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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité des droits de l'enfant examine le rapport de Chypre

30 Mai 2012

Comité des droits de l'enfant

30 mai 2012

Le Comité des droits de l'enfant a examiné aujourd'hui le rapport de Chypre sur les mesures prises par ce pays en vue de mettre en œuvre les dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant.

Présentant le rapport, le Secrétaire permanent du Ministère du travail et de l'assurance sociale de Chypre, M. George Papageorgiou, a fait observer que Chypre n'est pas en mesure d'assurer la mise en œuvre de ses obligations internationales sur tout son territoire suite à l'occupation militaire étrangère illégale d'un tiers de ce territoire. M. Papageorgiou a souligné que la législation a été amendée cette année afin d'assurer que les conditions de travail des jeunes gens âgés de 15 à 18 ans soient appropriées. Il a également attiré l'attention sur un nouveau projet de loi visant à unifier les textes de lois relatifs à l'adoption nationale et internationale. L'éducation et les soins de santé gratuits et accessibles sont fournis à tous les enfants, a fait valoir le chef de la délégation. La prévention et le traitement de la violence au sein de la famille est également une priorité. En dépit de tous les progrès réalisés en matière de promotion des droits de l'enfant, le Gouvernement de Chypre reconnaît que des défis persistent, et un effort est en cours afin, notamment, d'améliorer le système de collecte des données, et d'adopter des dispositions législatives portant sur le bien-être, la prise en charge et la protection des enfants, sur les services de soins en faveur des enfants, sur la justice juvénile.

La délégation de Chypre était également constituée du Représentant permanent de Chypre auprès des Nations Unies à Genève, M. Leonidas Pantelides, ainsi que de représentants du Ministère des affaires étrangères; du Ministère du travail et de l'assurance sociale; du Ministère de l'éducation et de la culture; du Ministère de la santé; du Ministère de l'intérieur; du siège de la Police. Elle a fourni des réponses aux questions posées par les membres du Comité en ce qui concerne, notamment, la violence contre les enfants, y compris les châtiments corporels; l'application du principe de non-discrimination; le fonctionnement de la justice juvénile, s'agissant notamment de l'âge minimum de la responsabilité pénale; les fonctions et le rôle de la Commissaire à la protection des droits de l'enfant; les questions relatives à l'acquisition de la nationalité et aux personnes déplacées à l'intérieur du pays; les soins de substitution; l'administration de la justice pour mineurs; ou encore les questions d'éducation et de santé. La délégation a en particulier expliqué que l'un des principaux objectifs du projet de loi sur l'adoption à l'examen est d'interdire l'adoption privée, qui est pour le moment autorisée.

Le rapporteur du Comité chargé de l'examen du rapport de Chypre, M. Bernard Gastaud, a notamment relevé qu'en ce qui concerne la définition de l'enfant, des omissions importantes persistent dans la législation s'agissant de l'âge légal au travail, de l'âge de scolarité obligatoire, de la responsabilité pénale. Certaines formes de discrimination semblent subsister à Chypre en matière d'éducation en langue turque ou à l'égard de certains enfants appartenant à des groupes minoritaires, notamment les enfants de migrants, a poursuivi le rapporteur. Le principal défi auxquels se trouvent confrontés les administrations chypriotes est celui de la collecte des données en matière de droits de l'enfant, a également souligné le rapporteur. Il a relevé, en fin de journée, que des efforts substantiels ont été réalisés mais a souligné que nombre d'autres sont en cours dont la mise en œuvre au bénéfice des enfants devra se traduire dans les actes et dans les faits.

Le Comité adoptera, dans le cadre d'une séance privée, ses observations finales sur le rapport de Chypre et les rendra publiques à l'issue de la session, le vendredi 15 juin prochain.

Demain, à partir de 10 heures, le Comité examinera le rapport du Viet Nam CRC/C/VNM/3-4 (à paraître en français).

