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Communiqués de presse Organes conventionnels

Comité pour l'Élimination de la discrimination: audition d'ONG sur le Cap-Vert, la Bosnie-Herzégovine, la Serbie et le Royaume-Uni

15 Juillet 2013

Comité pour l'élimination de la discrimination
  à l'égard des femmes

15 juillet 2013

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a entendu, à l'occasion d'une séance informelle cet après-midi, des organisations non gouvernementales sur la mise en œuvre de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discriminations à l'égard des femmes dans les quatre pays dont les rapports seront examinés cette semaine, à savoir: Cap-Vert, Bosnie-Herzégovine, Serbie et Royaume-Uni.  Des interventions ont également été faites par la Commission sur l'égalité et les droits de l'homme du Royaume-Uni, la Commission des droits de l'homme de l'Irlande du Nord et la Commission écossaise des droits de l'homme.

S'agissant du Cap-Vert, les questions abordées ont notamment porté sur le manque d'éducation de qualité, l'absence d'égalité des chances devant l'emploi pour les femmes handicapées, la stérilisation forcée de femmes handicapées, l'absence de mécanismes spécifiques d'assistance pour l'accès des femmes handicapées à la justice.  Il a été recommandé au Gouvernement cap-verdien de revoir sa législation dans tous les domaines de sorte à y inclure le respect des droits des handicapées, et de sensibiliser la société à ces droits.  Le Comité des femmes handicapées de la Fédération cap-verdienne des Associations de personnes handicapées a fait une présentation et répondu aux questions des membres du Comité.

Au sujet de la Bosnie-Herzégovine, les représentants de la société civile ont dénoncé le fait que les femmes soient écartées des centres de prise de décisions législatives et politiques.  En outre, peu de progrès ont été accomplis, depuis 2009, en ce qui concerne le jugement des auteurs de viols massifs commis pendant les années de la guerre de 1992-1995; vingt ans après la guerre, de nombreuses femmes victimes n'ont toujours pas accès à la justice.  La marginalisation des femmes roms, des réfugiées et personnes déplacées a également été dénoncée.  Ont participé au débat United Women Banja Luka et TRIAL.

S'agissant de la Serbie, la représentante d'une organisation non gouvernementale a affirmé que des femmes qui collaborent avec le Comité au sujet de la situation dans ce pays sont menacées par des extrémistes.  De manière générale, la prédominance de l'extrémisme tant dans les foyers que dans les rues de Serbie été dénoncée.  Une ONG a par ailleurs attiré l'attention sur les multiples abus à l'égard des femmes handicapées, notamment le viol par le conjoint, contre lequel ni la loi ni les préjugés sociaux n'offrent de recours.  L'Autonomous Women's Centre, Out of Circle et le Réseau des femmes roms ont apporté leurs témoignages sur la Serbie.

Enfin, les organisations du Royaume-Uni ont mis l'accent sur l'impact disproportionné du programme d'austérité gouvernementale sur les femmes, le démantèlement de la structure nationale sur l'égalité des chances, la paupérisation des femmes et l'élimination de services naguère gratuits, en particulier d'assistance judiciaire.  Il a été souligné que les services d'avortement sont déniés aux femmes irlandaises alors qu'ils ont disponibles au Royaume-Uni.  Le Groupe de travail sur la Convention au Royaume-Uni et la Northern Ireland Women's European Platform sont intervenues, ainsi que la Commission sur l'égalité et les droits de l'homme du Royaume-Uni, la Commission écossaise des droits de l'homme et la Commission des droits de l'homme de l'Irlande du Nord.

Les présentations des organisations non gouvernementales et des institutions nationales des droits de l'homme ont été suivies d'échanges de vue avec les membres du Comité.


