Skip to main content

Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité des droits de l'enfant examine le rapport du Costa Rica

10 Juin 2011

Comité des droits de l'enfant
10 juin 2011

Le Comité des droits de l'enfant a examiné aujourd'hui le rapport du Costa Rica sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant.

Présentant le rapport de son pays, M. Manuel B. Dengo, Représentant permanent de Costa Rica auprès des Nations Unies à Genève, a notamment indiqué que le Costa Rica a significativement progressé en termes de mise en conformité des normes internes avec les dispositions de la Convention. Il a aussi souligné que le pays a adopté en 2008 une loi interdisant les châtiments corporels, assortie d'un plan d'action, et a interdit en 2007 le Mariage de mineurs de moins de 15 ans. La loi sur la protection des adolescents travailleurs, les protège contre le travail dans des conditions dangereuses et insalubres. M. Dengo a aussi indiqué que les inspecteurs du Ministère du travail et de la sécurité sociale sont autorisés à vérifier dans les maisons d'habitation les conditions de travail des adolescents et interdit certains types de travaux domestiques. Une autre loi renforce la lutte contre l'exploitation sexuelle des mineurs. En dépit de tous ces progrès, le Costa Rica doit encore surmonter certains défis, a reconnu M. Dengo, citant notamment le défi que constitue pour le pays l'application effective de la loi de protection des victimes et témoins de délits, sans discrimination aucune, aux personnes mineures.

La délégation costaricienne, également composée de représentants de la Fondation nationale pour l'enfance et de la Mission permanente de Costa Rica auprès des Nations Unies à Genève, a fourni aux experts des compléments d'information en ce qui concerne, notamment, les réponses apportées face à la crise économique; la situation des migrants; l'enregistrement des naissances; le travail des enfants; les adoptions internationales; l'âge du consentement sexuel; le principe de non-discrimination; les questions d'éducation et de santé; les châtiments corporels et la violence domestique; ou encore l'administration de la justice pour mineurs.

La rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Costa Rica, Mme Marta Mauras Pérez, a salué la volonté du Costa Rica de se doter d'un cadre juridique et normatif fort pour appliquer les dispositions de la Convention, mais il reste des efforts à consentir pour mettre en œuvre les politiques. Des questions restent sans réponse en ce qui concerne la définition de l'enfant, surtout pour ce qui concerne l'âge du Maríage, a-t-elle souligné. En ce qui concerne la non-discrimination, d'importantes lacunes subsistent pour ce qui a trait aux autochtones, aux Afro-Costariciens et aux migrants. L'éducation pose également problème, tout comme d'une manière générale la question de l'intégration des enfants autochtones. Pour ce qui est de la violence domestique et des châtiments corporels - et plus généralement de la question de la violence -, le cadre législatif est assez obsolète et n'apporte pas suffisamment de réponses ni d'outils permettant d'identifier les abus. Le manque de fourniture de services de santé génésique préoccupe également beaucoup le Comité, a ajouté la rapporteuse. La corapporteuse, Mme María Del Pilar Nores, a pour sa part porté son attention sur les difficultés rencontrées par le pays en ce qui concerne les groupes les plus vulnérables et les questions liées à l'adoption et à l'exploitation sexuelle des enfants. Elle a néanmoins estimé que les progrès ont été significatifs en matière de promotion et de protection des droits de l'enfant, même si un chemin reste à parcourir pour que ces progrès se concrétisent, a-t-elle ajouté.

Le Comité examinera la semaine prochaine, en séances privées, ses observations finales concernant l'ensemble des rapports examinés au cours de la session en vue de leur adoption. Elles devraient être rendues publiques lors de la séance de clôture de la présente session, à 17 heures le vendredi 17 juin.

