Skip to main content

Communiqués de presse Organes conventionnels

Comité contre la torture examine le rapport de la Mongolie

08 Novembre 2010

8 novembre 2010

Le Comité contre la torture a examiné, vendredi après-midi et ce matin, le rapport de la Mongolie sur les mesures prises par ce pays pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention contre la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Présentant le rapport de son pays, M. Gungaa Bayasgalan, Secrétaire d'État au Ministère de la justice et de l'intérieur de la Mongolie, a indiqué que des mesures ont été prises en 2008 afin d'harmoniser la législation interne avec les dispositions de la Convention contre la torture et plus particulièrement pour définir la torture dans les mêmes termes que la Convention, ainsi que pour réduire la période de détention avant jugement et la période de détention et d'emprisonnement des mineurs. Une loi spécifique est en cours d'élaboration pour assurer compensation pour les préjudices découlant d'un crime. M. Bayasgalan a par ailleurs indiqué qu'une Unité de sécurité a été créée au sein du Département général de la police qui est chargée, entre autres, de mener des enquêtes au sujet des plaintes déposées par les citoyens à l'encontre d'agents de police et de superviser les activités des agents. Le Secrétaire d'État a en outre attiré l'attention sur l'amélioration progressive des conditions dans les centres de détention centralisés. Il a d'autre part indiqué que les démarches ont été engagées pour l'accession de son pays au Protocole facultatif sur l'abolition de la peine de mort. Enfin, M. Bayasgalan a admis qu'en dépit de toutes ces réalisations, plusieurs incidents de mauvais traitements se sont produits ces dernières années, sous la forme de tabassage et d'atteintes physiques intentionnellement infligés par des personnels en charge des enquêtes et par des gardiens de prison. Les mesures appropriées ont été prises pour remédier à ce problème, a-t-il toutefois assuré.

La délégation de la Mongolie était également composée de M. Luvsantseren Orgil, Représentant permanent de la Mongolie auprès des Nations Unies à Genève, ainsi que d'autres représentants du Ministère des affaires étrangères et de membres du Département général de la police et du Comité du programme national sur les droits de l'homme. La délégation a répondu aux questions que lui ont adressées les membres du Comité s'agissant notamment du fonctionnement de la Commission nationale des droits de l'homme, des conditions de détention, de la question des réparations, de la lutte contre la traite de personnes, ou encore de la durée maximale de la détention provisoire.

Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Mongolie, M. Alessio Bruni, a relevé que personne n'a été tenu pour responsable des violations des droits de l'homme commises lors des événements de 2008, lorsque l'état d'urgence avait été déclaré à la suite des manifestations de milliers de personnes du 1er juillet en raison de présumées fraudes lors des élections parlementaires. Selon les informations reçues, la police aurait eu recours à la force de manière excessive à cette occasion et des plaintes pour torture et mauvais traitements commis par la police ont été déposées. Le Rapporteur spécial sur la torture avait déjà clairement souligné que l'impunité pour les actes de torture et de mauvais traitements persistait dans ce pays en raison de l'absence, dans le Code pénal, d'une définition de la torture conforme à la Convention. Le rapporteur s'est en outre inquiété d'informations indiquant que les arrestations et détentions arbitraires continuent d'être pratiquées en Mongolie. La corapporteuse, Mme Myrna Y. Kleopas, a rappelé le caractère absolu et indérogeable de l'interdiction de la torture et de l'imprescriptibilité du crime de torture selon la Convention. Elle a en outre relevé qu'il semble y avoir dans le pays une acceptation implicite et culturelle de la violence contre les suspects. Des informations font encore état de mauvais traitements et d'actes de torture commis par les forces de police. En outre, des informations fiables font état d'une persistance, en Mongolie, de la traite de personnes à des fins d'exploitation sexuelle et de travail forcé.

Le Comité adoptera, dans le cadre de séances privées, des observations finales concernant le rapport de la Mongolie, qu'elle rendra publiques à la fin de la session, le vendredi 19 novembre prochain.

Le Comité entame cet après-midi, à 15 heures, l'examen du rapport de l'Équateur (CAT/C/ECU/4-6).

