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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité des droits de l'homme examine le rapport d'Israël

14 Juillet 2010

Comité des droits de l'homme
14 juillet 2010

 

Le Comité des droits de l'homme a examiné, dans le cadre de trois séances qui se sont tenues hier après-midi et aujourd'hui, le rapport périodique d'Israël sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Présentant le rapport de son pays, M. Aharon Leshno Yaar, Représentant permanent d'Israël à l'Office des Nations Unies à Genève, a indiqué que l'évaluation du respect par Israël des dispositions du Pacte doit tenir compte de l'évolution de la situation, en particulier le retrait complet d'Israël, en 2005, de la bande de Gaza, suivi par la prise de pouvoir violente dans cette région par l'organisation terroriste du Hamas. Face aux menaces qui pèsent contre sa sécurité nationale, Israël a fermement maintenu sa politique d'ouverture à l'égard des organes conventionnels des Nations Unies, de manière à améliorer sans cesse le respect de ses engagements et obligations internationaux. Le Procureur général adjoint d'Israël, M. Malkiel Blass, a pour sa part déclaré qu'en dépit des graves difficultés et dilemmes auxquels Israël est confronté dans sa lutte contre le terrorisme et les autres menaces pour sa sécurité, le pays reste fermement engagé dans le respect de ses obligations internationales en tant que partie aux six grands traités de droits de l'homme. La prévention efficace du terrorisme dans le respect des droits fondamentaux de tous les citoyens, y compris ceux des criminels les plus endurcis, est une tâche complexe et exigeante, à tel point qu'Israël, en tant qu'État démocratique, est souvent contraint de combattre «une main liée dans le dos».

La délégation israélienne était également composée de plusieurs représentants du Ministère des affaires étrangères d'Israël et du Ministère de la justice. Elle a répondu aux très nombreuses questions du Comité concernant notamment la protection des droits et la représentation des citoyens israéliens arabes, la démolition de logements à Jérusalem, la conduite de l'opération militaire «Plomb durci» contre Gaza et les conditions du blocus, la répartition des ressources en eau, ainsi que les colonies de peuplement et la construction d'un mur de séparation.

Des experts du Comité ont regretté qu'Israël n'ait pas apporté de réponses écrites à bon nombre de questions, notamment concernant l'opportunité d'étendre l'application du Pacte à la Cisjordanie et à la bande de Gaza. Le Président du Comité s'est félicité du dialogue ouvert et approfondi auquel s'est prêtée la délégation, qui s'est efforcée de répondre à toutes les questions orales des membres du Comité. Le Président a espéré que les politiques du Gouvernement israélien en vue de l'application du Pacte tiendront compte des avis exprimés au sein du Comité des droits de l'homme.

Les observations finales du Comité sur les rapports des pays examinés au cours de la session seront rendues publiques à la fin des travaux, le 30 juillet prochain.

Le Comité des droits de l'homme tiendra demain matin, vers 11 heures, une séance publique consacrée à ses méthodes de travail. Il doit procéder, demain après-midi et vendredi matin, à l'examen du rapport périodique de la Colombie (CCPR/C/COL/6), qui se déroulera au Palais Wilson.

Présentation du rapport

M. AHARON LESHNO YAAR, Représentant permanent d'Israël à l'Office des Nations Unies à Genève, a rappelé que les principes qui sont au cœur du Pacte international relatif aux droits civils et politiques sont consacrés par la Déclaration d'indépendance adoptée en mai 1948, ainsi que par les arrêts de la Cour suprême israélienne, qui garantissent les droits de l'homme dans le pays. L'évaluation du respect par Israël des dispositions du Pacte doit tenir compte des événements importants qui ont marqué l'actualité depuis le dernier examen par le Comité en 2003. Il faut en particulier mentionner le retrait complet d'Israël, en 2005, de la bande de Gaza, suivi par la prise de pouvoir violente dans cette région par l'organisation terroriste du Hamas, qui a fait pleuvoir des missiles sur la population du sud du territoire israélien. Face à ces menaces contre sa sécurité nationale, Israël a fermement maintenu sa politique d'ouverture à l'égard des organes conventionnels des Nations Unies, de manière à améliorer sans cesse le respect de ses engagements et obligations internationaux, a fait valoir M. Yaar. C'est pourquoi la délégation d'Israël aborde le dialogue d'aujourd'hui dans un esprit d'ouverture, a déclaré le Représentant permanent.

