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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité des droits de l'enfant examine le rapport du Mexique

20 Mai 2015

20 mai 2015

Le Comité des droits de l'enfant a examiné, aujourd'hui, le rapport présenté par le Mexique sur les mesures prises par le pays pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant.

Le rapport a été présenté par le Sous-Secrétaire aux affaires multilatérales et aux droits de l'homme au Secrétariat des relations extérieures du Mexique, M. Juan Manuel Gómez Robledo. Il a déclaré que les faits nouveaux intervenus sur le plan juridique au Mexique et la coopération du pays avec le Comité et d'autres mécanismes internationaux de droits de l'homme témoignent de l'engagement du Mexique en faveur du plein respect des dispositions de la Convention. Mme Laura Vargas Carrillo, Directrice du Système national pour le développement intégral de la famille du Mexique, a pour sa part souligné que le pays comptait plus de 40 millions d'enfants et adolescents, dont environ 12,5% sont des autochtones. La représentante a notamment souligné que l'âge minimum d'accès à l'emploi a été porté de 14 à 15 ans et que la loi générale de 2014 sur les droits des enfants et des adolescents était l'«avancée législative la plus importante intervenue au Mexique ces 25 dernières années» en matière d'enfance. Elle a aussi fait valoir qu'entre 1990 et 2014, la mortalité infantile avait diminué de 62% pour les enfants âgés de moins de cinq ans et de 60,3% pour ceux âgés de moins d'un an. Par ailleurs, l'éducation inclusive et interculturelle a progressé, le taux de scolarisation atteignant désormais 94,4% chez les jeunes de 3 à 14 ans. Le Gouverneur de l'État de Coahuila et Coordonnateur de la Commission des droits de l'homme de la Conférence nationale des gouverneurs, M. Rubén Moreira Valdéz, est également intervenu pour faire part des efforts déployés au Mexique afin de disposer de législations étatiques harmonisées.

La délégation mexicaine était également composée, d'une Sénatrice, Mme Martha Elena García Gómez, ainsi que de représentants du Secrétariat du Gouvernement; du Secrétariat de l'éducation publique; du Secrétariat du développement social; du Secrétariat des relations extérieures; du Secrétariat de la santé; de l'Institut national des migrations; du Système national pour le développement intégral de la famille; du bureau du Procureur général de la République; et de l'État de Coahuila. Elle a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, notamment, de la torture; de la discrimination à l'égard des LGBT; de l'âge minimum du mariage; de la prévention des grossesses d'adolescentes; de la mortalité infantile; du nombre important d'enfants victimes des accidents de la route; de l'application devant les tribunaux du principe de l'intérêt supérieur de l'enfant; du sort des enfants migrants; des questions d'éducation et de santé; de l'adoption; de la pratique des mères porteuses; des cas de disparitions forcées; des enfants des rues; ou encore du travail des enfants.

Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Mexique, M. Jorge Cardona Lloréns, a attiré l'attention sur les défis qui demeurent dans certains domaines, notamment du fait que le pays compte 32 entités jouissant d'une très grande autonomie, ce qui rend difficile d'assurer que tous les enfants jouissent des mêmes droits sur l'ensemble du territoire. Certes, le Mexique s'est doté d'une excellente loi générale sur les droits de l'enfant, mais la très grande majorité des questions traitées dans cette loi relèvent non pas de l'État fédéral mais des entités fédérées sans compter des pouvoirs dévolus aux municipalités. Il s'est inquiété des barrières discriminatoires qui subsistent dans les faits à l'égard de certains groupes de populations, notamment les filles, les autochtones ou encore les personnes handicapées. La corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Mexique, Mme Sara de Jesús Oviedo Fierro, souligné que le Comité allait pouvoir aider le Mexique à rendre opérationnelle la loi générale sur les droits de l'enfant qui vent d'être adoptée. Également corapporteuse pour le rapport mexicain, Mme Maria Rita Parsi a déploré que la torture soit une pratique systématique dans tout le pays.

Le Comité adoptera, dans le cadre de séances privées, des observations finales sur le rapport du Mexique avant la fin de la session, le 5 juin prochain.

Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport présenté par le Honduras, qui soumettra des rapports au titre de la Convention (CRC/C/HND/4-5 ), ainsi que des deux Protocoles facultatifs (CRC/C/OPSC/HND/1 et CRC/C/OPAC/HND/1).

Présentation du rapport

Le Comité est saisi du rapport du Mexique (CRC/C/MEX/4-5), ainsi que de ses réponses (CRC/C/ERI/Q/4/Add.1) à la liste de points à traiter que lui a adressée le Comité (CRC/C/MEX/Q/4-5 ).

M. JUAN MANUEL GÓMEZ ROBLEDO, Sous-Secrétaire aux affaires multilatérales et aux droits de l'homme au Secrétariat des relations extérieures du Mexique, a déclaré que les faits nouveaux intervenus sur le plan juridique au Mexique et la coopération du pays avec le Comité et d'autres mécanismes internationaux dans le domaine des droits de l'homme témoignent de l'engagement du Mexique en faveur du plein respect des dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant. Attirant l'attention sur l'important réseau consulaire dont dispose le pays, il a indiqué que la coopération avec le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) avait abouti à la signature d'un accord prévoyant la fourniture de services consulaires particuliers pour les enfants migrants.

MME LAURA VARGAS CARRILLO, Directrice du Système national pour le développement intégral de la famille (SNDIF), a affirmé que, depuis les dernières rencontres qu'il a eues avec le Comité, en 2006 et 2011, le Mexique a beaucoup progressé. Pour autant, le pays a conscience des importants défis qui persistent et espère que le dialogue avec le Comité fournira des orientations utiles pour les relever.

Le Mexique compte plus de 40 millions d'enfants et adolescents, qui représentent près du tiers de la population et dont environ 12,5% sont des autochtones, a poursuivi Mme Vargas Carrillo. Elle a précisé qu'environ 1,7% des enfants de moins de 17 ans ont une forme ou une autre de handicap.

Outre la réforme constitutionnelle de 2011, qui accorde un rang constitutionnel aux droits de l'homme consacrés dans les instruments internationaux, diverses réformes ont été apportées à la charte suprême (Constitution) s'agissant de l'enfance, au nombre desquelles il convient de citer celles de 2011 et 2014 par lesquelles l'État s'est engagé à appliquer le principe de l'intérêt supérieur de l'enfant et a été reconnu le droit de toute personne d'être enregistrée immédiatement à la naissance, renforçant ainsi le droit à l'identité. Le droit à une éducation de qualité a également été intégré à la Constitution, a fait valoir Mme Vargas Carrillo. Par ailleurs, l'âge minimum d'accès à l'emploi a été porté de 14 à 15 ans, ce qui a permis d'approuver la Convention n°138 de l'Organisation internationale du travail et de réduire de 500 000 le nombre d'enfants en situation de travail infantile. L'ensemble de ces modifications constitutionnelles témoignent de la volonté de l'État mexicain de renforcer le cadre de protection des droits de l'enfant, a insisté Mme Vargas Carrillo.

Évoquant ensuite l'avancée législative la plus importante intervenue au Mexique ces 25 dernières années en matière d'enfance, Mme Vargas Carrillo a souligné que le 4 décembre dernier, la loi générale sur les droits des enfants et des adolescents avait été publiée, le Mexique ayant ainsi appliqué l'une des principales recommandations qui lui avait été adressée par le Comité et par d'autres organes conventionnels. Cette loi marque un changement profond en ce sens qu'elle reconnaît les enfants et adolescents en tant que titulaires de droits, passant du paradigme protectionniste à un accent mis sur la garantie des droits. La loi fonctionnera comme un axe autour duquel s'articuleront toutes les politiques publiques consacrées à l'enfance, tant au niveau fédéral qu'au niveau des entités et des municipalités de la République, a expliqué Mme Vargas Carrillo. Cette loi garantit la participation des enfants dans l'élaboration et l'exécution des politiques publiques affectant leurs droits. Elle prévoit en outre la création d'un bureau fédéral de Procureur pour la protection des enfants et adolescents, chargé de veiller à la protection intégrale de leurs droits et articulant les travaux des 32 bureaux du procureur existant déjà dans chacune des entités fédérées, a ajouté Mme Vargas Carrillo. Elle a également attiré l'attention sur la création du Système national de protection intégrale, dirigé par le Président de la République; ce Système est responsable d'assurer la participation de tous les secteurs dans la définition et l'application des politiques et d'assurer qu'une perspective soucieuse des droits de l'enfant soit prise en compte dans la planification nationale en faveur du développement. Un programme national de protection des enfants et adolescents sera développé, a ajouté Mme Vargas Carrillo.