Présentation du rapport du Costa Rica

M. MANUEL B.DENGO, Représentant permanent de Costa Rica auprès des Nations Unies à Genève, a souligné que durant la période allant de 2002 à 2007, le Costa Rica a significativement progressé en termes de mise en conformité des normes internes avec les dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant. La loi générale sur les jeunes de 2002 réaffirme que les adolescents sont des sujets de droit et protège ce groupe de population sans discrimination aucune fondée sur le sexe, la nationalité, l'appartenance ethnique, la condition socioéconomique ou le lieu de résidence, a indiqué M. Dengo. Conformément aux recommandations du Comité, a-t-il poursuivi, le pays a adopté en 2008 une loi interdisant les châtiments corporels, assortie d'un plan d'action, et a interdit en 2007 le Maríage de mineurs de moins de 15 ans. En outre, a été promulguée la loi sur la protection des adolescents travailleurs, qui protège ces personnes contre le travail dans des conditions dangereuses et insalubres. Le 13 août 2010, a ajouté le Représentant permanent, est entrée en vigueur la Loi portant modification du Code de l'enfance et de l'adolescence et protection des droits des personnes adolescentes travailleuses domestiques, qui autorise des inspecteurs du Ministère du travail et de la sécurité sociale à vérifier dans les maisons d'habitation les conditions de travail des personnes adolescentes et interdit certains types de travaux domestiques, comme l'allaitement ou encore les soins aux personnes âgées, par exemple. A également été adoptée une loi de renforcement de la lutte contre l'exploitation sexuelle des mineurs par le biais de l'amendement ou de l'ajout de plusieurs articles du Code pénal et de la réforme de divers articles du Code de procédure pénale; il s'agit là sans aucun doute d'une avancée significative puisque est désormais pénalisée la possession de matériel pornographique impliquant des enfants et des adolescents. D'autre part, le Costa Rica a approuvé en septembre 2008 la Convention sur les droits des personnes handicapées, a rappelé M. Dengo.

En dépit de tous ces progrès, le Costa Rica doit encore surmonter certains défis, a poursuivi M. Dengo, citant notamment le défi que constitue pour le pays l'application effective de la loi de protection des victimes et témoins de délits, sans discrimination aucune, aux personnes mineures.

Évoquant la jurisprudence de son pays, le Représentant permanent a par ailleurs souligné que la Cour constitutionnelle avait ordonné la création d'un centre spécialisé pour les soins aux mineurs consommateurs de stupéfiants; les autorités ont donc concrétisé l'ouverture et la mise en fonctionnement d'un tel centre. En outre, M. Dengo a rappelé que la Cour constitutionnelle avait validé le principe de la confidentialité des plaintes. Aujourd'hui plus qu'hier, l'image des mineurs est protégée contre les abus des media, a souligné le Représentant permanent du Costa Rica. Par ailleurs, a ensuite indiqué M. Dengo, le Bureau du Procureur général de la République, à travers ses critères ayant force contraignante, a signalé le droit des mineurs à s'associer.

Conformément à la recommandation du Comité, a poursuivi M. Dengo, le Costa Rica a adopté une politique nationale pour l'enfance et l'adolescence. Toutes les institutions concernées, avec l'aide de l'assistance technique du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), travaillent actuellement intensément à l'élaboration d'un plan d'action permettant de réaliser, de contrôler et d'évaluer cette politique nationale. D'autres politiques ont également été adoptées par le pays, a ajouté M. Dengo: Politique nationale de la jeunesse (2011-2013); Politique intégrale et durable de sécurité citoyenne et de promotion de la paix sociale (2011-2021); Politique nationale sur la sexualité (2010-2021); Politique de sécurité alimentaire et nutritionnelle (2011-2021).

Un des grands défis auxquels est confronté le Costa Rica, comme nombre de pays en développement, a trait à la capacité de l'État d'orienter les investissements en faveur de l'enfance et de l'adolescence, a souligné M. Dengo. L'État costaricien ne ménage aucun effort pour parvenir à une société plus inclusive et participative et cherche à assurer une distribution équitable des ressources.

Actuellement, a par ailleurs indiqué le Représentant permanent, le Conseil national de l'enfance et de l'adolescence est en train de débattre d'une révision de la norme existante en matière d'internement et de soins alternatifs de protection pour les enfants. M. Dengo a d'autre part indiqué que le pouvoir exécutif avait soumis à l'Assemblée nationale un avant-projet de loi visant à réformer le Code de la famille afin d'éliminer la possibilité des remises directes et soumettre au contrôle administratif et judiciaire le processus d'adoption.

S'agissant des questions de santé, le Costa Rica a élargi, durant la période couverte par le présent rapport, son réseau de services de premier niveau en rapprochant les services de santé des communautés. Durant cette même période, le taux de mortalité infantile est passé de 11,15 pour mille en 2002 à 9,46 pour mille en 2010 – soit l'un des taux les plus faibles d'Amérique latine, surtout si l'on tient compte du fait que l'avortement n'est pas autorisé, a fait valoir M. Dengo. Il a en outre fait état d'un plan stratégique national de santé pour les adolescents couvrant la période 2010-2015. A d'autre part été créée la première «banque de lait maternel», a-t-il ajouté.

