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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité des droits des personnes handicapées examine le rapport initial de la République tchèque

01 Avril 2015

1er avril 2015

Le Comité des droits des personnes handicapées a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport initial présenté par la République tchèque sur les mesures prises par ce pays pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

Le rapport a été présenté par la Ministre du travail et des affaires sociales, Mme Michaela
Marksová, qui a déclaré que son pays s'était employé à adopter des mesures progressives pour chaque aspect de la vie des personnes handicapées. Ainsi, depuis la révolution de 1989, le Gouvernement a conçu et exécuté cinq plans nationaux sur les personnes handicapées. Il a systématiquement procédé à leur évaluation et les a amendés, le cas échéant. Elle a souligné l'importance du dernier de ces documents, intitulé Plan national en faveur de l'instauration de l'égalité des chances des personnes handicapées 2010-2014, directement inspiré de la Convention. La Ministre a aussi évoqué l'adoption d'un nouveau code civil, entré en vigueur en janvier 2014, qui prévoit des mesures d'appui aux personnes ayant une capacité juridique limitée afin de favoriser la pleine jouissance des droits et l'indépendance de ces personnes. Pour des raisons d'ordre juridique, la République tchèque n'a pas encore ratifié le Protocole facultatif se rapportant à la Convention, mais un projet de ratification est en discussion à l'heure actuelle.

Outre Mme Marksová, la délégation tchèque comprenait une quinzaine de membres, représentant notamment le Ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, le Ministère du développement régional, le Ministère du travail et des affaires sociales, le Ministère de la santé, le Ministère de l'intérieur, le Ministère de la justice, le Ministère des transports, ainsi que le Conseil des personnes handicapées. Elle a notamment répondu aux questions des experts s'agissant des questions de l'accès aux transports, aux bâtiments et aux espaces publics, de la capacité juridique des personnes handicapées, de l'amélioration de l'accès à l'emploi et à l'éducation publique, des dispositions relatives à la stérilisation forcée, de l'interdiction des châtiments corporels, de la capacité juridique, de la situation des handicapés détenus ou encore de la réforme du placement en institution.

Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport, M. Damjan Tatiæ, a salué la politique tchèque de lutte contre la discrimination, qui a obtenu des résultats «dignes d'éloge». Il a également jugé positif l'élargissement de l'emploi de la langue des signes. Ila aussi félicité l'État pour sa franchise concernant les défis auxquels il se heurte. Le rapporteur a toutefois noté, entre autres, que le système de suivi de l'accessibilité posait problème; que la définition de la tutelle n'était pas tout à fait conforme à la Convention sur la reconnaissance de la personnalité juridique des personnes handicapées; et que l'inclusion dans le système éducatif laissait encore à désirer. D'autres membres du Comité ont exprimé leurs préoccupations du fait que le système juridique tchèque ne propose aucune définition harmonisée du handicap ou des personnes handicapées. Certains se sont érigés contre des pratiques assimilables à la torture, comme les traitements avec des médicaments chimiques ou les «lits-cages», infligées à des personnes atteintes de maladies mentales.

Le Comité adoptera, en séance privée, des observations finales sur le rapport de la République tchèque, qui seront rendues publiques à l'issue de sa session, le vendredi 17 avril.

Cet après-midi à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport du Turkménistan (CRPD/C/TKM/1).

Présentation du rapport de la République tchèque

Le Comité est saisi du rapport initial de la République tchèque (CRPD/C/CZE/1), ainsi que des réponses fournies par l'État partie (CRPD/C/CZE/Q/1/Add.1, disponible en anglais) à une série de questions écrites établie par le Comité (CRPD/C/CZE/Q/1).

MME MICHAELA MARKSOVÁ, Ministre du travail et des affaires sociales de la République tchèque, a déclaré que ce rapport avait été déposé auprès du Comité en 2011 et que le Gouvernement avait fourni des réponses aux questions que lui a adressées le Comité et qui ont fourni l'occasion de poursuivre le dialogue avec le comité et de soumettre des informations complémentaires. Faisant l'historique des mesures prises au cours des deux décennies écoulées, soit depuis la révolution de 1989, en vue de surmonter les obstacles à la pleine jouissance par les personnes handicapées de leurs droits et à leur participation à la vie sociale, elle a affirmé que le processus d'amélioration de leurs conditions de vie et de la qualité des prestations est constant et qu'il vise principalement à trouver progressivement des solutions pour chaque problème spécifique. Ce faisant, cinq plans nationaux consécutifs ont été approuvés et appliqués. Ceux-ci prévoyaient des tâches spécifiques pour chaque ministère, avec un échéancier de priorités. Le Gouvernement assure le suivi de l'application de ces plans et, le cas échéant, procède à des amendements. Le dernier plan, pour la période 2010-2014, portait sur la promotion de l'égalité pour les personnes handicapées et s'inspirait directement de la Convention, ratifiée par la République tchèque en septembre 2009.

