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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité des droits de l'enfant examine les rapports du Rwanda

31 Mai 2013

Comité des droits de l'enfant 

31 mai 2013

Le Comité des droits de l'enfant a examiné, hier après-midi et aujourd'hui, les rapports présentés par le Rwanda au titre de la Convention relative aux droits de l'enfant et de ses deux Protocoles facultatifs portant, respectivement, sur l'implication d'enfants dans les conflits armés et sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants. 

Mme Zaina Nyiramatama, Secrétaire exécutive de la Commission nationale pour les enfants du Rwanda, a notamment déclaré que depuis la présentation du dernier rapport, le Rwanda a enregistré des progrès significatifs sur la voie de la réalisation des normes les plus élevées possibles s'agissant de la mise en œuvre de la Convention et de ses deux Protocoles facultatifs.  En 2011, a-t-elle fait valoir, le pays a adopté une politique intégrée en faveur des droits de l'enfant, assortie d'un plan stratégique, qui s'articule autour de sept axes: identité et nationalité; soins familiaux et alternatifs en faveur des enfants; survie, santé et niveaux de vie; éducation; protection; justice; participation des enfants.  Mme Nyiramatama a par ailleurs indiqué qu'une nouvelle politique sur les enfants en conflit avec la loi est en cours d'élaboration afin de rendre le système de justice juvénile adapté aux enfants.  Elle a également attiré l'attention sur deux lois adoptées récemment qui incriminent, notamment, le fait d'infliger une souffrance à un enfant, l'imposition d'un châtiment dégradant et humiliant à un enfant, le trafic de personnes, ainsi que le fait d'impliquer un enfant dans la pornographie, dans l'exploitation d'un enfant, dans un conflit armé, dans le travail des enfants, dans les stupéfiants et dans le trafic d'armes.

La délégation rwandaise, également composée du Procureur principal de l'État, M. Eugène Rusanganwa, , a répondu aux questions soulevées par les membres du Comité s'agissant, notamment, de la place de la Convention dans l'ordre juridique interne; des questions de disparités entre les régions; de l'enregistrement des naissances; de la violence faite aux enfants; du travail des enfants; de la loi sur les réfugiés; des questions d'éducation et de santé; de la justice pour mineurs; ou encore de l'implication d'enfants dans le conflit armé en République démocratique du Congo.

À cet égard, le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport présenté par le Rwanda au titre du Protocole facultatif sur les enfants et les conflits armés, M. Gehad Madi, a souligné que la situation à la frontière entre le Rwanda et la République démocratique du Congo est source de grande préoccupation pour le Comité; de nombreuses informations indiquent en effet que les enfants rwandais et les enfants réfugiés sont recrutés par des groupes armés opérant en République démocratique du Congo, a-t-il précisé.  En outre, certaines informations indiquent que les autorités rwandaises à la frontière auraient facilité le recrutement d'enfants, en particulier au sein du groupe armé M23 auquel le Rwanda fournirait par ailleurs armes et munitions et un appui à différents niveaux.  Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport présenté par le Rwanda au titre du Protocole sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, M. Hatem Kotrane, a souligné que nouveau Code pénal mis en place en 2012 ne couvre pas tous les actes proscrits par le Protocole.

La rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport rwandais présenté au titre de la Convention, Mme Agnès Akosua Aidoo, a pour sa part relevé que le Rwanda est sur la bonne voie pour la réalisation de la plupart des objectifs du Millénaire pour le développement d'ici 2015.  Pour autant, a poursuivi la rapporteuse, le Rwanda reste confronté à des défis importants du point de vue de la mise en œuvre de la Convention.  Certains de ces défis sont systémiques et doivent être relevés avec vigueur, a-t-elle souligné, citant en particulier les disparités géographiques et les inégalités persistantes entre les provinces méridionales et septentrionales du pays et entre les zones rurales et urbaines, les disparités entre les sexes et la violence à l'encontre des fillettes et des femmes, ou encore les niveaux élevés de pauvreté.  Mme Aidoo a en outre fait part de sa préoccupation s'agissant de diverses informations qui rapportent l'existence d'une très grave discrimination et stigmatisation affectant de nombreux enfants au Rwanda, en particulier les enfants nés d'un viol durant le génocide, des enfants handicapés (en particulier les fillettes handicapées), des enfants à la tête d'un foyer en raison du génocide ou du VIH/sida ou encore des enfants de la communauté minoritaire batwa.