Présentation du rapport

Présentant le rapport de Chypre (CRC/C/CYP/3-4), M. GEORGE PAPAGEORGIOU, Secrétaire permanent du Ministère chypriote du travail et de l'assurance sociale, a souligné que la société chypriote est traditionnellement centrée sur les enfants et fortement axée autour de la famille. Depuis l'indépendance de Chypre en 1960, une grande importance a été accordée au respect et à la protection des droits de l'enfant, a-t-il ajouté. Malheureusement, a-t-il poursuivi, le Gouvernement de Chypre n'est pas en mesure d'assurer la mise en œuvre de ses obligations internationales, notamment pour ce qui est d'assurer l'application universelle des droits de l'enfant à tous les enfants, sur tout le territoire de la République de Chypre. Cela est dû au fait que depuis 1974, le Gouvernement est empêché d'exercer un contrôle effectif sur un tiers de ce territoire, suite à l'occupation militaire étrangère illégale, a déclaré M. Papageorgiou. Il a fait observer qu'en vertu du droit relatif aux droits de l'homme et du droit humanitaire international, la responsabilité de respecter et d'assurer les droits protéger par les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme à toutes les personnes vivant sous occupation partielle ou totale incombe à la puissance occupante qui exerce le contrôle effectif, même si ce contrôle s'exerce par le biais de la présence de forces en dehors de son territoire. Par conséquent, a souligné M. Papageorgiou, l'information fournie dans le rapport présenté aujourd'hui devant le Comité concerne la zone se trouvant sous contrôle effectif du Gouvernement de Chypre.

Comme le souligne le rapport présenté en 2011 aux Nations Unies par la Commissaire à la protection des droits de l'enfant, les enfants à Chypre jouissent généralement de niveaux élevés de respect de leurs droits, a poursuivi M. Papageorgiou, ajoutant aussitôt qu'il y aura toujours une marge d'amélioration possible. L'une des pierres angulaires de la promotion des droits de l'enfant à Chypre a été la mise sur pied en 2007 du bureau du Commissaire à la protection des droits de l'enfant, doté d'un vaste mandat totalement conforme aux Principes de Paris et à l'observation générale n°2 du Comité des droits de l'enfant. La ratification des deux Protocoles facultatifs se rapportant à la Convention – en 2006 et 2010 – a témoigné de l'engagement de Chypre à améliorer encore la protection des droits de l'enfant. En outre, une proposition visant de la signature du Protocole facultatif à la Convention qui prévoit une procédure de communications (plaintes) a été soumise au Conseil des Ministres et devrait être approuvée dans les semaines à venir, a indiqué M. Papageorgiou.

Le chef de la délégation a par ailleurs souligné que la législation a été amendée cette année afin d'assurer que les conditions de travail des jeunes gens âgés de 15 à 18 ans soient appropriées. Il a également attiré l'attention sur la soumission à la Chambre des Représentants d'un nouveau projet de loi, actuellement en cours de discussion, visant à unifier l'ensemble des textes de lois existants relatifs à l'adoption nationale et internationale afin d'assurer que des procédures claires et effectives soient suivies en la matière, dans l'intérêt supérieur de l'enfant.

M. Papageorgiou a d'autre part attiré l'attention sur le Parlement des enfants créé en 2001 par une organisation non gouvernementale œuvrant dans le domaine des droits de l'enfant (le Comité panchypriote de coordination pour la protection et le bien-être des enfants); ce Parlement des enfants comprend 80 membres âgés de 12 à 18 ans, se réunit tous les deux mois et présente une fois par an ses opinions lors d'une séance spéciale de la Chambre des Représentants.

La Commissaire à la protection des droits de l'enfant peut faire office de représentant légal d'un enfant afin d'assurer que l'enfant soit entendu et que soit préservé son intérêt supérieur. En outre, le Comité consultatif de la jeunesse de la Commissaire, créé en 2010, se réunit tous les deux mois pour faire connaître à la Commissaire les points de vue des enfants sur les questions qui les concernent. Dans le cadre des procédures d'enquête pénale, la police dispose des installations, équipements et compétences nécessaires pour procéder à un enregistrement vidéo des déclarations des enfants qui seront ensuite présentées devant les tribunaux pénaux.

