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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité contre la torture examine le rapport de l'ex-République Yougoslave de Macédoine

05 Mai 2015

Comité contre la torture

5 mai 2015

Le Comité contre la torture a examiné, hier matin et cet après‑midi, le rapport présenté par l'ex‑République yougoslave de Macédoine sur les mesures qu'elle a prises pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Le rapport a été présenté par le Secrétaire d'État au Ministère macédonien de la justice, M. Ilija Ristovski, qui a souligné que le renforcement de l'indépendance du judiciaire restait une priorité pour son pays.  Dans ce contexte, des amendements à la Constitution sont envisagés en vue, notamment, d'étendre les compétences de la Cour constitutionnelle à cet égard.  Il est en outre prévu d'instituer un système de plaintes constitutionnelles qui devrait contribuer à améliorer la protection des droits des citoyens.  M. Ristovski a d'autre part souligné que son gouvernement était fermement engagé à poursuivre les réformes du système pénitentiaire en se concentrant essentiellement sur le problème de la surpopulation carcérale grâce à la construction de nouvelles installations et en rénovant des installations existantes, à la mise en place du service de probation durable, au renforcement des capacités des prisons en personnel et à une amélioration du traitement des délinquants condamnés, notamment par la promotion des activités de resocialisation.  Le Secrétaire d'État a en outre indiqué qu'une initiative avait été engagée en vue de créer un mécanisme indépendant pour le contrôle externe du Ministère de l'intérieur.  Les dispositions de la loi relatives au crime de torture ont été rendues plus strictes, a ajouté M. Ristovski, la sanction prévue ayant été portée de cinq ans maximum à huit ans maximum d'emprisonnement.

La délégation de l'ex‑République yougoslave de Macédoine était également composée de Secrétaires d'État auprès du Ministère du travail et de la politique sociale et du Ministère de la santé, ainsi que de représentants du Ministère de la justice, du Ministère des affaires étrangères, du Ministère de l'intérieur, du Ministère de la santé et du Ministère du travail et de la politique sociale.  Elle a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, notamment, des attaques contre les membres de la communauté des lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués; de la mise en place d'un mécanisme de plaintes; de la définition de la torture; des condamnations prononcées pour torture; du fonctionnement du Bureau de l'Ombudsman et des ONG; des mesures prises pour lutter contre la surpopulation carcérale et autres problèmes qui se posent dans les prisons; de la suite donnée aux événements de mai 2013 où des agents de l'unité spéciale de police «Alfi» ont été accusés d'avoir eu recours à une force disproportionnée; ou encore des questions relatives aux étrangers et requérants d'asile.

La rapporteuse du Comité pour l'examen de ce rapport, Mme Felice Gaer, s'est félicitée que le pays ait adhéré au Protocole facultatif et ait fait de l'Ombudsman le mécanisme national de prévention de la torture.  Elle a toutefois ajouté que des préoccupations persistaient quant à l'efficacité de la fonction de l'Ombudsman, dont nombre de recommandations semblent rester lettre morte.  Elle s'est également inquiétée d'allégations de violences à l'encontre des personnes placées en détention, ainsi que d'allégations faisant état d'agressions contre les membres de la communauté rom.  Les crimes à l'encontre de la communauté des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres seraient fréquents, a ajouté la rapporteuse.  Le corapporteur, M. Satyabhoosun Gupt Domah, a notamment dénoncé nombre d'agissements des membres de l'unité spéciale de police «Alfi».  Il a aussi relevé que la plupart des établissements pénitentiaires du pays ne respectent pas les normes internationales; la situation est alarmante, a‑t‑il ajouté.  Le traitement réservé aux travailleurs en situation irrégulière «est loin d'être normal», a‑t‑il en outre estimé.

Le Comité adoptera, dans le cadre de séances privées, des observations finales sur le rapport de l'ex‑République yougoslave de Macédoine et les rendra publiques à l'issue de la session, qui se termine le vendredi 15 mai.


Demain après‑midi, à 15 heures, le Comité se penchera sur le suivi des articles 19 et 22 de la Convention et sur la question des représailles (à l'encontre de personnes coopérant ou ayant coopéré avec le Comité).