Le Comité présentera des observations finales sur les rapports du Rwanda à l'issue de la session, qui s'achève le vendredi 14 juin prochain.


Lundi matin à 10 heures, le Comité entamera l'examen du rapport présenté par Israël au titre de la Convention (CRC/C/ISR/2-4).


Présentation des rapports

Présentant les rapports du Rwanda (CRC/C/RWA/3-4, CRC/C/OPSC/RWA/1 et CRC/C/OPAC/RWA/1), MME Zaina Nyiramatama, Secrétaire exécutive de la Commission nationale pour les enfants du Rwanda, a rappelé que son pays avait été confronté à des défis considérables, «avec pour point d'orgue le génocide de 1994 contre les Tutsi».  Ce génocide non seulement s'est soldé par la mort de plus d'un million de citoyens rwandais mais a également laissé le pays quasiment sans cadres institutionnels et sans ressources humaines.  L'État est néanmoins parvenu à mettre en place des institutions et des politiques qui ont permis au pays de se reconstruire et au peuple de restaurer son tissu économique et social, a fait valoir Mme Nyiramatama.

Mme Nyiramatama a ensuite souligné que le présent rapport a été préparé à l'issue d'un vaste processus de consultations ayant impliqué le Gouvernement, la société civile et les représentants communautaires.  Depuis la présentation du dernier rapport, le Rwanda a enregistré des progrès significatifs sur la voie de la réalisation des normes les plus élevées possibles s'agissant de la mise en œuvre de la Convention et de ses deux Protocoles facultatifs, a assuré la Secrétaire exécutive de la Commission nationale pour les enfants.  En 2011, a-t-elle fait valoir, le pays a adopté une politique intégrée en faveur des droits de l'enfant, assortie d'un plan stratégique, qui constitue le document d'orientation de l'action des institutions gouvernementales et de leurs partenaires aux fins de la mise en œuvre de la Convention et de ses Protocoles.  Cette politique en faveur des droits de l'enfant s'articule autour de sept axes, a précisé Mme Nyiramatama: identité et nationalité; soins familiaux et alternatifs en faveur des enfants; survie, santé et niveaux de vie; éducation; protection; justice; participation des enfants.

En vertu de la réforme apportée en mars 2012 à la stratégie nationale des soins apportés aux enfants, quelque 1465 enfants ont été retirés des orphelinats et réintégrés dans des familles au cours des 17 derniers mois, a fait valoir Mme Nyiramatama.  Elle a ajouté qu'un mécanisme de contrôle a été mis en place dans ce contexte.  Dans le domaine de la santé et du bien-être des enfants, le Rwanda s'est efforcé de parvenir à une réalisation globale des droits de l'enfant en développant des stratégies visant à réduire la mortalité maternelle et infantile ainsi qu'à promouvoir l'accès aux soins de santé et à améliorer la situation nutritionnelle des enfants et des mères.  Parallèlement, le Gouvernement continue d'améliorer les conditions de vie des enfants vivant dans des institutions.  Mme Nyiramatama a aussi indiqué que des cadres légaux et politiques ont été mis en place afin de prévenir le travail des enfants et protéger les enfants handicapés. 

Mme Nyiramatama a par ailleurs indiqué qu'une nouvelle politique sur les enfants en conflit avec la loi est en cours d'élaboration afin de rendre le système de justice juvénile adapté aux enfants. 

D'autre part, l'éducation, au Rwanda, est inclusive et non discriminatoire, a fait valoir la Secrétaire exécutive de la Commission nationale pour les enfants, précisant que le système «Ubudehe» est prévu pour les enfants les plus vulnérables qui bénéficieront d'une aide du Gouvernement. 

