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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes examine le rapport du Bangladesh

25 Janvier 2011

25 janvier 2011

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a examiné, aujourd'hui, le rapport périodique présenté par le Bangladesh sur les mesures prises par le pays pour mettre en œuvre des dispositions de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Présentant le rapport, Mme Shirin Sharmin Chaudhury, Ministre des affaires féminines et de l'enfance du Bangladesh, a déclaré que le pays est entré dans une nouvelle ère de démocratie avec les élections parlementaires de décembre 2008, à la suite desquelles le nouveau gouvernement s'est engagé notamment à intégrer la perspective sexospécifique dans ses politiques macroéconomiques et à adopter des politiques destinées à apporter des changements concrets dans la vie des femmes à tous les niveaux. Les stratégies et mesures en faveur des femmes prises par le Gouvernement dans les dernières décennies ont exercé une influence positive contre la pauvreté des femmes, dont les progrès s'expliquent par leur participation accrue dans différents secteurs de production ainsi que dans le secteur informel et indépendant. Le pays a en outre adopté dès 1997 une «Politique nationale pour la promotion de la femme». Mme Chaudhury a aussi fait savoir qu'une attention prioritaire est accordée à l'adoption d'une approche intégrale de la lutte contre la violence à l'encontre des femmes. Elle a aussi indiqué que la loi permet désormais à une femme de transmettre sa nationalité à ses enfants. La mise en œuvre de la Convention et de son Protocole facultatif par le Bangladesh a permis au pays d'enregistrer des succès dans la lutte pour l'égalité entre les sexes et l'autonomisation des femmes, en particulier au plan économique, a affirmé la Ministre.

La délégation du Bangladesh, composée de plusieurs représentants du Ministère des affaires féminines et de l'enfance et du Ministère des affaires étrangères, a répondu aux questions du Comité s'agissant, notamment, des réserves émises par le Bangladesh à deux articles de la Convention relatifs à l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes et au mariage; de la participation des femmes à la vie politique et publique; de la lutte contre la violence à l'égard des femmes; et des effets des microcrédits sur les femmes qui en sont bénéficiaires.

En fin de séance, la Présidente du Comité, Mme Silvia Pimentel, s'est félicitée des réussites du Bangladesh dans la réalisation des objectifs fixés par la Convention, en dépit des difficultés liées à l'application des textes de loi.

Le Comité adoptera en séance privée ses observations finales sur les rapports de tous les pays examinés et les rendra publiques ultérieurement.

Le Comité examinera demain, à partir de 10 heures, le rapport de Sri Lanka (CEDAW/C/LKA/5-7).

Présentation du rapport du Bangladesh

MME SHIRIN SHARMIN CHAUDHURY, Ministre d'État aux affaires féminines et à l'enfance
du Bangladesh, a déclaré que son pays était entré dans une nouvelle ère de démocratie avec les élections parlementaires de décembre 2008, à la suite desquelles le nouveau gouvernement a promulgué sa «Vision 2021», par laquelle il s'engage notamment à intégrer la perspective sexospécifique dans ses politiques macroéconomiques et à adopter des politiques destinées à apporter des changements concrets dans la vie des femmes à tous les niveaux. Les stratégies et mesures en faveur des femmes prises par le Gouvernement dans les dernières décennies ont exercé une influence positive contre la pauvreté des femmes, dont les progrès s'expliquent par leur participation accrue dans différents secteurs de production ainsi que dans le secteur informel et indépendant. La concrétisation des engagements du Bangladesh au titre de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes est régie par la «Politique nationale pour la promotion de la femme» adoptée en 1997.

