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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité contre la torture entame l'examen du rapport de la Grèce

09 Mai 2012

MATIN

9 mai 2012

Le Comité contre la torture a entamé, ce matin, l'examen du rapport présenté par la Grèce sur les mesures prises par ce pays pour mettre en application la Convention internationale contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
 
M. Ioannis Ioannidis, Secrétaire général du département des droits de l'homme et de la transparence au Ministère de la justice, a déclaré que la Grèce attache une grande importance à la lutte contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.  La prévention et l'élimination de ces phénomènes sont des priorités pour la Grèce, qui est déterminée à n'épargner aucun effort pour sanctionner tout comportement entraînant une violation des droits garantis par la Convention.  Cela étant, les autorités grecques sont confrontées à un ensemble de facteurs externes tels que des flux d'immigration très importants et la crise financière, qui contribuent à la surpopulation des lieux de détention, avec des difficultés considérables en matière de conditions de vie des personnes en détention.  De par sa position géographique, la Grèce connaît des problèmes liés aux migrations illégales.  La Grèce réalise 90% des détections d'entrées illégales dans l'Union européenne.  Pour mieux gérer ces flux migratoires, la Grèce s'est donc dotée de nouvelles infrastructures d'accueil, a modernisé ses centres de détention, a procédé à la réforme du système national d'asile et introduit une nouvelle procédure de retour, qui constitue un moyen moderne, intégré et décentralisé de gestion des flux migratoires, a indiqué le chef de la délégation grecque.  La délégation était également composée d'autres représentants du Ministère de la justice et du Ministère de la protection des citoyens, ainsi que du Ministère des affaires étrangères.
 
Mme Nora Sveaass, rapporteuse pour l'examen du rapport de la Grèce, a observé que si la Constitution grecque interdit la torture, des lacunes subsistent au niveau législatif dans la définition de cette notion.  Certains comportements constituant des actes de torture au titre de la Convention risquent donc de ne pas être incriminés comme tels par la loi grecque, au risque d'assurer l'impunité à leurs auteurs.  La définition grecque omet en particulier de faire du viol et des violences sexuelles des actes constitutifs de la torture.  Les plaintes déposées contre des fonctionnaires de police pour mauvais traitements sont trop souvent classées, tandis qu'il semble que certains abus sont volontairement dissimulés, a aussi regretté Mme Sveaass, qui a cité plusieurs cas de laxisme favorisant des policiers coupables d'actes de torture.  Mme Essadia Belmir, corapporteuse, a déploré le comportement de la police envers la population en général, et envers les migrants et les personnes en détention en particulier.  La Grèce doit expliquer ce relâchement qui condamne le système à l'échec aussi longtemps que des justiciables sont confrontés aux comportements problématiques de fonctionnaires ne semblant pas réaliser qu'ils sont au service des citoyens.  D'autres membres du Comité ont également interrogé la délégation sur ces questions.
 
Le Comité entendra demain après-midi, à 15 heures, les réponses de la délégation de la Grèce aux questions qui lui ont été adressées ce matin. 
 
 
Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entendra les réponses de la délégation de l'Albanie aux questions posées par les experts hier matin.
 
 
Présentation du rapport
 
Présentant le rapport périodique de la Grèce (CAT/C/GRC/5-6), M. IOANNIS IOANNIDIS, Secrétaire général du département des droits de l'homme et de la transparence au Ministère de la justice, chef de la délégation, a déclaré que son pays attache une grande importance à la lutte contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.  La prévention et l'élimination de ces phénomènes ont été et sont encore des priorités pour la Grèce, qui est déterminée à n'épargner aucun effort pour punir tout comportement entraînant une violation des droits garantis par la Convention.  Cela étant, les autorités grecques sont confrontées à un ensemble de facteurs externes tels que des flux d'immigration très importants et la crise financière, qui contribuent à la surpopulation des lieux de détention, avec des difficultés considérables en matière de conditions de vie des personnes en détention. 
 