Pour ce qui est des domaines de l'éducation et de la santé, M. Papageorgiou a souligné que l'éducation et les soins de santé gratuits et accessibles sont fournis à tous les enfants. L'éducation – obligatoire jusqu'à l'âge de 15 ans – est fournie à tous les niveaux à tous les enfants âgés de 4 ans et huit mois à 18 ans. Les établissements d'enseignement publics enrôlent les élèves sans distinction fondée sur le sexe, les capacités, la langue, la couleur, la religion, les opinions politiques, l'origine ethnique ou le statut de résidence de leurs parents, a indiqué M. Papageorgiou. Il a précisé qu'un ambitieux programme de réforme de l'éducation est en cours qui devrait totalement moderniser le système éducatif. Le nouveau programme scolaire, qui sera pleinement appliqué à compter de 2014, est basé sur le principe selon lequel les enfants doivent non seulement être conscients de leurs droits et responsabilités mais aussi préserver, respecter, accepter et tolérer les droits des autres. Certaines zones accueillant une population d'élèves défavorisés ont été désignées qui opèrent sous l'appellation de «zones d'éducation prioritaire» (ZEP), a poursuivi M. Papageorgiou. La politique appliquée dans ces ZEP, qui vise à prévenir l'échec scolaire et l'illettrisme, dérive de la stratégie de l'UNESCO de discrimination positive pour luter contre les inégalités. Ces dernières années, a-t-il poursuivi, des préoccupations croissantes ont été exprimées au sujet des incidents de comportement antisocial auxquels certaines élèves sont confrontés au sein du système scolaire; pour traite de ce problème, un certain nombre de programmes ont été mis sur pied, à tous les niveaux d'éducation, visant essentiellement la prévention de ce type de comportements.

La prévention et le traitement de la violence au sein de la famille est une priorité de l'agenda gouvernemental, a en outre assuré M. Papageorgiou, avant de faire état de l'adoption par le Conseil des Ministres d'un Plan national d'action pour la prévention et la lutte contre la violence au sein de la famille couvrant la période 2008-2013.

En dépit de tous ces progrès réalisés en matière de promotion des droits de l'enfant, le Gouvernement de Chypre reconnaît que différents défis persistent, a indiqué M. Papageorgiou. Un effort est en cours afin d'améliorer le système de collecte des données, a-t-il notamment précisé. La présidence chypriote du Conseil de l'Union européenne (pour le second semestre de 2012) va promouvoir le développement d'indicateurs visant à mesurer la pauvreté et le bien-être des enfants, a-t-il ajouté. Il a en outre reconnu qu'un long retard a été pris pour ce qui est de la création d'un cadre juridique moderne concernant les enfants. Aussi, a-t-il attiré l'attention sur deux projets de lois qui seront proposés d'ici la fin de l'année et portent respectivement sur le bien-être, la prise en charge et la protection des enfants et sur l'enregistrement des services de soins résidentiels et de soins quotidiens en faveur des enfants. Un nouveau cadre législatif sur la justice juvénile est également en cours de discussion, a indiqué M. Papageorgiou.

Lorsque le pays assumera la présidence du Conseil de l'Union européenne, au cours du second semestre de 2012, le renforcement de la cohésion sociale sera l'une des priorités que Chypre s'efforcera de mettre en avant; dans ce contexte, le pays mettra l'accent sur la lutte contre la pauvreté des enfants et sur la promotion du bien-être des enfants.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

M. BERNARD GASTAUD, rapporteur du Comité chargé de l'examen du rapport de Chypre, a rappelé qu'à Chypre, les conventions ont une valeur infra-constitutionnelle et supra-législative. Aussi, a-t-il souhaité savoir s'il existe un contrôle de la conformité de la loi chypriote avec les dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant. D'autre part, la Convention est-elle invoquée devant les juridictions chypriotes, a-t-il demandé?

Le rapporteur s'est en outre enquis de l'état actuel du processus législatif concernant plusieurs textes de lois intéressant les droits de l'enfant.