Quant à l'éducation, le Costa Rica a augmenté la part de son budget consacré à l'éducation au regard du PIB, laquelle est passée de 4,7% du PIB en 2002 à 7,2% en 2010, a indiqué M. Dengo, avant de préciser que des démarches ont été engagées en vue d'une réforme constitutionnelle obligeant le pays à consacrer au moins 8% de son PIB à l'éducation. Le Représentant permanent a par ailleurs indiqué qu'un département de l'éducation interculturelle avait été créé au sein du Ministère de l'éducation et que, par le biais d'un décret exécutif, il avait été décidé que les éducateurs nommés dans ce contexte devaient appartenir à l'ethnie du territoire concerné.

Enfin, M. Dengo a souligné que la loi d'incitation à la responsabilité sociale des entreprises touristiques oblige à impliquer tous les acteurs du processus touristique dans l'éradication de l'exploitation sexuelle des mineurs à des fins commerciales.

Le rapport périodique du Costa Rica (CRC/C/CRI/4) indique que la Constitution dispose que les traités nationaux, les conventions internationales et les concordats dûment adoptés par l'Assemblée législative, dès leur promulgation ou à compter du jour qui y est indiqué, primeront les autres lois. En cas de conflit entre les lois, c'est la loi la plus favorable à l'intérêt supérieur du mineur qui s'applique, conformément au Code de l'enfance et de l'adolescence. Le rapport attire par ailleurs l'attention sur la loi n° 8654 relative au droit des enfants et adolescents à une discipline sans châtiments corporels ni traitement humiliant, qui porte adjonction, dans le Code de l'enfance et de l'adolescence, d'un article où il est interdit désormais aux parents, responsables, directeurs et membres du personnel des établissements d'enseignement, de santé, de soins, d'établissements pénitentiaires pour mineurs ou de toute autre nature, de recourir aux châtiments corporels et au traitement humiliant. Le rapport reconnaît que les châtiments corporels demeurent latents dans le pays. L'entrée en vigueur du Code de l'enfance et de l'adolescence permet de mettre en place un système national de protection intégrale des enfants et adolescents qui compte un conseil national de l'enfance et l'adolescence (CNNA), les conseils de la protection et les comités de tutelle, poursuit le rapport. La Fondation nationale pour l'enfance (PANI) est l'organe directeur en matière de droits de l'enfant, de l'adolescent et des familles, rappelle-t-il. Le service du Défenseur des habitants est un organe indépendant qui est chargé de suivre l'application du Code de l'enfance et de l'adolescence, par l'intermédiaire d'une structure de suivi.

La population migrante, en général, qui se trouve sur le territoire costaricien, a les mêmes droits et obligations dans tous les programmes et projets destinés aux mineurs, précise en outre le rapport. Il n'existe aucun cas de demande d'asile de personnes mineures, indique par ailleurs le rapport. Eu égard aux mineurs, accompagnés ou seuls, pris en charge en raison de leur situation de migrants, les autorités sont tenues d'informer (d'une manière immédiate) la PANI à laquelle il incombe d'assurer une aide dans le cadre d'une protection de remplacement selon la procédure administrative correspondante. La plupart des cas correspondent à des adolescents non accompagnés qui ont été accueillis dans les différentes structures de protection de remplacement de la PANI. Il existe quelques difficultés avec certains pays concernant le rapatriement de mineurs; il s'impose d'établir des mécanismes internationaux et régionaux homogènes et normalisés, en se fondant sur les bonnes pratiques en vigueur, ajoute le rapport. La grossesse précoce est l'un des facteurs qui porte atteinte au bon développement de la population infantile, souligne le rapport, précisant que depuis 2003 jusqu'au premier semestre de 2005, près d'un cinquième des naissances sont survenues chez des mères de moins de 19 ans.