La Ministre du travail et des affaires sociales a mis en avant l'adoption d'un nouveau code civil, entré en vigueur en janvier 2014, qui prévoit désormais des mesures de soutien aux personnes ayant une capacité juridique limitée, notamment les déclarations préliminaires, l'assistance et la représentation dans la prise de décision par un membre de la famille. Il s'agit de permettre la pleine jouissance des droits et de ces personnes et de leur assurer indépendance et autonomie.

L'accent a également été mis sur l'égalité d'accès et l'inclusion dans le système éducatif. Un projet de loi visant à l'inclusion dans les écoles publiques attend l'approbation du Président de la république. Des progrès importants ont été accomplis dans le domaine de l'accessibilité, en particulier s'agissant des bâtiments et des transports publics. Un meilleur accès à l'information a également été facilité, de même qu'à celui du patrimoine culturel dans les musées, galeries, bibliothèques et centres d'information. La ministre a aussi attiré l'attention sur le travail d'inspection auprès des prestataires de services et la transformation des services sociaux afin qu'un nombre croissant de personnes handicapées puissent choisir entre un accueil en résidence et la vie au sein de leur famille. Mais Mme Marksová a reconnu qu'en dépit des efforts en matière d'emploi, le taux des personnes handicapées qui ont un travail demeure faible.

Il faut aussi modifier les pratiques s'agissant soins psychiatriques, qui sont encore trop centralisés et institutionnalisés, la maladie mentale continuant d'être stigmatisée en République tchèque, a reconnu la ministre. Le Gouvernement envisage une réforme aux fins d'accroître la capacité d'absorption et la qualité des centres de santé primaires et la formation des spécialistes. La République tchèque n'a pas ratifié le Protocole facultatif à la Convention, la ratification proposée par le Ministère du travail et des affaires sociales s'étant heurtée à une forte opposition; mais les discussions vont bon train en vue d'une ratification dans les plus brefs délais. La Ministre du travail a également fourni des informations sur le mécanisme de mise en œuvre et de suivi des dispositions de la Convention. La République tchèque discute de l'opportunité de mettre en place un bureau du médiateur sur les personnes handicapées respectant les Principes de Paris sur les institutions nationales des droits de l'homme.

Examen du rapport

Questions et observations des experts

M. DAMJAN TATIÆ, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la République tchèque, s'est dit satisfait du rapport et du document parallèle des organisations non gouvernementales qui ont facilité la tâche du Comité. L'État partie jouit d'une longue tradition d'aspiration à la liberté. Membre de l'Union européenne ayant une forte tradition de droit romain qui met l'accent sur la tutelle, sa politique de lutte contre la discrimination a obtenu des résultats dignes d'éloge, a-t-il reconnu, notant d'autres acquis comme l'emploi de la langue des signes ou encore la reconnaissance par l'État des difficultés auxquelles il se heurte.

Le système de suivi de l'accessibilité pose problème, a toutefois poursuivi le rapporteur. En outre, la définition de la tutelle n'est pas tout à fait conforme à l'alinéa 1) de l'article 12 de la Convention sur la reconnaissance en tous lieux de la personnalité juridique des personnes handicapées. M. Tatiæ a aussi cité, parmi d'autres difficultés, les questions liées à l'inclusion dans le système éducatif.

Parmi les autres membres du Comité, une experte a demandé comment les personnes handicapées étaient impliquées dans la préparation des lois les concernant et leur application. Elle a aussi voulu savoir si les membres de l'appareil judiciaire sont formés à la Convention. Il n'existe pas de définition de l'aménagement raisonnable, a-t-elle en outre noté, soulignant aussi le faible taux d'emploi des femmes handicapées.