M. Gastaud a fait observer que la Commissaire à la protection des droits de l'enfant ne dispose pas d'un budget réellement autonome et est tributaire pour son équipe d'agents et de fonctionnaires dépendant d'autres ministères, ce qui est susceptible de susciter des difficultés d'ordre déontologique pour les personnes intéressées. Dans quelle mesure un enfant peut-il saisir la Commissaire, a demandé le rapporteur?

En ce qui concerne la définition de l'enfant, M. Gastaud a relevé que des omissions importantes existent en matière d'âge légal au travail et en matière d'éducation – du point de vue de l'âge de scolarité obligatoire – où des contradictions existent ainsi qu'en matière de responsabilité pénale.

S'agissant du principe de non-discrimination, certaines formes de discrimination semblent subsister à Chypre en matière d'éducation en langue turque ou à l'égard de certains enfants appartenant à des groupes minoritaires, notamment aux enfants de migrants, a poursuivi le rapporteur. Peu d'actes discriminatoires ont été recensés, mais comment la délégation explique-t-elle cet état de fait, a demandé M. Gastaud?

Le principe de l'audition de l'enfant est consacré par des dispositions législatives en vigueur et le sera encore par d'autres qui sont en projet, mais il semble qu'il manque des dispositions législatives garantissant le respect de ce principe dans les cadres familial et scolaire, a déploré M. Gastaud.

En matière de droits de l'enfant, le principal défi auxquels se trouvent confrontés les administrations chypriotes est celui de la collecte des données, a enfin souligné le rapporteur. D'après des informations récentes, la compétence en la matière aurait été transférée à la Commissaire à la protection des droits de l'enfant; or celle-ci ne dispose ni des moyens financiers, ni des moyens techniques et humains pour ce faire et, de surcroît, cette mission constitue un accroissement notable de ses compétences et de sa charge de travail.

Un autre membre du Comité a souhaité en savoir davantage sur le mandat et la structure du bureau du Commissaire à la protection des droits de l'enfant et sur la manière dont sont traitées les plaintes émanant d'enfants chypriotes.

Depuis l'examen du précédent rapport de Chypre en 2003, il semble que des efforts supplémentaires soient nécessaires pour favoriser la tolérance et le multiculturalisme, surtout dans le domaine de l'éducation, a fait observer un autre expert. Il a en outre rappelé que le Comité avait exprimé son inquiétude face aux pratiques discriminatoires concernant l'acquisition de la nationalité pour les enfants nés hors mariage et pour les enfants chypriotes d'origine turque.

Rappelant qu'en 2007-2008, une campagne a été menée afin de sensibiliser la société aux violences familiales et corporelles, un autre expert a notamment souhaité savoir si des sanctions ont été prises contre des auteurs de ce type de violence. Une experte s'est enquise des procédures permettant aux enfants de dénoncer des cas de châtiments corporels à leur encontre. Qu'en est-il également des procédures existantes en matière de violence familiale?

Une experte a relevé que dans son rapport, la Commissaire à la protection des droits de l'enfant estime que l'un des principaux problèmes auxquels soit confronté Chypre a trait à l'acceptation de la prise en compte du point de vue de l'enfant; la Commissaire semble s'inquiéter d'une résistance de la société chypriote à l'idée de la participation de l'enfant.

Il semble que les enfants grecs orthodoxes continuent d'être stigmatisés, en particulier à l'école publique, en raison de leur religion ou de celle de leurs parents, s'est pour sa part inquiétée une experte. Les nouveaux programmes scolaires prévoient-ils une instruction religieuse, a-t-elle demandé? Par ailleurs, les Chypriotes turcs et les Chypriotes grecs ont-ils librement accès à leurs lieux de cultes et autres monuments religieux, a également demandé cette experte?

Une experte a souhaité savoir si la Loi sur les enfants de 1956 était toujours en vigueur, qui ouvrait la voie à des discriminations, notamment à l'encontre des minorités, et autorisait également les châtiments corporels.

Plusieurs experts se sont enquis de la place de la Convention dans l'ordre juridique interne chypriote.