Présentation du rapport de l'ex‑République yougoslave de Macédoine

Présentant le rapport de l'ex‑République yougoslave de Macédoine (CAT/C/MKD/3), M. ILIJA RISTOVSKI, Secrétaire d'État au Ministère de la justice de l'ex‑République yougoslave de Macédoine, a souligné que le renforcement de l'indépendance du judiciaire reste la priorité pour son pays.  Dans ce contexte, des amendements à la Constitution du pays ont été rédigés, dont une grande partie concerne le système de justice.  Ces amendements, qui en sont au stade de la dernière lecture devant le Parlement, prévoient notamment que le Ministre de la justice et le Président de la Cour suprême ne soient plus membres d'office du Conseil judiciaire et que le nombre de juges qui en membres soit augmenté.  Il est également proposé d'étendre les compétences de la Cour constitutionnelle en lui permettant de trancher en appel contre les décisions du Conseil judiciaire et du Conseil des procureurs publics liées à l'élection des juges et des procureurs publics ainsi que contre des décisions de sanctions disciplinaires adoptées par ces deux Conseils.  Il est en outre prévu d'instituer un système de plaintes constitutionnelles qui devrait contribuer à améliorer la protection des droits des citoyens, a‑t‑il indiqué.

M. Ristovski a ensuite attiré l'attention sur les importantes allocations budgétaires attribuées ces deux dernières années aux fins de l'application de la nouvelle loi de procédure pénale.  Des équipements audiovisuels ont été acquis pour permettre l'enregistrement des auditions et interrogatoires des personnes inculpées et des témoins dans les procédures d'enquête, a‑t‑il fait valoir.  Un système de gestion des affaires a été mis en place au sein des bureaux des procureurs afin de faciliter la gestion et le suivi des affaires pénales, a‑t‑il ajouté.

Le Secrétaire d'État a d'autre part souligné que le Gouvernement de l'ex‑République yougoslave de Macédoine était fermement engagé à poursuivre les réformes du système pénitentiaire en se concentrant essentiellement sur la réduction de la surpopulation carcérale en construisant de nouvelles installations et en en rénovant d'autres déjà existantes; en mettant en place du service de probation durable; en renforçant les capacités du personnel des prisons; et en améliorant le traitement des délinquants condamnés, y compris en promouvant des activités de resocialisation.  Le Secrétaire d'État a notamment attiré l'attention sur le projet de promotion des services de probation et des peines alternatives développé en 2010, en vertu duquel a été élaborée la première mouture du projet de loi sur la probation qui s'accompagne de la signature d'un contrat pour l'achat et l'installation de 400 bracelets électroniques et des équipements de transmission y associés.  M. Ristovski a en outre fait état de la stratégie nationale de développement du système pénitentiaire qui est en cours d'adoption et qui prévoit notamment l'élaboration d'un plan stratégique pour une politique de tolérance zéro à l'égard des mauvais traitements et de la corruption.

Le Ministère de l'intérieur accorde une attention particulière au plein respect des droits de l'homme et cela s'applique tout particulièrement aux procédures associées à l'exercice des pouvoirs de police, a poursuivi M. Ristovski.  Les activités menées dans ce contexte visent notamment à améliorer le cadre juridique existant et à renforcer la capacité institutionnelle pour assurer des comportements adéquats au sein de la police, a‑t‑il précisé.  Il a ainsi indiqué qu'une initiative avait été engagée en vue de créer un mécanisme indépendant pour le contrôle externe du Ministère de l'intérieur.  Il a en outre rendu compte d'amendements apportés à la loi sur la police en vertu desquels doivent désormais être confisquées les armes d'un policier s'il a commis un délit pénal comprenant des éléments de violence ou s'il existe à son encontre une notification du centre de travail social selon laquelle il serait l'auteur d'un acte de violence domestique.

Le centre d'accueil pour étrangers a été rénové, a poursuivi le Secrétaire d'État, faisant en outre état d'intenses efforts en cours afin de désigner une autre installation propriété d'État qui sera transformée en nouveau centre d'accueil.

Les dispositions de la législation concernant le crime de torture ont été rendues plus strictes, a poursuivi M. Ristovski.  La sanction prévue pour de tels crimes a été portée de cinq ans maximum à huit ans maximum d'emprisonnement, a‑t‑il précisé.  En outre, une nouvelle loi de procédure pénale a été adoptée en vertu de laquelle c'est le bureau du Procureur qui est en charge de l'enquête (système accusatoire); en vertu de cette nouvelle loi, la personne ayant déposé une plainte pénale peut faire appel auprès du Procureur public supérieur au cas où l'instance inférieure du bureau du Procureur public n'aurait pas donné suite à la plainte pénale déposée (la jugeant infondée).