D'autres progrès importants sont intervenus ces dernières années, a poursuivi Mme Vargas Carrillo, citant la loi générale sur le travail, qui énumère les tâches spécifiques interdites aux travailleurs n'ayant pas atteint un certain âge, ou encore les modifications apportées à la loi fédérale visant à prévenir et éliminer la discrimination – modifications qui ont permis d'intégrer à cette loi des mesures concernant spécifiquement les enfants et les adolescents.

Mme Vargas Carrillo a également mis l'accent sur le lancement de la Campagne nationale d'enregistrement universel, opportun et gratuit des naissances de mineurs, ainsi que sur la Stratégie nationale de prévention des grossesses adolescentes. En matière de lutte contre la pauvreté, elle a notamment souligné que quelque 6,3 millions de déjeuners quotidiens sont distribués à des enfants en âge scolaire, alors qu'un soutien alimentaire est apporté à plus de 1,8 million d'enfants et adolescents. Mme Vargas Carrillo a par ailleurs fait valoir qu'entre 1990 et 2014, la mortalité infantile avait diminué de 62% pour les enfants âgés de moins de cinq ans et de 60,3% pour ceux âgés de moins d'un an. La malnutrition a quant à elle baissé de 84% entre 2000 et 2010. Enfin, l'éducation inclusive et interculturelle a progressé, le taux de scolarisation atteignant désormais 94,4% chez les jeunes de 3 à 14 ans.

M. RUBÉN MOREIRA VALDÉZ, Gouverneur de l'État de Coahuila et Coordonnateur de la Commission des droits de l'homme de la Conférence nationale des gouverneurs, a souligné que le Mexique était un État fédéral composé de 32 entités jouissant d'une grande autonomie budgétaire. Les municipalités ont elles aussi leurs propres gouvernements, ce qui donne une idée des défis que doit relever l'État pour respecter ses obligations internationales. À cet égard, le pouvoir exécutif fédéral a redoublé d'efforts pour assurer une coordination de l'action en faveur des droits de l'homme, a-t-il souligné. M. Moreira Valdéz a fait part des efforts déployés au Mexique afin de disposer de législations étatiques (des États et entités fédérés) harmonisées, soulignant que sept entités disposent désormais de lois approuvées sur l'enfance, alors que dans seize autres entités, les congrès locaux ont engagé des initiatives de révision de la loi.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

M. JORGE CARDONA LLORÉNS, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Mexique, s'est réjoui que le pays ait retiré la réserve qu'il avait émise à l'égard du Protocole sur l'implication des enfants dans les conflits armés. Néanmoins, il conviendra ici de se concentrer sur les défis qui demeurent dans certains domaines, notamment du fait que le pays compte 32 entités jouissant d'une très grande autonomie, ce qui rend difficile d'assurer que tous les enfants jouissent des mêmes droits sur l'ensemble du territoire, a poursuivi le rapporteur. Il s'est enquis des intentions du Mexique à l'égard d'une éventuelle ratification du troisième Protocole se rapportant à la Convention, qui instaure une procédure de plaintes individuelles.

Certes, le Mexique s'est doté d'une excellente loi générale sur les droits de l'enfant, mais la très grande majorité des questions traitées dans cette loi relèvent non pas de l'État fédéral mais des entités fédérées, sans compter les pouvoirs dévolus aux municipalités, a poursuivi M. Cardona Lloréns. Or, selon ce qu'a indiqué la délégation, seules sept entités à ce stade se sont dotées de lois relatives à l'enfance.