M. MALKIEL BLASS, Procureur général adjoint au Ministère de la justice d'Israël, a déclaré qu'en dépit des graves difficultés et dilemmes auxquels Israël est confronté dans sa lutte contre le terrorisme et les autres menaces pour sa sécurité, ce pays reste fermement engagé dans le respect de ses obligations internationales en tant que partie aux six grands traités de droits de l'homme. La prévention efficace du terrorisme dans le respect des droits fondamentaux de tous les citoyens, y compris ceux des criminels les plus endurcis, est une tâche complexe et exigeante à tel point qu'Israël, en tant qu'État démocratique, est souvent contraint de combattre «une main liée dans le dos». Concernant les progrès réalisés par Israël dans le domaine législatif depuis le dernier examen, M. Blass a fait savoir que les lois adoptées au cours de la dernière décennie sont à la fois plus radicales dans leur conception et d'une portée plus vaste que les textes adoptés antérieurement. En témoignent notamment le nouveau Code de procédure pénale adopté en 2007, qui entérine la doctrine juridique relative à l'«abus de procédure», ou encore la loi imposant l'obligation de tenir compte de l'effet sur l'égalité entre les sexes de toute législation primaire ou secondaire adoptée par la Knesset (Parlement).

La Cour suprême d'Israël est en particulier saisie de questions liées au respect des droits de l'homme lors de conflits. Les appels, traités de manière particulièrement rapide par la Cour, peuvent notamment entraîner la suspension d'opérations militaires en cours. Les décisions de la Cour en matière de promotion des droits de l'homme lui valent une réputation au niveau international, a fait valoir M. Blass. Dans le domaine exécutif, le Procureur général adjoint a relevé que le Comité ministériel concernant le secteur non juif a avalisé la création d'une Autorité de développement économique du secteur arabe, y compris les secteurs druze et circassien. En outre, le Gouvernement d'Israël gère de nombreux projets de renforcement des infrastructures dans les villes et villages arabes. M. Blass a enfin espéré que le dialogue d'aujourd'hui ne serait pas uniquement focalisé sur la situation en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, compte tenu des efforts considérables consentis par Israël pour s'acquitter, sur son territoire, de ses obligations au regard du Pacte. M. Blass a enfin estimé que tout débat sur les droits de l'homme doit tenir compte du sort du soldat Gilad Shalit, enlevé par le Hamas et détenu dans des conditions toujours inconnues.

Le troisième rapport périodique d'Israël (CCPR/C/ISR/2001/3) indique, notamment, que l'égalité complète entre hommes et femmes devant la loi est une solide réalité en Israël, sauf en ce qui concerne certaines questions régies par la loi religieuse. La loi sur l'égalité des droits entre hommes et femmes dispose, à l'article premier, que les mêmes lois s'appliquent aux hommes et aux femmes pour «tout acte juridique», et que toute loi établissant une discrimination à l'encontre des femmes sera de nul effet. En 2007, la Knesset a adopté la loi relative aux incidences de la législation du point de vue de l'égalité entre les sexes. Cette loi rend obligatoire l'examen de toute législation primaire et secondaire du point de vue de ses incidences sur l'égalité entre hommes et femmes avant son adoption par la Knesset. Il s'agit de mettre en évidence toute inégalité occulte entre hommes et femmes qui pourrait résulter de différents projets de loi, de manière à promouvoir des conditions d'égalité entre les deux sexes. Le quatrième amendement à la loi (2005) dispose que toute équipe désignée par le gouvernement chargée de définir les politiques nationales (y compris les équipes de négociation préparant un accord de paix) doit comprendre un nombre approprié de femmes. Afin d'assurer le respect et l'application effective de cette disposition, l'organisme qui désigne l'équipe doit rendre compte de sa composition à l'Office pour la promotion de la condition de la femme, qui l'examinera à son tour en détail, ouvrant ainsi la voie à l'établissement d'un rapport annuel à présenter à la Commission de la condition de la femme sur la représentation adéquate des femmes dans les équipes responsables de politiques publiques.

Au chapitre des mesures de contrôle des organismes chargés de l'application des lois, le rapport indique que tous les agents de la fonction publique répondent de leurs actes au regard du droit pénal et la plupart d'entre eux au regard des règlements qui leur sont applicables. Les détenus, les prisonniers ou toute autre personne peuvent saisir directement les tribunaux ou engager des procédures administratives pour obtenir réparation de l'action ou de la décision contestée. Le Département des enquêtes sur le personnel de police du Ministère de la justice conduit régulièrement des enquêtes sur les abus commis par la police. Ainsi, en octobre 2006, au cours d'un raid de la police des frontières, des policiers ont arrêté trois Palestiniens soupçonnés de séjourner illégalement en Israël. Pendant l'examen de leurs pièces d'identité, l'un des policiers chargé de surveiller les personnes interpellées a tiré un coup de feu qui a entraîné la mort de M. Iyad Abu Aya et blessé une autre personne. À la suite d'une enquête, le Département a demandé l'ouverture de poursuites contre deux des fonctionnaires de police impliqués dans l'incident. Le 16 janvier 2008, l'un des accusés a été reconnu coupable d'homicide et d'agression avec circonstances aggravantes ayant causé un dommage corporel réel. L'affaire est encore pendante.