C'est pourquoi la Grèce a adopté des mesures contre la surpopulation carcérale dans le cadre d'un plan stratégique s'appuyant sur des mesures législatives.  Depuis 2001, l'État a lancé un programme de construction de nouveaux établissements pénitentiaires, pour une capacité totale de 3200 nouvelles places.  La modification de la loi a pour but, parallèlement, d'accélérer le fonctionnement de la justice et de limiter la durée des détentions provisoires.  Une nouvelle disposition autorise la mise en détention à domicile, tandis qu'il est prévu de réserver le recours aux peines de privation de liberté aux délits relevant du droit pénal.  Les peines maximales encourues par les délinquants juvéniles auteurs de délits graves ont été réduites de cinq ans en moyenne.
 
La transparence dans la gestion des prisons a été améliorée par l'introduction en 2011 d'un mécanisme de recensement systématique des incidents de violence contre les détenus.  Ceux-ci ont accès à une ligne téléphonique permanente, reliée au Secrétariat des politiques correctionnelles, pour faire part de leurs doléances concernant leurs conditions de détention.  La transparence sera grandement améliorée par la ratification du Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, a ajouté M. Ioannidis.
 
De par sa position géographique, la Grèce connaît des problèmes liés aux migrations illégales.  Sur les frontières terrestres, le nombre d'immigrants illégaux arrêtés a quadruplé en 2010.  La Grèce réalise 90% des détections d'entrées illégales dans l'Union européenne.  Pour mieux gérer ces flux migratoires, la Grèce s'est dotée de nouvelles infrastructures d'accueil, a modernisé ses centres de détention, a procédé à une réforme du système national d'asile et introduit une nouvelle procédure de retour, qui constitue un moyen moderne, intégré et décentralisé de gestion des flux migratoires. 
 
M. Ioannidis a encore fait savoir que les autorités de son pays ont pris des mesures pour enquêter sur les allégations de brutalités policières et lutter contre la traite des êtres humains.  Il a aussi adopté une structure de prévention et de lutte contre les violences envers les femmes.  Le chef de la délégation a salué le rôle du Comité contre la torture et s'est félicité du dialogue qui s'ouvre aujourd'hui.
 
Examen du rapport
 
Questions et observations des membres du Comité
 
MME NORA SVEAASS, rapporteuse pour l'examen du rapport de la Grèce, a rappelé que le Comité veille à la protection de chacun contre la torture et à la poursuite des auteurs de ce crime.  Certains des points qui seront abordés aujourd'hui permettront à la Grèce d'approfondir son action dans le domaine du traitement des immigrés et des conditions de détention.  Le Comité est préoccupé par la situation des migrants provenant d'Asie et de l'est de l'Europe et, dans ce contexte, par la présence en Grèce de partis politiques aux idées xénophobes.
 
Mme Sveaass a observé que si la Constitution grecque interdit la torture, il demeure cependant des lacunes au niveau législatif dans la définition de cette notion.  Certains comportements constituant des actes de torture au titre de la Convention risquent donc de ne pas être incriminés comme tels par la loi grecque, au risque d'assurer l'impunité aux auteurs de ces crimes.  La définition grecque omet en particulier de faire du viol et des violences sexuelles des actes constitutifs de la torture.  D'autres lacunes importantes demeurent dans les statistiques relatives aux condamnations pour faits de torture, lacunes dénoncées par la Cour européenne des droits de l'homme en particulier. 
 
Les plaintes déposées contre des fonctionnaires de police pour mauvais traitements sont trop souvent classées, tandis qu'il semble que certains abus sont volontairement dissimulés, a regretté Mme Sveaass.  Plusieurs fonctionnaires accusés de viols de détenus ont bénéficié de peines extrêmement clémentes, tandis que leurs victimes ont été privées de soins médicaux et d'accès aux voies de recours; un policier de Céphalonie condamné à trois ans de prison pour mauvais traitement contre un Rom a bénéficié, en deuxième instance, d'une réduction de peine, une situation qui demande des précisions de la part de la délégation.  Mme Sveaass a cité d'autres cas de laxisme favorisant des policiers pourtant coupables d'actes de torture.  L'experte a aussi demandé des renseignements sur la création d'organes indépendants chargés d'enquêter sur les dénonciations de comportements policiers. 
 