Seul 1% du budget consacré à l'enfance est prévu pour les politiques de protection, s'est par ailleurs inquiété le rapporteur. Il a d'autre part relevé qu'il ne semble pas que des sanctions soient prévues à l'encontre des fonctionnaires qui se seraient rendus coupables de corruption.

S'agissant du principe de non-discrimination, le rapporteur s'est félicité d'une excellente loi antidiscriminatoire adoptée par le Mexique. Mais il subsiste dans le pays une discrimination de fait et M. Cardona Lloréns s'est enquis des politiques mises en place pour éliminer les barrières discriminatoires qui subsistent à l'égard de certains groupes de population, notamment les filles, trop souvent victimes de féminicides, ainsi que les autochtones ou encore les personnes handicapées. Le rapporteur a en outre fait observer que nombre de décès d'enfants sont dus à des accidents de voiture, ainsi qu'à la criminalité organisée.

M. Cardona Lloréns a en outre dénoncé la discrimination sociale contre les enfants «LGBTI» et contre les enfants de lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexe.

Le rapporteur s'est en outre inquiété de pratiques délétères persistantes au Mexique du fait que nombre d'entités fédérées établissent une différence entre les âges minima du mariage pour les jeunes filles et pour les jeunes garçons et prévoient qu'il ne saurait y avoir de viol sur mineure si le violeur épouse la victime.

MME SARA DE JESÚS OVIEDO FIERRO, corapporteuse pour l'examen du rapport du Mexique, a souligné combien ce dialogue intervient à un moment opportun alors que le Mexique vient d'adopter une loi générale sur les droits de l'enfant. Le Comité va ainsi pouvoir aider le pays à rendre cette loi opérationnelle, a-t-elle souligné. Mme Oviedo Fierro a ensuite souhaité en savoir davantage au sujet des organes et programmes de coordination de l'action en faveur de l'enfance. Comment les autorités entendent-elles garantir la participation active de la société civile, a-t-elle en outre demandé?

Mme Oviedo Fierro s'est ensuite enquise des mesures prises par les autorités pour éclaircir les faits entourant le décès à Puebla d'un jeune autochtone de treize ans (José Luis Tehuatle) qui participait à une manifestation.

MME MARIA RITA PARSI, également corapporteuse pour l'examen du rapport du Mexique, s'est félicitée de l'interdiction constitutionnelle de la torture au Mexique mais a déploré que la torture soit encore une pratique systématique dans tout le pays, commise par les forces de sécurité. Elle a aussi relevé de nombreux cas de mauvais traitements commis par le personnel éducatif dans les écoles.

Mme Parsi s'est également enquise des mesures prises pour harmoniser les législations étatiques afin de veiller à ce que la définition de la torture qui y figure soit conforme aux normes internationales. Elle a souhaité en savoir davantage au sujet des mesures prises pour réprimer et prévenir la torture dans les lieux de détention pour adolescents en conflit avec la loi.

Parmi les autres membres du Comité, une experte a souhaité savoir si des efforts avaient été faits pour assurer une meilleure conformité de la Commission nationale des droits de l'homme du Mexique avec les Principes de Paris, s'agissant notamment d'indépendance et d'impartialité. Certes, le Mexique a fait d'énormes progrès en termes d'harmonisation de la définition de l'enfant figurant dans sa législation avec celle énoncée à l'article premier de la Convention; mais des informations seraient encore bienvenues s'agissant des âges minima, notamment pour ce qui est du consentement à un traitement médical. Elle a ajouté que de nombreuses informations faisaient état d'actes de torture et de traitements cruels, inhumains ou dégradants et a voulu savoir quelles suites ont été données à ces actes sur le plan judiciaire. Elle s'est par ailleurs inquiétée que les violences sexuelles à l'égard des enfants, notamment des jeunes filles, donnent rarement lieu à des poursuites et condamnations.

Un membre du Comité a déploré que les châtiments corporels continuent à être pratiqués pour «élever les enfants».