Le rapport informe en outre de la situation des 170 000 Bédouins qui vivent dans la région désertique du Néguev. La plupart d'entre eux habitent dans des centres urbains et suburbains aménagés et construits en toute légalité. Toutes les agglomérations existantes ont été construites conformément à des plans approuvés et sont dotées d'équipements collectifs - établissements scolaires, cliniques, adductions d'eau et d'électricité, etc. Bien que les sept agglomérations existantes puissent apporter une réponse satisfaisante aux besoins de la population bédouine, sous réserve de leur expansion, le Gouvernement a décidé que neuf agglomérations nouvelles devaient être créées à partir de 1999 pour les Bédouins. Tirant les leçons des travaux des anciens comités d'urbanisme, les services d'urbanisme ont travaillé en contact permanent avec les représentants des Bédouins qui leur ont fait part de leurs idées sur la conception optimale de chaque agglomération et ses caractéristiques souhaitées. Le Gouvernement a aussi créé, au sein du Ministère de la construction et du logement, une nouvelle autorité chargée exclusivement de l'aménagement du secteur bédouin, y compris de l'expansion des agglomérations, et de la recherche de solutions au problème de logements de tous les Bédouins.

Examen du rapport

Renseignements complémentaires

La délégation d'Israël a fourni des renseignements complémentaires en réponse à la liste des points à traiter qui lui avait été adressée au préalable par le Comité (CCPR/C/ISR/Q/3; des réponses écrites figurent au document CCPR/C/ISR/Q/3/Add.1).

En ce qui concerne la question de la responsabilité d'Israël, en vertu du droit international, d'assurer l'application des dispositions du Pacte en Cisjordanie, Israël reconnaît qu'il existe un lien étroit entre le droit de la guerre et les droits de l'homme, et qu'il pourrait bien y avoir une convergence entre ces deux sources de droit à certains égards. Toutefois, ces deux ensembles juridiques sont codifiés dans des instruments distincts et s'appliquent dans des circonstances différentes. La Convention, qui est un instrument d'application territoriale, ne s'applique pas à l'extérieur du territoire national.

S'agissant de l'interdiction de la discrimination et de la création d'une institution nationale de droits de l'homme, la délégation a indiqué que la Cour suprême a statué à plusieurs reprises conformément aux principes d'égalité et de prévention de la discrimination. Plusieurs institutions de défense des droits de l'homme existent déjà en Israël, en matière de santé, de droits de l'enfant ou d'autonomisation des femmes, notamment.

S'agissant des démolitions de logements à Jérusalem-Est, la délégation a indiqué que, entre 2004 et 2009, la municipalité de Jérusalem a fait démolir près de 700 constructions illégales, dont moins de 500 dans les quartiers Est de la ville, à majorité arabe, et plus de 200 dans les quartiers Ouest. Les démolitions sont justifiées par des violations des règlements sur la construction et sur l'urbanisation. Toutes les démolitions sont cependant effectuées dans le respect des procédures juridiques et peuvent faire l'objet de recours jusqu'à la Cour suprême, a assuré la délégation. Le caractère spectaculaire des démolitions d'immeubles à Jérusalem-Est s'explique par le fait que les constructions illégales consistent en immeubles entiers, tandis qu'à Jérusalem-Ouest il s'agit surtout d'ajouts de pièces ou d'aménagements de cours intérieures.

La délégation a rappelé par ailleurs que l'arabe est une langue officielle en Israël. La Knesset a adopté, en 2007, la loi portant création d'un institut de formation à la langue arabe. D'autres lois obligent la publication de certaines communications officielles dans cette langue, tandis que le ministère de la culture et des sports alloue des fonds publics à l'organisation d'activités culturelles en arabe. Enfin, le Ministère des transports étudie la mise en place d'une signalisation claire à l'intention de tous les usagers de la route.

La délégation a encore indiqué que la définition du terrorisme est actuellement étudiée dans le cadre d'une réforme législative complète visant à encadrer la lutte contre le terrorisme et les moyens d'y faire face. D'autre part, la promulgation de la loi sur les combattants illégaux, validée par la Cour suprême, a entraîné la mise en détention de sept personnes. Les décisions peuvent faire l'objet d'appel. Il ne fait par ailleurs pas de doute qu'Israël vit en situation d'urgence, compte tenu des vagues de terrorisme qu'il a subies depuis l'an 2000. Si, ces dernières années, l'État s'est abstenu de prolonger l'état d'urgence, il n'est pas possible d'y mettre un terme sans délai avant de réviser certaines lois statuant sur les situations d'urgence. L'état d'urgence actuel prendra fin en juin 2011.

