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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité des droits de l'enfant examine le rapport du Sénégal

Situation des enfants au Sénégal

12 Janvier 2016

GENEVE (12 janvier 2016) - Le Comité des droits de l'enfant a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport présenté par le Sénégal sur les mesures prises par ce pays pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant.

Présentant le rapport de son pays, M. Mame Baba Cissé, Représentant permanent du Sénégal auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, a notamment indiqué qu’un projet de loi portant code de l’enfant devrait être finalisé dans les meilleurs délais.  Le Plan Sénégal Émergent place les enfants parmi les bénéficiaires prioritaires de la politique nationale de protection sociale, a-t-il en outre fait valoir, avant d’assurer que le Sénégal a enclenché une véritable «révolution» dans le domaine de la promotion et de la protection des droits de l’enfant. La Stratégie nationale de protection de l’enfant repose sur trois piliers essentiels, a-t-il précisé: la prévention contre toutes les formes de maltraitance, d’exploitation et de violence; la prise en charge effective des cas par la facilitation des synergies et des coopérations sociales; et la promotion de tous les droits par la création et la consolidation des liens avec les autres systèmes. M. Cissé a convenu que l’un des défis les plus importants de cet ambitieux chantier demeure la mise en place d’un mécanisme consensuel de concertation et de coordination intersectorielle. Dans cette optique, a-t-il précisé, a été créé le Comité intersectoriel national de protection de l’enfant (CINPE), organe de pilotage de la Stratégie nationale.

M. Cissé a reconnu qu’en dépit de tous ces progrès, de nombreux défis subsistent. Des phénomènes comme la mendicité des enfants, la traite et le travail des enfants, le non-enregistrement des enfants à l’état civil, les mariages d’enfants et d’autres formes de violence continuent d’affecter des milliers d’enfants, surtout ceux établis en milieu rural. La mise en œuvre du Programme national de bourses de sécurité familiale, le Programme de la couverture maladie universelle ou encore le Programme de promotion de la carte d’égalité des chances pour les personnes handicapées sont autant d’initiatives visant à améliorer le sort des enfants, a fait valoir le Représentant permanent, avant d’ajouter que l’adoption prochaine du code de l’enfant permettrait de lever toutes les difficultés liées à l’application rigoureuse des lois en matière de droits de l’enfant. Enfin, l’instauration du Défenseur des enfants et la relance du Parlement national des enfants permettront de parachever le dispositif institutionnel, a conclu M. Cissé.

La délégation sénégalaise était également composée, entre autres, de représentants du Ministère de la femme, de la famille et de l’enfance et du Ministère des affaires étrangères; de la Direction des droits, de la protection de l’enfance et des groupes vulnérables; du Centre national d’état civil; de la Direction de l’éducation surveillée et de la protection sociale; ainsi que de deux fonctionnaires chargés de programmes auprès, respectivement, de la Cellule d’appui à la protection de l’enfance et de la Direction de la santé, de la reproduction et de la survie de l’enfant.

La délégation a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, notamment, de l’enregistrement des naissances; de l’interdiction des châtiments corporels, en particulier dans les écoles coraniques; des conditions régissant l’obtention de la nationalité sénégalaise; de l’âge nubile; des questions de santé génésique; de la justice pour mineurs; du Parlement des enfants; de la prise en charge des enfants handicapés; des pratiques traditionnelles néfastes; ou encore des enfants talibés forcés à mendier.

Corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Sénégal, Mme Suzanne Aho Assouma a reconnu que le Sénégal s’est doté de nombreuses lois aux fins de la promotion des droits de l’enfant, mais elle s’est interrogée au sujet de leur mise en œuvre effective. D’une manière générale, elle a déploré le manque de statistiques concernant les enfants. La corapporteuse a par ailleurs relevé les disparités existantes en matière d’enregistrement des naissances entre les zones urbaines et les zones rurales, 80% des naissances étant enregistrées dans les premières, contre 50% dans les secondes. Elle s’est en outre étonnée que les femmes enceintes ne bénéficient que d’un seul rendez-vous de suivi durant la totalité de leur grossesse.

