Skip to main content

Communiqués de presse Organes conventionnels

Comité pour l'Élimination de la discrimination à l'égard des femmes: audition d'organisations non gouvernementales

17 Janvier 2011

Comité pour l'élimination de la discrimination
à l'égard des femmes

17 janvier 2011

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a entendu, cet après-midi, plusieurs organisations non gouvernementales qui ont fourni des renseignements concernant la situation des femmes en Israël, au Liechtenstein, au Kenya et en Afrique du Sud, quatre pays dont les rapports seront examinés cette semaine.

S'agissant d'Israël, l'attention a notamment été attirée sur les conditions de vie des femmes travaillant dans le secteur de la santé, une intervenante estimant que leurs conditions de travail sont assimilables à des formes d'esclavage. Une autre représentante a dénoncé les dispositions du droit de la famille israélien consacrant l'inégalité des femmes dans le domaine de la famille, l'application de principes religieux entraînant des discriminations contre les femmes juives au moment du divorce et s'agissant de la garde des enfants. Des préoccupations ont été émises s'agissant de l'activité des tribunaux religieux, qui ont commencé à appliquer avec effet rétroactif des mesures discriminatoires relatives à la répartition des biens du ménage lors du divorce.

Des organisations non gouvernementales ont attiré l'attention sur la situation dans les bidonvilles du Kenya, où le risque de maladies est élevé du fait des conditions insalubres ainsi que le risque de violence et de violence sexuelle contre les femmes et jeunes filles. Le Comité a été invité à prier le Gouvernement du Kenya d'inviter le Rapporteur spécial sur la violence contre les femmes à faire une visite dans ce pays. D'autres représentants d'organisations non gouvernementales ont relayé des témoignages relatifs au problème des taux élevés de mortalité maternelle et de séropositivité dans le pays.

En ce qui concerne le Liechtenstein, une organisation non gouvernementale a jugé urgente l'adoption de mesures contre les auteurs de violence familiale, estimant que cette forme de violence doit être poursuivie d'office par les autorités, comme l'a recommandé au pays le Conseil des droits de l'homme dans le cadre de l'Examen périodique universel. En effet, beaucoup de crimes restent impunis en raison de la peur qu'éprouvent souvent les victimes de violences; peur de leur tortionnaire mais aussi peur du regard de la société.

En Afrique du Sud, tout en reconnaissant des progrès réalisés dans plusieurs domaines, une organisation non gouvernementale a souligné que les inégalités sont ancrées dans des pratiques coutumières discriminatoires, s'agissant du mariage par exemple. Les femmes ne sont pas aidées par la loi ni par les tribunaux à s'émanciper ni à échapper aux violences, parfois fatales, perpétrées par des hommes. Une étude récente a montré qu'une femme est tuée tous les quatre jours en Afrique du Sud, dans un contexte de totale impunité.

Ont fait des déclarations les organisations suivantes: s'agissant d'Israël: Women's Centre for Legal Aid and Consulting; Kav LaOved; Groupe de travail sur la situation des femmes palestiniennes en Israël; The Ruth and Emanuel Rackman Center for the Advancement of the Status of Women. S'agissant du Kenya: Amnesty International; Franciscain international; Centre on Housing Rights and Evictions; Economic and Social Rights Centre; Fédération des femmes juristes du Kenya. S'agissant du Liechtenstein: Comité du genre et de la diversité de l'the Université du Liechtenstein. Pour l'Afrique du Sud: Masimanyne Women's Support Centre.

Demain matin, à 10 heures, le Comité entamera l'examen des quatrième et cinquième rapports périodiques d'Israël (CEDAW/C/ISR/4 et CEDAW/C/ISR/5).