Une experte a souhaité savoir comment les autorités mexicaines garantissaient le maintien d'un contact entre enfants et parents lorsque les parents sont placés en prison. Il n'y a pas de réglementation uniforme, dans les différentes entités fédérées, des institutions où peuvent être placés des enfants, a par ailleurs fait observer cette experte. Elle a aussi demandé de quelle façon ces institutions étaient supervisées. L'experte s'est en outre enquise des mesures prises en faveur de la protection des migrants mineurs non accompagnés dont bon nombre traversent le Mexique pour aller retrouver leurs parents aux États-Unis.

Le Mexique serait l'un des principaux producteurs de matériel pornographique mettant en scène des enfants et l'une des principales destinations du tourisme sexuel, a quant à elle souligné une experte. Elle s'est en outre inquiétée des nombreux cas de traite à des fins d'exploitation d'enfants par le travail ainsi que des cas d'abus sexuels par des religieux, avant de s'enquérir de ce que font les autorités pour lutter contre ces pratiques. Il existe dans le Code pénal fédéral un délit de pédérastie, a-t-il été souligné; aussi, les abus sexuels de ce type imputables à des religieux relèvent-ils de ce délit et sont-ils poursuivis à ce titre, a-t-il été demandé?

Un membre du Comité s'est inquiété du grand nombre d'enfants handicapés placés dans le système d'éducation spéciale au lieu d'être intégrés dans le système scolaire ordinaire. Il a en outre déploré le maintien au Mexique d'une approche du handicap fondée sur l'assistance et non sur les droits des personnes handicapées. L'expert a également regretté que les autorités adoptent une approche essentiellement pénale de la lutte contre la toxicomanie et que l'abus de drogues soit donc criminalisé. Il a par ailleurs fait observer qu'en dépit d'une amélioration, le taux de mortalité maternelle reste élevé. Le pourcentage d'enfants pauvres au Mexique est scandaleux, a également déclaré cet expert, avant de s'enquérir des mesures prises pour remédier à cette situation. Il a également dénoncé les épandages de produits toxiques sur des terres agricoles du peuple yaqui par des avions, affectant nombre d'enfants et provoquant cancers et leucémies.

Un système d'enregistrement des données permet-il de connaître le nombre d'enfants victimes de violences et d'abus au Mexique, a demandé un membre du Comité? Le pays est-il confronté à un phénomène grave de disparitions forcées et, le cas échéant, quelles sont les mesures qui ont été prises pour prévenir et combattre ce phénomène, a également demandé l'expert? Un autre membre du Comité a fait état d'une hausse inquiétante des cas de disparitions d'enfants et de jeunes gens, s'enquérant lui aussi des mesures prises pour remédier à ce problème.

Des préoccupations ont également été exprimées au sujet de la situation des enfants des rues, dont le nombre atteindrait les 100 000 dans le pays.

Environ 2,5 millions d'enfants âgés de moins de 16 ans travaillent au Mexique, souvent dans les pires formes de travail des enfants, notamment dans le travail domestique et le travail agricole, a-t-il été fait observer, un membre du Comité souhaitant savoir si les autorités ont l'intention de renforcer les institutions chargées de traiter le problème du travail des enfants et d'appliquer les lois relativement à cette question.

La loi sur la justice juvénile au Mexique n'est pas pleinement conforme aux dispositions de la Convention, notamment pour ce qui a trait à la durée de la détention provisoire pour les jeunes délinquants, a-t-il en outre été affirmé.

La délégation a par ailleurs été interrogée sur les mesures prises afin de veiller à ce que les dispositifs mis en place en faveur des victimes de violences et d'abus soient portés à la connaissance des enfants.

Réponses de la délégation

S'agissant du troisième Protocole facultatif se rapportant à la Convention, qui instaure une procédure de plaintes individuelles, la délégation a indiqué que, du fait du caractère fédéral du pays, toute décision relative à la ratification d'un traité requiert la participation d'un nombre important d'acteurs. Elle a toutefois fait valoir que la loi générale sur les droits de l'enfant prévoit l'obligation de mettre en place des mécanismes permettant aux enfants de porter plainte et de participer aux enquêtes et procédures judiciaires (alinéa 4 de l'article 83). La possibilité de porter plainte devant les autorités et mécanismes consacrés est donc garantie aux enfants, a-t-elle insisté.