Présentation du rapport de la Mongolie

M. GUNGAA BAYASGALAN, Secrétaire d'État au Ministère de la justice et de l'intérieur de la Mongolie, a souligné que la Constitution de 2002 avait fait des droits de l'homme et des libertés fondamentales la pierre angulaire de la politique de l'État, conformément aux tendances démocratiques qui se développent au niveau mondial. Depuis l'adoption de cette nouvelle Constitution, des mesures ont progressivement été prises pour assurer ces droits et libertés, renforcer la responsabilité de l'État devant ses citoyens et développer un système d'application des lois et d'organes judiciaires.

Selon l'article 10 de la Constitution mongole, les traités internationaux auxquels le pays est partie prennent effet en droit interne dès l'entrée en vigueur des lois de ratification ou d'adhésion y relatives, a poursuivi M. Bayasgalan. Des amendements ont été apportés en 2008 au Code pénal et au Code de procédure pénale afin d'harmoniser la législation interne avec les dispositions de la Convention contre la torture et plus particulièrement pour définir le terme de torture tel qu'énoncé dans la Convention, réduire la période de détention avant jugement et réduire la période de détention et d'emprisonnement des mineurs, a précisé le Secrétaire d'État. Une loi spécifique est en cours d'élaboration pour assurer compensation pour les préjudices découlant d'un crime; ce projet de loi devrait permettre d'accorder une compensation pour les crimes graves énoncés à l'article 251 du Code pénal, a-t-il indiqué. Afin d'assurer la mise en œuvre de la Convention, a-t-il poursuivi, une révision des règles existantes et l'élaboration de nouvelles règles ont été engagées.

M. Bayasgalan a indiqué qu'une Unité de sécurité a été créée au sein du Département général de la police qui est chargée, entre autres, de mener des enquêtes au sujet des plaintes déposées par les citoyens à l'encontre d'agents de police et de superviser les activités des agents. En 2009, 2527 agents de police ont été enregistrés comme étant impliqués dans 2502 délits et punis en conséquence.

Le Secrétaire d'État a par ailleurs attiré l'attention sur l'amélioration progressive des conditions dans les centres de détention centralisés et a indiqué qu'un nouveau centre de détention avant jugement, conforme aux normes internationales, allait être construit cette année.

M. Bayasgalan a d'autre part indiqué que les études nécessaires et les préparatifs adéquats ont été menés en vue d'une accession de la Mongolie au Protocole facultatif se rapportant à la Convention. Un groupe de travail a été mis sur pied sous la supervision du Ministère de la justice et des affaires intérieures afin de traiter de cette question et de recueillir les points de vues des autorités gouvernementales compétentes et des organisations non gouvernementales, a-t-il précisé.

Enfin, M. Bayasgalan a admis qu'en dépit de toutes ces réalisations, des plaintes et informations émanant des citoyens, ainsi que les résultats des examens et enquêtes menés par les autorités en charge de l'application des lois et des droits de l'homme indiquent que plusieurs incidents de mauvais traitements se sont produits ces dernières années, sous la forme de tabassage et de atteintes physiques intentionnellement infligés par des personnels en charge des enquêtes et par des gardiens de prison. Les mesures appropriées ont été prises pour remédier à ce problème, a assuré le Secrétaire d'État.

Le rapport initial de la Mongolie (CAT/C/MNG/1) indique que le Code de procédure administrative adopté en 2002 a pour principal objet de protéger les droits de l'homme et les libertés individuelles, ainsi que les intérêts légitimes de chacun contre tout acte illégal ou arbitraire de l'administration et des agents de la fonction publique, de rétablir les droits violés et de promouvoir un ordre juridique équitable. Bien que des procédures d'enquête et d'instruction aient rarement été menées sur des cas de traitement cruel, inhumain ou dégradant de suspects, le fait est qu'en application de la législation antérieure, les plaintes et informations concernant des actes imputés à des agents de police qui étaient traitées exclusivement par les autorités de police aboutissaient à des décisions erronées ou injustes, poursuit le rapport. Afin de réprimer les actes cruels et inhumains et de promouvoir les droits de l'homme, le Code de procédure pénale de 2002 a confié à l'Unité chargée de l'instruction au Bureau du Procureur général de Mongolie, la tâche de recevoir toute plainte, information ou dossier sur des cas présumés de traitement cruel ou inhumain de la part d'agents de la police, l'administration de la justice ou du parquet. L'Unité a commencé ses activités le 11 septembre 2002. Elle est chargée d'enquêter sur les infractions commises par la police, les enquêteurs, les agents d'instruction, les procureurs ou les juges. Depuis 2002, une seule personne appartenant aux organes de police ou aux services judiciaires a été condamnée pour traitement cruel ou inhumain d'un suspect ou d'un accusé. Le rapport souligne par ailleurs que l'une des réformes les plus remarquables réalisées dans le domaine de la protection des droits de l'homme est l'adoption en 2000 de la loi sur la Commission nationale des droits de l'homme, qui a donné naissance à un organe indépendant chargé des questions relatives aux droits de l'homme en Mongolie.