Mme Amal Salman Aldoseri, corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport sénégalais, s’est inquiétée que les châtiments corporels semblent permis dans certains cadres. Elle a par ailleurs constaté que, selon le rapport, 39% des jeunes filles sont mariées dès l’âge de 18 ans et 10% dès l’âge de 15 ans. La corapporteuse a d’autre part réitéré la préoccupation du Comité s’agissant des enfants talibés forcés à mendier dans les rues du Sénégal ; elle a rappelé qu’à l’issue de l’examen du précédent rapport sénégalais, en 2006, le Comité avait recommandé au pays de redoubler d’efforts pour éradiquer ce phénomène.

Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport du Sénégal, qu’il rendra publiques à l’issue de la session, qui doit clore ses travaux le vendredi 29 janvier prochain.

Le Comité entamera cet après-midi, à compter de 15 heures, en salle XXIV du Palais des Nations, le rapport de la Lettonie (CRC/C/LVA/3-5).


Présentation du rapport du Sénégal

Le Comité est saisi du rapport périodique du Sénégal (CRC/C/SEN/3-5, ainsi que des réponses  de ce pays (CRC/C/SEN/Q/3-5/Add.1) à la liste de points à traiter que lui a adressée le Comité (CRC/C/SEN/Q/3-5).

Présentant ce rapport, M. MAME BABA CISSE, Représentant permanent du Sénégal auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, a rappelé que son pays a été l’un des premiers États à adhérer sans réserve à la Convention relative aux droits de l'enfant.  Depuis lors, le Sénégal s’attache à rendre régulièrement compte des efforts inlassables qu’il déploie pour matérialiser son engagement à bâtir une société digne de ses enfants.  Relevant que le Sénégal a souvent été interpellé sur les questions ayant trait à l’amélioration de la législation et aux mécanismes de coordination des services, M. Cissé a indiqué qu’un projet de loi portant code de l’enfant devrait être finalisé dans les meilleurs délais.  Quant aux mécanismes de coordination, ils devraient être consolidés par le renforcement des capacités des organes en charge de la protection et de la promotion des droits de l’enfant et plus précisément par la définition exacte de leurs mandats et rôles et par leur dotation en personnel dûment formé.

Depuis quelques années, a poursuivi le Représentant permanent, l’État du Sénégal s’attèle sans relâche à surveiller et à améliorer les indicateurs qui renseignent sur le degré d’attention porté à la matérialisation des différentes recommandations du Comité.  Ce souci constant apparaît clairement dans les orientations stratégiques du Plan Sénégal Émergent, qui place les enfants parmi les bénéficiaires prioritaires de la politique nationale de protection sociale.  Cette ambition apparaît tout aussi clairement dans la volonté manifeste des pouvoirs publics de recentrer la politique nationale de protection de l’enfance, a insisté M. Cissé.  Dans ce sens, a été initié un vaste chantier de diagnostic du secteur à travers une étude exhaustive des principales lacunes qui affectent la mise en œuvre des engagements souscrits en vertu de la Convention; cette étude, intitulée «Cartographie et analyse des systèmes de protection de l’enfant au Sénégal», a permis de procéder à un état des lieux approfondi de la réalisation des droits des enfants au Sénégal et de relever des difficultés comme, par exemple, l’insuffisance des services offerts aux enfants, l’absence d’un leadership fort dans le secteur de la protection de l’enfance ou encore l’absence d’un système national de gestion de l’information et d’une base de données.  Suite à cette étude et à l’adoption subséquente d’une Stratégie nationale de protection de l’enfant à l’issue d’un conseil interministériel tenu en 2013, le Sénégal a enclenché une véritable «révolution» dans le domaine de la promotion et de la protection des droits de l’enfant. Cette Stratégie repose sur trois piliers essentiels: la prévention contre toutes les formes de maltraitance, d’exploitation et de violence; la prise en charge effective des cas par la facilitation des synergies et des coopérations sociales; et la promotion de tous les droits par la création et la consolidation des liens avec les autres systèmes, pour le déroulement d’une vaste offensive nationale de protection et de promotion des droits de l’enfant.