S'agissant des recommandations du Comité issues de l'examen du précédent rapport de son pays, Mme Chaudhury a fait savoir qu'une attention prioritaire est accordée à l'adoption d'une approche intégrale de la lutte contre la violence à l'égard des femmes. Des mesures concrètes d'aide aux victimes sont offertes dans les centres d'accueil qui ont été ouverts dans les sept régions administratives du pays, mesures qui s'inscrivent dans un cadre législatif approprié: loi interdisant la dot (1980), loi sur la prévention et la répression de la violence à l'encontre des femmes et des enfants (2003), loi sur la prévention de la violence domestique (2010). Des campagnes de sensibilisation sont organisées au niveau communautaire, tandis que des tribunaux mobiles sont autorisés à poursuivre en comparution immédiate les auteurs de harcèlement sexuel, conformément aux directives formulées par la Haute Cour du Bangladesh.

Mme Chaudhury a indiqué en outre que la loi sur la citoyenneté avait été amendée en 2009 pour en supprimer les dispositions discriminatoires et permettre à une femme de transmettre sa nationalité à ses enfants. La Ministre a précisé que dans les situations où les dispositions de la Convention ne peuvent être appliquées directement, les tribunaux, lorsqu'ils interprètent le droit, peuvent recourir à la Convention de même qu'à tout autre instrument international. Ainsi, de nombreux articles de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes ont été intégrés au droit domestique par le biais de l'interprétation des tribunaux.

D'une manière générale, a fait valoir Mme Chaudhury, la mise en œuvre de la Convention et de son Protocole facultatif par le Bangladesh a permis au pays d'enregistrer des succès en matière d'égalité entre les sexes et de l'autonomisation des femmes, en particulier au plan économique. L'action du Gouvernement à cet égard vise avant tout la réduction de la féminisation de la pauvreté, par le biais de mesures adaptées et ciblées à l'intention des veuves, des femmes enceintes, des mères de familles et des femmes vivant dans l'extrême pauvreté, notamment. Des petits crédits à taux préférentiel sont octroyés aux femmes rurales pour leur permettre de devenir indépendantes au plan économique; les femmes les plus démunies se servent de ces crédits pour monter des activités génératrices de revenus.

L'égalité entre les sexes est une réalité dans le domaine de l'éducation, a indiqué Mme Chaudhury. La scolarisation secondaire des filles dépasse désormais celle des garçons. L'éducation obligatoire étant gratuite pour les filles à condition qu'elles ne soient pas mariées, le taux de scolarisation a augmenté en même temps qu'ont chuté les taux de mariages précoces et d'abandon. Des progrès ont aussi été réalisés en matière de santé de la femme, des mesures ayant été prises pour prodiguer des soins de santé primaire aux femmes rurales par le biais d'un réseau de dispensaires.

La Ministre a également fourni des précisions sur la participation accrue des femmes dans la force de travail, qui est passée de 23,9% en 1999 à 29,2% en 2006. Cette participation améliorée concerne aussi bien le secteur privé que la fonction publique – soumise à un quota de 15%. L'émancipation politique des femmes est assurée depuis l'adoption de la loi de 1997 qui prévoit leur élection directe à un certain nombre de sièges au niveau des autorités locales.

Le rapport périodique du Bangladesh (CEDAW/C/BGD/6-7) indique notamment que, pour éliminer la discrimination à l'égard des femmes, le Parlement du Bangladesh a promulgué la loi amendée de 2009 sur la nationalité, qui donne aux femmes bangladaises le droit de transmettre leur nationalité à leurs enfants. La reconnaissance de l'identité de la mère a été un événement marquant dans la promotion de l'autonomisation des femmes grâce à l'inscription du nom de la mère dans le passeport et dans d'autres documents officiels. Le rapport indique en outre que la définition de la discrimination à l'égard des femmes telle qu'elle figure à l'article premier de la Convention est reflétée dans la Constitution du Bangladesh, en vertu de laquelle tous les citoyens sont égaux devant la loi et ont droit à la protection de la loi sur le même pied d'égalité. La Constitution ne prévoit pas seulement l'égalité des droits pour les femmes: elle contient également une disposition concernant la prise de mesures appropriées pour la promotion de la femme au Bangladesh. Le Ministère des affaires féminines et de l'enfance a élaboré le projet de loi de 2009 sur la prévention de la violence familiale et la protection contre celle-ci. En mai 2009 un jugement historique de la Haute Cour sur le harcèlement sexuel a fourni des directives en cas de harcèlement sexuel des femmes dans tous les établissements universitaires, lieux de travail et organisations. La Haute Cour a enjoint au Gouvernement de considérer ces directives comme une loi en attendant la promulgation d'un texte législatif. Au chapitre de la traite des personnes, le rapport indique notamment que des consultations ont été menées avec huit ministères compétents et un cadre national pour lutter contre ce phénomène a été élaboré. Le cadre comprend des mesures de prévention, de protection et de soins pour lutter contre les problèmes liés à la traite.