Le Code de procédure pénale dispose que nul ne sera soumis à la torture ni à des peines ou autres traitements cruels, inhumains ou dégradants. La modification du Code pénal adoptée le 1er février 2008 donne une large définition du concept de «torture». Cet acte est puni en fonction de sa gravité mesurée par l'étendue du préjudice corporel causé. Afin de surveiller les lieux de détention et de prévenir tout acte de torture qui pourrait y survenir, ainsi que de statuer immédiatement sur toutes les plaintes, propositions ou requêtes formulées par des accusés, depuis janvier 2008, des agents du Bureau du procureur de la capitale répartis en quatre équipes travaillent vingt-quatre heures sur vingt-quatre au centre de détention de Gants Khudag. Sur les 50 condamnés à la peine capitale, six ont vu leur peine commuée en une peine de trente ans d'emprisonnement, indique par ailleurs le rapport.

L'article 69 du Code de procédure pénale fixe comme suit la durée de l'enquête et de la détention: quatorze jours au maximum dans le cas d'un suspect; deux mois au maximum dans le cas d'un accusé, poursuit le rapport. En fonction de la complexité de l'affaire, le tribunal peut décider de prolonger la durée de l'enquête et de la détention, la prolongation pouvant varier selon la gravité de l'infraction. Elle est de quatre mois au maximum dans le cas d'une infraction de moindre gravité, de douze mois au maximum dans le cas d'une infraction grave et de vingt-quatre mois au maximum dans le cas d'une infraction très grave. Dans les cas où le délai de détention a expiré ou que la décision de placement en détention prise par le tribunal n'a pas été remise dans le délai prescrit par la loi, les intéressés sont immédiatement libérés sur ordre du directeur de l'établissement. En 2007, sur les 3268 suspects admis dans un établissement de détention, 2075 ont été libérés; en 2008, sur les 3487 suspects arrêtés, 1478 ont été libérés. Toutes ces mesures ont été exécutées sous la supervision de procureurs. Dans le cadre des réformes législatives de 2002, l'administration des centres de détention, qui était précédemment du ressort de la police, a été transférée à l'Autorité chargée de l'application des décisions de justice. Cette mesure juridique vise à établir une séparation entre les centres de détention et les organes d'enquête et d'instruction et autres organes de police chargés d'appliquer la loi aux fins de protéger autant que possible les citoyens contre la torture et les traitements cruels et inhumains.

Examen du rapport

M. ALESSIO BRUNI, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Mongolie, a souligné que le rapport initial d'un État partie constitue le point de départ du dialogue entre cet État et le Comité concernant l'application de la Convention, rappelant que la date butoir pour la soumission de ce rapport initial avait été fixée à 2003 et que ce document n'a finalement été soumis qu'en 2009; il s'agit donc d'un dialogue tardif qui s'engage aujourd'hui après de longues années de silence, a fait observer le rapporteur.

M. Bruni a demandé à la délégation de lui présenter des cas concrets et récents d'enquêtes concernant des actes de torture ou mauvais traitements et des suites qui leur ont été données. Il a souhaité savoir si la délégation était en mesure de fournir des exemples d'affaires judiciaires dans lesquelles les dispositions pénales concernant la torture ont été appliquées et s'est enquis des peines prononcées dans ces affaires.

En ce qui concerne la Commission nationale des droits de l'homme de Mongolie, qui est devenue opérationnelle en 2001, il est affirmé dans le rapport qu'elle jouit d'une certaine compétence «même lors d'une situation d'urgence», s'agissant de formuler des propositions et des recommandations en matière de droits de l'homme. Le rapporteur a voulu savoir si cette Commission fonctionne sur la base des Principes de Paris et de quelle manière un état d'urgence peut influer sur ses activités et sur la situation des droits de l'homme en Mongolie.