Une autre experte a constaté une incohérence dans la définition du handicap et relevé qu'un grand nombre de textes législatifs ne respectent pas la définition figurant dans la Convention. Elle a souhaité savoir ce que la République tchèque envisage de faire pour combler l'écart entre les femmes handicapées et les autres, et entre les femmes handicapées et les hommes handicapés. Un de ses homologues s'est demandé, quant à lui, s'il existe des organismes chargés du suivi des questions d'accessibilité, en particulier dans les transports et les infrastructures en règle générale.

Une experte a demandé quelles mesures étaient prises pour lutter contre la discrimination également en matière d'éducation et a demandé si des politiques ont été mises sur pied pour aider les enfants handicapés à cet égard. Le Gouvernement envisage-t-il d'interdire le placement d'enfants de moins de trois ans dans des institutions spécialisées? Elle a ensuite noté que le châtiment corporel n'était pas interdit au foyer ou dans les institutions s'occupant d'enfants handicapés.

Impressionné par les résultats obtenus par la République tchèque, un membre du Comité a voulu connaître le statut et les compétences du Conseil national du handicap et d'autres organisations. Ces dernières ont elles le même pouvoir que ce Conseil? L'expert s'est demandé si tout manquement était passible de sanctions.

Un autre expert a attiré l'attention sur les différents handicaps pris en compte par la République tchèque pour déterminer qui peut occuper un emploi. Il a estimé que cela implique une forme de discrimination et qu'il fallait, pour résoudre ce dilemme, adopter une définition plus précise du handicap, conforme à la Convention. Il a aussi encouragé le Gouvernement à ancrer davantage la culture des droits de l'homme au sein de l'opinion publique tchèque.

Revenant sur le droit des enfants handicapés, s'agissant surtout des sourds-muets et malentendants, un membre du Comité s'est interrogé sur la mise à disposition des familles d'un enseignement de la langue des signes qui soit facile et gratuit. Une experte s'est enquise, de son côté, des mesures prises pour surveiller l'application des dispositions de la Convention au sein du système judiciaire.

L'experte a aussi traité de la violence au foyer et de la violence sexuelle et voulu obtenir des chiffres à cet égard, en particulier sur le nombre de femmes devenues handicapées des suites de la violence. Elle a également abordé la question du viol et de sa définition. Celui-ci est-il défini dans le code pénal? Elle s'est dite épouvantée par l'abandon des nouveaux nés et la pratique de la «boîte à bébés» où ils peuvent être déposés. Elle a recommandé de s'engager dans un modèle social du handicap et solliciter des données plus précises.

Un autre membre a aussi fait des observations sur la terminologie employée par la République tchèque dans ce domaine, soulignant qu'il fallait faire une distinction entre «invalide» et «handicapé», deux termes invariablement utilisés dans le pays. Il a par ailleurs jugé inexplicable qu'aucune plainte n'ait été déposée auprès du système judiciaire en rapport avec les problèmes rencontrés par les personnes handicapées.

Les enfants handicapés peuvent bénéficier d'une prise en charge au titre de leur handicap à travers un placement en institution, a relevé un autre expert, qui a encouragé la République tchèque à éviter un tel placement. Il a également signalé que 30 000 personnes sont formées à l'assistance des handicapés et s'est étonné à nouveau qu'aucune plainte n'ait été présentée. Une autre experte a noté que la Stratégie d'intégration des Roms ne dit pas un mot sur l'inclusion des personnes handicapées issues de cette communauté.

Une experte a déploré le recours excessif aux traitements chimiques dans les institutions accueillant les personnes souffrant de maladie mentale. Elle s'est en outre inquiétée du manque de services communautaires pour les autistes. Une de ses homologues a pointé du doigt la privation de la capacité juridique et appelé à des garanties contre des abus des tuteurs légaux, en particulier en ce qui concerne le patrimoine et les biens fonciers de la personne handicapée. Elle a fustigé les contraintes physiques à l'égard de personnes handicapées, qui semblent monnaie courante dans des centres médicaux. Cette pratique pourrait constituer un acte de torture.

L'experte s'est aussi enquise de cas éventuels de traite de personnes handicapées et du recours à la stérilisation forcée. Malgré la bonne volonté de l'État partie concernant les institutions, un autre expert a exhorté à investir plutôt dans des résidences de vie communautaires alternatives favorisant l'autonomie. Il a également invité à mieux axer l'attention sur les causes des châtiments corporels car les parents ou les gardiens ne comprennent pas pourquoi l'enfant ou la personne handicapée est différente des autres. Le respect du choix des personnes handicapées a aussi été mis en avant par l'expert à tous les points de vue (lieu de résidence, dépenses, biens particuliers, héritage, traitement médical etc.)