Le rapport indique, en ce qui concerne le consentement sexuel, que la liberté sexuelle est reconnue aux mineurs âgés de 13 à 15 ans, dans la mesure où il n'est pas tiré profit de l'âge – le consentement est sans effet sur la qualification de l'infraction. Jusqu'à l'âge de 18 ans, la protection légale s'applique de sorte que le consentement de la victime n'est pas retenu dans la qualification de l'infraction (exploitation sexuelle à des fins commerciales, proxénétisme, corruption, traite, relations sexuelles rémunérées). Le rapport souligne par ailleurs qu'avant qu'il soit décidé de séparer un enfant ou un adolescent de son milieu, la procédure administrative doit être assortie des garanties suivantes: recourir aux formes de protection de remplacement uniquement lorsqu'il existe un risque élevé pour l'intégrité physique et psychique de l'enfant ou l'adolescent, au sein de son propre milieu familial; choisir autant que possible un placement dans des familles d'accueil et foyers communautaires; prévoir des modalités de préparation aux fins d'intégration dans les différentes formes de protection de remplacement et de sortie, compte tenu de l'âge, des caractéristiques et de la situation des familles; choisir si possible de placer les fratries ensemble. Dans certains cas, très précis, où cette solution est impossible, il faut favoriser au minimum le maintien et le renforcement des liens entre les enfants; assurer un suivi permanent des périodes de placement en institution ou de séparation d'avec le groupe familial, pour que leur durée soit la plus brève possible; respecter le contexte culturel, en essayant de placer les enfants et adolescents dans des structures de protection situées dans leurs zones d'origine, pour autant que leur intérêt supérieur l'exige.

L'augmentation des naissances chez des adolescentes de moins de 15 ans, qui sont passées de 360 en 1990 à 611 en 2003, est tout particulièrement préoccupante, insiste le rapport. Le Costa Rica est parvenu à généraliser l'enseignement primaire où le taux net de scolarisation s'élève à 99,8%, fait valoir le rapport. Concernant le nombre d'établissements scolaires autochtones, en 2007, le système comptait 72 sections préscolaires, 231 écoles primaires, 4 écoles secondaires et 6 structures d'enseignement secondaire à distance. Les établissements scolaires autochtones sont qualifiés de bilingues, une partie de l'enseignement étant dispensé en langues autochtones. L'âge minimal pour assumer une responsabilité pénale est fixé à 12 ans, indique enfin le rapport. De 2003 à 2007, 400 mineurs des deux sexes ont été condamnés en moyenne par mois, précise-t-il avant de souligner que la liberté surveillée est la peine la plus fréquemment appliquée dans le pays et s'accompagne généralement d'ordonnances d'orientation et de surveillance, destinées à corriger la conduite du mineur.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

MME MARTA MAURAS PÉREZ, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Costa Rica, a souligné que près de 18% de la population costaricienne – soit 2 points de plus qu'il y a quelques années – vivent actuellement en dessous du seuil de pauvreté, le Costa Rica n'ayant pas été épargné par l'impact de la crise économique et financière qui continue d'affecter le monde. Dans ce contexte, la rapporteuse s'est enquise des plans prévus par l'État costaricien pour protéger la population, en particulier les enfants et adolescents et les personnes en situation de pauvreté et de marginalisation, contre les effets de la crise.

Mme Mauras Pérez a par ailleurs souhaité savoir si la Fondation nationale pour l'enfance bénéficiait des ressources techniques et financières qui lui sont nécessaires pour exercer pleinement une fonction de coordination interinstitutionnelle de l'action en faveur de l'enfance.

Évoquant les activités des entreprises du secteur privé et leur impact sur les droits des enfants, la rapporteuse a relevé la croissance des investissements étrangers au Costa Rica et les nombreuses activités d'entreprises transnationales dans certains secteurs comme le tourisme, la construction et l'extraction minière. Aussi, s'est-elle enquise de la législation existante dans le pays pour réguler l'impact de ces activités sur, par exemple, la qualité de l'eau, l'environnement et le droit des personnes à la propriété, surtout dans les zones les moins protégées. Y a-t-il des motifs de préoccupation à cet égard, a demandé Mme Mauras Pérez?