Les autorités fédérales vont insister auprès de toutes les entités fédérées afin qu'elles adoptent toutes au plus vite une législation relative aux enfants, sur le modèle d'une loi-type en la matière, a indiqué la délégation. Elle a ajouté que tous les États ont érigé en infraction les mauvais traitements infligés à l'école et prévoient des sanctions, administratives ou sous forme d'amendes.

Plusieurs membres du Comité ayant fait référence à la question de la torture, la délégation a assuré que le Gouvernement mexicain avait à cœur de disposer d'une loi qui permette, certes, d'avoir une définition de la torture, mais surtout de prendre à bras le corps le problème de la violence dans son ensemble. Le Mexique dispose notamment d'un programme de prévention de la violence en milieu pénitentiaire. Les autorités travaillent également sans relâche pour lutter contre la violence liée à la criminalité organisée, qui touche aussi les enfants, a poursuivi la délégation. La politique de prévention a permis d'obtenir de bons résultats en matière de lutte contre la violence, notamment pour ce qui est des homicides, a souligné la délégation. Elle a par ailleurs fait état d'une étude sur la violence sociale qui a été commandée afin de voir de quelle manière la violence affecte les enfants dans différents cadres.

Quant à la discrimination à l'égard des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres, la délégation a indiqué qu'au Mexique, la lutte contre ce type de discrimination figure au nombre des priorités de la politique générale en faveur de l'égalité et de la lutte contre les discriminations.

La loi générale sur les droits de l'enfant stipule que les lois fédérales comme celles des États fédérés devront fixer à 18 ans l'âge minimum du mariage, a fait valoir la délégation. Elle a d'autre part attiré l'attention sur les efforts déployés par les autorités en matière de prévention des grossesses d'adolescentes, par le biais de mesures législatives et d'interventions interinstitutionnelles. Les filles sont moins sujettes à l'abandon scolaire que les garçons, notamment grâce au système de bourses dont nombre d'entre elles bénéficient, a par ailleurs fait valoir la délégation.

Les programmes mis en place en matière, notamment, de bourses et d'alimentation ont permis à de nombreux enfants autochtones de rester plus longtemps à l'école, a par ailleurs fait valoir la délégation.

Au Mexique, quelque 24 000 décès sont causés chaque année par des accidents de la route, 30% des victimes étant des jeunes, a indiqué la délégation. Les accidents de la route constituent la première cause de décès chez les enfants et 40 à 60% de ces accidents sont dus à un abus d'alcool, a-t-elle précisé.

La délégation a de nouveau attiré l'attention sur les bons résultats enregistrés par le Mexique en matière de réduction de la mortalité infantile, le pays ayant mis l'accent sur les maladies respiratoires et diarrhéiques puisqu'elles constituaient les premières causes de décès chez les très jeunes enfants.

Répondant à d'autres questions, la délégation mexicaine a fait valoir qu'un protocole permettait d'évaluer l'intérêt supérieur de l'enfant dans les affaires de divorce et de garde d'enfants, l'intérêt supérieur de l'enfant étant dûment pris en compte dans les procédures judiciaires. Des juges sont dûment formés pour appliquer comme il se doit les dispositions de la Convention, a fait valoir la délégation.

Les autorités mexicaines sont conscientes que le délit de torture n'a pas été correctement qualifié et que très peu de peines pour ce délit sont prononcées, a déclaré la délégation. Néanmoins, un tournant radical est intervenu avec la réforme constitutionnelle considérant comme des infractions graves les violations de droits de l'homme, a-t-elle fait valoir. Dans les cas de torture, un protocole judiciaire précis est appliqué. La délégation a notamment évoqué la peine prononcée récemment dans l'affaire Martín del Campo.

La pauvreté est la cause d'une atteinte aux droits des enfants, a souligné la délégation. Aussi, un programme baptisé Prospera et bénéficiant à plus de 6,5 millions d'enfants a-t-il été mis en place, a-t-elle notamment fait valoir.

S'agissant de la situation des migrants, la délégation a assuré que les procédures administratives concernant les migrants en situation irrégulière ne sont plus aussi expéditives qu'elles l'étaient auparavant, le nombre de demandes de protection acceptées étant quatre fois plus élevé que l'année dernière.