M. Cissé a convenu que l’un des défis les plus importants de cet ambitieux chantier demeure la mise en place d’un mécanisme consensuel de concertation et de coordination intersectorielle. Dans cette optique, a-t-il précisé, a été créé le Comité intersectoriel national de protection de l’enfant (CINPE), organe de pilotage de la Stratégie nationale composé de représentants des structures étatiques, des collectivités locales, des organisations de la société civile et des partenaires techniques et financiers.  Présidé par le Premier Ministre, ce Comité intersectoriel se réunit au moins une fois par semestre, a indiqué le chef de la délégation sénégalaise.

M. Cissé a reconnu qu’en dépit de tous ces progrès, de nombreux défis subsistent. Des phénomènes comme la mendicité des enfants, la traite et le travail des enfants, le non-enregistrement des enfants à l’état civil, les mariages d’enfants et d’autres formes de violence continuent d’affecter des milliers d’enfants, surtout ceux établis en milieu rural. La mise en œuvre du Programme national de bourses de sécurité familiale, le Programme de la couverture maladie universelle ou encore le Programme de promotion de la carte d’égalité des chances pour les personnes handicapées sont autant d’initiatives visant à améliorer le sort des enfants, a fait valoir le Représentant permanent, avant d’ajouter que l’adoption prochaine du code de l’enfant permettrait de lever toutes les difficultés liées à l’application rigoureuse des lois en matière de droits de l’enfant. Enfin, l’instauration du Défenseur des enfants et la relance du Parlement national des enfants permettront de parachever le dispositif institutionnel, a conclu M. Cissé.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

MME SUZANNE AHO ASSOUMA, corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Sénégal, a reconnu que le Sénégal s’est doté de nombreuses lois aux fins de la promotion des droits de l’enfant, mais elle s’est interrogée sur l’existence de décrets d’application nécessaires à leur mise en œuvre effective.  Comment le Sénégal parvient-il à mettre réellement en pratique ses lois? Les prédateurs sexuels sont-ils effectivement arrêtés? Les enfants sont-ils effectivement protégés?

Le nouveau code de l’enfant a-t-il harmonisé l’âge du mariage pour les enfants des deux sexes, a par ailleurs demandé la corapporteuse?  Elle a en outre souhaité savoir quand ce nouveau code serait réellement adopté, soulignant qu’il s’agit là d’une préoccupation majeure du Comité.  S’agissant de la coordination de l’action en faveur des enfants, elle s’est enquise des ressources humaines et budgétaires prévues à cette fin.  Comment toutes les institutions étatiques concernées se concertent-elles et se coordonnent-elles concrètement pour protéger les droits de l’enfant, a demandé la corapporteuse?

D’une manière générale, Mme Aho Assouma a déploré le manque de statistiques concernant les enfants.  Elle a souhaité savoir combien d’enfants vivent dans la rue.  Les chiffres manquent aussi quant aux nombres d’enfants toxicomanes, de victimes d’abus sexuels, d’enfants qui effectuent les pires formes de travail ou encore d’enfants infectés par le VIH/sida.  S’agissant de ces derniers, elle a souhaité savoir combien d’entre eux avaient accès à un traitement.

La corapporteuse a par ailleurs relevé les disparités existantes en matière d’enregistrement des naissances entre les zones urbaines et les zones rurales, 80% des naissances étant enregistrées dans les premières, contre 50% dans les secondes.  Mme Aho Assouma s’est enquise des raisons de ces disparités, émettant l’hypothèse qu’il puisse s’agir d’un problème de manque de registres d’état civil. Comment ces registres sont-ils gérés?