Les événements de 2008 ont constitué un véritable électrochoc pour la société mongole, a poursuivi M. Bruni, rappelant que l'état d'urgence avait été déclaré pour 4 jours à la suite des manifestations de milliers de personnes qui s'étaient produites le 1er juillet à Oulan-Bator et ailleurs dans le pays en raison de présumées fraudes lors des élections parlementaires. Selon Amnesty International, la police a recouru à la force de manière excessive à cette occasion et il y a eu des plaintes pour torture et mauvais traitements de la part de la police à l'encontre des centaines de personnes arrêtées. Or, toujours selon Amnesty International, personne n'a été tenu pour responsable de ces violations de droits de l'homme, de sorte qu'une certaine impunité des forces de sécurité prévaut dans le pays deux ans après ces événements. M. Bruni a souhaité des éclaircissements de la part de la délégation face à ces allégations.

M. Bruni a indiqué qu'il n'était pas persuadé que tous les éléments de la torture figurant dans la définition énoncée à l'article premier de la Convention soient repris dans les dispositions pertinentes de la législation nationale mongole. Au vu des informations qu'il a recueillies sur cette question, M. Bruni a estimé que quelques mois d'incarcération ou jusqu'à deux ans d'emprisonnement pour le crime de torture restent une punition très légère, même en l'absence de circonstance aggravante. Il a rappelé qu'à l'issue de sa visite en Mongolie en 2005, le Rapporteur spécial sur la torture avait déjà clairement souligné que l'impunité pour les actes de torture et de mauvais traitements persistait dans le pays en raison de l'absence, dans le Code pénal, d'une définition de la torture conforme à la Convention.

M. Bruni s'est en outre enquis des dispositions légales en vigueur en Mongolie s'agissant des droits fondamentaux des personnes arrêtées, s'agissant notamment du droit d'être informé des charges pesant contre soi, du droit à l'assistance juridique ou encore du droit à un examen médical.

Le rapporteur s'est en outre inquiété d'informations indiquant que les arrestations et détentions arbitraires continuent d'être pratiquées en Mongolie, ce qui laisse apparaître un fossé entre la loi existante et son application dans la réalité.

Existe-t-il en Mongolie une procédure fondée sur une base juridique qui permette à un subordonné de remettre en question voire de refuser l'ordre d'un supérieur si cet ordre implique des actes de torture, a par ailleurs demandé M. Bruni?

M. Bruni a par ailleurs rappelé qu'à l'issue de sa visite en Mongolie il y a cinq ans, le Rapporteur spécial sur la torture s'était dit préoccupé par la grave surpopulation carcérale dans le principal établissement de garde à vue de la police à Oulan-Bator – le Centre pour la détention forcée. Il s'était également dit préoccupé par la situation des prisonniers soumis au régime spécial d'isolement dans la prison de haute sécurité de Tashiree Am – également connue sous le nom de Tangaar Nam ou Takhir Soyot. Quelles sont aujourd'hui les conditions de détention dans ces établissements, a demandé M. Bruni? Il s'est de la même manière enquis de la situation qui prévaut aujourd'hui dans la prison de Denjiin Myanga à Oulan-Bator – où Amnesty International recensait, en 2009, 242 prisonniers pour une capacité d'environ 150 places. M. Bruni s'est enquis de la périodicité du contrôle des lieux de détention exercé par le bureau du Procureur général.

Il semble ressortir des réponses que la Mongolie a apportées au Rapporteur spécial sur la torture que sur 744 plaintes pour torture enregistrées depuis 2007, 743 ont été considérées comme sans fondement – dont 730 n'ont même pas été considérées comme dignes de devoir faire l'objet d'une enquête. Le rapporteur s'est étonné de ces chiffres et a demandé des explications à la délégation.

Selon des informations reçues d'organisations non gouvernementales, la question de la peine de mort est considérée en Mongolie, comme un secret d'État et aucune donnée n'est disponible à ce sujet, a fait observer M. Bruni. À l'instar des informations transmises par plusieurs organisations non gouvernementales, le Rapporteur spécial sur la torture s'est lui aussi dit préoccupé par le secret total qui entoure les affaires impliquant la peine capitale en Mongolie. Cette année, le Président mongol a annoncé un moratoire sur l'exécution de la peine de mort et a demandé à des juristes de travailler à son abolition, a relevé M. Bruni, qui a voulu savoir où en étaient ces démarches. Le rapporteur a aussi demandé s'il existe toujours des «couloirs de la mort» et quelles étaient les conditions de détention actuelles.