Dans chaque État fédéré, le bureau du procureur dispose d'une unité spéciale qui s'occupe des délits concernant les migrants, a par ailleurs indiqué la délégation. Le chapitre 19 de la loi générale sur les droits de l'enfant traite spécifiquement des enfants migrants, accompagnés et non accompagnés, et des mesures spéciales prévues en leur faveur, a-t-elle souligné.

S'agissant des questions d'éducation et notamment de l'inclusion des enfants autochtones et des enfants handicapés dans le système éducatif, la délégation a affirmé qu'il reste plusieurs défis à relever en ce qui concerne la diversité, mais a souligné que la législation existante, notamment la loi sur l'éducation, stipule que tout enfant a droit à une éducation de qualité, sans discrimination. La délégation a en outre attiré l'attention sur le programme Cruzada contra el Hambre (Croisade contre la faim) dont l'objectif est de favoriser la scolarisation de tous les enfants. Un programme de bourses a également été mis en place qui favorise le maintien de nombreuses filles dans le système scolaire. Le taux de réussite des enfants autochtones s'est accru, a en outre fait valoir la délégation, soulignant en outre que de nombreuses mesures ont été prises pour lutter contre la stigmatisation dont faisaient l'objet ces enfants.

S'agissant des enfants handicapés, la délégation a notamment souligné que des manuels scolaires sont produits en braille qui permettent de disposer d'un système éducatif davantage inclusif. Des mesures sont en outre prises pour que les espaces publics et privés, y compris les établissements scolaires, soient davantage accessibles aux personnes handicapées, a-t-elle fait valoir. Quelque 155 000 enfants handicapés sont scolarisés dans les écoles ordinaires, alors que quelque 429 000 autres bénéficient d'un enseignement spécial avec le soutien des unités d'appui à l'enseignement régulier, a précisé la délégation.

La délégation a d'autre part indiqué qu'à ce stade, 90% des adoptions au Mexique se font par la voie institutionnelle et 10% seulement par la voie privée. Un membre du Comité ayant souligné que l'adoption privée est constitutive d'un délit de vente d'enfants, la délégation a précisé qu'à ce stade, aucun projet de loi n'a été prévu qui érigerait l'adoption privée en infraction.

S'agissant du cas du jeune José Luis Tehuatle, la délégation a indiqué que dès son décès, intervenu à Puebla lors d'une manifestation, le bureau du Procureur de Puebla a ouvert une enquête et la Commission nationale des droits de l'homme est intervenue. Des personnes ont été jugées et d'autres ont reçu des sanctions administratives, a précisé la délégation.

La délégation a ensuite attiré l'attention sur la publication d'une brochure de sensibilisation et sur l'établissement en cours d'un protocole de soutien et de soins intégraux pour les enfants victimes d'abus et de violence. Ce protocole est centré sur la personne et sur les droits de l'homme afin d'assurer que les victimes de violence bénéficient de la part de l'État de soins immédiats, tant médicaux que psychologiques, et d'un soutien en vue d'une réparation intégrale adéquate. La politique globale de protection des droits de l'enfant comprend une composante de lutte contre les abus et violence à l'égard des enfants, a ajouté la délégation.

Dans le cadre de la lutte contre les stupéfiants, la délégation a indiqué que les autorités mexicaines ont entrepris de mettre l'accent sur la prévention et la répression de l'offre. Les autorités souhaitent désormais suivre la voie de la non-criminalisation du consommateur, a-t-elle indiqué.

Interpellée sur la pratique des mères porteuses dans l'État de Tabasco, la délégation a reconnu que cette pratique était légale dans cet État, une mère pouvant porter l'embryon jusqu'à l'accouchement avant de remettre l'enfant à une famille. Le Tabasco est le seul État du Mexique à permettre cette pratique, a souligné la délégation. Sur Internet, certaines personnes offrent ce service à des fins lucratives, ce qui est contraire à l'intention initiale; aussi, les autorités réfléchissent-elles actuellement aux moyens de lutter contre de telles pratiques, a ajouté la délégation.