La rapporteuse a ensuite abordé la question de la non-discrimination en rappelant que ce thème avait déjà été soulevé lors de l'examen du précédent rapport du pays, surtout pour ce qui a trait à la population autochtone et à la jouissance de leurs droits par les enfants de cette population, laquelle continue d'être déficiente si l'on tient compte du fait que l'analphabétisme est six fois plus élevé parmi les autochtones (30%) que chez les non autochtones ou encore du fait que la mortalité infantile chez les autochtones est deux fois plus élevée que la moyenne nationale. Il est certain qu'en matière d'éducation de base, la couverture est satisfaisante, mais on ne peut toujours pas compter dans ce pays sur une éducation interculturelle bilingue. En outre, la couverture préscolaire est très basse puisqu'elle se situe aux alentours de 25%. En règle générale, a insisté Mme Mauras Pérez, il est préoccupant que les zones où vivent les autochtones figurent parmi les plus économiquement déprimées du pays, avec des taux de pauvreté assez supérieurs à la moyenne nationale.

La situation des enfants migrants ou réfugiés est également un sujet de préoccupation, a poursuivi la rapporteuse; leur nombre est élevé et la grande majorité se trouvent dans le secteur informel de l'économie et dans des régions éloignées des services de protection. De fait, le Costa Rica est l'un des pays de la région ayant la plus forte immigration, 7,8% de la population étant constituée d'immigrés – dont les trois quarts proviennent du Nicaragua. Les enfants ayant cette origine ont des taux de scolarisation plus bas que les enfants non immigrés. Le Costa Rica a-t-il l'intention de ratifier la Convention sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, a demandé la rapporteuse?

Mme Mauras Pérez a par ailleurs fait observer que la violence domestique est en hausse dans la région et au Costa Rica et s'est enquise des réponses concrètes apportées par les autorités costariciennes en la matière.

S'inquiétant de l'importance du problème des grossesses précoces l'experte a par ailleurs fait observer qu'une naissance sur cinq au Costa Rica est le fait d'une adolescente de moins de 19 ans et que, pour les adolescentes autochtones, 40% des naissances sont le fait de mineures de moins de 15 ans. En outre, selon l'agence de sécurité sociale du Costa Rica, le nombre d'avortements illégaux dans ce pays serait très élevé, s'est inquiété Mme Mauras Pérez.

Enfin, la rapporteuse a attiré l'attention sur la situation des enfants Ngabe-Buglé qui, du fait de leur situation migratoire complexe liée à la culture du café, se voient exposés à des violations en raison des difficultés qu'ils rencontrent en termes d'enregistrement des naissances et d'accès aux services de santé et d'éducation.

MME MARÍA DEL PILAR NORES, corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Costa Rica, a relevé la fragilité de l'économie costaricienne vis-à-vis de l'extérieur, au regard, notamment, de la balance commerciale négative du pays et de l'inflation, qui avoisine les 8%. Elle s'est dans ce contexte enquise des effets qu'a eus le programme adopté par le Costa Rica pour pallier les effets de la crise économique. Le taux de pauvreté, ces vingt dernières années, a toujours oscillé entre 15% et 20% et il ne fait aucun doute que cela constitue une cause sous-jacente de bien des questions qui seront soulevées dans le cadre de l'examen du présent rapport du Costa Rica, a poursuivi Mme Nores, avant de s'enquérir de la manière dont le pays entend s'y prendre pour relever le défi de la pauvreté.

Lorsque l'on parle de pauvreté et d'exclusion, il y a des secteurs qui sont plus vulnérables que d'autres, a poursuivi la corapporteuse, citant en particulier les autochtones, les migrants temporaires (en rapport avec la culture du café) originaires du Nicaragua et de Panama (et dont le nombre va de 500 000 à un million), les enfants de migrants et les enfants afro-costariciens. Aussi, Mme Nores s'est-elle enquise des stratégies éventuellement adoptées pour chacune de ces quatre catégories de groupes vulnérables.

S'agissant des questions d'adoption, la corapporteuse a relevé que persistent au Costa Rica deux systèmes d'adoption: l'un à travers la Fondation nationale pour l'enfance et l'autre qui relève d'adoptions privées ou directes. En 2007, a-t-elle rappelé, a été approuvé le Code pour les adoptions nationales et internationales; néanmoins, la Cour suprême continue d'estimer que la Convention de La Haye sur les adoptions internationales n'est toujours pas applicable pour les adoptions internationales qui se font avec le consentement des parents (dites adoptions directes). Malheureusement, a déploré Mme Nores, le faible contrôle du processus d'adoptions exercé par le Fondation nationale pour l'enfance stimule le recours aux adoptions directes. Dans ce contexte, quelles mesures le Costa Rica envisage-t-il pour faire prévaloir les principes de la Convention, a demandé la corapporteuse, avant d'insister sur la nécessité d'interdire les adoptions privées, lesquelles ne sont pas compatibles avec la Convention relative aux droits de l'enfant?