Le Ministère des affaires féminines et de l'enfance a mené à bien plusieurs programmes de développement novateurs en faveur des femmes, qui comprennent des activités de sensibilisation visant à modifier les attitudes stéréotypées et les normes relatives aux rôles et aux responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et la société. Les principales activités de sensibilisation menées par le Ministère des affaires féminines et de l'enfance sont, entre autres, les suivantes: développement en faveur des groupes vulnérables, programme d'allocations de maternité, centre d'assistance pour les femmes et garde à vue dans des conditions de sécurité pour les femmes, les enfants et les adolescentes, autonomisation et protection de l'enfance, promotion de l'égalité entre les sexes et émancipation des femmes. Ces activités de développement font participer les femmes pauvres et défavorisées ainsi que les hommes et les garçons. L'examen mensuel des progrès et les rapports trimestriels sur ces projets permettent d'évaluer les réalisations et les lacunes dans les interventions. En outre, le rapport précise que la loi de 2006 sur le travail interdit la discrimination fondée sur le sexe en ce qui concerne la rémunération des employés, fixe le salaire minimum et n'autorise aucune violation en matière de rémunération des employés, prévoit un congé de maternité qui a été porté de huit à 16 semaines, ramène la durée de service de neuf à six mois et augmente le nombre de crèches pour les enfants des mères qui travaillent. Quinze équipes de contrôle sont chargées de questions telles que l'égalité salariale, le congé de maternité, le nombre de crèches et la mise en œuvre des autres lois sur le travail dans les secteurs public et privé.

Concernant la participation de femmes à la vie politique, l'ordonnance relative à la représentation du peuple de 2008 impose aux partis politiques l'obligation de nommer 33% de femmes comme candidates aux élections parlementaires et d'inclure 33% de femmes dans tous les comités et organes de décision. En conséquence 475 femmes ont été élues vice-présidentes sur un total de 1 936 femmes qui se sont présentées aux élections de janvier 2009. Le nouveau gouvernement, dirigé par une femme, a nommé cinq femmes: trois sont ministres et deux sont ministres d'État en charge de portefeuilles clés. Pour la première fois une femme a été nommée vice-présidente de la Chambre au Parlement et une femme parlementaire a été nommée présidente du Comité parlementaire permanent pour le Ministère des affaires féminines et de l'enfance. Le parti au pouvoir a déclaré dans son manifeste électoral qu'il porterait à 33% le nombre de sièges réservés aux femmes au Parlement.

Examen du rapport

Observation et questions des membres du Comité

Plusieurs membres du Comité ont voulu savoir si le Bangladesh entend lever ses réserves à l'égard de l'article 2 de la Convention («les États parties condamnent la discrimination à l'égard des femmes sous toutes ses formes, conviennent de poursuivre par tous les moyens appropriés et sans retard une politique tendant à éliminer la discrimination à l'égard des femmes») et du paragraphe 1 c) de l'article 16 (relatif à l'égalité dans le mariage), réserves qui seraient liées à l'application de la charia. Ces réserves posent le problème de la cohérence des démarches des autorités en vue de l'intégration de la sexospécificité. Une harmonisation du statut de la femme au sein de la société bangladaise devrait peut-être être envisagée en concertation avec les autorités religieuses, a-t-on observé. Les expertes se sont aussi interrogées sur la volonté du Bangladesh de s'associer au mécanisme d'enquête prévu par le Protocole facultatif.