M. Ristovski a d'autre part indiqué que la loi portant amendement de la loi sur l'Ombudsman se trouve en pleine procédure parlementaire.  L'objet de l'amendement est de permettre à l'Ombudsman, en tant qu'institution nationale des droits de l'homme, de respecter les critères associés au statut A en vertu des Principes de Paris et d'inclure la promotion des droits de l'homme dans son mandat.

Une nouvelle loi sur la prévention de la violence domestique et la protection contre ce type de violence a été adoptée en septembre 2014 en tant que première loi systémique spéciale dans ce domaine, a par ailleurs fait valoir le Secrétaire d'État.  Il a en outre indiqué que le Gouvernement était engagé à améliorer les conditions de logement et de soins dans l'Institut spécial Demir Kapija pour personnes handicapées mentales; une partie de l'Institut a été totalement rénovée et une autre partie a été fermée.  Depuis 2006, processus de dé‑hospitalisation des établissements psychiatriques est en cours.

Examen du rapport

Questions et observations des experts

MME FELICE GAER, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de l'ex‑République yougoslave de Macédoine, s'est dite très heureuse que le pays ait adhéré au Protocole facultatif se rapportant à la Convention et ait créé un poste d'Ombudsman en tant que mécanisme national de prévention de la torture.  Elle s'est également réjouie de l'autre signe positif que constituent les visites que le Comité européen de prévention de la torture du Conseil de l'Europe a menées dans le pays.

Des préoccupations persistent néanmoins quant à l'efficacité de la fonction de l'Ombudsman, dont nombre de recommandations semblent rester lettre morte, aucun mécanisme formel n'étant prévu pour promouvoir l'application de ses recommandations, a fait observer Mme Gaer.  Elle a aussi souligné que cette institution ne jouit que du statut B auprès du Comité international de coordination des institutions nationales de droits de l'homme (CIC).  Elle a voulu en savoir davantage au sujet du financement des activités du Bureau de l'Ombudsman et des ONG, relevant que cette institution faisait état d'une augmentation du nombre de plaintes qu'elle reçoit. 

La rapporteuse s'est ensuite inquiétée des allégations de violences à l'encontre des personnes placées en détention, qui souffriraient en outre de mauvaises conditions d'hygiène.  Ces allégations proviennent notamment du Comité européen de prévention de la torture, a‑t‑elle précisé.

Des problèmes de violence domestique et de violence à l'égard des femmes ont également été décrits, a poursuivi la rapporteuse. 

Mme Gaer s'est également inquiétée d'allégations faisant état d'attaques contre les membres de la communauté rom.  Le 5 mai 2013, une quinzaine d'agents de police seraient entrés de force dans des maisons et boutiques de Roms à Skopje en ayant recours à une force excessive.

Les crimes à l'encontre de la communauté des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres seraient fréquents.  Selon certaines informations, des membres de cette communauté affirmant avoir été attaqués et passés à tabac, s'est inquiétée Mme Gaer.

Mme Gaer a par ailleurs fait part de sa préoccupation face aux scandales récurrents d'écoutes téléphoniques en ex‑République yougoslave de Macédoine, qui soulèvent la question de l'état de droit dans ce pays.

Relevant par ailleurs que la définition de la torture énoncée à l'article 142 du code pénal semble inclure les actes infligés par, à l'instigation de ou avec le consentement d'un représentant public, Mme Gaer a souhaité savoir si cette définition englobait les personnes travaillant dans l'armée, dans la police et dans les services du procureur et si elle inclut les complices d'actes de torture.

Combien d'affaires relevant des articles 142 et 143 du code pénal ont‑elles été enregistrées durant la période couverte par le rapport et des personnes ont‑elles été reconnues coupables et condamnées dans de telles affaires, a par ailleurs voulu savoir Mme Gaer?  Elle s'est inquiétée d'informations selon lesquelles personne n'a été reconnu coupable de torture depuis les amendements apportés en 2009 à la loi pénale et à la loi de procédure pénale.