L'importance de l'accès à l'information pour les personnes atteintes d'une maladie mentale ou ayant des difficultés intellectuelles a été souligné par un expert qui a voulu connaître la réalité sur le terrain concernant l'accessibilité à des moyens tels que le braille, l'interprétation simultanée et la langue des signes. Les handicapés ont-ils facilement accès aux tribunaux sous des formes adaptées à leurs besoins, a-t-il encore demandé.

Un autre membre du Comité a abordé la question des interventions au lendemain d'une catastrophe et mentionné le Protocole de Sendai (Japon) sur la réduction des risques de catastrophes, qui prend en compte les besoins de personnes handicapées. Une experte s'est érigée contre le problème des «lits cages», assimilables à une torture ou à une punition grave. Ce crime que constituent les «lits cages» demeure totalement impuni, a-t-elle insisté, déplorant que les institutions qui se sont rendues responsables de cette pratique soient encore ouvertes justement à cause du vide juridique qui entoure cette pratique ignoble qui a déjà fait des morts. Elle a également posé des questions sur le placement forcé en institution (70 000 à 100 000 personnes vivent dans des institutions) et sur les traitements forcés. Lui faisant écho, un autre expert a fait remarquer que beaucoup de personnes handicapées y vivent faute de moyens financiers pour subvenir à leurs besoins. Il a encouragé le pays à des efforts soutenus pour leur faciliter un emploi décent. Le principe d'aménagement raisonnable existe-t-il dans les prisons pour les personnes handicapées, a demandé la présidente du Comité.

Une experte est revenue sur la stérilisation pour signaler des risques d'abus sexuels. Elle a demandé quel appui est proposé aux parents d'autistes. Elle a relevé le manque d'aménagements s'agissant de la langue des signes et les efforts insuffisants pour favoriser la participation des personnes handicapées à la collecte des données les concernant. Elle a aussi voulu savoir ce que l'État envisage pour inclure les handicapés dans les buts et objectifs du programme de développement pour l'après-2015.

Une experte a souhaité davantage de données sur le nombre des personnes handicapées vivant dans des conditions de pauvreté. Notant que 19 milliards de couronnes tchèques serviront aux programmes consacrés aux handicapés, elle a exprimé ses craintes que les pauvres figurant dans cette catégorie n'en bénéficieront guère, de même que ceux appartenant à des minorités, comme les Roms. Elle a encouragé à l'exercice du droit de vote, notamment des personnes ayant une capacité juridique limitée, et à leur accessibilité aux bureaux de vote. Elle s'est aussi demandé si le Médiateur des droits de l'homme était une institution conforme aux Principes de Paris.

Une autre experte s'est enquise des mesures prises en vue de l'inclusion dans le système éducatif et d'allocation de fonds d'assistance personnelle dans le cadre des aménagements raisonnables.

Un membre du Comité a posé des questions sur les médias et sur les fournisseurs de services électroniques afin de permettre aux personnes handicapées de participer à la vie publique.

Une experte a remarqué que l'article 173 du code civil autorise la limitation de la capacité juridique pour le mariage. Elle a prié l'État partie de se conformer à l'Article 23 de la Convention.

Un autre expert a demandé quel organisme était précisément chargé de la mise en œuvre effective de la Convention.

Le rapporteur du Comité chargé de l'examen du rapport de la République tchèque a sollicité des informations supplémentaires sur l'accessibilité aux contenus audiovisuels et sur l'amendement à la loi à cet égard. Existe-t-il des formations spécialisées sur les droits de l'homme des personnes handicapées? Se disant conscient de la crise économique en Europe, il a toutefois voulu avoir des commentaires sur les effets adverses et délétères des réformes économiques en cours sur les personnes et enfants handicapés. Notant que les handicapés de premier et deuxième degré risquent aussi de perdre leur pension de retraite. Il a voulu savoir ce qui est prévu pour qu'ils puissent recevoir une pension. Il a enfin encouragé à lire la publication du Conseil de l'Europe sur un tourisme sensible à personnes handicapées.

Un expert a prié la République tchèque de décrire les programmes de réinsertion sur le marché de l'emploi. Il 's'est par ailleurs interrogé sur le risque que le système de quotas ne soulève des problèmes entre les employeurs et les personnes handicapées sur le lieu de travail.