MME MYRNA Y. KLEOPAS, corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la Mongolie, a rappelé le caractère absolu et indérogeable de l'interdiction de la torture et l'imprescriptibilité du crime de torture selon la Convention et a observé que dans le cas de la Mongolie, il semble que tel ne soit pas le cas. Évoquant la perception publique des mauvais traitements et de la torture en Mongolie, elle a relevé qu'il semble y avoir dans ce pays une acceptation implicite et culturelle de la violence contre les suspects.

Exemples à l'appui, Mme Kleopas s'est inquiétée de l'absence d'enquêtes sur des allégations de torture.

Des organisations non gouvernementales – et notamment Amnesty International – font encore état de mauvais traitements et d'actes de torture commis par les forces de police, a par ailleurs souligné la corapporteuse.

En dépit des mesures adoptées pour remédier à ce phénomène, des informations fiables font état d'une persistance, en Mongolie, de la traite de personnes à des fins d'exploitation sexuelle et de travail forcé, a poursuivi Mme Kleopas. Des ONG font état d'une augmentation des cas d'exploitation sexuelle des jeunes filles – notamment de jeunes filles enlevées des zones rurales à des fins d'exploitation. Par ailleurs, des cas ont été dénoncés par certaines sources s'agissant des pires formes de travail des enfants dans l'industrie minière et dans l'agriculture, a ajouté Mme Kleopas.

En dépit des efforts consentis par la Mongolie pour prévenir et combattre la violence conjugale, notamment par le biais de l'adoption d'une loi sur la question en 2005, le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, dans ses observations finales, de même que des ONG ont exprimé leurs préoccupations face à l'incidence de la violence domestique, qui demeure préoccupante en Mongolie.

De nombreux viols ne font l'objet d'aucune plainte en raison de la crainte des victimes de faire l'objet d'une stigmatisation sociale, a poursuivi la corapporteuse. Seule une minorité des cas de viols fait l'objet de poursuites en justice, a-t-elle ajouté.

Depuis 2006, les châtiments corporels sont interdits dans les écoles en vertu de la loi; Mme Kleopas a toutefois rappelé que le Comité estime que ce type de châtiments doit être interdit dans tous les cadres, y compris au sein de la famille.

Un autre membre du Comité a souhaité savoir si un officier de police judiciaire est habilité à procéder à une garde à vue sans autorisation et sinon, de quelle autorité judiciaire relève l'autorisation de prendre une telle mesure.

Un expert a attiré l'attention sur les «mineurs ninjas», dont les droits sont souvent bafoués, en soulignant qu'il existe en Mongolie des cas de travail des enfants, de prostitution et même des situations très proches de la servitude.

Une experte a fait état d'informations crédibles attestant de violences à l'encontre de résidents chinois en Mongolie, dont le nombre avoisinerait les 12 000. Quelle est la nature de ces incidents et comment a réagi le Gouvernement, a demandé l'experte?

Que pense la délégation de l'éventualité d'adopter une loi sur les crimes de haine, a demandé un autre membre du Comité?

Une experte s'est enquise de la réaction de la délégation face à l'arrestation à Londres – conformément au mandat d'arrêt international qui avait été prononcé à son encontre – de M. Bat Khurts, un responsable mongol ayant participé à l'enlèvement en France d'un ressortissant mongol réfugié en France qui avait ensuite été emmené en Mongolie où il aurait été victime de torture.

Réponses de la délégation de la Mongolie

Les traités internationaux dûment ratifiés par la Mongolie font partie intégrante du droit interne, a indiqué la délégation, ajoutant que la législation nationale était conforme aux dispositions de la Convention contre la torture.

La Commission nationale de droits de l'homme de la Mongolie est indépendante et autonome; elle est conforme aux Principes de Paris et fonctionne même en période d'état d'urgence, a d'autre part indiqué la délégation.

Les décisions d'expulsion d'étrangers peuvent faire l'objet de recours et d'appel devant les tribunaux, a par ailleurs indiqué la délégation. Elle a en outre indiqué qu'un comité ad hoc était actuellement chargé d'examiner la possibilité, pour la Mongolie, d'accéder à la Convention de 1951 sur les réfugiés.