La délégation a rappelé que la loi fondamentale d'Israël interdit l'application de la torture, qui est criminalisée. La Cour suprême a confirmé que rien ne justifie le recours à la torture lors d'enquêtes judiciaires. À cet égard, l'exception pour situation de «nécessité» ne peut être invoquée qu'à des conditions très précises, définies par la Cour suprême. L'examen des techniques d'interrogatoire utilisées par l'Agence pour la sécurité d'Israël n'a pas entraîné de condamnations; par contre, il a suscité un certain nombre d'aménagements et de changements dans le déroulement des interrogatoires. Le recours à un conseil juridique est garanti par le Code de procédure pénale. Le magistrat instructeur doit organiser la rencontre entre le détenu et son avocat le plus rapidement possible, un délai de 24 heures au maximum étant admissible dans des cas graves, comme par exemple pour éviter la commission d'un crime ou pour assurer la sauvegarde d'une vie humaine. Dans la pratique, un deuxième délai de 24 heures peut être imposé. La décision doit être prise au cas par cas et est susceptible de recours.

Le règlement sur les prisons régit les conditions d'accès des détenus à un avocat; la rencontre avec l'avocat peut être retardée si l'administration pénitentiaire a des raisons de croire qu'un entretien avec un avocat en particulier risque d'entraîner une violation des règlements pénitentiaires, ou constituer une menace pour la sécurité des personnes ou de l'État. Le délai entre la demande et la visite est en principe de 24 heures, prolongeable de cinq jours au plus, avec l'accord du ministère public. Ce dernier peut imposer un délai supplémentaire de 21 jours au maximum, décision qui peut faire l'objet d'un appel devant la Cour suprême. La détention au secret n'est pas autorisée en Israël, a souligné la délégation, qui a précisé que le placement en isolement est distincte de cette forme de détention, a précisé enfin la délégation.

Questions et observations des membres du Comité

Les experts du Comité ont généralement regretté qu'Israël n'ait pas apporté de réponses à plusieurs questions, notamment concernant la possibilité d'étendre l'application du Pacte à la Cisjordanie ou à la bande de Gaza. Il a été observé que les questions soumises aux États, et leurs réponses, ont pour objet de permettre au Comité de mieux comprendre comment, en principe et surtout en pratique, les dispositions du Pacte sont appliquées.

Une experte du Comité a déploré la brièveté des réponses apportées par écrit à certaines questions juridiques controversées, estimant notamment que l'on ne peut balayer d'un revers de main la question de l'application du Pacte en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. Le Comité estime en effet, et de longue date, que le Pacte s'applique bel et bien aux populations soumises à une occupation. Cette position est confortée par un arrêt de la Cour internationale de justice de 2004, qui conclut que le Pacte est applicable aux actes d'un État agissant selon sa compétence au-delà de son propre territoire. De même, la Cour estime que la protection offerte par les instruments internationaux de droits de l'homme s'étend également lors de conflits armés. Israël est intervenu au Liban, à Gaza, en haute mer, a rappelé l'experte, interventions qui ont entraîné des pertes de vies humaines et qui obligent donc que l'on se pose la question du fondement juridique de ces actes.

Dans le cadre de questions de suivi, une experte a relevé que la non-application du Pacte dans les territoires occupés semble désormais résulter, pour Israël, non plus d'une question de principe mais d'un simple état de fait. L'interprétation donnée par la délégation est en effet surprenante: le refus total de reconnaissance du Pacte (à Gaza) et simultanément sa reconnaissance en partie seulement (dans la Cisjordanie), comme il a été expliqué. Dans ce débat juridique, Israël donne l'impression de se retrancher derrière les arrêts de sa propre Cour suprême, rejetant toute interprétation divergente de la justice internationale.

Il a été souligné qu'Israël est tenu de garantir l'application du droit à l'autodétermination du peuple palestinien. La colonisation, la confiscation de terres, le déplacement arbitraire de populations ne sauraient entraîner l'effacement des dispositions du Pacte, une situation totalement incompréhensible pour un juriste, a-t-il été observé. Le problème de la lenteur de la mise en conformité des normes discriminatoires du fait du recours systématique à la Cour suprême a aussi été soulevé. Concernant l'utilisation obligatoire de la langue arabe dans les procédures judiciaires, est-il certain que les personnes confrontées à la justice et s'exprimant dans cette langue sont notifiées des décisions les concernant dans cette langue? Une experte a aussi demandé des précisions sur les conditions de révocation de la nationalité israélienne, ainsi que sur les critères d'octroi et de retrait des permis de circulation des personnes.

S'agissant de la démolition de logements, un expert a cité des rapports indiquant que la multiplication des constructions illégales s'explique notamment par le défaut d'octroi d'autorisations de construire aux Palestiniens et par la crainte de ces derniers de perdre leur statut de résidents de Jérusalem. L'expert a demandé des indications chiffrées concernant le nombre des permis de construire accordés aux Palestiniens et le nombre des parcelles réservées aux Israéliens dans Jérusalem-Est. Des informations ont également été demandées sur les objectifs généraux de la planification urbaine à Jérusalem.