MME MARIA HERCZOG, corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de Chypre, a déploré les contraintes budgétaires dont souffre le Parlement des enfants, qui semble être financé non par l'État mais par des organisations non gouvernementales.

Les traditions familiales sont très solides à Chypre, ce qui constitue un «filet de sécurité» pour les enfants, a poursuivi Mme Herczog. Néanmoins, à Chypre comme dans tous les pays du monde, les familles sont confrontées à des problèmes et, en l'absence de soutien familial, c'est à l'État de prendre le relais.

Mme Herczog s'est en outre enquise du système d'éducation préscolaire. Un enseignement du grec est-il dispensé aux enfants qui ne parlent pas le grec afin de leur permettre par la suite de suivre le cours normal de l'enseignement à Chypre, a-t-elle demandé?

La corapporteuse a souhaité en savoir davantage sur les adoptions nationales et internationales à Chypre. En la matière, ni la loi ni la pratique ne sont encore conformes à la Convention de La Haye. Mme Herczog a fait état d'allégations selon lesquelles des enfants et des nouveau-nés sont parfois vendus, notamment par des mères réfugiées ou migrantes.

Une autre membre du Comité a fait état d'informations selon lesquelles le droit à l'éducation dans leur langue maternelle reste très limité pour les enfants turcs à Chypre. En ce qui concerne la traite d'enfants, l'experte s'est inquiétée que beaucoup d'enfants résident à Chypre sans parents ni tuteurs.

Chypre devrait mette ne place une ligne téléphonique gratuite à disposition de tous les enfants ayant besoin d'une aide quelconque, a estimé une experte.

Un membre du Comité a souhaité connaître les mesures précises prises par les autorités pour assurer le droit aux loisirs des enfants handicapés, par exemple pour ce qui est de leur possibilité d'accès aux plages du pays. Les enfants handicapés sont-ils intégrés dans le système d'éducation ordinaire et, dans ce cas, comment leur inclusion y est-elle assurée? Les délinquants mineurs sont-ils jugés par des tribunaux spéciaux pour mineurs présidés par des juges spécialisés, a par ailleurs demandé l'expert?

Existe-t-il à Chypre un problème en matière de grossesses d'adolescentes et, le cas échéant, quelles sont les mesures prises pour y remédier, a demandé une experte? Elle a en outre souhaité obtenir des informations actualisées concernant l'incidence du VIH/sida dans le pays et les mesures prises en matière de prévention de la transmission de la maladie de la mère à l'enfant.

Un amendement à la législation relative au travail des enfants a certes été adopté, ce dont il convient de se féliciter, mais ce texte s'applique-t-il également au travail domestique des enfants, se sont inquiétés plusieurs experts? Qu'en est-il des inspections du travail menées concernant les jeunes employés domestiques et des contrôles effectués afin de prévenir l'exploitation des enfants à des fins de travail et l'exploitation sexuelle des enfants, a-t-il été demandé?

Les huit institutions existantes à Chypre pour le placement d'enfants en soins de substitution sont-elles dotées du personnel adéquat? S'agit-il d'institutions étatiques ou municipales voire gérées par des organisations de la société civile ou d'autres entités, a demandé un expert?

Un membre du Comité a souhaité disposer d'informations concernant le nombre d'enfants ayant pu arriver à Chypre après avoir fui un conflit armé – ou y avoir pris part – dans leur pays, en particulier dans le contexte des printemps arabes.

Existe-t-il, en vertu de la législation chypriote, des restrictions imposées dans les cas où un enfant est appelé à déposer devant la justice ou en cas de nécessité de confrontation de l'enfant victime à l'auteur présumé d'un délit commis à son encontre, a-t-il été demandé?

Réponses de la délégation

S'agissant de la place de la Convention relative aux droits de l'enfant dans l'ordre juridique interne, la délégation chypriote a souligné que la Convention prime sur la législation nationale et a déjà été invoquée à plusieurs reprises devant les tribunaux.