Audition des organisations non gouvernementales

S'agissant d'Israël

Une représentante de l'organisation Kav LaOved, chargée de la protection des travailleurs défavorisés, en particulier les femmes migrantes, a déploré les conditions de vie des femmes employées dans le secteur de la santé. Trop souvent, leurs conditions de travail sont mauvaises au point d'équivaloir à des formes d'esclavage. Ce problème est aggravé par l'impossibilité pour ces femmes d'avoir recours aux dispositifs juridiques et sociaux en leur faveur. La représentante a condamné les politiques délibérément mises en place et qui conduisent à cette situation, demandant au Comité de se pencher sur la situation des femmes migrantes en Israël. Si les États ont le droit d'organiser les conditions du séjour de travailleurs migrants, ils doivent ce faisant respecter leurs obligations au regard du droit international, a souligné la représentante.

Une représentante du Groupe de travail sur la situation des femmes palestiniennes en Israël a regretté que les autorités israéliennes n'aient pas tenu compte des recommandations de son organisation s'agissant de l'amélioration de la situation des femmes palestiniennes vivant en Israël. La représentante a notamment condamné les destructions de maisons appartenant à des citoyens arabes palestiniens. Elle a aussi déploré l'absence d'agents de police arabes capables de recevoir les plaintes de femmes palestiniennes victimes de violence et de violence domestique. La représentante a regretté enfin l'absence des femmes palestiniennes au sein des autorités élues.

Une représentante de l'organisation The Ruth and Emanuel Rackman Center for the Advancement of the Status of Women a regretté que le droit de la famille israélien contienne encore des dispositions consacrant l'inégalité des femmes dans le domaine de la famille. En effet, l'application de principes religieux suscite des discriminations contre les femmes juives au moment du divorce et s'agissant de la garde des enfants. L'évolution la plus alarmante concerne l'activité des tribunaux religieux, qui ont commencé d'appliquer avec effet rétroactif des mesures discriminatoires relatives à la répartition des biens du ménage lors du divorce. La représentante a en outre condamné l'existence de cas de polygamie en Israël, et regretté que les autorités n'aient pris aucune mesure contre ces problèmes.

La représentante du Women's Centre for Legal Aid and Counseling a observé que les femmes palestiniennes qui vivent dans une situation d'occupation sont victimes au quotidien de très nombreuses violations de leurs droits fondamentaux. La représentante a dénoncé le prolongement par Israël des dispositions interdisant le regroupement familial, au détriment des familles palestiniennes vivant à cheval entre Israël et les territoires occupés. Cette interdiction s'accompagne de discriminations au regard notamment du droit à la libre circulation. La représentante a demandé au Gouvernement d'Israël quelles mesures il compte prendre pour faire en sorte que les femmes palestiniennes bénéficient de tous leurs droits.

Un autre représentant d'organisation non gouvernementale a regretté que le Gouvernement d'Israël n'accorde pas sa protection aux femmes palestiniennes qui fuient la violence sexuelle. De même, les femmes palestiniennes victimes de la traite ne bénéficient pas du statut de demandeur d'asile en Israël. Le représentant a demandé au Gouvernement d'accueillir ces personnes et de leur accorder une année de délai avant de procéder à leur interrogatoire.

Des experts du Comité ont voulu savoir dans quelle mesure les femmes palestiniennes sont conscientes des moyens de recours à leur disposition. Ils ont par ailleurs voulu connaître l'ampleur de la polygamie en Israël. Il a été demandé si Israël disposait d'une loi générale régissant la répression de la violence au sein de la famille et si les centres gérés par les autorités prodiguent une protection efficace aux femmes – juives et musulmanes – victimes de violence qu'ils accueillent. Une autre question a porté sur les conséquences juridiques de l'application de dispositions du droit religieux à certaines femmes juives. D'autres experts se sont interrogés sur les réserves apportées par Israël à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Répondant aux questions du Comité, des représentants d'organisations non gouvernementales ont rappelé qu'il appartient au Gouvernement d'Israël d'appliquer le droit international dans les territoires qu'il contrôle ou occupe. Le fait est qu'Israël prend des mesures qui aggravent les violences contre les femmes palestiniennes, a expliqué la représentante d'une ONG; ainsi, un homme palestinien humilié par les soldats israéliens aura davantage tendance à commettre des violences contre des femmes. Une représentante a indiqué, par ailleurs, que nombre de mariages polygames ne sont pas enregistrés. Cependant, 40 % des femmes arabes en Israël seraient engagées dans une union polygame: on doit donc déplorer que les autorités israéliennes n'appliquent pas leurs obligations au regard du droit international. Il a été précisé en outre que le Parlement vient de décider de supprimer les financements publics accordés à certaines organisations, dont Human Rights Watch, au motif qu'elles seraient financées par les organisations terroristes. Enfin, il a été précisé qu'Israël n'est pas partie à la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Les migrants de la première génération ne sont pas autorisés à épouser d'autres migrants de la première génération, a-t-on fait savoir.