Un expert a voulu connaître la situation s'agissant de l'adduction d'eau et de la fourniture de médicaments, en particulier à Gaza. Des rapports d'organisations non gouvernementales font état d'une consommation en eau anormalement basse, correspondant à deux tiers, et parfois un quart de la ration quotidienne préconisée par l'Organisation mondiale de la santé, laissant craindre une discrimination à l'encontre des Palestiniens sur ce plan. Parallèlement, des indications devraient être données sur la consommation en eau des colonies israéliennes en Cisjordanie. S'agissant de l'accès aux soins, des informations font état du blocage de la livraison à Gaza de matériel médical nécessaire à l'établissement de diagnostics vitaux et aux traitements par rayons, a observé l'expert. La délégation a été priée d'expliquer pourquoi Israël n'allège pas le blocus contre Gaza pour y permettre l'acheminement de matériaux de construction et de médicaments. Un expert a relevé que la crédibilité de la commission d'enquête concernant le raid sur le convoi à destination de Gaza serait renforcée par la présence de personnalités internationales.

Abordant la conduite de l'opération militaire «Plomb durci» contre Gaza, et les allégations selon lesquelles un certain nombre de crimes ont été commis au cours de cette opération, une experte s'est interrogée sur l'indépendance des procédures judiciaires lancées contre des membres de l'armée israélienne soupçonnés de ces crimes, ainsi que sur le très faible taux d'inculpation de soldats. La délégation a aussi été priée d'expliquer l'écart entre les chiffres relatifs au nombre de personnels médicaux blessés et d'hôpitaux endommagés fournis par Israël et ceux des Nations Unies, du Comité international de la Croix-Rouge et des institutions nationales des droits de l'homme. Comment s'explique, d'autre part, la persistance d'exécutions ciblées extrajudiciaires de militants palestiniens, compte tenu des injonctions en sens contraire de la Cour suprême, a voulu savoir une experte, demandant en outre comment la justice militaire pouvait juger qu'il n'existe pas de base légale pour la poursuite des personnes responsables de tels actes.

Une experte a demandé quelles raisons expliquent les modifications de dispositions concernant la caractérisation des délits contre la sécurité et la réalisation d'enquêtes pénales contre des membres de l'Agence pour la sécurité d'Israël, qui risquent de compromettre la crédibilité du processus judiciaire. La même experte a observé que les autorités ont été saisies, depuis 2001, de plus de 600 plaintes pour cas de torture, dont aucune n'a entraîné l'ouverture d'une enquête: dans ces conditions, est-il judicieux de confier le traitement de ces plaintes à l'Agence pour la sécurité d'Israël, comme c'est le cas actuellement? D'autres experts ont voulu savoir si la torture, telle que définie par la Convention contre la torture, est effectivement interdite en Israël. On doit, à cet égard, s'interroger sérieusement sur le contenu nécessairement subjectif de la notion de «nécessité», invoquée à titre d'exception au principe général de l'interdiction de cette pratique: la fin justifie-t-elle tous les moyens? Quels sont les critères justifiant, au nom de la «nécessité», le recours à la torture lors d'interrogatoires, ont insisté des membres du Comité.

Un expert, relevant que le rapport fait état d'un renforcement des compétences des fonctionnaires du service public à la lutte contre les discriminations, a signalé que des organisations de la société civile font régulièrement état de la persistance de comportements discriminatoires au sein de l'armée, notamment: quelles mesures complémentaires seront-elles prises pour donner effet aux dispositions légales?

Un expert a demandé des réponses à la question, restée sans réponse, relative à la fréquence et aux conditions du recours à la détention administrative, en particulier dans les territoires palestiniens occupés et dans le sillage de l'opération «Plomb durci» contre Gaza. Est-il exact que les familles de Palestiniens de Gaza détenus en Israël n'ont pas le droit de rendre visite à leurs proches, a notamment demandé l'expert. Un autre expert a voulu savoir si Israël envisageait d'autoriser le Comité international de la Croix-Rouge à rendre visite aux personnes placées à l'isolement pour en contrôler les conditions de détention. Une experte a demandé si Israël avait envisagé d'améliorer la situation des prisonniers afin qu'ils puissent communiquer avec leurs familles, par le biais d'Internet par exemple. Israël serait-il en outre prêt à relancer le programme de visites familiales du Comité international de la Croix-Rouge suspendu en 2007?