Le Comité examinera demain, à partir de 10 heures, le rapport du Cap-Vert (CEDAW/C/CPV/7-8 à paraître en français)


Échanges de vues avec les organisations non gouvernementales et institutions nationales des droits de l'homme

S'agissant du Cap-Vert

La représentante du Comité des femmes handicapées de la Fédération cap-verdienne des Associations de personnes handicapées, a mis l'accent sur le manque d'éducation de qualité, l'absence d'égalité des chances devant l'emploi pour les femmes handicapées, la stérilisation forcée et le manque de mécanismes spécifiques d'assistance pour l'accès à la justice, en particulier en ce qui concerne les actes de violence.  Les femmes handicapées sont confrontées à des discriminations multiples.  Souvent, les familles surprotègent ou sous-estiment les filles handicapées, a indiqué l'oratrice, qui a rappelé que les femmes handicapées sont piégées dans des relations violentes faute de moyens de subsistance indépendante.  Les femmes ayant des handicaps psychosociaux sont souvent stérilisées contre leur gré.  La représentante a recommandé que les femmes handicapées participent à la formulation et à la mise en œuvre de lois qui les concernent.  Le Gouvernement cap-verdien devrait réviser sa législation dans tous les domaines pour y inclure le respect des droits des handicapées.  Il importe également de sensibiliser la société tout entière à ces droits, a-t-elle conclu. 

Des expertes ayant demandé quelle était la législation sur les femmes handicapées et si elle évoluait, les organisations non gouvernementales ont indiqué qu'il existe une loi sur les droits des handicapés et qu'un projet de révision est soutenu par Handicap International.  Toutefois, on n'attend pas de changement profond.

S'agissant de la Bosnie-Herzégovine

Une représentante d'United Women Banja Luka a attiré l'attention du Comité sur la marginalisation politique et économique des femmes, affirmant que l'État avait une politique pénale très faible face aux discriminations à l'égard des femmes.  Les femmes ont peur et sont découragées de signaler des actes de violence.  En matière de participation politique, les femmes sont marginalisées dans les partis politiques, les médias manifestent des stéréotypes à leur égard et les réformes, constitutionnelles et autres, sont gérées par un petit cercle d'hommes.  D'autre part, une intervenante de la même organisation a signalé que les femmes roms sont moins instruites que les autres, alors que les femmes les lesbiennes, bisexuelles et transgenres sont souvent l'objet de discriminations.  Quant aux travailleuses du sexe et aux femmes qui se droguent, elles sont particulièrement vulnérables au VIH/sida.  United Women Banja Luka a exhorté l'État à s'assurer que tous les travailleurs sociaux et des centres de santé suivent des formations sur la violence à l'égard des femmes. 

Pour sa part, la représentante de TRIAL a dénoncé le nombre considérable de viols dans le pays et souligné qu'il y a eu 60 inculpations pour quelque 20 000 victimes pendant le conflit qu'a connu le pays.  Elle a regretté que peu de progrès aient été accomplis depuis 2009 dans la reddition de compte des viols commis durant la guerre.  Les parentes de personnes disparues ne bénéficient toujours par d'indemnités au titre du Fonds spécial pour les personnes disparues.  Plus de vingt ans après la guerre, de nombreuses femmes victimes n'ont toujours pas accès à la justice, a-t-elle fait remarquer, en demandant que le droit de victimes au recours soit garanti. 

Suite à des questions d'experts, les organisations non gouvernementales bosniaques ont déclaré que le Gouvernement devrait ratifier d'ici la fin de cette année la Convention d'Istanbul du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique.  Elles ont précisé avoir un bon dialogue avec le Gouvernement, avant de recommander au Comité de demander une accélération du processus de mise en œuvre de la Convention pour l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, compte tenu de la complexité des procédures juridiques de l'État partie.  L'égalité hommes-femmes fait partie du cursus scolaire mais la Convention n'est pas régulièrement citée devant les tribunaux, ont-elles précisé.

S'agissant de la Serbie

La représentante de l'Autonomous Women's Centre (AWC) a indiqué d'emblée qu'elle et d'autres femmes qui présentent leur rapport au Comité sont menacées par les extrémistes en Serbie.  Dénonçant l'extrémisme tant dans les foyers que dans les rues de Serbie, elle a ajouté que l'État n'avait rien fait pour éliminer ces problèmes et que des extrémistes religieux attaquent aussi les droits des femmes et incitent à des agressions et à l'adoption de lois comme celle annoncée en vue de l'interdiction de l'avortement.  La disponibilité de services gynécologiques dépend du statut et du lieu où vit la femme.  L'État n'exerce pas de pressions sur les hommes pour qu'ils s'acquittent de leurs obligations civiles.  AWC a appelé l'État de Serbie à agir d'une manière plus responsable.