Réponses de la délégation

La délégation tchèque a d'abord répondu à une question sur les victimes handicapées de violences sexuelles, expliquant que la menace de violence était suffisante pour qualifier un acte de viol et qu'il n'était pas nécessaire d'établir un élément de résistance active de la victime. Le viol d'une personne handicapée est un crime avec circonstance aggravante.

La violence familiale à l'encontre des femmes handicapées est abordée par une loi de 2013 qui régit la situation des victimes de tout type de violences. Certains groupes sont plus vulnérables parmi ces victimes, notamment les personnes handicapées. Une assistance spéciale leur est fournie sous forme de conseil et d'assistance juridique. Un registre de prestataires gratuits est aussi offert aux victimes.

La délégation a rappelé que la Constitution garantit un enseignement public gratuit à tous les niveaux. L'on ne saurait dénier à quelque enfant que ce soit le droit à l'éducation fondé sur un handicap, que ce soit dans une école spécialisée ou dans un établissement scolaire public.

Avant l'année 2014, il était possible de déposséder totalement une personne de sa capacité juridique au motif qu'elle était handicapée. Depuis un an maintenant, une modification du code civil restitue ce droit, ce qui a un impact direct sur le droit de vote des personnes handicapées, entre autres changements positifs. Un tribunal peut d'ailleurs statuer sur cette question en cas de plainte.

Le chef de la délégation, s'agissant des critiques formulées par le Comité des droits de l'enfant sur la pratique des «boîtes à bébés», dont la République tchèque n'a pas l'apanage puisque l'Autriche et le Canada y ont également recours, a expliqué que lorsqu'un enfant risque d'être abandonné ou tué par ses parents car issu d'une grossesse souvent non désirée et secrète, il est important de leur permettre de recourir à la boîte à bébés. Les services sociaux ont comptabilisé 119 de ces bébés qui parfois ont même été restitués à leurs familles ou ont été adoptés dans de bonnes conditions.

La délégation a estimé que les préoccupations de membres du Comité s'agissant de la question de la terminologie résultent d'un problème de traduction, l'invalidité en Croate étant un terme générique pour tous les types de handicaps. L'expression désormais utilisée est «personne handicapée», conformément à la Convention. La seule situation pour laquelle on continue d'utiliser le terme «invalidité» est en rapport avec les prestations.

Toutes les lois sur l'accessibilité aux infrastructures et bâtiments publics ont un caractère contraignant et seuls deux entités sont chargées du contrôle de la qualité. Dans ce contexte, des procédures et sanctions disciplinaires sont prévues. Pour l'instant, aucun incident n'est à déplorer.

Depuis 2013, une nouvelle législation a été promulguée sur la protection juridique des enfants handicapés, qui est complexe compte tenu de toutes ses composantes sociales, éducatives et sanitaires. Grâce au nouveau système et en dépit des nombreux problèmes, de plus en plus d'enfants sont transférés des institutions à leur famille. Les moyens et capacités des autorités compétentes sont également renforcées et davantage de personnel a été recruté grâce à des fonds nationaux et de l'Union européenne. Des subventions et allocations familiales sont largement proposées aux familles pour qu'elles soient à même de prendre soin de leurs enfants handicapés, avec l'aide de travailleurs sociaux.

La délégation a souligné que le Plan national en faveur de l'instauration de l'égalité des chances des personnes handicapées 2010-2014 s'applique bien sûr également à la communauté rom et n'établit aucune distinction. La sixième Plan national 2015-2020 pour les personnes handicapées examine plus étroitement les besoins spécifiques de cette communauté.

Dans le domaine de l'emploi, les allocations pour les personnes handicapées sont fournies sur la base du degré de handicap établi par des experts médicaux. Est considérée comme handicapée toute personne dont l'état de santé est défavorable à long terme. Cela signifie qu'elle présente une pathologie médicale qui implique d'autres problèmes sur le court, moyen et long termes. Le principal critère est l'aptitude à travailler et le risque de régression. Le premier degré de handicap est de 35 à 49 %, le deuxième de 50 à 69 %, et le troisième, de 70% et plus. Cette procédure d'évaluation, très nuancée, ne s'arrête pas à l'aspect purement médical mais vise principalement à déterminer quel type d'emploi la personne concernée serait susceptible d'occuper dans les meilleures conditions pour elle.