Évoquant d'autre part la loi sur l'amnistie adoptée en 2011, la rapporteuse s'est faite l'écho d'informations selon lesquelles le Parlement de l'ex‑République yougoslave de Macédoine aurait en fait créé une situation d'impunité pour des personnes qui se seraient rendues coupables d'infractions au droit international humanitaire.  Elle s'est notamment enquise de la situation des citoyens appartenant à la minorité ethnique albanaise qui auraient été victimes de disparitions forcées lors du conflit armé.

La nouvelle loi sur l'asile et la protection temporaire a‑t‑elle amélioré la situation en ce qui concerne les requérants d'asile et les questions d'asile dans leur ensemble, a par ailleurs demandé Mme Gaer?  Elle s'est enquise du nombre de demandes d'asile reçues, de la proportion de demandes acceptées et des motifs de refus opposés aux requérants déboutés.

M. SATYABHOOSUN GUPT DOMAH, corapporteur du Comité pour l'examen du rapport macédonien, a regretté que peu d'éléments concernant l'interdiction des actes de torture et de mauvais traitements figuraient parmi les divers enseignements dispensés aux personnels de force de l'ordre dans le cadre de leur formation.  Le corapporteur a dit avoir le sentiment que les pouvoirs en place exercent davantage une ingérence pour protéger les auteurs d'actes de torture plutôt que pour protéger leurs victimes.  En mars 2013, le chef de l'opposition a été attaqué dans un lieu public par des membres de l'unité spéciale de la police dénommée «Alfi» et des officiers de cette unité ont été mis en cause; or, il semblerait que la victime soit devenue le coupable dans cette affaire.  Des membres de cette unité de police ont en outre pénétré dans des habitations sans mandat et des enfants roms ont même été interrogés en l'absence de représentants légaux.  Aucune poursuite n'a été engagée contre les membres de cette unité pour de tels agissements, a insisté M. Domah.

La plupart des établissements pénitentiaires de l'ex‑République yougoslave de Macédoine ne respectent pas les normes internationales, a poursuivi le corapporteur.  M. Domah s'est par ailleurs inquiété de la hausse du nombre de personnes placées en détention provisoire, leur détention se faisant dans des conditions inhumaines et dégradantes, alors que ces personnes se voient refuser l'accès à un traitement médical.  Quant à la situation dans les établissements pénitentiaires, elle est alarmante, a insisté le corapporteur: surpopulation carcérale importante (le taux de surpopulation pouvant atteindre 180 voire 200%); hausse du nombre de plaintes déposées devant le Comité d'Helsinki; manque d'approvisionnement en eau (et lorsque l'eau est fourni, elle est souvent insalubre); pénurie de serviettes et de brosses à dent, etc.

Le traitement réservé aux travailleurs en situation irrégulière est loin d'être normal, a poursuivi M. Domah.  Il n'y a pas de distinction claire entre un travailleur migrant et un requérant d'asile, a‑t‑il fait observer.  S'il faut se réjouir que les autorités recourent moins qu'auparavant à la procédure accélérée pour le traitement des demandes d'asile, beaucoup de personnes sont toutefois refoulées à la frontière et celles qui sont détenus dans un centre le sont dans des conditions très précaires, a souligné le corapporteur.

Parmi les autres membres du Comité, un expert s'est lui aussi inquiété des conditions de détention en ex‑République yougoslave de Macédoine, citant le cas d'une prison d'une capacité de 800 places qui accueille 1600 prisonniers.  Il s'est lui aussi enquis de l'impact des recommandations formulées par l'Ombudsman, s'agissant notamment des conditions de détention dans les commissariats de police.

Un autre expert a demandé quelles étaient les intentions des autorités en matière d'application du Protocole d'Istanbul, ou Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.  Les autorités envisagent‑elles de faire passer les services médicaux pénitentiaires sous la supervision du Ministère de la santé, a‑t‑il en outre demandé?  Quand les peines alternatives à la privation de liberté pourront‑elles avoir un impact positif du point de vue de la lutte contre la surpopulation carcérale, qui atteint en moyenne 130%, a par ailleurs demandé cet expert?