S'agissant des conditions de détention, la délégation a indiqué que le Parquet effectue des visites dans les centres de détention; les procureurs locaux y effectuent des visites mensuelles. Six centres de détention qui ne répondaient pas aux normes fixées ont été fermés, a fait valoir la délégation, ajoutant que les autres centres respectent les normes pertinentes. Pour ce qui est des prisons, l'une des priorités de l'action actuelle est leur modernisation et la rénovation de leurs locaux, a poursuivi la délégation. Les conditions carcérales ont été considérablement améliorées ces derniers temps, a-t-elle fait valoir. Dans les prochaines années, vont être construits dans le pays des centres de détention provisoire pour une capacité totale de 3000 places, a-t-elle ajouté.

Pour ce qui est de la protection des victimes et des témoins, des dispositions existent en la matière dans le droit pénal, mais il est vrai qu'il faudra à l'avenir disposer d'une loi traitant spécifiquement de cette question, a convenu la délégation. Aussi, un groupe de travail ad hoc a-t-il été mis sur pied pour étudier cette question et préparer un projet de loi qui sera soumis à la session de printemps de 2011 du Parlement, a-t-elle précisé.

D'après la loi, la réparation de préjudices causés par un agent de l'État incombe aux services de l'État, a souligné la délégation. Il peut y avoir sanction pénale en cas de détention, arrestation ou fouille illégales, ainsi qu'en cas d'imposition de traitement médical forcé, a-t-elle notamment indiqué. Selon les dernières statistiques, suite à des actes illégaux de la part d'agents chargés de l'application des lois, plus de 400 000 millions de tugriks ont été payés comme réparations dans une vingtaine d'affaires au total. Le budget de l'État a prévu 3,8 millions de tugriks pour le paiement de telles réparations, a ajouté la délégation. Une loi spécifique sur les réparations en faveur des victimes de torture devrait également être présentée au Parlement, a-t-elle fait savoir.

Rappelant que la Mongolie respecte déjà un moratoire sur la peine capitale, la délégation a indiqué que la semaine dernière, dans le cadre de l'Examen périodique universel auquel a procédé le Conseil des droits de l'homme s'agissant de la Mongolie, le Gouvernement a officiellement approuvé l'adhésion de la Mongolie au deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, sur l'abolition de la peine de mort. Ce Protocole devrait donc être approuvé lors de la prochaine session plénière du Parlement, après quoi la peine de mort pourra être définitivement abolie dans le pays.

Le problème de l'exploitation sexuelle des jeunes filles est très délicat et le Gouvernement y accorde une grande importance, a par ailleurs assuré la délégation. Les autorités vont s'attacher à régler le statut juridique des victimes de la traite de personnes, a-t-elle précisé. La Mongolie entend élargir sa coopération avec tous les pays aux fins de la lutte contre la traite d'êtres humains, a-t-elle ajouté. Le mois dernier, le pays a signé avec Macao un mémorandum d'accord visant la lutte contre la traite de personnes; en effet, d'après les informations disponibles, les jeunes filles de Mongolie sont très concernées par le problème de la traite de personnes avec Macao.

Une loi devrait également être prochainement adoptée visant l'élimination des pires formes de travail des enfants, a par ailleurs indiqué la délégation.

Étant donné que la violence familiale ne diminue pas, un programme spécifique devrait également être mis en place en faveur des femmes concernées par ce phénomène.

Les autorités ne disposent d'aucune plainte officielle concernant des violations de droits des minorités sexuelles, lesquelles disposent de leur propre association à travers le Centre GTBT, a d'autre part indiqué la délégation; ce Centre dispose sans doute d'informations qu'il a bien entendu tout loisir de partager s'il le souhaite.

La Mongolie essaie de réduire la durée maximale de détention provisoire avant jugement; depuis 2002, ce temps a été réduit à 24 mois dans les cas les plus graves. Pour un mineur, ces délais ne peuvent généralement dépasser un mois, sauf pour les crimes les plus graves où la durée de détention provisoire d'un mineur peut alors aller jusqu'à huit mois.

Si des ressortissants étrangers commettent un crime sur le territoire mongol ou si un ressortissant mongol commet un crime à l'étranger, la question peut en principe être tranchée par la législation mongole, a par ailleurs indiqué la délégation.

En ce qui concerne la minorité kazakhe - dont il arrive que des membres partent au Kazakhstan puis reviennent en Mongolie -, la délégation a rappelé que la Mongolie ne reconnaît pas la double nationalité. Le droit à la nationalité mongole peut seulement être rétabli par le Président et il y a effectivement eu quelque 200 cas de ressortissants kazakhs qui ont demandé à voir rétablir leur droit à la citoyenneté mongole.