Le système juridique couvre les mauvais traitements physiques et mentaux. Le châtiment corporel est interdit dans les établissements scolaires ainsi que dans tous les établissements chargés de la protection des enfants, y compris des handicapés. Le code de la famille protège les enfants des châtiments corporels au sein de la famille et à l'extérieur. Il faut éviter de porter atteinte à la dignité de l'enfant. Une Stratégie nationale contre la violence faite aux enfants incorpore la définition du châtiment corporel figurant dans la Convention sur les droits de l'enfant.

Différents programmes d'études et des classes spéciales sont réservées aux enfants malentendants; des efforts sont déployés en vue de leur inclusion dans des classes traditionnelles. La langue des signes n'est pas enseignée dans un organisme public mais des organisations non gouvernementales offrent un enseignement dans cette langue. La délégation a formé le vœu qu'une nouvelle loi sur l'enseignement de la langue des signes permettra d'offrir une éducation de qualité.

La République tchèque souhaite améliorer ses campagnes de sensibilisation à la Convention et envisage de former les maires et les juges à ses dispositions, et associer d'autres partenaires locaux, municipaux et régionaux.

La délégation a décrit les procédures d'urgence dont plusieurs pouvoirs publics ont la responsabilité, en particulier le Ministère de l'intérieur, les services de police et les pompiers, précisant qu'un registre est établi pour réagir à des situations d'urgence impliquant des personnes handicapées. Un DVD préparé par les pompiers explique la procédure à suivre pour différents types de handicaps.

Les «lits-cages» n'existent plus depuis 2012, a assuré la délégation, ajoutant que les mesures de contrainte ne sont utilisées qu'en dernier recours. Des ceintures de contrainte sont néanmoins utilisées par le personnel médical pour empêcher tout mouvement de la partie supérieur du corps. Elle ne l'est que pour administrer un traitement. La tendance consiste à réduire le nombre de lits à filet destinés à protéger les patients agités. Les mécanismes de surveillance dans les hôpitaux psychiatriques sont les mêmes que ceux qui existent dans les autre centres médicaux, conformément à la loi de santé de 2012. La réforme actuelle des soins psychiatriques prévoit une réduction drastique du recours aux moyens de contention. La loi sur les services sociaux, de son côté, stipule que la contrainte ne saurait être utilisée qu'en cas de danger imminent pour le patient ou pour autrui. Les prestataires médicaux constatent des lacunes à cet égard et la réforme envisage une approche davantage orientée vers la prévention de situations pouvant conduire à une menace ou à un danger.

Le nouveau code civil entré en vigueur le 1er janvier 2014 élargit la portée de la capacité juridique, qui ne peut être limitée par un tribunal que pour une période de trois ans. Trois mesures subsidiaires sont également prévues comme la représentation par un membre de la famille, l'assistance et le conseil dans la prise de décisions et la tutelle. La tutelle est bien réglementée et est obligatoirement supervisée par un tribunal. Une formation spéciale est dispensée aux juges à cet effet. Environ 36 000 tuteurs ont été répertoriés dans tout le pays.

Il n'existe pas de statistiques ventilées sur la violence aux personnes handicapées, l'un des délits les plus fréquents au sein de la famille. Les enfants affectés sont placés dans des foyers temporaires ou des familles d'accueil. Il n'y a pas de données sur la traite des personnes handicapées. Une nouvelle stratégie 2015-2020 sur la traite des personnes est en cours de préparation mais des rapports sont élaborés chaque année sur cette problématique. La portée de la loi sur la torture sera modifiée de façon à inclure les abus à l'égard des personnes handicapées au sein des institutions.

Le système des institutions psychiatriques est aussi en cours de réforme dans le but d'améliorer les conditions de vie des patients atteints de troubles mentaux. Un réseau de base prévoyant une trentaine d'institutions sera construit dès 2016 et le personnel des centres de santé mentale subira une formation stricte pour travailler dans des équipes multidisciplinaires. Un programme est également prévu pour modifier la perception des maladies mentales au sein du public. Une méthode d'évaluation des soins a également été approuvée, en coopération avec l'Organisation mondiale de la santé. Cette réforme favorisera un dépistage et des interventions rapides. L'hospitalisation ou le traitement sans le consentement des patients sont également définis dans la loi de la santé et doivent être approuvés par un tribunal. Le placement institutionnel forcé est également réglementé et le ministère de la justice a émis, en 2012, un protocole très détaillé pour protéger les droits et obligations de toutes les parties prenantes.