S'agissant du Kenya

Un représentant d'Amnesty International a déploré les conditions d'hygiène très difficiles qui règnent dans les bidonvilles du Kenya, qui aggravent encore le risque de violence et de violence sexuelle contre les femmes et jeunes filles, en sus du risque de morbidité encouru. Le représentant a regretté que les autorités n'appliquent pas les lois qui permettraient de remédier à cette situation. Il a demandé au Comité de prier le Gouvernement du Kenya d'inviter le Rapporteur spécial sur la violence contre les femmes à effectuer une visite dans le pays.

Une représentante de Franciscain international a relayé des témoignages sur le problème des taux élevés de mortalité maternelle et de séropositivité. La représentante a demandé au Gouvernement kenyan d'augmenter le nombre d'établissements hospitaliers ainsi que les effectifs de sages-femmes professionnelles, ainsi que d'autres mesures concrètes pour éliminer la discrimination contre les femmes dans le secteur de la santé.

Un représentant du Centre on Housing Rights and Evictions a indiqué que près de deux millions de Kényans, dont une majorité de femmes, souffrent de problèmes de logement au Kenya. Les inégalités dans ce domaine ne sont qu'insuffisamment traitées par les autorités. De même, des discriminations persistent en ce qui concerne les droits fonciers et l'héritage, encore régis par des dispositions coutumières défavorables aux femmes. Le représentant a dénoncé en particulier la pratique qui consiste à expulser les veuves du domicile familial. Une action en vue du renforcement des compétences des autorités traditionnelles s'impose à cet égard.

Un représentant du Economic and Social Rights Centre a observé que si le Gouvernement s'est engagé à lutter contre la discrimination des femmes dans le domaine du logement, les mesures qu'il a prises sont nettement insuffisantes, notamment parce qu'aucune mesure directe d'octroi de logement n'est prévue. Par ailleurs, le représentant a observé que la loi sur la prévention du VIH/sida, qui impose l'information obligatoire de son état de santé, ne tient pas compte du fait que la plupart du temps, seules les femmes connaissent leur statut au regard du VIH. Elles sont donc exposées à des violences et au rejet de la part de leurs maris ou conjoints, une forme de discrimination indirecte qui risque de les pousser dans la pauvreté.

Une représentante de Fédération des femmes juristes du Kenya s'est inquiétée de la faible participation des femmes à la vie politique du Kenya. Elle a également regretté que le Parlement de ce pays ait pris un important retard dans l'examen et l'adoption des projets de loi contre la discrimination à l'encontre des femmes. On doit aussi regretter que la justice n'ait toujours pas ouvert d'instruction contre les auteurs de violations des droits de l'homme commises lors des violences postélectorales en 2008.

Des experts du Comité ont observé que le Gouvernement du Kenya lui-même est conscient du fait que les femmes séropositives, qui ne disposent en outre, souvent, pas du pouvoir de refuser des relations sexuelles dangereuses, sont victimes de discrimination et de stigmatisation: dans quelle mesure les autorités agissent-elles contre ce problème? D'autres questions ont porté sur le projet de loi visant à restreindre le pouvoir décisionnel des instances coutumières, notamment en ce qui concerne le mariage.