Mme Nores a par ailleurs relevé que le nombre de grossesses de mineures de 17 ans avait atteint 7000 en 2009 et s'est notamment enquise des mesures prises pour enseigner les méthodes contraceptives et assurer la disponibilité des moyens de contraception.

La corapporteuse a par ailleurs fait observer que seuls 38% des élèves terminent leurs études secondaires. Relevant que le Gouvernement costaricien a affronté ce défi par le biais de mesures touchant notamment aux transports scolaires et à l'alimentation, elle s'est enquise de l'évaluation des résultats obtenus en la matière.

S'agissant de l'exploitation sexuelle des enfants, Mme Nores a relevé qu'elle a été pénalisée par la loi et qu'une feuille de route a été élaborée pour lutter contre le travail des enfants et contre la traite et l'exploitation sexuelle à des fins commerciales, mais a souligné que toutes les régions du pays ne disposent pas encore de juges de l'enfance et de l'adolescence capables de traiter les plaintes en la matière.

Un autre membre du Comité a salué les efforts déployés par le Costa Rica en termes de modification de la législation, relevant notamment qu'a été adopté en 2010 un amendement au Code de l'enfance et de l'adolescence, aux fins de la protection des enfants travailleurs domestiques. Pour autant, subsiste une impression que le Costa Rica tarde toujours à rendre effective l'application des lois sur le terrain; aussi, cet expert s'est-il enquis de la réaction des juges à cet égard. Les juges reçoivent-ils une formation adéquate pour s'assurer que l'intérêt supérieur de l'enfant est toujours bien pris en compte dans le contexte judiciaire, a demandé cet expert?

Un autre expert s'est inquiété que l'âge du consentement aux relations sexuelles soit fixé à 13 ans.

En ce qui concerne le travail des enfants, l'expert a relevé qu'une enquête menée en 2002 par les autorités costariciennes avait montré q ue plus de 10% des quelque 1 113 000 enfants âgés de 5 à 17 ans vivant dans le pays travaillent.

Selon les enquêtes menées dans le pays, a ajouté l'expert, une très large majorité de jeunes estiment perceptibles les discriminations à l'encontre des personnes handicapées et des migrants au Costa Rica.

Les autorités ont-elles identifié les châtiments corporels à l'école comme constituant un problème, a pour sa part demandé une experte?

Une experte a fait observer qu'en 2007, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels avait considéré insuffisantes les mesures prises par le Costa Rica pour lutter contre la violence domestique; le Comité contre la torture a émis l'année suivante les mêmes préoccupations, a-t-elle souligné. Aussi, cette experte s'est-elle enquise de l'éventuelle volonté des autorités costariciennes de réformer et d'amender la loi afin d'ériger la violence domestique en délit pénal. Cette experte a par ailleurs fait part de sa préoccupation face aux nombreuses grossesses d'adolescentes et face au manque de moyens de contraception d'urgence pour les adolescentes.

Le taux de scolarisation au niveau secondaire est faible et l'est encore plus dans les communautés autochtones, s'est pour sa part inquiétée une experte, avant de s'enquérir des mesures prises pour prévenir l'abandon scolaire. Un autre membre du Comité s'est inquiétée de la hausse du taux d'abandon scolaire, en particulier au niveau secondaire, en raison notamment de l'éclatement de la cellule familiale, et des conséquences que cela peut avoir sur l'exploitation du travail des enfants.

En ce qui concerne l'administration de la justice pour mineurs, un expert a relevé que selon la loi, entre 12 et 18 ans, la privation de liberté est exceptionnelle; mais à regarder la loi de plus près, il semblerait que cette exception ne soit réellement effective qu'entre 12 et 15 ans. La tendance à l'enfermement des enfants en conflit avec la loi, auxquels sont souvent infligées des peines privatives de liberté, a été dénoncée.

Quelles mesures sont-elles envisagées pour prévenir la délinquance juvénile qui semble relativement développée au Costa Rica, a demandé un expert?

