouvernement s’efforce d’instaurer un environnement sain au sein des prisons, a poursuivi la délégation.  Des mesures disciplinaires sont prises contre tout prisonnier qui tenterait d’instaurer une hiérarchie officieuse parmi les détenus, a-t-elle expliqué. 

Les personnes placées en détention préventive et celles qui sont condamnées sont séparées, a par ailleurs assuré la délégation.

Des psychologues ont visité certaines prisons dans le but d’apporter une aide psychologique aux détenus et ce processus va se poursuivre pour s’étendre à l’ensemble des prisons du pays, a en outre indiqué la délégation.

La délégation a relevé qu’il y avait eu 26 cas de décès en prison, dont huit suicides. La plupart de ces détenus sont décédés suite à une maladie, a-t-elle précisé.

Dans le passé, il y a eu des cas de pénurie de personnel pénitentiaire, mais la situation tend à se résorber grâce à différentes campagnes de recrutement, a d’autre part indiqué la délégation, avant de faire valoir que les barèmes de salaires du personnel pénitentiaire avaient été augmentés.

Des activités sont proposées à l’ensemble des détenus, y compris à ceux qui sont condamnés à perpétuité, a d’autre part indiqué la délégation.

La délégation a souligné que des mesures avaient été prises pour assurer un dépistage des détenus à leur arrivée en prison. Un premier examen médical est réalisé dès le début de la détention pour rendre compte de toute éventuelle lésion corporelle. Cet examen se fait en toute confidentialité, sans la présence du moindre membre du personnel pénitentiaire ni d’agents de police.  Si des lésions corporelles sont détectées et qu’elles sont dues à des mauvais traitements, le médecin fait un rapport aux autorités compétentes, comme le prévoit la procédure en la matière qui est inscrite dans la législation nationale.  Le Registre électronique des informations sur les détenus a été créé et comprend tous les renseignements pertinents concernant les détenus, qu’ils se trouvent placés en détention provisoire ou qu’ils aient été condamnés. Les antécédents médicaux de tous les détenus ont été enregistrés comme le prévoit le Protocole d'Istanbul, a insisté la délégation.  Depuis 2004, un programme de prévention du VIH/sida a été mis en œuvre, a-t-elle ajouté.  Des mesures visant à lutter contre la tuberculose sont actuellement appliquées dans les prisons, a-t-elle également souligné.

La délégation a par ailleurs indiqué que des préservatifs étaient distribués dans les prisons et que des produits de substitution tels que la méthadone sont mis à disposition des détenus toxicomanes.

La délégation a ensuite expliqué que les formations à l’intention des fonctionnaires qui traitent des mineurs en conflit avec la loi étaient une priorité pour les autorités arméniennes. 

Sept mineurs se trouvent actuellement en détention et en 2016, seuls deux ont été placés à l’isolement, a indiqué la délégation.  Pour les détenus mineurs, la mise à l’isolement ne peut excéder 10 jours, a-t-elle précisé. 

Il n’y a pas d’obligation légale d’enregistrer les interrogatoires de mineurs, a d’autre part souligné la délégation.

La délégation a assuré que l’adoption d’une législation anti-discrimination reprenant tous les motifs de discrimination était une question prioritaire pour le pays ; un tel texte est en cours de rédaction.

La délégation a fait observer qu’il n’y avait pas eu d’amnistie, ni de grâce prononcées pour des auteurs de torture.

La délégation a ensuite énoncé une série d’affaires judiciaires impliquant des cas de torture commis par des agents de l’État et des affaires concernant des cas d’intimidations, de harcèlements ou de violence à l’encontre de journalistes.

Des réformes devraient permettre de renforcer le cadre des enquêtes concernant des décès dans l’armée et des cas de bizutage, a d’autre part indiqué la délégation.  Depuis 2014, a-t-elle précisé, le département de la police a enquêté sur 81 cas de décès dans l’armée en dehors des combats et 37 affaires pénales sont en cours.

La délégation a relevé que ces cinq dernières années, le nombre d’enquêtes pénales et de poursuites engagées suite à des plaintes concernant des violences domestiques a été multiplié par deux. Cela prouve que les autorités ont pris ce problème très au sérieux, a souligné la délégation.

La délégation a ensuite expliqué que des mécanismes contre les violences domestiques, axés sur la prévention, la protection et les poursuites, étaient prévus dans le Plan national d’action pour les droits de l’homme. Une loi d’assistance sociale est en cours de préparation; elle prévoit notamment une définition de la violence au foyer, a ajouté la délégation. Un autre projet loi prévoit quant à lui la création de centres d’accueil qui permettraient de prendre en charge les victimes de violences domestiques.

La délégation a souligné que l’Arménie entendait à intégrer les réfugiés dans la société malgré les difficultés socioéconomiques que traverse le pays.  L’Arménie accueille beaucoup de réfugiés provenant d’Irak, d’Azerbaïdjan ou de Syrie, a-t-elle affirmé.  Il n’y a pas eu de changements concernant la procédure de demande d’asile, a-t-elle ensuite fait observer, assurant que les critères n’ont pas été durcis.  Certains réfugiés peuvent avoir accès à la nationalité arménienne et obtenir, notamment, des bourses d’études, a ajouté la délégation.

La délégation a d’autre part expliqué que la législation interdisait les avortements liés au choix du sexe de l’enfant.  Les professionnels de la santé qui enfreignent la loi s’exposent à des sanctions, a-t-elle insisté.  Les autorités ont mis en place un travail de sensibilisation auprès de la population, qui a eu comme conséquence la baisse de ce type d’IVG ces dernières années, a ajouté la délégation.

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