Des experts ont par ailleurs constaté que la loi sur la citoyenneté de 2009 contient encore des mesures discriminatoires, car si elle permet en effet aux femmes de transmettre leur nationalité à leurs enfants, elle n'autorise toujours pas la transmission à leurs époux. De même, le rapport indique de manière nette qu'aucune démarche n'est envisagée pour unifier le code de la famille.

Des questions ont porté sur les obstacles qui empêchent les autorités de faire admettre les dispositions juridiques progressistes par les fonctionnaires, notamment les magistrats.

Plusieurs membres du Comité ont insisté sur l'importance de l'établissement de statistiques ventilées par sexe qui permettent de mesurer les effets des politiques appliquées en vue de la mise en œuvre de la Convention.

Une experte s'est félicitée de la création de points focaux pour canaliser l'action gouvernementale en matière d'égalité entre les sexes, demandant quelle évaluation a été faite de cette action.

Un membre du Comité a fait état d'une augmentation du nombre des plaintes de femmes victimes de violence, voulant savoir si cette tendance reflète une aggravation du phénomène ou une meilleure sensibilisation des victimes à leurs droits. Elle a demandé si le Bangladesh mène des programmes de suivi psychologique des auteurs de la violence contre les femmes. Une autre experte a demandé quelle était l'incidence de la violence à l'école et au travail. Il a aussi été demandé si les auteurs d'attaques à l'acide au visage de femmes seront punis sévèrement, comme il se doit, et non plus d'une simple amende.

Une experte a regretté la persistance de stéréotypes négatifs au Bangladesh qui empêchent encore les femmes d'occuper des postes à responsabilité, et ce en dépit de la présence depuis plusieurs années de femmes au plus haut niveau du Gouvernement.

D'autres questions ont porté sur la traite des êtres humains, les mariages forcés, les travailleuses du sexe, la prépondérance des garçons sur les filles dans les statistiques démographiques.

S'agissant de la participation des femmes dans la vie politique, une experte a relevé que seules cinq ministères sur quarante-neuf sont dirigés par les femmes. De même, trente-cinq femmes siègent au Parlement. Il a été souligné que les candidatures de femmes ne sont pas favorisées par les risques encourus du fait de la violence exercée par des hommes, par exemple sous la forme d'attaques à l'acide au visage de femmes. Le Gouvernement prend-il des mesures pour donner une image positive des femmes dans la vie publique, dans un contexte où les femmes sont présentées comme le pilier de l'activité économique du Bangladesh, toutes les femmes travaillant et travaillant sans cesse, surtout dans le secteur agricole; mais où seules six femmes juges siègent dans les cours judiciaires supérieures? Des quotas de femmes seront-ils par exemple imposés dans la fonction publique? Une experte a regretté que le Bangladesh ne soit pas représenté au niveau international par suffisamment de femmes.

Une experte s'est dite préoccupée par la faiblesse du taux d'achèvement de la scolarité des jeunes filles. Il serait en outre important que le Bangladesh communique les statistiques de la scolarisation nette des jeunes filles, ainsi que des précisions sur les mesures prises pour réduire la disparité dans les taux de scolarisation des filles à la ville et à la campagne. D'autres questions ont porté sur les conditions du choix des filières d'enseignement par les filles; sur la présence des filles dans les instituts de formation technique; sur le contenu de l'enseignement prodigué dans les collèges pour filles; et sur la proportion de femmes enseignantes dans le secondaire public.

Un autre membre du Comité a insisté sur la nécessité pour le Comité de disposer de statistiques ventilées concernant la structure de l'emploi, ainsi que d'explications relatives à la définition du salaire minimal, qui semble discriminatoire. D'autre part, le Code du travail interdit, dans le contexte professionnel, les comportements «indécents» ou «contraires à l'honneur» de la femme: s'agit-il là des dispositions relatives à la protection contre le harcèlement sexuel? D'autres interrogations demeurent s'agissant de la protection des femmes travaillant dans le secteur informel.