Des questions ont porté sur la protection des droits linguistiques des citoyens israéliens arabes. On constate à ce propos que la traduction des arrêts de la Cour suprême est souvent réalisée vers l'anglais mais pas vers l'arabe. Il a aussi été relevé que la notification des pièces de procédure pénale doit se faire dans une langue comprise par le justiciable. D'autre part, certains citoyens arabophones sont confrontés au refus des ministères de traiter leurs documents rédigés en arabe ou à l'obligation de rédiger certains formulaires en hébreu. Ces mêmes citoyens sont d'autre part souvent confrontés à de grandes difficultés pour se rendre dans les États voisins. Il a aussi été fait état de l'interdiction par les autorités de nombreuses manifestations culturelles (matches de football, conférence des jeunes femmes) destinées à célébrer l'identité arabe. Enfin, la translittération en hébreux des panneaux de signalisation risque de poser le problème de la perte de l'héritage culturel – sans compter que la signalisation dans certaines localités arabes est uniquement en hébreu. Des précisions ont été réclamées au sujet de la traduction des toponymes arabes sur les panneaux indicateurs.

Un expert a demandé à la délégation de confirmer que les autorités sont sensibles aux besoins humanitaires de toutes les personnes vivant sur le territoire national, en particulier ceux des Bédouins. La délégation a été interrogée sur la question de l'intégration culturelle et sociale des populations nomades.

Des membres du Comité ont demandé pour quelle raison Israël ne donnait pas suite à l'avis consultatif de la Cour internationale de justice concernant le mur de séparation.

S'agissant du respect du principe d'égalité, une experte a relevé que la crainte qu'inspire la Cour suprême, censée inspirer la rédaction des textes législatifs, est en réalité très relative, compte tenu de la difficulté de mise en œuvre de ses arrêts.

Les chiffres concernant la révocation du statut de résident à Jérusalem, ainsi que le texte de l'ordonnance étendant le champ d'application de la loi sur la révocation à toutes les catégories de personnes, devront faire l'objet de communications écrites ultérieures au Comité, a demandé une experte. Des experts ont demandé des précisions sur la nature et la diffusion publique du règlement portant sur la révocation des permis de résidence.

Un expert a demandé combien de Palestiniens vivent dans les «zones de séparation» et dans quelle mesure ils y disposent de la liberté de mouvement. D'autre part, comment Israël justifie-t-il la saisie de terres dans ces zones, compte tenu des dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels? Et quels garde-fous juridiques contrôlent-ils les règlements militaires qui s'appliquent dans ces zones?

Un expert a demandé combien de personnes ont déposé des demandes de dispense de service militaire pour objection de conscience et quelles réponses ont été données à ces demandes. Des précisions devraient en outre être données sur les conditions précises de l'accès au service civil par les objecteurs. Plusieurs experts se sont demandés s'il est bien juste de laisser aux tribunaux militaires le soin de conférer ou non le statut d'objecteur de conscience.

Un expert a observé que la Cour suprême d'Israël avait rejeté une demande visant une réglementation des lieux saints en Israël, en réponse à une vague de profanations de lieux saints importants pour les musulmans. Des personnes ont-elles été jugées pour ces faits? Et comment faire en sorte que les décisions en matière de protection des lieux saints soient appliquées de manière non discriminatoire?

D'autres questions ont porté sur les attaques militaires contre deux écoles à Gaza pendant l'opération «Plomb durci»; sur les conséquences de la nouvelle Loi sur le financement des organisations non gouvernementales en termes de liberté d'association; sur l'applicabilité du Pacte dans les colonies et sur la multiplication des violences commises par les colons contre des hommes et des femmes palestiniens.

Réponses de la délégation

Répondant aux questions des membres du Comité, la délégation a fait savoir que le principe d'égalité, bien qu'il ne soit pas mentionné explicitement dans la loi fondamentale, guide néanmoins les rédacteurs juridiques et les parlementaires chargés de légiférer: en effet, la Cour suprême ne manquera pas de rejeter tout texte de loi contraire au principe d'égalité. Répondant à une question ultérieure sur le respect du principe d'égalité, la délégation a précisé que les arrêts de la Cour suprême sont des instruments complexes, dont l'application exige parfois, en effet, des délais administratifs.

S'agissant de la révocation du droit de séjour à Jérusalem, la délégation a expliqué que le statut de résident est révoqué après une absence de sept ans, indépendamment de l'origine des personnes concernées. Les Arabes concernés, s'ils gardent un lien avec Israël, ne seront pas touchés par la révocation.

Le traitement des plaintes contre le comportement des fonctionnaires de l'Agence pour la sécurité d'Israël (ASI) lors des interrogatoires est assuré par des inspecteurs indépendants du même corps, choisis néanmoins de manière à éviter tout conflit d'intérêt, tout en connaissant parfaitement les rouages de l'agence. Ils travaillent sous le contrôle d'un fonctionnaire de haut rang du Ministère de la justice. Les lignes directrices régissant le recours à la notion de nécessité par les fonctionnaires de l'ASI ont donné lieu à des modifications des méthodes d'interrogatoire, de même qu'à des sanctions disciplinaires. Ces méthodes sont classées sous le régime du secret défense du fait de leur importance pour la sécurité nationale. Les enquêteurs de l'ASI œuvrent en effet contre des organisations terroristes qui cherchent des moyens de résister à un éventuel interrogatoire.