Mme Nyiramatama a ensuite expliqué que le Gouvernement rwandais avait mis en place la Commission nationale pour les enfants en tant qu'organe chargé de la coordination de l'ensemble des interventions en faveur des enfants.  Elle a enfin attiré l'attention sur deux nouvelles lois adoptés par le Rwanda: la Loi de 2011 sur les droits et la protection des enfants et le nouveau Code pénal qui incrimine, notamment, le fait d'infliger une souffrance à un enfant, l'imposition d'un châtiment dégradant et humiliant à un enfant, le trafic de personnes, ainsi que le fait d'impliquer un enfant dans la pornographie, dans l'exploitation d'un enfant, dans un conflit armé, dans le travail des enfants, dans les stupéfiants et dans le trafic d'armes.

Examen du rapport au titre de la Convention

Observations et questions des experts

MME AGNES AKOSUA AIDOO, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport présenté par le Rwanda au titre du Protocole facultatif sur l'implication d'enfants dans les conflits armés, a salué la voie positive de la réconciliation nationale et de la reconstruction d'après-conflit qu'a empruntée le Rwanda suite au génocide qu'a subi le pays il y a une vingtaine d'années.  Aujourd'hui, le Rwanda a l'une des économies les plus dynamiques d'Afrique et est sur la bonne voie pour la réalisation de la plupart des objectifs du Millénaire pour le développement d'ici 2015.  Ce pays peut en outre se prévaloir de posséder la plus forte proportion au monde de femmes siégeant au Parlement, a ajouté Mme Aidoo.  Depuis 2008, le Rwanda a fait preuve de volonté politique en retirant les réserves qu'il avait émises à l'égard d'un nombre significatif de traités internationaux de droits de l'homme.  Il convient en outre de saluer le nombre impressionnant de lois, politiques et institutions ayant pour objectif la protection et de la promotion des droits de l'enfant, a ajouté la rapporteuse, citant en particulier la Loi de 2011 sur les droits et la protection de l'enfant, la politique nationale de lutte contre le travail des enfants mise en place en 2012 ou encore la mise sur pied en 2011 de la Commission nationale pour les enfants.

Pour autant, a poursuivi la rapporteuse, le Rwanda reste confronté à des défis importants du point de vue de la mise en œuvre de la Convention.  Certains de ces défis sont systémiques et doivent être relevés avec vigueur, a-t-elle souligné, citant en particulier les disparités géographiques et les inégalités persistantes entre les provinces méridionales et septentrionales du pays et entre les zones rurales et urbaines, les disparités entre les sexes et la violence contre les fillettes et les femmes, ou encore les niveaux élevés de pauvreté affectant 44,9% de la population et jusqu'à 60% des enfants – ce qui ne manque pas d'avoir un impact important sur la santé et l'éducation des enfants, sur le travail des enfants et sur leur exploitation.

Mme Aidoo s'est ensuite dite préoccupée par la faiblesse des allocations budgétaires globalement consacrées par le Gouvernement aux droits de l'enfant – à l'exception de celles allouées au secteur de l'éducation – en comparaison avec les sommes fournies par les partenaires du développement.  Ainsi, il semble que le budget alloué par le Gouvernement à la politique intégrée en faveur des droits de l'enfant ne soit que de 1,3 million de dollars, alors que les sommes allouées en soutien de cette politique par les partenaires du développement atteignent 13 millions de dollars, ce qui ne va pas sans poser la question du respect par le Rwanda de son obligation, en vertu de l'article 4 de la Convention, de consacrer le maximum de ses ressources disponibles à l'action en faveur des droits de l'enfant. 

Les données statistiques font défaut s'agissant des enfants vivant dans la pauvreté, des foyers ayant un enfant à leur tête et autres enfants se trouvant en situation particulièrement vulnérables tels que les enfants batwas et ceux appartenant à d'autres minorités, a poursuivi Mme Aidoo.

La rapporteuse a ensuite fait part de sa préoccupation s'agissant de diverses informations qui témoignent d'une très grave discrimination et stigmatisation affectant de nombreux enfants au Rwanda, en particulier les enfants nés d'un viol durant le génocide, des enfants handicapés (en particulier les fillettes handicapées), des enfants dirigeant un foyer en raison du génocide ou du VIH/sida ou encore des enfants de la communauté minoritaire batwa – que l'État rwandais préfère qualifier d'enfants historiquement marginalisés.  Tous ces enfants pâtissent d'importantes disparités et privations en termes de soins de santé, d'éducation et d'accès aux services sociaux, a insisté Mme Aidoo.