Une experte a voulu savoir si les femmes sont associées à la définition des programmes de reconstruction après les catastrophes naturelles et au processus de décision relatif au développement durable en général. Elle a aussi observé que certaines observations donnent à penser que les bénéficiaires de microcrédits cherchent, à terme, à rejoindre le secteur salarié. L'experte a voulu savoir si, dans l'expérience du Bangladesh, le microcrédit, au-delà des problèmes de gestion immédiate des dispositifs qu'il suscite, entraîne ou non une transformation sociale radicale.

S'agissant des questions de santé, une experte a regretté que le rapport du Bangladesh ne fournisse pas suffisamment d'indications statistiques sur les résultats des lois et programmes destinés à donner effet aux dispositions de la Convention. L'experte a prié la délégation d'informer le Comité des progrès obtenus en vue de la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), en particulier en matière de santé génésique. La même experte a posé d'autres questions relatives aux résultats de la lutte contre le mariage précoce, dont la diminution reflète le succès des démarches en faveur de l'éducation sexuelle et du planning familial.

Une experte a regretté que le rapport du Bangladesh ne donne pas d'information concernant la lutte contre la discrimination à l'égard des femmes dans le domaine des soins de santé, ou qu'il donne des informations non pertinentes. Le Bangladesh peut certes se féliciter d'une baisse du taux de mortalité maternelle (à 3,37 pour 1000), un phénomène qui reste cependant élevé au regard de la cible de 1,4 pour mille fixée par les objectifs du Millénaire pour le développement. La question se pose aussi des dispositions prises pour permettre aux femmes de prendre en charge leur propre santé.

Une experte s'est inquiétée de l'apparition d'une véritable «bulle du microcrédit» et du risque que des femmes bénéficiaires soient entraînées dans une spirale d'endettement. Plusieurs expertes ont demandé quelles mesures seront prises, notamment à l'égard de la propriété foncière et au-delà du microcrédit, pour favoriser l'autonomisation des femmes rurales, dont un grand nombre vit encore dans des conditions de grande pauvreté.

Une experte a suggéré que le Gouvernement lance, si ce n'est déjà fait, un processus progressif d'alignement des dispositions civiles et religieuses en matière de statut personnel et familial, afin que les conséquences économiques du mariage soient réglées globalement par des dispositions civiles inspirées du droit des contrats – le mariage pouvant être considéré comme une forme spécifique de contrat. L'experte a demandé quelle loi s'applique au moment du divorce pour régir la répartition des acquêts et quels sont les droits de la femme s'agissant de l'héritage – autant de questions qui ne sont pas traitées dans le rapport. Une autre experte a voulu savoir si le nouveau Code de la famille traitera bien des droits de toutes les femmes au Bangladesh, indépendamment de leur religion. Des informations ont aussi été demandées sur la lutte contre les mariages forcés et sur la discrimination dans les conditions de la garde des enfants.

Renseignements complémentaires fournis par la délégation

Répondant aux questions sur le cadre général d'application de la Convention, la délégation du Bangladesh a expliqué qu'au moment de la ratification en 1984, le pays avait émis des réserves à l'égard de quatre articles, deux d'entre elles ayant été subséquemment levées au moment de la Conférence de Beijing en 1995. Bien que le Bangladesh maintien des réserves, le Gouvernement a accompli d'importants progrès dans l'application du principe et de l'esprit de la Convention s'agissant de la lutte contre la discrimination et l'égalité entre les sexes, comme en témoignent les amendements à la loi sur la nationalité. Les autorités actuelles, entrées en fonction en 2008, espèrent que la question de la levée de la réserve à l'article 2sera abordée dans le fond d'ici trois ans. Pour ce qui concerne la réserve à l'article 16, le Gouvernement du Bangladesh se renseigne auprès d'États placés dans la même situation que lui pour évaluer ses possibilités d'agir.