La corapporteuse s’est étonnée que les femmes enceintes ne bénéficient que d’un seul rendez-vous de suivi durant la totalité de leur grossesse et s’est enquise des raisons de ce suivi limité: est-ce dû à la distance ou au manque de personnel?  Elle s’est également enquise de l’existence de programmes de prise en charge des fistules obstétriques.  Notant que les femmes sénégalaises ont en moyenne cinq enfants, elle a souhaité obtenir davantage d’informations sur la politique de planning familial de l’État. Enfin, alors que seulement un tiers des femmes pratiquent l’allaitement exclusif, elle s’est demandée ce qu’il en était de la sensibilisation à l’allaitement.

MME AMAL SALMAN ALDOSERI, corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Sénégal, a souhaité savoir si le droit interne interdit expressément les châtiments corporels.  Il semble que les châtiments corporels soient permis dans les foyers et dans certains centres de soins, a-t-elle relevé.  Qu’en est-il pour les enfants des écoles coraniques, a-t-elle demandé?

Se réjouissant que le rapport fasse état de l’existence d’un Parlement des enfants, Mme Aldoseri a souhaité savoir si cet organe existe toujours, s’il est présent dans toutes les régions du pays, si des décisions y sont prises et, le cas échéant, comment ces décisions s’intègrent aux autres mesures  prises en faveur des enfants.

Quant aux pratiques traditionnelles, Mme Aldoseri s’est enquise des résultats concrets du plan pour l’abandon de l’excision couvrant la période 2010-2015.

Évoquant la question des avortements clandestins, la corapporteuse a souhaité savoir s’il existait à l’intention des jeunes filles des programmes de sensibilisation à la santé génésique.  Elle a par ailleurs constaté que, selon le rapport, 39% des jeunes filles sont mariées dès l’âge de 18 ans et 10% dès l’âge de 15 ans, 2% des jeunes filles ayant par ailleurs un enfant dès l’âge de 15 ans.  Elle a souhaité savoir si le mariage des enfants est explicitement interdit par la loi et, si tel est le cas, si cette disposition est respectée.

La corapporteuse a d’autre part réitéré la préoccupation du Comité s’agissant des enfants talibés forcés à mendier dans les rues du Sénégal.  Elle a rappelé qu’à l’issue de l’examen du précédent rapport sénégalais, en 2006, le Comité avait recommandé au pays de redoubler d’efforts pour éradiquer ce phénomène; en outre, dans le cadre de son examen périodique universel devant le Conseil des droits de l’homme, le Sénégal a accepté une recommandation relative à la mendicité.   Qu’a-t-il donc été fait dans ce domaine?

Le Sénégal a par ailleurs été prié de soumettre au Comité son rapport initial sur la mise en œuvre du Protocole facultatif sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

D’autres questions ont en outre été posées à la délégation sénégalaise s’agissant, entre autres, des mesures prises pour réglementer le secteur du tourisme afin de protéger les enfants contre le tourisme sexuel ; des mécanismes mis en place pour réglementer l’adoption; de la sensibilisation des forces de l’ordre à la loi de lutte contre la traite de personnes ; de la prise en charge des enfants handicapés; des mesures prises pour retenir les filles à l’école; ou encore des progrès réalisés dans les opérations de déminage dans la région de Casamance.

Une autre experte a souhaité savoir si la Convention a été traduite dans les langues locales. Le Sénégal a-t-il évalué le niveau de connaissance que les enfants et les personnes qui s’occupent d’eux ont de la Convention?

S’intéressant à la question de la participation des enfants, une experte a déploré que des «comportements traditionnels» empêchent les enfants d’exprimer leur avis tant dans les écoles que dans les foyers et s’est enquise de ce qui est fait pour permettre aux enfants de s’exprimer plus librement.