Évoquant un certain nombre de projets de loi actuellement en cours d'élaboration ou de discussion, la délégation a indiqué que, pour ce qui est de remplacer la Loi sur les enfants actuellement en vigueur, deux projets de textes existent; mais il reste à définir un certain nombre de normes minimales, notamment pour les soins de santé et pour les crèches. La raison du retard dans l'adoption d'une nouvelle loi sur les enfants est liée au fait que ce projet est très ambitieux, a souligné la délégation. Un nouveau projet de loi sur l'adoption a été présenté au parlement et est en cours de discussion, a par ailleurs indiqué la délégation. Il en va de même pour un nouveau projet de loi sur la justice juvénile.

La loi sur la protection de la santé au travail, adoptée cette année, veille à ce que les jeunes âgés de 15 à 18 ans travaillent dans des conditions convenables; elle veille à empêcher que les jeunes soient exploités d'un point de vue économique, a en outre indiqué la délégation.

Les données de la police concernant la violence domestique sont disponibles sur le site internet de la Police de Chypre, a par ailleurs fait savoir la délégation. Pour la période allant de 2004 à 2010, 12% des plaintes pour violence domestique présentées devant la police concernaient des enfants et les enfants représentaient seulement 1% des accusés. Pour la période allant de 2004 à 2011, sur 998 affaires de violence domestique contre les enfants, 28% étaient d'ordre sexuel, a en outre indiqué la délégation.

Pour ce qui est châtiments corporels, la délégation a souligné que le chapitre 54 de l'actuelle Loi sur les enfants sera supprimé lorsque la nouvelle loi sur les enfants aura été adoptée. Pour autant, les châtiments corporels à Chypre ne sont pas institutionnalisés ni autorisés, a assuré la délégation. Depuis 1994, a-t-elle notamment fait valoir, des affaires de violence de parents à l'encontre de leurs enfants sont traitées au pénal en vertu de la Loi contre la violence familiale et des condamnations sont prononcées dans ce contexte. La délégation a en outre attiré l'attention sur des textes réglementaires stipulant que toute forme de châtiment corporel à l'école est strictement interdite.

En ce qui concerne l'administration de la justice pour mineurs, la délégation a indiqué qu'en 2006, il est passé de 6 à 12 ans pour certains types de délit et à 14 ans en termes généraux, indépendamment, a-t-elle par la suite précisé, du délit considéré, qu'il s'agisse d'un délit mineur ou d'un délit grave. Pour les délinquants âgés de 14 à 16 ans, il existe une procédure spéciale visant à décriminaliser (déjudiciariser) les affaires et à obtenir un traitement de substitution pour les mineurs de cette tranche d'âge qui seront condamnés. Les délinquants de plus de 14 ans peuvent être traduits en justice, mais ce n'est généralement pas la voie suivie concernant le traitement des mineurs en conflit avec la loi, a insisté la délégation. Pour les enfants condamnés, des peines de substitution sont généralement appliquées, a insisté la délégation, de sorte qu'entre 2003 et 2008, par exemple, le nombre moyen d'enfants envoyés en prison n'a été que de 36 par an, ce nombre étant même tombé à 4 en moyenne annuelle pour les années 2009 à 2011. Les statistiques montrent que, dans les affaires impliquant des délinquants mineurs de moins de 16 ans, le procureur général n'a décidé d'engager des poursuites que dans 38% des cas.

Une aile spéciale de l'unique prison de Chypre est réservée aux détenus mineurs, a en outre souligné la délégation. À compter du mois d'août prochain, a-t-elle ajouté, une installation spécifique pour les mineurs sera inaugurée, adjacente au corps actuel des bâtiments de la prison.

Il n'existe pas à ce stade de juges spécialisés pour les enfants en conflit avec la loi, mais cela sera corrigé grâce à un projet de loi actuellement à l'étude, a indiqué la délégation.

Pour ce qui est des mineurs non pas en conflit mais en contact avec la loi, la délégation a notamment fait état de locaux spécialisés pour enregistrer les dépositions des victimes et témoins mineurs et d'un personnel dûment qualifié pour ces procédures.