Les soins en institution sont très profondément enracinés dans l'esprit de la population, ce qui explique que l'État continue d'investir dans les maisons de retraite et autres résidences communautaires, notamment pour les personnes handicapées. De nouvelles méthodes de planification sont en cours d'élaboration, en collaboration avec les comtés, aux fins de l'amélioration des services sociaux et pour favoriser la désinstitutionalisation. Ces services résidentiels sont prioritaires dans le décaissement des subventions, y compris aux organisations non gouvernementales. Logement et soins ne sont pas séparés, a encore expliqué la délégation, insistant sur l'importance cruciale de l'aide au logement. La désinstitutionalisation pose encore des difficultés en raison d'une réticence de la population; c'est pourquoi des campagnes de sensibilisation sont menées sur cette question. De 2011 à fin 2013, le nombre de personnes en institution a diminué de 11 %, soit 1600 personnes au total. Il existe actuellement 67 507 personnes vivant dans des institutions.

En réponse à d'autre questions, la délégation a expliqué que la stérilisation exigeait le consentement du patient et, en cas d'incapacité juridique, du tuteur après une évaluation médicale et juridique. Un document doit en outre être signé par le patient, un témoin et le médecin, et sera conservé dans le dossier médical du patient. Une commission d'experts, composée de trois médecins, d'un psychologue clinique et d'un avocat, doit aussi tenir compte de la maturité intellectuelle du patient et refuser toute stérilisation d'un mineur. Un délai de sept jours est obligatoire entre la décision et la procédure de stérilisation. Celle-ci ne peut en aucun cas être effectuée en milieu carcéral. La castration est également réglementée par le législateur et n'est effectuée que dans les cas de déviance sexuelle dangereuse et de récidive. Elle n'est pratiquée que sur décision d'un tribunal et suite à l'évaluation d'une commission d'experts.

Dans les prisons, la surpopulation ne concerne pas les détenus handicapés car la législation a été améliorée pour leur permettre d'avoir des conditions de détention dignes. Pour les sourds et les aveugles, une loi de 1998 sur la langue des signes prévoit le recours gratuit à ce service par les détenus. Des rampes d'accès et des ascenseurs ont été construits et des financements prévus dans le but d'améliorer l'accessibilité en milieu carcéral.

Il n'existe pas de données statistiques sur les personnes handicapées ayant porté plainte pour discrimination et il reste à en élucider la raison. La délégation a souligné qu'il «n'est pas dans la nature» de la population tchèque de se défendre directement en justice. Des mécanismes sont peu à peu mis en place pour permettre de réclamer le droit à la non-discrimination comme la Ligue des droits de l'homme et l'Association des droits de l'homme, qui renseignent les personnes handicapées sur leurs droits en vertu de la Convention et d'autres instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. Le Médiateur des droits de l'homme, conformément à la loi contre la discrimination, est très actif dans ce domaine, et peut être saisi de plaintes et de doléances et fournir des informations exhaustives sur les moyens de défendre ces droits.

Des lignes directrices en vue de l'élimination des obstacles à l'accès aux bâtiments et aux espaces publics ont été diffusées auprès des ministères concernés et de la population. Les attractions touristiques sont aussi rendues plus accessibles et des programmes spéciaux ont favorisé la construction d'environ 20 mille appartements spécialement conçus pour les personnes handicapées.

La délégation a souligné que les personnes handicapées au deuxième ou troisième degré peuvent travailler sous certaines conditions, suite à une évaluation d'experts mais que leur nombre était très faible. En 2012, des mesures ont été prises pour restreindre les abus sur le marché du travail mais la situation est loin d'être idéale pour l'emploi des handicapés. Des déductions fiscales sont prévues pour les employeurs et des subventions seront accordées non seulement en vue de la création de nouveaux postes et le paiement des salaires, mais également à titre provisoire aux fins d'épauler les employeurs. Le Bureau du travail surveille en outre les postes ouverts aux personnes handicapées.