Un membre du Comité a souhaité savoir si la principe de séparation entre détenus adultes et mineurs était respecté dans tous les lieux de détention accueillant des mineurs, que ce soit en prison ou dans les commissariats.  Si tel n’est pas le cas, quelles sont les mesures prises pour rendre cette séparation possible, a-t-il demandé?

Un autre expert s’est quant à lui interrogé sur les possibilités offertes aux enfants des écoles coraniques de porter eux-mêmes plainte contre leurs maîtres en cas de mauvais traitements.

Réponses de la délégation

S’agissant de la coordination entre les différents secteurs impliqués dans la protection de l’enfance, la délégation a expliqué que c’est le Comité intersectoriel national de protection de l’enfant qui joue le rôle d’orientation et d’impulsion de la politique nationale de protection et de promotion des droits de l’enfant au Sénégal.

En réponse à une question portant sur la collaboration entre l’Etat et la société civile, la délégation a souligné que cette collaboration fonctionne bien, la société civile complétant l’action de l’Etat et étant présente dans tous les cadres d’intervention.

Pour ce qui est de la diffusion des textes relatifs aux droits de l’enfant, une proposition a été faite à cette fin au Fonds des Nations Unies pour l'enfance pour les cinq langues nationales identifiées. Chaque année, le Sénégal célèbre le 20 novembre l’anniversaire de la Convention relative aux droits de l’enfant. Ce sont des moments privilégiés de plaidoyer et de sensibilisation aux droits de l’enfant et au contenu de la Convention ; des ateliers, des activités et des émissions spéciales sont généralement organisées, a fait valoir la délégation.

Le Parlement des enfants a été très actif jusqu’en 2006, année où il a été renouvelé pour trois ans supplémentaires. En 2009 toutefois, en raison de l’insuffisance des ressources, une léthargie s’est installée et le Parlement n’a pas fonctionné comme prévu.  Des réflexions ont été menées pour repenser tout ce processus et remettre en chantier le Parlement des enfants, pour lequel le Président de la République s’est passablement engagé, a indiqué la délégation.

L’audition de l’enfant est obligatoire dans toutes les procédures civiles et pénales dès l’âge de 15 ans, a d’autre part indiqué la délégation.  En particulier, le Code de la famille fait obligation au juge d’entendre le mineur dès l’âge de 15 ans pour toutes les procédures ayant trait à l’adoption et à l’attribution de la garde de l’enfant. Toutefois, si cette audition peut causer un traumatisme, le juge est libre de décider de ne pas entendre le mineur ou de ne l’entendre que partiellement.  Si l’enfant a moins de 15 ans, il peut être entendu, mais cela n’est pas obligatoire et dépend alors de l’appréciation du juge.

Pour ce qui est de la mise en œuvre des lois, la délégation a expliqué qu’un décret d’application est adopté dès l’approbation d’une loi ; ainsi, les lois votées sont-elles immédiatement applicables dans toutes les juridictions.

S’agissant du Code de l’enfant, la délégation a confirmé qu’il a bien été élaboré et doit maintenant être présenté au Conseil des ministres avant d’être formellement adopté.  Entre autre dispositions, ce Code prévoit l’interdiction absolue de la mendicité; il interdit de manière formelle les pratiques culturelles néfastes; et il fixe l’âge du mariage à 18 ans au lieu de 16 ans jusqu’ici.

Le nouveau Code permet aussi à l’enfant d’obtenir la nationalité sénégalaise même si un seul de ses parents la détient; de plus, il n’y a plus de distinction entre hommes et femmes puisqu’un enfant né d’une mère sénégalaise peut aussi recevoir cette nationalité.  La délégation a par ailleurs confirmé qu’un enfant trouvé au Sénégal obtient la nationalité sénégalaise s’il n’est pas possible de prouver qu’il a une autre nationalité.  Enfin, un étranger marié à une femme sénégalaise obtient la nationalité sénégalaise au bout de cinq ans de mariage; leurs enfants ont automatiquement la nationalité sénégalaise par leur mère.