La délégation a observé en réponse à d'autres questions que peu de pays acceptent de publier leurs directives concernant le traitement des personnes soupçonnées de terrorisme, ce qui s'explique par des raisons de sécurité. La Cour suprême a jugé d'autre part que l'imminence d'un acte terroriste ou la nécessité de préserver des vies humaines sont des critères de nécessité: il incombe en effet aux autorités de protéger la vie des citoyens et résidents. Les responsables des interrogatoires suivent à la lettre les dispositions de l'arrêt.

Seuls 239 arrêts de la Cour suprême, présentant un caractère historique, ont été traduits en anglais, a précisé la délégation. Les directives des ministères ont été modifiées afin d'autoriser la soumission des documents officiels dans d'autres langues que l'hébreu, a-t-elle encore assuré. À ce propos, il a été décidé la traduction intégrale, par l'Institut de la langue arabe, de tous les documents administratifs. Les retards dans ce domaine sont imputables au manque de personnel.

Concernant l'application du Pacte à Gaza et en Cisjordanie, la délégation a indiqué que cette question suscite un vif débat depuis plusieurs années. Elle a ajouté qu'il était difficile d'évaluer l'application du Pacte dans ces régions du fait de l'évolution rapide de la situation. Israël a évacué intégralement Gaza, où elle ne dispose plus d'un contrôle effectif. Le Pacte ne peut donc s'y appliquer. En Cisjordanie, Israël exerce un contrôle gouvernemental très restreint, le droit palestinien s'appliquant pour l'essentiel. Israël reconnaît un lien étroit entre le droit de la guerre et les droits de l'homme: mais dans le contexte actuel, ils s'appliquent dans des circonstances très différentes. Apportant des précisions en réponse à d'autres questions, la délégation a déclaré que l'application du Pacte en Cisjordanie et à Gaza est complexe dans la réalité: il s'agit en effet de zones en conflit, auxquelles s'appliquent le droit de la guerre et le droit international humanitaire. L'application concrète de ces deux systèmes est complexe.

Le Gouvernement d'Israël soutient le droit à l'autodétermination du peuple palestinien, comme en témoigne la signature de la Feuille de route qui prévoit la création d'un État palestinien, a précisé le chef de la délégation. Les autorités palestiniennes doivent dans ce contexte assumer les responsabilités liées à l'autorité étatique. Or, le Hamas agit contre les intérêts de son propre peuple par ses actes violents. Par contre, certains intervenants au Proche-Orient, en Iran mais aussi dans certains milieux palestiniens, tendent à nier le droit à l'autodétermination du peuple juif, à délégitimer Israël et à exacerber la colère de la communauté internationale contre ce pays. La solution est celle d'une coexistence pacifique de deux États vivant côte à côte, dans la reconnaissance mutuelle de leur légitimité.

Répondant à d'autres questions, la délégation a souligné qu'Israël a confirmé à plusieurs reprises le droit des Palestiniens à l'autodétermination; le blocage actuel de la situation ne tient donc pas à un refus de ce droit. Israël s'attend pour sa part à ce que ses partenaires admettent son existence et s'abstiennent d'actes de violence à son encontre.

Les exécutions ciblées mentionnées par le Comité ont fait l'objet d'une plainte, examinée par le Procureur militaire, qui a jugé que les opérations incriminées ne dérogeaient pas aux arrêts de la Cour suprême. D'une manière générale, Israël étudie la question de la nécessité et de la proportionnalité des attaques ciblées dans le contexte d'attaques terroristes palestiniennes. Le ciblage de terroristes est un impératif militaire, dans le respect des principes d'humanité, et quand il n'existe pas d'autre moyen d'appréhender les terroristes recherchés. Le contrôle de la proportionnalité s'applique alors au cas par cas.

Le Procureur militaire a diligenté une enquête sur des allégations de mauvais traitements par les forces de défense israéliennes à Gaza pendant l'opération «Plomb durci», recensées par le Comité des droits de l'homme. Les conclusions de l'enquête seront présentées au Procureur qui déterminera la suite à donner à la procédure. La délégation a fait savoir en outre que l'utilisation de boucliers humains est proscrite par les forces de défense israéliennes. Sept allégations d'utilisation de civils comme boucliers humains à Gaza ont été recensées; le procès en cour martiale a lieu en ce moment même de soldats accusés d'avoir obligé un enfant de neuf ans à entrer dans une maison. Un officier supérieur a été entendu pour contravention aux règlements militaires, un capitaine a été jugé pour manque de discernement, un sous-officier pour faute. Plusieurs autres procédures disciplinaires sont presque terminées. Elles ont montré que les populations civiles n'ont pas été la cible intentionnelle des opérations militaires à Gaza, qui étaient justifiées par la nécessité opérationnelle. Elles ont aussi abouti à une adaptation des règlements d'engagement en zone urbaine et des règlements relatifs au traitement des populations et biens civils, en vue en particulier de leur meilleure protection pendant les combats.