S'exprimant au nom de quatre organisations s'occupant des droits des handicapés qui ont participé à la préparation du rapport parallèle, la représentante du Réseau «Out of Circle» a particulièrement traité des violences contre les handicapées et de différentes formes d'abus.  D'autre part, le viol conjugal n'est pas reconnu et les femmes handicapées sont obligées de continuer à vivre avec leur violeur, sans aucune protection ni alternative juridique.  Le préjugé social veut qu'une handicapée soit asexuée, ce qui fait que les femmes handicapées ne disposent pas de services ou d'accès aux équipements adéquats dans les centres de santé. 

La représentante du Réseau des femmes roms a énuméré une liste de difficultés rencontrées par les femmes rom, en dépit d'un plan pour améliorer la situation des Roms.  Elle a notamment dénoncé la marginalisation des Roms et le fait que les propositions du Réseau des femmes roms pour remédier à certains problèmes qu'elles rencontrent soient systématiquement rejetées.  Les lesbiennes, les réfugiées et déplacées vivent également des situations de marginalisation et de déni de leurs droits en Serbie.  La représentante a en outre regretté que la Convention du Conseil de l'Europe sur la violence à l'égard des femmes ne soit pas encore ratifiée par la Serbie. 

Lors du dialogue avec les membres du Comité, une experte s'est particulièrement arrêtée sur la question des groupes extrémistes qui s'en prennent sciemment aux femmes militantes.  Elle a en outre noté que la Serbie avait quelque peu progressé depuis le dernier rapport grâce à l'adoption d'une loi générale sur la non-discrimination et d'une autre sur la parité ainsi que l'adoption de mécanismes de plaintes et d'un grand nombre de mesures pour améliorer la place et le rôle de la femme au sein de la société.  Il s'agit désormais d'appliquer concrètement tous ces textes et de procéder à une évaluation qualitative des résultats, a ajouté l'experte, qui a demandé aux ONG quels étaient, outre les ressources financières, les facteurs les plus importants qui empêchent l'application des politiques d'égalité des chances. 

Les ONG ont en outre expliqué qu'en Serbie, l'État ne dispose pas de statistiques sur le nombre de femmes tuées par leurs partenaires ou par un membre de la famille.  Ce sont les ONG qui s'occupent de ces questions.  L'État ne protège pas les femmes, même dans les cas où la police savait, avant l'homicide par exemple, qu'il s'agissait d'un foyer violent.  Une audience publique au parlement serbe aura lieu sous peu mais les activités de sensibilisation sont laissées aux bons soins des ONG de femmes et à leurs partenaires de différents pays d'Europe.  Il en va de même pour ce qui est de faire connaître la Convention et le Protocole facultatif. 

Une autre intervenante, représentant la communauté lesbienne, a dénoncé «le fascisme croissant dans le pays», ajoutant que, lors de la marche des fiertés homosexuelles (Gay Parade), 6000 policiers étaient présents et que l'État se montre clément avec les groupuscules fascistes. 

S'agissant du Royaume-Uni

La représentante du Groupe de travail sur la Convention au Royaume-Uni a déclaré que le programme d'austérité du Gouvernement avait eu un impact disproportionné sur les femmes, ce qui fait basculer beaucoup d'entre elles dans la pauvreté.  L'accès gratuit à la justice a totalement disparu pour les femmes pauvres.  Les mesures prises grâce aux politiques récentes pour prévenir et lutter contre la violence ne sont pas dûment mises en œuvre.  La structure nationale sur l'égalité des chances a été démantelée et rien n'est prévu dans le nouveau modèle.  Les barrières comportementales subsistent en matière d'égalité hommes-femmes. 

Dans le même esprit, la représentante de l'organisation ENGENDER a indiqué que les femmes ont payé le tribut le plus fort aux politiques d'austérité, ajoutant que, parmi elles, les femmes handicapées sont très affectées.  Elle a invité à des investissements publics dans l'infrastructure sociale et engagé le Gouvernement écossais à prendre des mesures en vue du renforcement des infrastructures scolaires, surtout pour la petite enfance.  Elle a aussi souligné que, dans 75% des cas, les plaintes pour viols n'ont pas de suite en raison d'une loi qui veut que les faits soient corroborés par deux sources au moins.