Une experte a souhaité connaître le nombre de prisons en ex‑République yougoslave de Macédoine qui sont spécifiquement prévues pour les femmes.  Elle s'est en outre enquise de l'impact que la stratégie nationale adoptée à cette fin a pu avoir sur la réduction de la violence domestique, alors que des informations font état d'une hausse des cas de violence domestique dans le pays de 300 en 2007 à quelque 700 en 2011.

Les rapports concernant la situation dans la prison d'Idrizovo sont alarmants, a pour sa part fait observer un expert, faisant état du surpeuplement carcéral, de l'insuffisance des services médicaux et des violences qui prévalent dans cet établissement.  Il s'est en outre inquiété des conditions dans lesquelles se trouvent les migrants en situation irrégulière regroupés dans un centre de Skopje qui est en fait une ancienne école de la ville.

Des informations ont été requises sur les suites judiciaires dans une affaire impliquant le viol d'un détenu mineur, mentionné dans le rapport de l'Ombudsman.

Revenant par la suite sur la problématique de l'indépendance du système judiciaire, une experte a souligné que si des efforts ont certes été déployés, une personne en ex‑République yougoslave de Macédoine a révélé au grand public des enregistrements audio semblant indiquer que de hauts fonctionnaires publics et de hauts responsables politiques étaient impliqués dans des atteintes aux droits de l'homme, notamment des atteintes à l'indépendance du judiciaire.  Dans quelle mesure ont pu être améliorées les conditions d'accueil et de résidence des étrangers en ex‑République yougoslave de Macédoine, a par ailleurs demandé cette experte?  Quelles mesures concrètes ont‑elles été prises pour éviter que les personnes qui cherchent à traverser la frontière ne soit refoulée sans bénéficier d'un examen au cas par cas de leur situation, s'est‑elle en outre enquise?

Un membre du Comité a souhaité en savoir davantage sur la composition du Conseil judiciaire.  Cet expert a également voulu savoir qui en ex‑République yougoslave de Macédoine est chargé de recevoir et d'examiner les plaintes présentées conformément aux articles 13 et 14 de la Convention.

Un autre expert a affirmé que les choses en ex‑République yougoslave de Macédoine semblent aller dans la bonne direction en dépit de la persistance d'un certain nombre de problèmes.  Des informations laissent apparaître que la plupart des centres de détention du pays ne répondent pas aux normes internationales, en raison essentiellement de l'absence d'équipements et de financement adéquats, a souligné cet expert. 

Si l'Ombudsman a été saisi de plusieurs dizaines de plaintes pour torture, aucune de ces plaintes n'a finalement donné lieu à des poursuites par le parquet (ministère public), s'est étonné un membre du Comité.

Une experte a souhaité savoir si était toujours en vigueur la disposition pénale qui, en matière de viol, faisait peser la charge de la preuve sur la victime dès l'âge de 14 ans.

Réponses de la délégation

Rendant compte des mesures prises par les autorités pour renforcer l'indépendance du judiciaire, la délégation a souligné que pour ce qui est de la nomination des juges, la loi avait mis en place un système fondé sur le mérite; ainsi, seule une personne passée par la formation réservée aux juges et procureurs peut faire acte de candidature à un poste de juge.  Tous les candidats à la formation initiale pour juges et procureurs doivent passer un test de qualification en vue de leur admission à suivre cette formation; ils doivent ensuite passer un examen final à l'issue de la formation, a précisé la délégation.  Le système de promotion en vigueur empêche dans une large mesure toute possibilité de décision discrétionnaire en matière de nomination des juges et procureurs, a‑t‑elle insisté.

La délégation a assuré que des efforts ont été déployés afin d'intégrer nombre de normes internationales dans le fonctionnement du système judiciaire.  Ainsi, a‑t‑elle attiré l'attention sur la mise en place d'une commission d'établissements des faits qui sera chargée d'engager les procédures nécessaires suite à toute plainte contre un juge; cette commission aura alors des pouvoirs d'enquête après en avoir recommandé le lancement auprès du Conseil judiciaire.

Depuis fin 2013, l'équipe du bureau du Procureur travaille dans un nouveau bâtiment de plus de 10 000 mètres carrés, comprenant notamment huit salles d'audition équipées de systèmes d'enregistrement audiovisuel, tant à l'intention des témoins que des accusés, a par ailleurs indiqué la délégation.