Un membre du Comité a fait part de sa préoccupation s'agissant du système d'enregistrement des naissances, faisant observer que si, selon les autorités rwandaises, 82% des enfants de moins de 5 ans sont enregistrés, d'autres informations indiquent que seuls 62% des enfants sont enregistrés.  Un autre expert a toutefois fait observer que, même s'il convient pour le Rwanda d'améliorer la situation dans ce domaine, un taux d'environ 60% d'enregistrement des naissances reste louable au regard de la moyenne africaine qui se situe en la matière à 44%.
La situation n'est pas très claire concernant l'établissement de la paternité pour les enfants nés hors mariage, a en outre relevé une experte; est-il possible d'établir la paternité pour ces enfants et, dans ce cas, l'initiative revient-elle à la mère ou à l'État. 

Un expert s'est enquis des mécanismes prévus dans le pays pour la promotion de l'identité ethnique ou encore de l'identité sexuelle des individus: comment la législation nationale aborde-t-elle la question du respect de la diversité?  Qu'en est-il de la législation en matière de lutte contre la xénophobie, le racisme ou encore l'homophobie, a demandé cet expert?

Une experte a fait observer que le Rwanda a consenti des efforts considérables dans le domaine de l'éducation depuis 1994; après le génocide, les opportunités éducatives, jadis limitées, se sont multipliées, a-t-elle insisté.  L'accès à l'éducation s'est élargi de manière considérable ces dernières années, mais la qualité de l'éducation, en revanche, reste insuffisante.  Le taux de scolarisation au niveau du primaire, qui se situe à 95%, continue d'augmenter pour les filles comme pour les garçons; il se situe à 97% pour les premières et à 94% pour les seconds.  En revanche, le taux global de scolarisation au secondaire semble avoir accusé une diminution ces dernières années, et l'experte s'est interrogée sur les mesures prises pour lutter contre les causes des abandons scolaires au niveau du secondaire. 

La pauvreté générale a certes été réduite au Rwanda, mais la moyenne dissimule des disparités et à cet égard, c'est la situation des personnes particulièrement vulnérables qui préoccupe le Comité, a pour sa part souligné une experte, faisant observer que selon les derniers chiffres disponibles, le taux de pauvreté des enfants atteint 60%.

Un membre du Comité s'est inquiété de chiffres indiquant que près de 60 000 enfants travailleraient au Rwanda dans des emplois dangereux; aussi, s'est-il enquis des mesures prises par les autorités afin de lutter contre le travail des enfants.  Est-il vrai que des enfants de moins de 17 ans peuvent travailler dans des mines souterraines, a demandé cet expert?

L'âge de la responsabilité pénale serait fixé à 14 ans au Rwanda, mais il semblerait qu'il soit tout de même possible d'arrêter un enfant dès l'âge de 10 ans si le délit qu'il est suspecté d'avoir commis est passible d'une peine d'emprisonnement supérieure à cinq ans, s'est inquiété un expert.

Une experte s'est pour sa part enquise des initiatives prises par le pays pour combattre la malnutrition et promouvoir l'allaitement maternel.

Si tous les enfants jouissent incontestablement d'une égalité de droits en vertu de la législation en vigueur au Rwanda, il ne semble pas qu'ils jouissent réellement d'une égalité de chances, a fait observer une experte.

Réponses de la délégation

Pour ce qui est de la place de la Convention dans l'ordre juridique interne, la délégation a indiqué que, conformément au système moniste adopté par le Rwanda, les dispositions des conventions ratifiées par l'État sont directement applicables et priment sur la législation interne, à l'exception de la Constitution.

Le Rwanda est un État de droit, de sorte qu'une personne ne saurait être privée de son droit de porter plainte lorsqu'elle s'estime avoir été victime d'une privation de l'un de ses droits, a fait valoir la délégation.  L'enfant mineur ne peut porter directement plainte et ce sont donc ses parents ou tuteurs qui déposent plainte en son nom, a-t-elle précisé.  Aucun enfant ne peut ester en justice, se présenter ou être présenté devant la police sans être représenté par un avocat.