La loi sur la nationalité ne prévoit toujours pas que la femme puisse transmettre sa nationalité à son époux, a admis la délégation, assurant néanmoins qu'une révision de cette loi est possible. Elle a ajouté que le rapport indique à tort qu'il serait «inenvisageable» pour le Bangladesh de procéder à une refonte du code de la famille. Une telle démarche implique cependant que les autorités religieuses se mettent d'accord sur le contenu d'un tel document.
La délégation a fait savoir que les autorités s'efforcent de donner effet aux décisions de la Cour suprême, qui ont force exécutoire. Le Gouvernement a créé ainsi des structures administratives capables de donner effet aux décisions de la Cour en matière de lutte contre le harcèlement sexuel. Il a en outre adopté une loi prévoyant des mesures de protection des femmes contre ce problème.

Le budget consacré à la promotion de l'égalité entre les sexes est réparti entre dix Ministères, ce qui rend d'autant plus nécessaire la réalisation d'une base de données de référence dans ce domaine, a confirmé la délégation. Elle a également indiqué que le mécanisme national de mise en œuvre est constitué de points focaux au sein des Ministères, dont le personnel est formé aux différents aspects de l'action gouvernementale dans ce domaine, a fait valoir la délégation. Le point faible de ce mécanisme tient surtout à des problèmes de rotation de personnel.

La Loi sur l'émancipation de la femme et sa politique d'accompagnement, adoptées en 1997, sont, à l'origine, le fruit d'une vaste consultation, ce qui n'a pas été le cas de leurs amendements successifs. Les autorités actuelles se sont engagées à réviser cette politique.

La Constitution garantit une protection égale pour tous les individus, notamment par la voie des tribunaux, les femmes dalits n'étant pas défavorisées à cet égard, a assuré la délégation en réponse à une question portant sur l'existence d'une politique spécifique en direction des femmes doublement discriminées en raison de leur statut économique et de leur origine sociale. La délégation a par la suite précisé que les dalits rencontrent peu de difficultés au Bangladesh.

La délégation a confirmé que les autorités doivent compiler des statistiques sur la violence à l'égard des femmes. Les cas de violence sont quoi qu'il en soit bien mieux consignés qu'auparavant, les médias jouant un rôle important dans ce domaine. Les femmes au Bangladesh ne sont plus confinées au foyer, mais elles sont maintenant plus exposées à la vie publique, ce qui explique peut-être l'augmentation de la violence à leur égard. Les auteurs de cette violence sont systématiquement poursuivis, a assuré la délégation. Au niveau des districts, des comités de policiers se réunissent une fois par mois pour faire le point sur la situation s'agissant de la violence contre les femmes. Les principaux commissariats disposent d'une unité spécialisée dans la réception des plaintes par des femmes. Compte tenu des contraintes budgétaires, l'action du Gouvernement est concentrée sur les victimes, les auteurs de crimes n'étant pas au bénéfice de mesures psychologiques. Par contre, les campagnes de sensibilisation sont axées également sur les hommes et les garçons.

La délégation a précisé que les sept centres d'accueil actuels de femmes victimes sont en phase pilote. Les expériences positives tirées de leur fonctionnement seront suivies par l'ouverture progressive de nouveaux centres dans l'ensemble des 64 districts du pays.

Quant au nombre de cas d'attaques à l'acide contre des femmes et des jeunes filles, il a diminué suite à un contrôle accru de la situation par les autorités, a assuré la délégation. La loi interdit l'automaticité de la remise en liberté sous caution des auteurs inculpés. Les victimes reçoivent un soutien médical. La Haute Cour a publié des jugements interdisant formellement et sanctionnant l'exercice de toute forme de justice personnelle ou alternative au Bangladesh, a jouté la délégation.