La délégation s’est par ailleurs dite consciente des défis posés par le problème de la mendicité.  C’est pour cette raison qu’un Plan d’action a été élaboré afin que des mesures urgentes et efficaces soient prises pour l’éradication définitive de ce phénomène.  Ce Plan a récemment été révisé, budgétisé et soumis aux bailleurs de fond; un financement a pu être obtenu qui permettra sa mise en œuvre prochaine.  Plus généralement, la délégation a assuré le Comité de l’engagement du Sénégal à poursuivre ses efforts pour amener les partenaires et les leaders religieux à mettre en œuvre des actions concrètes visant à sortir les enfants de la mendicité.  Les aptitudes des forces de l’ordre seront renforcées du point de vue des droits de l’enfant afin qu’elles puissent servir de relais dans la lutte contre la mendicité.  Les forces de l’ordre seront en particulier formées à prendre en compte l’opinion de l’enfant ainsi que son intérêt supérieur dans toutes les décisions qu’elles prendront.

Les châtiments corporels sont formellement interdits dans les milieux scolaires, dans tous les établissements, y compris les écoles privées et les «Daara» (écoles coraniques), a expliqué la délégation.  Elle a assuré que des poursuites sont intentées contre les maîtres coraniques qui imposent des châtiments corporels à leurs disciples si ces faits sont rapportés aux autorités. Ces poursuites peuvent être initiées par les parents ou les enfants eux-mêmes, a précisé la délégation.  Le recours à la réprimande en milieu familial existe toujours dans le Code de la famille, qui permet ainsi aux parents de disposer d’un droit de correction et de réprimande sur leurs propres enfants.  Les enfants placés en institution d’accueil ne peuvent se voir infliger de châtiments corporels, a ajouté la délégation.

S’agissant de l’enregistrement des naissances, le Sénégal a créé en 2004 un centre national d’état civil chargé de coordonner toutes les activités en la matière et disposant d’un budget pour accompagner la gestion de ces activités.  Quant aux disparités entre zones rurales et urbaines en matière d’enregistrement des naissances, elles n’ont aujourd’hui plus de sens puisque toutes les communautés rurales sont devenues des communes et que l’état civil est géré à ce niveau-là.  Quant aux raisons qui expliquent pourquoi les naissances ne sont pas toutes enregistrées, elles ont trait avant tout à un manque d’accès et d’information, a ajouté la délégation, avant de préciser que des mesures sont prises pour améliorer l’accès à l’enregistrement, un plan de communication ayant notamment été lancé pour sensibiliser la population à la nécessité d’enregistrer les naissances.

Répondant à un membre du Comité qui s’inquiétait de la présence d’enfants étrangers travaillant sans protection sur le territoire sénégalais, la délégation a expliqué qu’à travers la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), un réseau « Afrique de l’Ouest » a pu être mis en place, chargé de superviser la mobilité des enfants dans la sous-région afin que soient respectées des normes minimales de prise en charge jusqu’à leur réinsertion.

Évoquant les mesures prises en faveur des enfants handicapés, la délégation a expliqué que plusieurs structures d’encadrement et de formation existent à l’intention de ces enfants.  La Carte d’égalité des chances permet en outre à ses détenteurs de bénéficier d’avantages dans l’accès aux services sociaux de base, comme par exemple la gratuité dans les transports, la réduction des frais de scolarité, l’octroi de bourses familiales ou encore l’accès à des soins de santé gratuits. Sur ce dernier point, la délégation a précisé que la gratuité des soins est assurée pour tous les enfants de 0 à 5 ans dans le cadre du Programme de la couverture maladie universelle.