Réponses de la délégation

En ce qui concerne la réaction du Gouvernement face à la crise économique de ces dernières années, la délégation costaricienne a indiqué que le plan Escudo est une politique d'ajustement rapide de la structure économique du pays dans le but de défendre les classes les plus démunies et les plus vulnérables. Certaines mesures prises dans le cadre de ce plan ont très bien marché et d'autres moins et il est encore trop tôt pour en évaluer les résultats, a ajouté la délégation.

La délégation a par ailleurs souligné que la Fondation nationale pour l'enfance a été exemptée de la réduction de 20% du budget national qui a touché la plupart des institutions du pays.

La délégation a par ailleurs assuré que les migrants au Costa Rica bénéficient d'une égalité de traitement dans le monde du travail. Elle a rappelé que le Costa Rica n'a pas accepté, dans le cadre de l'Examen périodique universel, la recommandation qui lui avait été adressée de signer la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, et ce, en raison de la situation politique qui ne permet pas au Costa Rica de la signer eu égard en particulier aux frictions politiques entre ce pays et le Nicaragua.

La Fondation nationale pour l'enfance a commencé à travailler à la mise au point de politiques ciblées concernant les enfants et les adolescents de manière spécifique, notamment pour ce qui a trait aux enfants non accompagnés et aux enfants se trouvant dans le pays de façon irrégulière, a par la suite indiqué la délégation. Tout enfant a droit à la sécurité sociale, même s'il n'a pas de papiers d'identité, a-t-elle en outre souligné.

Les enfants qui naissent sur le territoire costaricien ont tous le droit d'être inscrits au Registre d'État civil du Costa Rica, a indiqué la délégation. Le pourcentage de non inscrits est minime par rapport à la population totale du pays. L'inscription à l'état civil et le droit à la nationalité costaricienne sont absolus et universels, le pays appliquant le jus soli, ce qui implique que toute personne née sur le territoire costaricien, indépendamment de la nationalité de ses parents, a droit à la nationalité costaricienne, a rappelé la délégation.

En ce qui concerne le travail des enfants, des progrès ont pu être réalisés sur le terrain grâce au cadre juridique adopté, qui s'appuie sur la feuille de route relative à la lutte contre le travail des enfants et contre la traite et l'exploitation sexuelle à des fins commerciales, a notamment indiqué la délégation.

S'agissant des questions d'adoption, la délégation a notamment indiqué que les enfants déclarés abandonnés et adoptables ne peuvent pas être adoptés tant que ne leur a pas été accordée la possibilité d'être entendus. Le Costa Rica connaît des cas d'adoption internationale uniquement avec des pays avec lesquels il a passé des conventions bilatérales à cette fin, a en outre souligné la délégation. Toutes les procédures en matière d'adoptions internationales sont désormais centralisées afin d'être mieux maîtrisées, a-t-elle ajouté. Priée de dire si elle était en mesure de donner une assurance qu'il n'est pas possible d'adopter directement un enfant au Costa Rica, la délégation a assuré que conformément à la jurisprudence récente de la Cour constitutionnelle, cela n'est pas possible. Cependant, il convient de réviser encore certaines normes puisque est encore établie la possibilité de remise directe d'enfants aux niveaux familial et communautaire, a-t-elle ajouté.

L'âge du consentement sexuel est de 15 ans et non pas de 13 ans, comme cela a pu être dit, a souligné la délégation. Le Code pénal tel qu'amendé en 2007 sanctionne toute personne majeure qui aurait une relation sexuelle avec une personne de moins de 15 ans, qu'il y ait consentement ou non à cette relation.

Le Costa Rica a développé tout un arsenal de protocoles institutionnels afin de traiter de la question de l'exploitation sexuelle à des fins commerciales, a poursuivi la délégation. Les auteurs de ces pratiques sont traduits en justice et dûment condamnés, a-t-elle souligné. Elle a par ailleurs indiqué qu'une coalition contre la traite avait été mise sur pied dans le pays, à laquelle participe la Fondation nationale pour l'enfance. À ce stade, n'a été enregistré qu'un cas de traite dans le pays, pour lequel un avocat auteur de ce délit a été condamné, a ensuite précisé la délégation.

La délégation a par ailleurs précisé que le délit de détention de matériel pornographique a été incriminé. En ce qui concerne la pornographie mettant en scène des enfants, a été lancée en coopération avec l'Union internationale des télécommunications une initiative de protection des enfants en ligne, c'est-à-dire connectés sur Internet, a en outre souligné la délégation.