Les représentants d'organisations non gouvernementales ont indiqué que l'action du Gouvernement, qui a criminalisé la propagation du sida, a aggravé la situation des femmes: premières à connaître leur situation, elles sont découragées de faire connaître leur état du fait de la crainte de poursuites.

S'agissant du Liechtenstein

Une représentante de la Commission du genre et de la diversité de l'Université du Liechtenstein a jugé urgente l'adoption de mesures contre les auteurs de violence familiale au Liechtenstein, estimant que cette forme de violence doit être poursuivie d'office par les autorités, comme il a été recommandé lors de l'examen du pays par le Conseil des droits de l'homme dans le cadre de l'Examen périodique universel. En effet, beaucoup de crimes restent impunis de par la peur qu'éprouvent souvent les victimes de la violence, peur de leur tortionnaire mais aussi peur du regard social porté sur leur condition. Dans ce contexte, les femmes étrangères sont particulièrement pénalisées, du fait du risque de perdre leur titre de séjour. D'autre part, la représentante s'est félicitée des mesures prises en matière d'égalité des sexes s'agissant d'aspects très concrets tels que la garde des enfants ou la participation au monde du travail. Or, des coupes budgétaires risquent à présent de compromettre les progrès réalisés, compte tenu de l'inexistence d'un fonds stable pour le financement de ces mesures. La représentante a enfin déploré que le Conseil d'administration de son Université soit composé d'hommes exclusivement.

Les questions des experts ont notamment porté sur la nouvelle loi sur les étrangers, la prévalence des violences contre des femmes étrangères au sein de la famille, la participation des femmes dans la vie politique, notamment.

S'agissant de l'Afrique du Sud

Une représentante du Masimanyne Women's Support Centre a regretté la persistance de lois et pratiques discriminatoires contre les femmes en Afrique du Sud, en dépit des progrès indéniables réalisés par ailleurs par les autorités de ce pays. La représentante a observé que la création d'un «Ministère de la femme et de l'enfance» revient à infantiliser les femmes, tandis que les inégalités sont ancrées dans des pratiques coutumières discriminatoires, s'agissant du mariage notamment. D'autre part, on a constaté que la loi, inadaptée et archaïque, entraîne des effets pervers, comme en témoigne l'inculpation d'une jeune victime de viol. Les femmes, qui dépendent encore beaucoup des hommes, ne sont pas aidées par la loi ni par les tribunaux à s'émanciper ni à échapper aux violences, parfois fatales, perpétrées par des hommes. Une étude récente a montré qu'une femme est tuée tous les quatre jours en Afrique du Sud, dans un contexte de totale impunité. L'État, de par sa passivité, est responsable de cette situation, a dénoncé la représentante.

Une autre représentante a évoqué les difficultés rencontrées par les jeunes femmes issues de milieu rural en Afrique du Sud. Ces femmes sont privées d'accès aux services sociaux, sont très souvent contraintes d'abandonner leur scolarité à la fin du primaire, soit du fait de violences sexuelles, soit du fait de difficultés économiques. De même, l'accès aux systèmes de soins de santé publics est très limité; les contraceptifs féminins sont peu accessibles, avec des conséquences graves en termes de grossesses non désirées. Le Gouvernement de l'Afrique du Sud doit améliorer la formation du personnel de santé et organiser, au profit des femmes rurales, davantage de formations.

Répondant à des questions des experts du Comité, la représentante d'une organisation non gouvernementale a précisé que le droit coutumier interdit aux femmes de s'exprimer directement. En cas de viol, le droit coutumier prévoit une médiation et, éventuellement, l'octroi d'une prestation compensatoire à la famille (généralement sous la forme d'un animal), mais aucun dédommagement à la victime elle-même.

__________

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

VOIR CETTE PAGE EN :