Quatre-vingt-dix pour-cent des immigrants vers l'Union européenne transitent par la Grèce.  Vu l'ampleur du phénomène, il importe que la Grèce respecte parfaitement les normes européennes relatives au traitement des personnes concernées et de leurs demandes d'asile, notamment en ce qui concerne les procédures d'appel et le respect du principe de non-refoulement.  L'ouverture de nouveaux centres de détention doit s'accompagner de mesures complémentaires en termes de dotation en personnel d'encadrement.  Mme Sveaass s'est interrogée sur le nombre très faible des demandes d'asile en Grèce déposées par des immigrants, et sur le faible taux d'admission des demandes.  De même, on doit se préoccuper de la mise en détention systématique des personnes immigrées en Grèce, surtout celle d'enfants non accompagnés.  Les conditions sanitaires régnant dans les centres de détention sont jugées préoccupantes par certaines organisations non gouvernementales, a relevé Mme Sveaass. 
 
Il apparaît que la Grèce a consenti des efforts très importants dans la lutte contre la traite des êtres humains, s'est ensuite félicitée Mme Sveaass, qui s'est toutefois interrogée sur les mesures de protection offertes aux victimes.  Elle a aussi voulu savoir dans quelle mesure le personnel de santé et les policiers sont formés à la détection des traces matérielles de torture.
 
MME ESSADIA BELMIR, corapporteuse pour l'examen du rapport de la Grèce, a souligné la responsabilité que les États sont tenus d'assumer s'agissant du respect des droits de toutes les personnes soumises à leur juridiction.  La question se pose de savoir si la Grèce estime que les minorités présentes sur son sol ressortissent de sa juridiction.  L'experte s'est félicitée des mesures juridiques et législatives prises par les autorités grecques pour garantir la protection des droits des justiciables, et de la volonté de mieux faire que traduisent ces mesures.  Par contre, la question de la mise en œuvre de ces dispositions est difficile.  La Grèce doit résoudre le problème de l'absence de mécanisme indépendant de réception des plaintes.  Elle doit aussi engager une réflexion approfondie sur la réforme de son système judiciaire, compte tenu de l'inefficacité prévisible de certaines mesures adoptées, comme le remplacement des peines de prison par des amendes, qui ne règlera pas les problèmes de personnes incapables de les régler.  Mme Belmir a aussi regretté que la Grèce ne se situe pas dans une véritable logique de justice pour mineurs, une notion qui répond à des critères précis.  En particulier, les peines pénales ne devraient être infligées aux mineurs qu'en tout dernier recours.  La Grèce doit donc progresser sur ce point. 
 
 
Plusieurs autres membres du Comité se sont interrogés sur les conditions de détention de migrants détenus dans la région d'Évros, à la frontière orientale du pays, et dans certains centres de détention près d'Athènes, qui seraient surpeuplés à 200%, voire 300%.  Un expert a relevé que le Comité européen de prévention de la torture a déploré à plusieurs reprises le manque de bonne volonté de l'État grec dans ce domaine.  Une experte a demandé à la délégation de donner des statistiques ventilées sur la population carcérale, en particulier les taux d'occupation et leur évolution dans le temps, l'âge et la nationalité des détenus: ces statistiques sont nécessaires entre autres pour évaluer les problèmes de violence carcérale et pour y remédier.  D'autres statistiques devraient être fournies concernant le nombre des plaintes déposées pour des faits de torture ou de mauvais traitements, et les sanctions adoptées contre leurs auteurs. 
 
Une experte a demandé des précisions sur la formation des policiers à l'identification des violences sexuelles ou domestiques faites aux femmes.  Elle a par ailleurs relevé que certaines organisations non gouvernementales estiment que les fouilles à corps invasives et systématiques pratiquées par la police constituent des violations des droits des citoyens. 
 
Un expert a voulu savoir si l'accord de gestion de l'immigration conclu entre la Grèce et la Turquie prévoit que la Turquie doit respecter le principe de non-refoulement.  Un autre expert a relevé des lacunes dans le rapport concernant les garanties octroyées aux justiciables dans les premières heures de la détention.  Le rapport ne dit rien non plus sur les mesures de protection des personnes qui signalent des actes de torture ou des mauvais traitements.  La lenteur dans le traitement des procédures pénales entraîne parfois la prescription de crimes. 
 
Plusieurs experts se sont interrogés sur l'accès des détenus aux services de santé.  D'autres questions ont porté sur le traitement juridique des enfants victimes de la traite des êtres humains; sur la proportionnalité des peines substitutives infligées aux personnes coupables de torture; sur les meilleures pratiques pour éviter les représailles contre des personnes détenues; et sur la participation des organisations non gouvernementales aux visites de prisons et lieux de détention.
 
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