S'agissant du principe de non-discrimination, la délégation a souligné que le Costa Rica s'est engagé contre la discrimination raciale, la xénophobie et toute forme d'intolérance et un plan est en cours d'élaboration à l'appui de cet engagement.

S'agissant des questions d'éducation, et plus précisément du problème de l'abandon scolaire, la délégation a fait part de l'existence d'un programme d'aide économique baptisé Avancemos! qui vise à encourager les adolescents à rester dans le système scolaire et à ne pas abandonner leurs études. En dehors de la pauvreté, une des causes de l'abandon scolaire est que les enfants s'ennuient dans le système scolaire, a ajouté la délégation.

En ce qui concerne les questions de santé, la délégation a notamment fait état de l'existence d'un plan d'action pour la santé mentale. Il existe au Costa Rica un hôpital psychiatrique national comportant un service pour adolescents, a-t-elle ajouté. Le Costa Rica dispose également d'un centre spécialisé pour les toxicomanes et les alcooliques qui est chargé de prendre en charge les mineurs victimes de ces dépendances, a indiqué la délégation. En réponse à la questions d'un expert, la délégation a confirmé que le Costa Rica est favorable à une forte décentralisation des services de protection tout en conservant une forte concentration pour ce qui est des services de santé.

Interrogée sur les causes du déclin de l'allaitement maternel qui a été enregistré récemment, la délégation a indiqué que les mères qui travaillent ont droit à une heure quotidienne pour l'allaitement de leurs enfants. Selon la loi, les mères bénéficient de trois mois de congés pour que les nouveau-nés puissent rester avec leur mère durant cette période.

Pour ce qui est des châtiments corporels, on peut dire que le Costa Rica a progressé par l'adoption d'une loi assortie d'un plan national approuvé par le Conseil national de l'enfance et de l'adolescence, a par ailleurs fait valoir la délégation. Elle a précisé que la loi contre le châtiment corporel amende le Code de la famille, qui jusqu'ici autorisait les parents à infliger ce type de châtiment de manière modérée, en retirant ce droit de correction aux parents mais sans pour autant définir ni incriminer les châtiments corporels; bien entendu, en cas de lésion associée à un châtiment corporel, le parent peut être poursuivi en justice. La violence domestique n'est pas non plus incriminée, a reconnu la délégation.

S'agissant de l'administration de la justice pour mineurs, la délégation a cité le chiffre d'environ 3000 cas annuels de poursuites judiciaires engagées contre des délinquants mineurs au Costa Rica.

Au Costa Rica, les personnes placées en détention préventive ne sont pas en contact avec les détenus condamnés, a par ailleurs souligné la délégation.

Observations préliminaires

MME MARIA DEL PILAR NORES, corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Costa Rica, a dit avoir l'impression que le pays a consenti des efforts – bien au-delà même de ce que le Comité espérait – pour mettre en œuvre tout ce que le Comité lui avait demandé de faire. Les progrès ont été significatifs à cet égard, même si un chemin reste à parcourir pour que ces progrès se concrétisent, a-t-elle ajouté.

MME MARTA MAURAS PÉREZ, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Costa Rica, a salué la volonté du Costa Rica de se doter d'un cadre juridique et normatif fort pour appliquer les dispositions de la Convention. Comme le pays l'a lui-même reconnu, il reste néanmoins au Costa Rica du chemin à parcourir, au niveau local et pour mettre en œuvre les politiques découlant de cet effort normatif, a-t-elle ajouté. Des questions restent incontestablement sans réponse en ce qui concerne la définition de l'enfant, surtout pour ce qui concerne l'âge du Maríage, a-t-elle souligné. En ce qui concerne la non-discrimination, subsistent également de grosses lacunes pour ce qui a trait aux autochtones, aux Afro-Costariciens et aux migrants. L'éducation pose également problème, tout comme d'une manière générale la question de l'intégration des enfants autochtones. Pour ce qui est de la violence domestique et des châtiments corporels - et plus généralement de la question de la violence -, le cadre législatif est assez obsolète et n'apporte pas suffisamment de réponse ni d'outil permettant d'identifier les abus, a souligné la rapporteuse. Le manque de fourniture de services de santé génésique préoccupe également beaucoup le Comité, a ajouté Mme Mauras Perez.

__________

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

VOIR CETTE PAGE EN :