La délégation a indiqué ne pas être en mesure de fournir immédiatement de réponse aux interrogations soulevées par un membre du Comité s'agissant de l'usage de pesticides par épandage aérien sur les terres du peuple yaqui; elle a précisé qu'elle apporterait ultérieurement au Comité une réponse à cette question.

En ce qui concerne les questions de santé, la délégation a fait état d'avancées importantes en matière de santé mentale, le nouveau modèle promu par les autorités dans ce domaine visant à sortir des institutions spécialisées les personnes qui souffrent de problèmes de santé mentale.

Les autorités mexicaines espèrent réduire de moitié d'ici 2030 le nombre de grossesses d'adolescentes, a par ailleurs indiqué la délégation.

S'agissant de la question des disparitions de personnes, la délégation a indiqué que cela fait moins de dix ans – depuis 2007 exactement – que ce phénomène a atteint des proportions disproportionnées. Depuis 2013, des mesures ont été prises pour faire face à ce phénomène, en particulier par le biais d'une stratégie et d'une législation adéquates. Ainsi, est-il prévu le délit de disparition forcée soit qualifié de violation grave des droits de l'homme, ce qui va permettre de reprendre ce délit dans les codes pénaux des États fédérés. En 2012, a ajouté la délégation, a été créé le Registre national des personnes disparues qui, avant d'être «nettoyé», comptait à l'origine 29 000 personnes; mais plus des deux tiers de ces personnes ont été retrouvées, dont environ la moitié en vie, et ce registre compte désormais environ 9700 personnes dont plus de 3000 enfants et adolescents. À cet égard, le plus grand nombre de disparitions intervient entre 15 et 17 ans, a précisé la délégation. Elle a attiré l'attention sur la hausse du taux d'élucidation des cas de disparitions forcées, qui approche les 80% grâce, en particulier, à la mise en place du système d'alerte.

La délégation a ensuite attiré l'attention sur la stratégie mise en place par les autorités mexicaines en faveur des enfants des rues; cette stratégie est ancrée dans le programme intégral de développement de l'enfant. Le Mexique s'est doté d'un groupe de travail technique qui travaille spécifiquement sur cette question, a précisé la délégation.

S'agissant du travail des enfants, la délégation a notamment indiqué que le mois dernier, le Sénat mexicain avait approuvé la ratification de la Convention n°138 de l'OIT sur l'âge minimum d'admission à l'emploi. La réforme de la législation du travail intervenue en 2012 a permis de disposer d'une liste d'activités considérées comme préjudiciables pour la santé et la sécurité des enfants et adolescents, a ajouté la délégation. Le Gouvernement mexicain a entrepris d'harmoniser et de renforcer le cadre juridique visant l'éradication du travail des enfants, a-t-elle souligné, attirant notamment l'attention sur la mise en place d'une nouvelle réglementation générale sur l'inspection du travail et les sanctions applicables en la matière. La Commission intersectorielle pour la prévention et l'éradication du travail infantile et la protection des travailleurs adolescents ayant l'âge légal (pour travailler) vise l'éradication des pires formes de travail des enfants d'ici 2016 et une réduction d'au moins 60% du travail des enfants d'ici la fin de l'année 2018 par rapport à 2013.

La pédophilie est un délit pénal défini au niveau fédéral comme au niveau des États sans exception, a indiqué la délégation. Elle a dit être consciente de l'impunité qui peut s'accentuer dans certains cas, mais a fait valoir que des mesures ont été prises afin de renforcer l'intervention des victimes dans les procédures, ce qui peut permettre – précisément – de lutter contre l'impunité.

Conclusions

La corapporteuse pour l'examen du rapport du Mexique, MME OVIEDO FIERRO, a relevé que beaucoup de questions sont restées en suspens, notamment pour ce qui est des migrants à l'intérieur du pays, des personnes déplacées ou encore de l'implication d'enfants dans la tauromachie. Le Mexique est un pays si grand que cela exige que de grandes décisions soient prises, a-t-elle souligné. La violence, la pauvreté et la mauvaise répartition des richesses sont à la base de nombre de questions soulevées et il conviendra donc pour les autorités d'agir sur ces trois volets, a estimé la corapporteuse.

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