Le maintien des filles à l’école est une question importante, a souligné la délégation. Aussi, les enseignants procèdent-ils chaque année à des campagnes de sensibilisation à l’intention des parents et des activités sont-elles promues afin de maintenir les filles à l’école.  Des bourses sont offertes aux jeunes filles par le Ministère de la femme, de la famille et de l’enfance, afin de les encourager à poursuivre leur scolarité, a ajouté la délégation.  La délégation a souligné que ces activités ont réussi à réduire le retrait des filles de l’école (abandon scolaire), notamment pour raison de mariage.  La délégation a en outre assuré qu’en cas de grossesse, le jeune fille peut reprendre ses études une fois sa maternité terminée, y compris dans un établissement différent pour éviter toute stigmatisation.

Le Sénégal s’est activement engagé dans la lutte contre les abus et l’exploitation sexuelle et a lancé un vaste programme de formation et de sensibilisation, en particulier dans les zones touristiques, a poursuivi la délégation.  À cet égard, les autorités ont noué des partenariats avec les professionnels du secteur touristique et des ateliers ont été organisés avec le soutien de l’organisation non gouvernementale ECPAT (End Child Prostitution and Trafficking).  Enfin, un plan d’action a été élaboré et une police touristique a été déployée pour veiller notamment au respect par les hôteliers de leur obligation de signalement de tout mineur dans leur établissement.

Invitée à fournir  un complément d’information sur les centres d’accueil publics et privés, la délégation a expliqué que les conditions d’accueil des mineurs dans ces centres sont codifiées par la loi : tout enfant doit au préalable être présenté devant le juge, une enquête spéciale est menée qui aboutit, éventuellement, à une ordonnance de garde provisoire pour confier provisoirement le mineur à un centre de l’Etat ou à un centre privé. Cette ordonnance est le document officiel sur la base duquel le mineur peut être pris en charge, a précisé la délégation, avant d’assurer que ces centres rendent compte régulièrement aux juges, lesquels en retour évaluent l’opportunité du maintien ou non du mineur dans le centre.  En outre, des inspecteurs sont chargés du suivi et de la surveillance des conditions de vie dans ces centres; ils ont compétence pour instruire l’ouverture ou la fermeture de tout centre d’accueil des enfants; leur mission inclut notamment l’encadrement du personnel, la surveillance et l’imposition de sanctions. En 2014, ces centres ont accueilli 1565 enfants en danger, dont 632 filles et 933 garçons, et 610 enfants en conflit avec la loi – 46 filles et 564 garçons.

Quant aux enfants en détention, qu’ils se trouvent en détention provisoire ou qu’ils purgent une peine, ils étaient en 2013 au nombre de 1605, dont 44 filles, a indiqué la délégation.   Ces enfants doivent être distingués de ceux qui sont recueillis dans les centres d’accueil; ils dépendent de la direction de l’administration pénitentiaire, a-t-elle précisé.  La délégation a également indiqué qu’il n’y a au Sénégal qu’une seule prison consacrée spécifiquement aux enfants; elle se trouve à Dakar et n’accueille que des garçons.  Les autres prisons du pays disposent de «carrés pour mineurs».  Les filles mineures sont détenues à la prison d’arrêt pour femmes et sont séparées des femmes majeures incarcérées. Dans aucune prison du Sénégal, les mineurs ne sont mélangés avec les détenus adultes, a assuré la délégation.  Il y a dans le pays quelque 14 tribunaux pour enfants, soit un dans chaque région, a-t-elle précisé.  Chacun d’entre eux dispose de services de protection sociale qui diligentent les enquêtes spéciales demandées par le juge.

Invitée à donner des précisions sur le dispositif de protection des mères emprisonnées avec leur enfant, la délégation a expliqué que ces mères peuvent rester avec leur enfant en prison pendant une durée maximale de trois ans.  Passé ce délai, des mesures sont prises par les services sociaux de l’Etat afin d’engager des procédures de placement alternatif de l’enfant.