Les autorités sont en train d'élaborer un nouveau projet de loi qui définira plus avant le cadre dans lequel s'inscrit le travail du bureau du Procureur, notamment s'agissant de l'intervention d'une décision du Procureur quant à l'opportunité d'engager des poursuites, a indiqué la délégation.

La délégation a confirmé que le Procureur général n'a pas été saisi d'affaires de torture.

En ce qui concerne les allégations d'attaques contre la communauté des lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués, la délégation a indiqué que le bureau du Procureur de Skopje a enregistré trois affaires de ce type, dont l'une – particulièrement sérieuse – contre le siège de l'association de la communauté.  Des enquêtes ont donc été ouvertes, a fait valoir la délégation, précisant que l'une d'elles porte sur une attaque contre un café fréquenté par les membres de cette communauté.

Les autorités envisagent en outre la mise en place d'un mécanisme de plainte auprès de la cour constitutionnelle, organe que pourrait saisir tout citoyen macédonien, a par ailleurs fait valoir la délégation.  Ce système de plaintes constituera un mécanisme de recours efficace du point de vue de l'examen de constitutionnalité, a‑t‑elle affirmé.

Pour ce qui est de la définition de la torture et de sa conformité avec celle énoncée à l'article premier de la Convention, la délégation a souligné que l'article premier de la Convention avait été transposé dans les articles 142 et 143 du code pénal.  Plusieurs types d'agissements passibles de sanctions pénales sont couverts par l'article 143 du code pénal, a‑t‑elle précisé, citant notamment le fait de causer ou d'infliger des sévices corporels ou mentaux lorsqu'il y a suspicion de commission d'un délit.  Certes, la notion de souffrances corporelles ou émotionnelles n'est pas spécifiquement mentionnée dans ces articles, mais le pays est disposé à amender son code pénal en vue d'intégrer de telles dispositions dans ledit code, a indiqué la délégation.  Dans la législation pénale en vigueur en ex‑République yougoslave de Macédoine, lorsque l'on parle de personnes exerçant des fonctions officielles, on parle de personnes autorisées par la loi à s'acquitter de ces fonctions, ce qui inclut les membres des forces armées (les militaires), a par ailleurs souligné la délégation.

Trois personnes ont été condamnées en 2012 au titre des infractions prévues à l'article 143 du code pénal; en 2013, elles étaient six à être condamnées au titre de ce même article, a indiqué la délégation.

La délégation a par ailleurs rappelé qu'un projet de nouvelle loi sur l'Ombudsman était en cours de préparation afin de rendre cette institution pleinement conforme aux Principes de Paris relatifs aux institutions nationales des droits de l'homme.

En ce qui concerne la surpopulation carcérale et autres problèmes qui se posent dans les prisons, la délégation a fait valoir les nouveaux bâtiments que les autorités ont entrepris de construire afin d'y remédier.  Conscientes que la construction de nouvelles prisons ne suffira pas à résoudre tous les problèmes qui peuvent se poser, les autorités ont également entrepris de mettre en place un nouveau système de liberté surveillée, fondé sur une nouvelle législation en la matière, a ajouté la délégation.  Aux fins de la construction de nouvelles prisons, a‑t‑elle indiqué, quelque 52 millions d'euros ont été débloqués, essentiellement par les partenaires extérieurs puisque la part du Gouvernement s'élève à six millions d'euros.  Une prison pour mineurs, dont les travaux ont débuté en 2014, devrait être achevée pour fin 2016, a fait valoir la délégation.

En 2009, a poursuivi la délégation, une enquête a été ouverte pour allégations de passage à tabac de plusieurs détenus par le personnel de la prison de Skopje, qui a conduit le procureur chargé de l'enquête à prononcer un non‑lieu.  En juin 2011, il a été allégué qu'un détenu avait été passé à tabac dans une autre prison du pays; l'Ombudsman a déposé plainte contre plusieurs gardiens de cette prison, mais là encore, le procureur a estimé qu'aucun élément pénal ne venait étayer ces plaintes et l'affaire a donc été classée sans suite.

Tout ce qui a trait à la violence entre détenus a fait l'objet d'une réglementation claire quant à la manière traiter ces situations, a par ailleurs assuré la délégation.