Les mineurs non accompagnés ne sont pas placés en détention au motif qu'ils ne seraient pas accompagnés ou qu'ils se trouveraient en situation irrégulière à Chypre, a par ailleurs assuré la délégation; ces enfants sont placés sous la garde du Ministère des affaires sociales. Les mineurs non accompagnés bénéficient de l'intégralité de leurs droits en matière sociale, a en outre indiqué la délégation.

S'agissant du principe de non-discrimination, la délégation a notamment fait valoir que l'objectif de l'éducation multiculturelle est une action coordonnée favorisant l'intégration au système national d'étudiants ne parlant pas la langue nationale. La tendance actuelle du Ministère de l'éducation est d'accepter toutes les demandes d'exemption du suivi de l'instruction religieuse qui lui sont adressées, a-t-elle également fait valoir.

En ce qui concerne la Commissaire à la protection des droits de l'enfant, la délégation a indiqué que son bureau est dûment doté en personnel détaché d'administrations publiques par la Commission de la fonction publique. Son budget est financé sur le budget de l'État et elle est seule responsable de ce budget. En 2010, le bureau de la Commissaire à la protection des droits de l'enfant a reçu au total 186 plaintes dont 11 émanant directement des enfants, contre 170 plaintes dont 3 émanant d'enfants l'année précédente. Cet accroissement est à porter au crédit des mesures prises en vue d'encourager les enfants à recourir aux services de plaintes qui leur sont offerts. Après enquête sur ces plaintes, la Commissaire présente ses recommandations qui sont transmises aux autorités compétentes. Chaque année, la Commissaire présente son rapport annuel à la Chambre des députés, a en outre souligné la délégation.

Tous les enfants nés à Chypre ont droit à un acte de naissance mais ne reçoivent pas nécessairement la nationalité chypriote, laquelle est déterminée en fonction de la nationalité des parents; ils la reçoivent uniquement si au moment de leur naissance, un de leurs deux parents à la nationalité chypriote, a indiqué la délégation.

Toutes les personnes déplacées à l'intérieur des frontières du pays, c'est-à-dire les réfugiés chypriotes, reçoivent une carte d'identité, a ajouté la délégation.

En ce qui concerne les soins de substitution, la délégation a indiqué qu'en dessous de l'âge de cinq ans, aucun enfant ne sera placé en institution; il sera placé en famille d'accueil. Actuellement, le nombre de familles d'accueil existantes ne suffit pas à répondre aux besoins en la matière, a reconnu la délégation, faisant état d'un certain nombre de mesures prises afin de pallier cette difficulté, parmi lesquelles l'amélioration de la subvention accordée à ces familles. La durée du placement de l'enfant en soins de substitution peut aller de quelques jours à plusieurs années, jusqu'à ce que l'enfant ait atteint l'âge de majorité (18 ans) voire l'âge de 21 ans dans certains cas. Le placement de l'enfant est revu au moins chaque année, a précisé la délégation. La décision de placement est prise par un tribunal; quant au type de placement choisi, il relève d'une procédure administrative. Des recours dans ces deux cas peuvent être engagés, soit devant les tribunaux pour ce qui est de la décision de placement, soit devant les services sociaux pour ce qui est du choix du type de placement, a ajouté la délégation. Elle a aussi précisé que le placement des enfants en soins de substitution relève de l'État; les municipalités n'ont aucune compétence en la matière et les huit institutions existantes dans le pays sont gérées par l'État.

En réponse à un membre du Comité ayant soulevé le cas d'enfants qui s'étaient enfuis d'un foyer, la délégation a indiqué que cette affaire particulière, qui a été relatée par un journaliste, s'est déroulée dans une zone – à savoir la partie chypriote turque de l'île – se trouve dans une partie du territoire qui n'est pas contrôlée par le Gouvernement de la République de Chypre.

La délégation a indiqué qu'un projet de loi sur l'adoption a été présenté au comité parlementaire compétent en novembre dernier. L'un des principaux objectifs de ce projet de loi est d'interdire l'adoption privée qui, en vertu de la loi actuellement en vigueur, est pour le moment autorisée, a souligné la délégation. En 2011, a-t-elle précisé, il y a eu 33 adoptions nationales et 12 adoptions internationales.