Répondant à d'autres questions, la délégation a indiqué que les directives de la haute Cour en matière de lutte contre le harcèlement sexuel seront prochainement intégrées à la loi, après un débat parlementaire. Elle a par la suite souligné que la prévention du harcèlement sexuel passe par l'adoption de mesures d'ordre juridique et technique, comme par exemple la création de tribunaux mobiles capables de poursuivre ces agissements.

La lutte contre les stéréotypes néfastes pour les femmes passe nécessairement par une collaboration avec les médias et avec les expertes qui travaillent depuis longtemps sur le terrain. Les mouvements de femmes, qui existent eux aussi depuis longtemps au Bangladesh, jouent un rôle crucial dans l'élaboration des lois.

La traite des personnes est sanctionnée par le Code pénal, qui prévoit dans certains cas la peine de mort pour les auteurs de ce crime, a indiqué la délégation. Des négociations bilatérales ont lieu avec l'Inde pour évaluer des mesures de lutte contre la traite transfrontalière des personnes. Les victimes de la traite, une fois identifiées, sont aidées en vue de leur réintégration sociale et professionnelle. Par ailleurs, la Constitution dispose que les femmes qui s'adonnent à la prostitution doivent se voir proposer des formes d'occupation alternatives pour se réinsérer. Elles bénéficient en outre de toutes les dispositions de la loi sur la violence contre les femmes.

Il a aussi été précisé que le Bangladesh ne dispose pas de ressources permettant aux parents de choisir le sexe de leurs enfants. Les statistiques démographiques ne témoignent donc pas d'une préférence pour les garçons au détriment des filles.

La délégation a indiqué que le Bangladesh accueillait 28 000 personnes originaires du Myanmar au bénéfice du statut de réfugié. Ces personnes sont hébergées dans des camps placés sous la supervision des grandes institutions internationales, dont le Haut-Commissariat des Nations Unies aux réfugiés. Les ressortissants du Myanmar ne disposant pas du statut de réfugiés bénéficient des infrastructures publiques dont elles ont besoin et ont accès à un emploi.

Les femmes rencontrent des succès indéniables dans leur participation à la vie politique, s'est félicitée la chef de la délégation, soulignant le rôle joué par nombre d'entre elles au Gouvernement, dans les partis et au sein des autorités locales. Ces femmes, qui assument des fonctions de très haut niveau, font véritablement figure de modèles aux yeux de la population féminine tout entière. La loi de 1997, a rappelé Mme Chaudhury, réserve, au titre de mesure de «discrimination positive», un certain nombre de places pour les femmes au sein des collectivités locales. On enregistre en outre une tendance encourageante s'agissant de la présence des femmes dans l'administration et la fonction publique, comme en témoigne par exemple le nombre de femmes diplomates ou juges dans les instances supérieures, de même que le recrutement de plus ne plus important de femmes policières ou soldates. D'une manière générale, la stratégie d'émancipation des femmes du Gouvernement engage la contribution et le soutien des organisations de la société civile.

La délégation a indiqué que l'égalité entre les sexes à l'école est une réalité depuis les années 1990. La nouvelle politique globale d'éducation met l'accent sur la formation technique et commerciale, ouverte aux filles comme aux garçons. Le Gouvernement entend agir pour augmenter la capacité d'accueil les programmes des instituts techniques destinés aux filles. La délégation a en outre précisé quelles mesures ont été prises pour garantir que les filles sont bien accueillies dans les écoles primaires et secondaires, notamment par l'installation de toilettes sûres et propres.

Le droit à la sécurité sociale ne souffre d'aucune discrimination, a assuré la délégation. Dans ce domaine, le Gouvernement s'emploie en ce moment même à la création de bases de données statistiques à l'appui de sa budgétisation et du contrôle de l'efficacité de ses dépenses. La plupart des femmes actives dans le secteur informel œuvrent dans l'agriculture ou la domesticité. Les autorités s'efforcent de reconnaître l'importance de leur participation.

Les besoins des femmes victimes de catastrophes naturelles sont pris en compte dans la formulation des mesures de reconstruction, en vertu de décisions politiques prises au plus haut niveau.