En ce qui concerne la présence d'un médecin lors des visites menées dans les lieux de détention, la délégation a indiqué qu'un protocole d'accord avait été signé en 2012 entre le mécanisme national de prévention de la torture et les associations de psychiatres et de médecins légistes du pays.  Des directives ont été émises concernant la détection des signes de torture sur les détenus et des formations adéquates ont été mises en place à cette fin, y compris pour les médecins travaillant dans les institutions psychiatriques, a en outre fait valoir la délégation.

S'agissant de l'avortement, la loi adoptée en juin 2003 concernant l'interruption volontaire de grossesse se préoccupe avant tout de la santé de la mère et prévoit donc que la grossesse peut être interrompue si la vie de la mère est en danger.

Pour ce qui est des événements de mai 2013 où des officiers de l'unité spéciale de police ‑ Alfi ‑ ont été accusés d'avoir eu recours à une force disproportionnée, la délégation a indiqué que l'Unité en charge des enquêtes internes a été saisie par l'Ombudsman, par le Centre pour les droits des Roms de Budapest et par le Comité Helsinki et a finalement établi que dans cette affaire, la force utilisée par les représentants des forces de l'ordre était conforme aux normes régissant l'utilisation de la force par les membres des forces de l'ordre.  L'unité Alfi n'a pas été démantelée; elle a été transformée en 2014 pour devenir une unité d'intervention d'urgence dans la zone de Skopje et elle s'est avérée particulièrement utile pour poursuivre des criminels responsables de crimes graves, a poursuivi la délégation, qui a précisé que les membres de cette unité avaient reçu une formation en matière de respect des droits de l'homme.

Les autorités ont l'intention de lancer un appel d'offres pour la construction d'un nouveau centre d'accueil destiné aux étrangers, a indiqué la délégation.  Une nouvelle loi sur les étrangers doit être adoptée d'ici la fin de cette année, a poursuivi la délégation.  Les mineurs non accompagnés ne peuvent être maintenus en détention dans les centres d'accueil pour étrangers et sont en fait hébergés dans un village où les personnes chargées de leur tutelle leur rendent visite régulièrement, a‑t‑elle indiqué.  Répondant à des questions complémentaires sur les questions relatives aux étrangers, la délégation a rappelé que le Centre d'accueil pour étrangers avait déjà été en partie rénové, les conditions d'hygiène y ayant été améliorées.  Parallèlement, un autre centre d'accueil pour étrangers a été activement recherché, dont les frais de mise en état seront financés par le Gouvernement, a ajouté la délégation.

La délégation a par ailleurs expliqué qu'en dehors des lieux officiels de passage de la frontière, toute traversée de la frontière constitue une infraction à la loi en tant que tentative d'entrée illégale sur le territoire.  Les personnes appréhendées en dehors des lieux de passage officiels seront emmenées au commissariat de police.

Dans les faits, les demandeurs d'asile et les migrants ne restent que peu de temps sur le territoire de l'ex‑République yougoslave de Macédoine et n'ont donc pas le temps de bénéficier réellement des services d'éducation auxquels ils ont pourtant pleinement droit, a en outre expliqué la délégation.  En 2013, l'ex‑République yougoslave de Macédoine a reçu quelque 1323 demandes d'asile et toutes ont été rejetées car les autorités ont estimé que les demandeurs ne couraient pas de risques apparents, a indiqué la délégation.  En 2014, ce sont quelque 1246 demandes d'asile qui ont été soumises; 11 Syriens se sont vu accorder l'asile et un Ukrainien a été placé sous protection subsidiaire, a‑t‑elle ajouté.

Face à l'affaire des écoutes téléphoniques qu'a mentionnée une experte du Comité, une enquête est actuellement en cours suite à une plainte déposée au pénal par le Ministère public, a indiqué la délégation, précisant qu'une personne avait reconnu avoir utilisé de façon illégale des équipements d'écoute téléphonique.

Une loi contre la discrimination a été adoptée récemment et une commission de protection contre toutes les formes de discrimination a été mise en place qui peut être saisie par tous les citoyens, y compris les membres de la communauté des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres et intersexués, qui seront traités comme tout autre citoyen, a par ailleurs indiqué la délégation.

En 2012, 854 plaintes pour violences domestiques ont été enregistrées, concernant 590 femmes, a d'autre part indiqué la délégation.  L'année suivante, a‑t‑elle précisé, ce nombre s'établissait à 801 plaintes et, en 2014, il était de 999 plaintes, dont 720 concernaient des femmes.

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