La loi sur l'enseignement de 2005 contenait les prémisses de l'inclusion des enfants handicapés. La délégation a dégagé deux tendances parallèles : l'intégration des enfants dans le système et la diminution des écoles ou classes spécialisées. En 2014, seuls 30 000 élèves fréquentaient les classes spécialisées et 40 000 étaient dans des classes traditionnelles. Un amendement consacrant l'inclusion et renonçant à la catégorisation des élèves a été approuvé par le Parlement et le sera dans les prochaines semaines par le Président. Par ailleurs, des mesures d'aide sont envisagées pour tous les élèves, avec une attention particulière aux besoins spécifiques de chacun. La délégation a dit la difficulté de fournir des chiffres sur le financement de l'éducation inclusive, mais évalué à 10 millions d'euros les fonds déboursés par l'État à ce propos, auxquels il faut ajouter des montants considérables de l'Union européenne et d'autres sources de financement.

L'enseignement de la langue des signes est également dispensé dans les écoles et les organisations non gouvernementales ne sont pas les seules à le faire. Cette langue est également enseignée aux parents.

La création d'un mécanisme indépendant de suivi de la Convention a été requise par les associations de personnes handicapées et il s'est avéré que le bureau du Médiateur des droits de l'homme était le mécanisme approprié pour répondre à cette requête. Le Médiateur effectue donc des visites dans les institutions pour vérifier qu'elles s'acquittent de leurs obligations en vertu de la Convention. Il a été convenu que dans le bureau du Médiateur, dix personnes hautement qualifiées travailleraient exclusivement sur les questions liées aux personnes handicapées.

Par ailleurs, un prix annuel est décerné à un journaliste ayant présenté une image satisfaisante des personnes handicapées dans les médias audiovisuels et sociaux. La radio et la chaîne de télévision publique tchèque utilisent la langue des signes et doivent diffuser les informations utiles aux personnes handicapées. Environ 500 émissions annuelles sont diffusées par les moyens d'information sur les droits des handicapées, en particulier ceux relatifs à la santé.

Le Comité gouvernemental chargé des personnes handicapées, créé avant la ratification de la Convention, est l'organe coordonnateur des questions y relatives au sein des ministères. Quant au Ministère du travail et des affaires sociales, il est le point focal pour l'application de la Convention. À ce titre, il a négocié le texte de cet instrument avant de devenir l'organe principal de la mise en œuvre de ses dispositions.

S'agissant de l'accès aux soins de santé, la délégation a mis l'accent sur l'égalité des chances. Elle a informé le Comité que des tablettes ont été distribuées dans 82 hôpitaux, y compris régionaux, pour aider le personnel médical à communiquer avec les personnes atteintes de surdité, avec l'aide d'une organisation non gouvernementale. Cette ONG a d'ailleurs reçu le prix 2014 du Ministère de la santé pour sa contribution remarquable à l'accès au droit à la santé. Pour sa part, le personnel médical et paramédical suit des cours spéciaux lors de leur formation pour être à même de traiter des personnes handicapées. La loi sur le personnel médical est également en cours de réforme, a expliqué la délégation, qui a annoncé que sa version finale sera soumise au Gouvernement à la fin de l'année.

Des prestations d'aide à la mobilité, à l'achat et au conseil sont fournies aux handicapés et des indemnités sont versées à ceux vivant en deçà du seuil de pauvreté, pour répondre à leurs besoins matériels. Conscient que la plupart des personnes handicapées se situent tout juste au-dessus du seuil de pauvreté, l'État compte apporter davantage de contributions.

Conclusions

La délégation de la République tchèque s'est félicitée de l'occasion de poursuivre le dialogue ouvert et constructif avec les membres du Comité, ce qui aide la République tchèque à progresser dans l'application de la Convention. Elle a reconnu la nécessité d'investir plus d'efforts dans la collecte des données et statistiques, et de l'importance de services ouverts et humanisés dans le cadre de la poursuite de la désinstitutionalisation. De très nombreux défis restent à relever mais dans un avenir très proche, l'État espère mettre en place un système de logement adéquat et continuer la réforme du système psychiatrique. La réforme concerne aussi la question de la tutelle, des droits des enfants handicapés et de l'accès à l'emploi et à l'éducation.

MME MARÍA SOLEDAD CISTERNAS, Présidente du Comité, a estimé que la déclaration finale de la République tchèque montre la disposition du pays à répondre en toute franchise aux questions posées.

M. TATIÆ, rapporteur du Comité pour la République tchèque, a reconnu que la barre avait été placée très haut pour la République tchèque. Il a aussi rappelé que tout État partie pouvait solliciter une assistance technique pour la mise en œuvre de la Convention.

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