S'agissant des questions d'éducation, la délégation a notamment évoqué le problème du bizutage et des violences à l'école en indiquant que ces dernières années, des préoccupations croissantes ont été exprimées à l'égard des comportements asociaux qui se manifestaient dans les écoles. Aussi, des programmes ont-ils été mis en place pour y remédier, notamment en visant l'amélioration de l'estime que les élèves ont d'eux-mêmes et la prévention de l'échec scolaire. En outre, un Observatoire national des violences à l'école a été créé qui agit en coopération étroite avec l'Observatoire international des violences à l'école, a ajouté la délégation.

La délégation a en outre fait valoir l'évolution à la baisse des taux d'abandon scolaire enregistrés à Chypre – preuve que les mesures prises à cette fin ont donné de bons résultats.

L'éducation préscolaire est facultative pour les enfants âgés de 3 ans à 4 ans et demi, a rappelé la délégation, avant d'ajouter que les enfants âgés de moins de 3 ans relèvent des services des affaires sociales. Au total, 16,5% des enfants de moins de zéro à 2 ans sont confiés à un système de garde, alors que 85% des enfants âgés de 3 à 5 ans suivent une forme ou une autre d'éducation préscolaire, a précisé la délégation.

Ces dernières années, le système chypriote d'éducation favorise l'intégration des enfants ayant des besoins particuliers dans le courant général de l'éducation ordinaire, en vertu du principe selon lequel tous les enfants ont le droit d'être éduqués ensemble indépendamment de leurs besoins spéciaux ou de leur situation de handicap, a par ailleurs souligné la délégation. Suivant les années, entre 4% et 6% des enfants ont des besoins éducatifs spéciaux et seuls 1% d'entre eux doivent finalement bénéficier d'une éducation distincte dans une école spéciale, a-t-elle indiqué.

En ce qui concerne la santé, la délégation a notamment fait état de programmes scolaires mis en place à Chypre en matière de prévention de l'alcool, du tabac et des drogues.

Le consentement des deux parents est nécessaire pour toute intervention médicale majeure sur un enfant, a souligné la délégation. S'il en va de l'intérêt supérieur de l'enfant, si ce dernier estime qu'il vaut mieux que ses parents ne soient pas au courant, par exemple dans le cas d'une interruption volontaire de grossesse, une commission interdisciplinaire peut prendre une décision, a-t-elle ajouté.

Si un jeune souhaite effectuer un test de dépistage du VIH/sida, c'est aussi une commission interdisciplinaire qui encadre la procédure car on ne sait jamais quelle va être la réaction du jeune aux résultats du test, a poursuivi la délégation.

Interrogée sur le fonctionnement de ces commissions interdisciplinaires, la délégation a indiqué qu'elles sont dirigées par un médecin et intègrent un gynécologue, un psychiatre ou tout autre personnel spécialisé selon que de besoin. Pour défendre l'intérêt supérieur de l'enfant, il est en outre recouru à un conseiller familial, a-t-elle ajouté.

Depuis 2009, Chypre dispose d'un comité chargé de promouvoir l'allaitement maternel, a d'autre part fait valoir la délégation.

Chypre dispose d'une clinique accueillant les enfants ayant des difficultés psychiatriques, a par ailleurs souligné la délégation. La décision a été prise de créer à Famagouste un centre spécialisé à l'intention des enfants ayant besoin de soutien psychologique sans pour autant souffrir de troubles psychiatriques, a-t-elle en outre indiqué.

Observations préliminaires

M. BERNARD GASTAUD, rapporteur pour l'examen du rapport de Chypre, a remercié la délégation pour le dialogue courtois mais intense qui s'est noué au cours de la journée entre elle et les experts. Il a salué l'esprit de collaboration et la volonté de discussion de cette délégation. Des efforts substantiels ont été réalisés mais nombre d'autres sont en cours dont la mise en œuvre au bénéfice des enfants devra se traduire dans les actes et dans les faits, a-t-il souligné.

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Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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