S'agissant des questions de disparité, régionale ou autre, la délégation a rappelé qu'au vu du contexte historique, le Rwanda n'a pas de groupes ethniques – tel est le principe de base du pays: tous les Rwandais vivent sur le même territoire et partagent la même culture et la même langue, s'identifiant donc tous comme Rwandais.  Des programmes existent qui garantissent l'équité et lorsque des disparités sont identifiées, il est fait recours au système «Ubudehe» qui permet, par une consultation démocratique au sein de la communauté villageoise concernée, de se mettre d'accord sur qui doit bénéficier d'une aide, d'un soutien, en matière d'éducation ou de santé, par exemple, a expliqué la délégation.

En ce qui concerne les enfants des orphelinats qui sont réintégrés dans les communautés, la délégation a expliqué qu'ils sont connus nominativement et que les listes de ces enfants sont soumises aux structures villageoises, dont relèvent les affaires sociales, qui suivent le parcours de ces enfants.

La délégation a par ailleurs indiqué que la Commission nationale pour les enfants maintient une base de données sur les enfants; cette base de données permet notamment à la Commission d'assurer un suivi adapté des enfants particulièrement vulnérables.

La délégation a d'autre part souligné que les autorités rwandaises sont conscientes des lacunes persistantes en matière d'enregistrement des naissances.  Au Rwanda, 95% des mères accouchent à l'hôpital, a souligné la délégation; on prévoit donc que le taux d'enregistrement des naissances dans le pays atteigne ce même taux, a-t-elle indiqué.  La délégation a rappelé que la Commission nationale pour les enfants a le devoir d'identifier toutes les lois qui semblent aller à l'encontre de l'intérêt supérieur de l'enfant; dans ce contexte, sera dûment examinée la question des sanctions pouvant être imposées aux personnes qui ne déclarent pas la naissance de leur enfant dans les délais fixés – sanctions dont plusieurs membres du Comité ont indiqué craindre qu'elles ne dissuadent les parents d'enregistrer leurs enfants lorsque le délai légal a été dépassé.

En ce qui concerne la participation des enfants, la délégation a notamment indiqué que le prochain Sommet des enfants aura lieu entre octobre et novembre, période qui correspond aux grandes vacances pour les enfants rwandais.

Une étude sur la violence faite aux enfants et son impact est en cours de préparation, a d'autre part indiqué la délégation.  Pour ce qui est des châtiments corporels, la délégation a précisé que la législation actuellement en vigueur stipule qu'il ne faut pas infliger de punition qui soit dégradante ou humiliante pour l'enfant ou qui le fasse souffrir de quelque manière.  Un décret ministériel doit être adopté cette année qui spécifiera ce qu'il faut entendre par punition dégradante et humiliante pour l'enfant, a ajouté la délégation.

La délégation a par ailleurs attiré l'attention sur la mise à disposition, tant des enfants eux-mêmes que des adultes, de plusieurs lignes téléphoniques gratuites que tout un chacun peut utiliser; il s'agit des numéros 112 ainsi que 34 et 35.

Au Rwanda, a poursuivi la délégation, on s'efforce de ne pas solliciter les enfants pour des travaux domestiques.  Quant au travail des enfants dans les champs, ce n'est pas très commun car l'école est obligatoire; en outre, une loi interdit le travail des enfants, a fait valoir la délégation.  Elle a ensuite reconnu que le phénomène du travail des enfants continue d'exister dans le pays; il a été constaté qu'il existe en effet des travaux réalisés par des enfants dans un cadre familial et pour la culture des champs.  Néanmoins, des campagnes de sensibilisation ont été menées s'agissant de ces questions, notamment auprès des responsables du secteur privé, a fait valoir la délégation.

Le travail des enfants est interdit avant l'âge de 16 ans, a souligné la délégation.  Certains emplois, comme le travail dans les mines, sont interdit aux enfants, a-t-elle ajouté. 

La délégation a par ailleurs indiqué que le Rwanda était en train de procéder à des amendements de sa loi sur les réfugiés.  S'agissant des camps de réfugiés, une administration est en place qui permet d'enregistrer les enfants qui y naissent et y résident, a ajouté la délégation.