La représentante de la Plate-forme des femmes européennes d'Irlande du Nord (Northern Ireland Women's European Platform - NIWEP) a souligné que la résolution 1325 du Conseil de sécurité avait un grand potentiel que le Royaume-Uni n'applique pas pleinement à l'Irlande du Nord.  Les femmes des minorités ethniques sont particulièrement vulnérables à la violence.  Le Comité pourrait demander au Gouvernement quelles mesures il compte prendre pour lutter contre la violence à l'égard des femmes des minorités et les gens du voyage.  Les services d'avortement sont déniés aux femmes irlandaises bien qu'ils soient disponibles au Royaume-Uni, a-t-elle regretté en exigeant que l'avortement soit réglementé en Irlande du Nord et que le Royaume-Uni suive les recommandations formulées par le Comité. 

Dans le cadre du dialogue entre les ONG et les experts du Comité, une ONG a souligné la difficulté à obtenir des données sur les femmes handicapées pour les inclure dans le rapport parallèle.  Une représentante d'ONG écossaise a indiqué que les autorités publiques viennent de publier les documents sur les amendements à la loi sur l'égalité et que les ONG commencent à peine à les éplucher.  Elle a toutefois estimé que la notion de sexospécificité avait été perdue en cours de route.  Une autre oratrice a observé que la loi sur l'égalité n'avait plus de répercussions sur la vie réelle des femmes.  L'argument a fait l'objet d'un début de contestation mais le manque de temps a empêché l'ouverture d'un débat. 

Une ONG a souligné que dans la loi sur l'égalité, il y a eu une interprétation législative neutre, qui ne prend pas en considération la différence entre hommes et femmes.  Une étude menée l'année dernière a montré que 75% des femmes violées n'ont pas de possibilité d'atteindre le niveau de preuves élevées requis par l'État.  En Écosse, il existe un besoin croissant en assistance juridique car il y a chaque plus de femmes pauvres.  Or, il y a un refus d'exempter les femmes de violence familles de subir un test pour pouvoir bénéficier d'une assistance judiciaire.  Les mesures de protection en Écosse sont réservées aux femmes les plus aisées. 

MME ANNA HENRY, membre de la Commission sur l'égalité et les droits de l'homme du Royaume-Uni, s'est fait l'écho des préoccupations des ONG de ce pays, en particulier pour ce qui a trait aux méfaits des politiques d'austérité sur les femmes.  Ainsi, s'agissant des allocations, un seul paiement est effectué pour un ménage et il n'est pas certain que les femmes en bénéficient.  Elle a souhaité que le Gouvernement explique comment il escomptait assurer le suivi de la situation des femmes.  Le Gouvernement a pris des mesures de financement de services de lutte contre la violence à l'égard des femmes mais il reste à voir comment les marchés seront octroyés dans ce domaine, a-t-elle encore déclaré.  Des initiatives doivent être prises en vue de l'amélioration tant de l'éducation des filles que de l'accès des femmes à l'emploi.  Elle a appelé de ses vœux la préparation d'un calendrier clair.

M. DIEGO QUIROZ, membre de la Commission écossaise des droits de l'homme, a mis en relief la protection juridique des femmes.  La Convention n'a pas encore été intégrée au système juridique écossais, a-t-il expliqué.  Il a en outre estimé qu'un retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne pourrait avoir des conséquences négatives sur l'application des Conventions européennes relatives aux femmes.  Il a souhaité des directives sur le respect de la vie privée des femmes dans les cas de viol.  La réforme des services sociaux et les coupures budgétaires ont eu des répercussions très négatives sur les droits des femmes.  Il a recommandé une amélioration des infrastructures infantiles pour faciliter l'emploi des mères. 

MME GENEVIEVE SAUBERLI, membre de la Commission des droits de l'homme de l'Irlande du Nord, a abordé des questions liées à l'exploitation sexuelle des filles, à la santé reproductive et à la participation des femmes à la vie publique et politique, y compris l'application de la résolution 1325.  La loi autorise l'avortement uniquement lorsque la santé mentale et physique de la mère est très gravement menacée, a-t-elle rappelé.  Elle a exhorté l'Irlande du Nord à respecter les dispositions de la Convention relatives à l'inceste et au viol.  Elle a exprimé son inquiétude face à la sous-représentation des femmes dans les instances judiciaires et politiques.  Enfin, elle a rappelé l'accord de 1998 du Vendredi Saint qui insiste sur une participation politique égale, avant de conclure en appuyant les recommandations des commissions des droits de l'homme du Royaume-Uni et de l'Écosse. 

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