En vertu du Code pénal, qui sanctionne la tentative (volonté intentionnelle) de commettre un délit pénal, l'intention de commettre un acte de torture est passible de sanctions pénales, a par ailleurs souligné la délégation.

Questions complémentaires des experts

Le rapporteur, M. BRUNI, a souligné que, selon certaines informations émanant du Rapporteur spécial sur la torture, il y a eu 744 plaintes pour torture depuis 2007 et une seule condamnation, ce qui porte à penser que les procédures d'enquête ne sont pas très sérieuses en Mongolie. Le rapport initial affirme que six des 50 condamnés à mort que comptait le pays ont vu leur peine commuée en détention à perpétuité; mais le rapporteur a souhaité connaître le sort des 44 autres, alors que le Rapporteur spécial a fait état de conditions de détention déplorables pour les personnes condamnées à mort.

La corapporteuse, Mme KLEOPAS, a indiqué qu'elle n'était pas convaincue que la nouvelle définition de la torture énoncée dans la nouvelle loi adoptée par la Mongolie en 2008 soit conforme à celle énoncée à l'article premier de la Convention contre la torture. À défaut de définition précise, il est difficile de disposer de sanctions précises, a-t-elle insisté. Une autre experte a demandé comment poursuivre et sanctionner les actes de torture alors qu'il y a si peu de précisions concernant la définition de la torture dans la législation interne.

La corapporteuse a en outre exprimé sa préoccupation pour ce qui est de la protection des victimes de la traite de personnes, qui reçoivent un faible soutien. Peu d'enquêtes sont menées sur les cas d'enfants enlevés, a-t-elle également relevé.

Comment sont désignés les membres de la Commission nationale des droits de l'homme, qui sont-ils et combien sont-ils, a par ailleurs demandé Mme Kleopas?

Les autorités mongoles ont-elles prévu de modifier la législation relative aux étrangers, qui date de 1993, alors que la situation a beaucoup évolué depuis 17 ans, a demandé un autre membre du Comité?

Un expert a souhaité obtenir des informations au sujet des 326 travailleurs de mongols qui, entre 2004 et 2007, sont décédés dans un État tiers auquel le Comité a l'intention de demander des explications à ce sujet lorsqu'il examinera son rapport.

Certes, il faut se réjouir que les traités internationaux dûment ratifiés par la Mongolie fassent partie du droit interne, mais – aux fins de poursuites – la loi mongole exige qu'il y ait qualification des actes; c'est pourquoi il est essentiel d'inclure dans le droit pénal la définition de la torture, a souligné un expert. Les souffrances psychologiques en tant que telles entrent-elles dans la définition de la torture, conformément à l'article premier de la Convention, a-t-il en outre demandé?

Réponses complémentaires de la délégation

Revenant sur la question de la définition de la torture, la délégation a assuré que tous les articles de la Convention s'appliquent de manière contraignante en droit interne et que les juges doivent donc en tenir compte dans leurs décisions et arrêts. En outre, une dizaine de dispositions pénales pertinentes sanctionnent des actes tels que l'abus de pouvoir de la part de fonctionnaires de haut rang, les accusations à tort à l'encontre de personnes innocentes, l'emprisonnement illégal ou encore la falsification de preuves, a souligné la délégation.

Tous les condamnés à mort ont obtenu une grâce présidentielle, a par ailleurs indiqué la délégation.

En réponse aux inquiétudes exprimées par un membre du Comité au sujet du manque de poursuites engagées suite à 744 plaintes pour torture, la délégation a expliqué qu'il avait été constaté qu'il n'y avait aucun fondement juridique permettant de considérer ces cas comme des délits de nature pénale. Cela ne signifie pas qu'aucune sanction n'est appliquée; en effet, même s'il n'y a pas de sanctions pénales, des mesures disciplinaires ou administratives sont prises à l'encontre des fonctionnaires concernés, a ajouté la délégation.

Trois membres permanents de la Commission nationale des droits de l'homme sont désignés par le Parlement et cette Commission est tenue d'exercer ses fonctions conformément aux Principes de Paris, a par ailleurs indiqué la délégation.

__________

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

Mots-clés

VOIR CETTE PAGE EN :