La santé génésique est une priorité pour le Bangladesh, en particulier dans le contexte des objectifs du Millénaire pour le développement. Le Gouvernement, conscient du grand nombre de décès maternels, accorde des prestations en espèces aux femmes afin qu'elles puissent avoir recours aux services de santé qui leur sont destinés. Les autorités entendent dans un premier temps mettre l'accent sur l'accès par toute la population à un réseau de soins de base. La création progressive de 18 000 dispensaires de santé communautaire s'inscrit dans la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement. Chacune de ces cliniques desservira 6000 familles. Le Ministère de la santé a, d'autre part, lancé un vaste programme de renforcement des compétences des infirmières et des sages-femmes pour réduire la mortalité maternelle. Ces campagnes de planification familiale, qui impliquent de plus en plus souvent les hommes, visent l'autonomisation des femmes. Le Ministère de la santé a également lancé des initiatives en faveur de la santé des jeunes filles, incluant un ensemble de mesures très concrètes en termes d'accueil et de prise en charge.

La situation des femmes dans les zones rurales est prise en compte par le Gouvernement dans le cadre de sa politique d'élimination de la pauvreté et de la féminisation de la pauvreté. Les femmes, qui sont des agents important de la transformation économique, sont au cœur des stratégies nationales. D'une manière générale, les autorités s'efforcent d'aider les femmes rurales à devenir propriétaires des terres qu'elles cultivent. Un plan d'action quinquennal est en préparation pour pérenniser les mesures de soutien actuellement prises en faveur des femmes pauvres des régions rurales.

L'incidence des microcrédits fait actuellement l'objet d'une controverse, a indiqué la délégation: en effet, les taux d'intérêt assez élevés sont une charge lourde pour les femmes bénéficiaires. Les autorités examinent ce problème plus en détail. En tout état de cause, le microcrédit n'est pas en soi la panacée aux problèmes que rencontre le Bangladesh. Il doit s'inscrire dans une stratégie générale d'autonomisation économique des femmes.

La délégation bangladaise a fait savoir que son gouvernement était ouvert à toute discussion s'agissant de l'adoption d'un code de la famille unifié. En l'état, un ensemble de lois individuelles régit, en fonction des religions, des aspects tels que la garde des enfants ou la propriété entre époux. Au moment du divorce, sauf la restitution de la dot versée par l'épouse, aucune modalité de partage des biens du ménage n'est prévue. L'obligation d'entretien ne s'applique qu'au mari au bénéfice de son ex-femme. En matière de garde, le droit musulman précise des conditions différentes en fonction du sexe de l'enfant. Il est prévu d'unifier ce régime par l'application de la notion d'intérêt supérieur de l'enfant. Les autorités souhaitent légiférer dans ces domaines au plan civil, une démarche qui exigera la tenue de nombreuses consultations.

La délégation a aussi précisé que son Gouvernement interdit le mariage des enfants. Ce phénomène existe, mais il est combattu par les autorités. Répondant enfin à une suggestion d'une experte, elle a indiqué qu'il existe au Bangladesh une incitation tacite à la limitation du nombre des enfants à deux par famille.

Conclusions

MME SHIRIN SHARMIN CHAUDHURY, Ministre des affaires féminines et de l'enfance du Bangladesh, a remercié les membres du Comité ainsi que les représentantes de la société civile qui ont participé au débat. Cette expérience est unique pour le Bangladesh, en ce qu'elle lui permet de bénéficier des conseils avisés des experts en vue de la mise en œuvre de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. Mme Chaudhury a assuré qu'elle transmettra à son Gouvernement les recommandations du Comité s'agissant de l'application de la Convention dans le contexte de la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement et compte tenu des contraintes propres au Bangladesh.

MME SILVIA PIMENTEL, Présidente du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, s'est félicitée des réussites du Bangladesh dans la réalisation des objectifs fixés par la Convention, en dépit des difficultés liées à l'application des textes de loi.

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