S'agissant des questions d'éducation, la délégation a souligné qu'une forme d'éducation informelle existe pour les enfants n'ayant pu suivre une scolarité normale, en particulier pour ceux qui ont abandonné l'école.  Le Gouvernement a récemment nommé une personne chargée de ce type de questions, notamment pour ce qui a trait à la problématique du décrochage scolaire, a précisé la délégation.  Les familles éprouvant des difficultés économiques reçoivent une aide de l'État visant à encourager la scolarisation de leurs enfants, a-t-elle ajouté.

De 2009 à 2010, quelque 3072 salles de classes ont été construites et quasiment autant l'année suivante, a par ailleurs fait valoir la délégation.

En ce qui concerne les questions de santé, la délégation a notamment indiqué que la législation concernant l'avortement dans des conditions sûres est en cours de discussion et n'est pas encore promulguée.

S'agissant enfin de la justice pour mineurs, la délégation a assuré qu'il est impossible, comme certains l'ont laissé entendre, que des enfants de 10 ans soient emprisonnés au Rwanda, car l'âge à partir duquel un enfant peut être poursuivi en justice est de 14 ans.  De 14 ans à 18 ans, l'enfant bénéficie de l'excuse de minorité, a en outre indiqué la délégation.

Protocole facultatif sur l'implication d'enfants dans les conflits armés

Observations et questions des experts

M. GEHAD MADI, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport présenté par le Rwanda au titre du Protocole facultatif sur l'implication d'enfants dans les conflits armés, a déclaré que le Rwanda a fait des progrès considérables pour veiller à ce que la question du recrutement dans les forces armées et dans les forces de police soit conforme au Protocole; nous savons qu'il n'y a pas de recrutement forcé, que le recrutement n'est que volontaire et que pour ce faire, l'âge de 18 ans doit être atteint.  Néanmoins, seuls 60% des enfants rwandais sont enregistrés à la naissance et seuls 7% disposent d'un acte de naissance; dans ce contexte, sur quels critères se fondent les autorités pour déterminer l'âge du candidat devant être recruté?

Le Comité prend acte de la position du Rwanda selon laquelle il n'existe pas de groupe armé non étatique dans le pays, a ensuite indiqué le rapporteur.  Néanmoins, des groupes armés non étatiques pratiquent aux frontières du Rwanda le recrutement d'enfants rwandais et de réfugiés, a souligné M. Madi.  Des informations indiquent qu'un nombre important d'enfants rwandais prennent part au conflit armé en République démocratique du Congo, a-t-il poursuivi, s'enquérant du nombre de ces enfants rwandais qui restent encore pris dans le conflit armé en République démocratique du Congo.  Le rapporteur s'est en outre enquis des obstacles rencontrés par les autorités rwandaises pour assurer le rapatriement de ces enfants dans le pays.  La situation à la frontière entre le Rwanda et la République démocratique du Congo est source de grande préoccupation pour le Comité; de nombreuses informations indiquent en effet que les enfants rwandais et les enfants réfugiés sont recrutés par des groupes armés opérant en République démocratique du Congo, a insisté M. Madi.  En outre, certaines informations vont jusqu'à dire que les autorités rwandaises à la frontière auraient facilité le recrutement d'enfants, en particulier au sein du groupe armé M23 auquel le Rwanda fournirait par ailleurs armes et munitions et un appui à différents niveaux, a ajouté le rapporteur.

M. BENYAM DAWIT MEZMUR, corapporteur du Comité pour l'examen du rapport sur l'implication d'enfants dans les conflits armés, a reconnu qu'il y a sur le terrain des progrès dont il faut féliciter le Rwanda, compte tenu, en particulier, de la situation dans la région.  Il a souhaité savoir s'il y a des enfants dans les écoles militaires et si l'enseignement dans ces écoles est conforme aux articles 28 et 29 du Protocole.  Des délais de prescription sont-ils prévus dans la législation qui empêcheraient les poursuites en cas de crimes relevant du Protocole, a ensuite demandé M. Mezmur?  L'âge limite de recrutement peut-il être abaissé en cas de situation d'urgence, a en outre demandé le corapporteur?  Il s'est enquis des programmes d'éducation à la paix développés par le Rwanda.