S’agissant des questions de santé, la délégation a affirmé que la mortalité maternelle a été réduite grâce aux stratégies mises en œuvre par les autorités.  L’accent a été mis sur la formation du personnel de santé aux soins obstétriques et néonataux d’urgence, ainsi que sur la reconnaissance et la maîtrise des signes de danger.  Davantage de sages-femmes ont été recrutées, notamment des sages-femmes itinérantes.  La délégation a reconnu qu’actuellement, seules 40% des femmes enceintes arrivent à effectuer les quatre consultations prénatales prévues; cela s’explique par des problèmes d’accès, mais aussi par le manque de pouvoir de décision de la femme qui, parfois, ne peut se rendre à la consultation sans l’avis de son mari, de sa belle-mère ou de sa belle-sœur, a indiqué la délégation.

S’agissant des mesures prises en faveur de la prise en charge des femmes souffrant de fistules obstétriques, la délégation a expliqué qu’il existe une procédure de prise en charge et d’hospitalisation de ces femmes; en outre, une aide à la réinsertion leur est offerte, par le biais d’activités génératrices de revenus. La prise en charge et la réparation sont gratuites, a précisé la délégation.

Le planning familial a également connu des progrès, a poursuivi la délégation, faisant valoir que le taux de prévalence de la contraception se situe aujourd’hui à 27%. L’offre se situe tant au niveau privé que communautaire et une clinique mobile existe dans six régions, a précisé la délégation. Le recours à la contraception chez les filles âgées de 15 à 19 ans est faible, a toutefois reconnu la délégation.  De multiples stratégies ont été mises en œuvre pour répondre aux grossesses précoces, incluant la prise en charge des adolescences par les structures de santé et la mise à disposition d’une sage-femme, a-t-elle indiqué.  Les autorités concernées oeuvrent au développement de synergies visant à mettre en place un cadre de concertation pour la prise en charge de la santé génésique des jeunes filles.

L’avortement est formellement interdit dans le droit sénégalais, sauf en cas de grossesses non désirées découlant d’un abus, d’un viol ou d’un inceste, après autorisation par un juge, a rappelé la délégation. 

S’agissant du taux de transmission du VIH/sida de mère à enfant, la délégation a assuré que des dépistages sont menés à tous les niveaux et pendant la grossesse.  Le nombre d’enfants infectés a commencé et devrait continuer à décroître, a-t-elle fait valoir.

Des inquiétudes ayant été exprimées face à la persistance de la malnutrition au Sénégal, la délégation a fait valoir que plusieurs stratégies sont mises en œuvre pour augmenter la disponibilité et l’accessibilité des services de nutrition. Ont en outre été lancées des campagnes de promotion des bonnes pratiques en matière de nutrition.

En conclusion, la délégation a souligné que le Sénégal connaît aujourd’hui une véritable révolution dont l’objectif ultime est une meilleure prise en charge des considérations relatives aux enfants et une meilleure efficacité des activités de l’Etat en faveur des enfants.  Elle a insisté sur trois projets présentés au cours de ce dialogue, à savoir le projet de relance du Parlement des enfants, le projet de Code de l’enfant et le projet de Défenseur des enfants – qui contribueront tous trois à rendre le dispositif en place beaucoup plus efficient.  Au niveau opérationnel, des programmes importants sont mis en œuvre, a rappelé la délégation, citant notamment le Programme de bourses de sécurité familiale et le Programme pour la modernisation des «Daara».

Conclusion

La corapporteuse pour le rapport du Sénégal, MME AHO ASSOUMA, s'est félicitée de la franchise avec laquelle la délégation sénégalaise a répondu aux questions du Comité. Tout ce dialogue est dans l’intérêt des enfants, a-t-elle rappelé, avant d’exprimer l’espoir que les textes de lois pourront être appliqués. Elle a invité la délégation a répondre par écrit aux questions qui n’ont pas trouvé de réponse durant ces deux séances d’examen.

Également corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport sénégalais, MME ALDOSERI a salué les efforts déployés au Sénégal pour améliorer la réalisation des droits des enfants dans ce pays.

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