Réponses de la délégation

La délégation a évoqué la problématique de l'enregistrement des naissances en soulignant que le taux de 60% se réfère aux enfants qui ont été dûment enregistrés dans les quinze premiers jours qui suivent leur naissance, et se sont donc vu octroyer un acte de naissance, ce qui ne signifie pas que la totalité des autres enfants ne sont pas enregistrés par la suite; en effet, la loi prévoit que passé ce délai de 15 jours, le tribunal doit être saisi pour qu'il puisse être procédé à l'enregistrement de la naissance, ce qui ouvre alors droit à l'octroi d'un document de naissance qui n'est pas à proprement parler un acte de naissance – l'idée ayant été à l'origine d'inciter les parents à déclarer la naissance dans le délai initial de 15 jours.  La délégation a indiqué que les autorités ont l'intention de déployer des activités afin de sensibiliser la population à l'importance de l'enregistrement des naissances

La délégation a réitéré qu'il n'y a pas de groupes armés non étatiques au Rwanda.  Le fait que des enfants participent au conflit en République démocratique du Congo est la conséquence directe du génocide de 1994 qui avait vu nombre d'enfants rwandais fuir dans ce pays.  Les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) ont commis d'innombrables violations des droits de l'homme aussi bien sur le territoire rwandais que sur le territoire congolais et certains enfants rwandais qui avaient fui le Rwanda il y a 20 ans et qui avaient été impliqués dans les activités de la FDLR ont pu être rapatriés au Rwanda, a indiqué la délégation.  La délégation a en revanche indiqué ne disposer d'aucune information précise attestant qu'il y aurait des cas de recrutement d'enfants réfugiés sur le territoire rwandais par des groupes armés opérant en République démocratique du Congo. 

Un membre du Comité ayant souligné que des enfants congolais se trouvant dans des camps de réfugiés sont recrutés par des groupes armés opérant en République démocratique du Congo, la délégation a expliqué que les enfants rwandais impliqués dans le conflit sur le territoire de la République démocratique du Congo sont des enfants issus des familles qui avaient fui le Rwanda à l'époque du génocide.  Le fait que des enfants rwandais participent au conflit en République démocratique du Congo ne signifie pas nécessairement qu'ils ont été recrutés au Rwanda, même s'il est vrai que les autorités n'ont pas les moyens de procéder à une évaluation objective de la situation en la matière.  Les FDLR comportent environ 5000 membres qui, bien entendu, ne sont pas tous des enfants.

La délégation a d'autre part rappelé les chiffres figurant dans le rapport, de 2500 enfants impliqués dans le conflit armé en République démocratique du Congo et de 700 enfants rapatriés.

Il n'y a pas d'enfants dans les académies militaires, a ensuite indiqué la délégation.

Aucune circonstance exceptionnelle ne saurait être invoquée pour modifier l'âge de recrutement dans l'armée, a d'autre part souligné la délégation.

Le Code pénal contient des dispositions qui prévoient un délai de prescription pour le délit d'implication d'enfants dans les conflits armés, a ajouté la délégation.

L'éducation aux droits de l'homme figure dans les programmes d'enseignement primaire et secondaire, a par ailleurs indiqué la délégation.

Protocole facultatif sur l'exploitation des enfants

Observations et questions des experts

M. HATEM KOTRANE, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport présenté par le Rwanda au titre du Protocole facultatif sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, a d'emblée souligné que le Rwanda, par rapport à ce Protocole, a certainement fait d'importants progrès, dont attestent, entre autres, la loi de 2011 sur la protection de l'enfance et le nouveau Code pénal mis en place en 2012.  La législation nationale est particulièrement importante dans le contexte de ce Protocole, car aucune disposition de cet instrument ne saurait être directement applicable puisque des dispositions pénales, donc internes, sont exigées, a souligné le rapporteur.

Le nouveau Code pénal ne couvre pas tous les actes proscrits par le Protocole, a ensuite fait observer M. Kotrane, relevant que le transfert d'organe d'enfant à titre onéreux ne semble pas, par exemple, être incriminé; il en va de même du travail forcé d'un enfant qui, d'après le Protocole, doit être qualifié de vente d'enfants. 

M. Kotrane a rappelé que le Protocole invite les États à étendre leur compétence territoriale pour connaître de tous les actes relevant de cet instrument commis en dehors de leur territoire, notamment lorsque l'auteur de l'infraction est un Rwandais; or, pour poursuivre un Rwandais ayant commis une telle infraction en dehors du territoire rwandais, le Rwanda exige la double incrimination de l'infraction, au Rwanda et dans le pays où elle a été commise.

Une autre experte a souhaité savoir si le Rwanda disposait d'un système de surveillance des sites pornographiques sur Internet. 

Réponses de la délégation

La délégation a notamment indiqué que la mission de la Commission nationale des droits de la personne comporte un rôle de sensibilisation aux lois nationales et aux traités ratifiés par le Rwanda; elle est également chargée de donner au Gouvernement des avis concernant les instruments internationaux devant, selon elle, être ratifiés par le pays.  Les deux Protocoles facultatifs se rapportant à la Convention relative aux droits de l'enfant ont été traduits en kinyarwanda et dûment diffusés auprès des personnels concernés.

La délégation a ensuite souligné que tout ce qui a trait à la traite est illicite et donc puni par la législation rwandaise, y compris pour ce qui a trait au trafic à des fins de prostitution; les peines sont particulièrement sévères à l'encontre d'une personne responsable de l'enfant qui l'implique dans de tels actes.

S'agissant de l'incrimination des actes proscrits par le Protocole, la délégation a indiqué que le Code pénal doit être appréhendé conjointement avec la loi sur la protection de l'enfant.

Pour ce qui est du contrôle des sites Internet pornographiques, la délégation a indiqué que cette question a été discutée en tenant compte de la nécessité de ne pas restreindre indûment les libertés fondamentales; mais dans la pratique, un tel contrôle reste à améliorer, cela ne fait aucun doute, a admis la délégation, ajoutant que la législation interne ne comporte aucune disposition relative à l'incrimination de la pornographie mettant en scène des enfants.

La délégation a par ailleurs indiqué avoir pris bonne note des commentaires des membres du Comité concernant les questions relatives à l'extradition.  Elle a en outre fait part de sa volonté d'amender les lois nationales lorsque cela s'avère nécessaire.

Conclusions

MME AIDOO, en tant que rapporteuse pour le rapport présenté au titre de la Convention, s'est félicitée de l'esprit d'ouverture dans lequel s'est tenu le dialogue entre la délégation et le Comité.  Elle a indiqué vouloir croire que le Rwanda a «changé son fusil d'épaule» et opté pour une société fondée sur les droits de l'homme, l'égalité et la paix.  Le pays a adopté toute une série de lois et mis en place plusieurs institutions intéressant les droits de l'enfant; ces progrès sont tout à fait louables et des mesures sont encore en cours de développement.  Néanmoins, en dépit de toutes les mesures prises par le pays, le Comité aimerait être certain que le Rwanda reconnaît les inégalités qui peuvent encore exister entre les enfants s'agissant de la jouissance de leurs droits, a fait observer la rapporteuse, évoquant en particulier les communautés dites marginalisées qui s'identifient elles-mêmes comme étant des Batwas.  Il faut que le Rwanda s'attache à protéger l'intérêt supérieur de l'enfant dans toutes les interventions qu'il mène en faveur de l'enfance, a poursuivi Mme Aidoo.  Elle a ensuite attiré l'attention sur les difficultés que rencontre le pays en ce qui concerne, notamment, la violence sexiste; il faudrait donc que le Rwanda veille à promouvoir davantage les droits des femmes et des petites filles. 

M. MADI, rapporteur pour l'examen du rapport présenté au titre des deux Protocoles facultatifs, a indiqué avoir conscience que le Rwanda avance pas à pas pour progresser dans la mise en œuvre du Protocole facultatif sur l'implication des enfants dans les conflits armés, et a souligné que dans ce contexte, le Comité ne peut que l'encourager à poursuivre ses efforts.  Il a toutefois exprimé l'espoir que lors de l'examen de son prochain rapport, le Rwanda aura transposé dans son ordre juridique interne les dispositions du Protocole.

S'agissant du Protocole facultatif sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, M. Madi a indiqué très bien comprendre combien est sensible la situation à la frontière entre le Rwanda et la République démocratique du Congo.  Il s'agit là d'une situation sensible et en tout cas catastrophique pour les enfants, lesquels restent, faut-il le rappeler, le sujet de préoccupation du Comité, a-t-il insisté. 

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