La délégation a indiqué, en réponse à des questions posées à la fin de l'examen, que le bombardement de précision de deux écoles pendant l'opération «Plomb durci» avait été motivé par des attaques de mortiers situés dans le voisinage immédiat des immeubles visés, comme l'a établi une enquête subséquente. Quatre obus ont été tirés, entraînant l'arrêt des tir constituant une menace immédiate pour les forces israéliennes. Israël a volontiers coopéré à l'enquête du Secrétaire général des Nations Unies au sujet de cette attaque et des dédommagements subséquents, a assuré la délégation; Israël émet par contre des réserves quant à l'impartialité des organes politiques des Nations Unies.

Il a par ailleurs été observé que certaines unités du Hamas ont, durant les opérations militaires à Gaza, pris leurs quartiers dans des établissements hospitaliers, d'autres endossant des uniformes médicaux ou utilisant des ambulances dans le cadre de leurs actions armées. Les Forces armées israéliennes ont pour leur part renforcé, pendant l'opération «Plomb durci», leurs mesures de protection des civils; elles se sont aussi abstenues d'attaquer certains véhicules ou immeubles médicaux utilisés frauduleusement à des fins militaires. Des enquêtes ont été lancées sur les allégations d'attaques contre le personnel et les installations médicaux. Par exemple, le ciblage d'un hôpital pédiatrique le 10 janvier 2008 avait pour objectif la destruction du matériel militaire qui y était stocké par le Hamas, ce qui a été accompli sans dommage collatéral; quant aux attaques contre des ambulances, certaines ont été injustifiées, mais jugées néanmoins explicables par les contraintes opérationnelles.

Le blocus contre Gaza est imposé du fait de la situation de guerre d'Israël contre le Hamas, qui tente de faire entrer des armes en contrebande. Le droit international impose la liberté de passage pour les biens médicaux, dans le respect des exigences de sécurité nationale. Israël applique pleinement ces dispositions, comme en a jugé la Cour suprême. Des mesures ont été prises récemment pour libéraliser l'acheminement des biens destinés aux populations civiles ainsi que l'aide humanitaire ne pouvant servir à des fins terroristes. Israël publie désormais une liste des biens dont l'importation est interdite.

Le droit international justifie aussi l'imposition d'un blocus en mer, y compris dans les eaux internationales. Concernant le blocus maritime contre Gaza, Israël a émis toutes les notifications officielles requises aux parties concernées. Le convoi qui a tenté de forcer le blocus s'exposait donc en toute connaissance de cause à des mesures de contrainte, a fait valoir la délégation. Étant donné le grand nombre de vaisseaux dans le convoi, et de la violence dont ont usé certains des militants à bord, l'armée israélienne a été contrainte faire usage de la force. Des magistrats militaires ont, hier, présenté leur rapport d'enquête sur ces événements. Ils y relèvent que l'unité engagée a tenu compte des impératifs légaux et humains et que son commandement a agi de manière courageuse et appropriée, y compris en ce qui concerne l'usage d'armes à feu. Sept des neuf personnes tuées dans ces événements avaient d'autre part exprimé publiquement leur volonté d'y trouver la mort, a fait observer la délégation.

La délégation a souligné qu'il n'existait pas d'implantation d'Israël à Gaza ni en Cisjordanie avant 1967, a rappelé la délégation. Les implantations ont commencé après la signature du traité de paix signé par Israël avec ses voisins. Elles n'ont jamais empêché le déroulement des négociations de paix. Cependant, dans un geste de bonne volonté, le Gouvernement d'Israël a accepté de suspendre pour dix mois l'extension des colonies et la délivrance de permis de construire. Sept mois après cette décision, on attend toujours de la partie palestinienne qu'elle se joigne aux pourparlers de paix, a regretté la délégation. La délégation a aussi rappelé que les attentats palestiniens ont entraîné la mort de douze mille de personnes. Depuis la construction du mur de séparation temporaire, le nombre de ces attentats a très fortement chuté, pour atteindre pratiquement zéro, preuve de son efficacité. Israël cherche l'équilibre entre la sécurité de ses citoyens et les besoins de la population palestinienne. À cet égard, la Cour suprême a été saisie de plus de deux mille demandes de rectification du tracé de la clôture.

Les résidents des «zones de séparation» entre le mur de séparation et la Ligne verte qu'il suit au plus près ont effectivement besoin d'un permis pour se déplacer, a fait savoir la délégation, assurant que son pays a pris des mesures pratiques pour faciliter la liberté de mouvement des personnes concernées par les effets de la séparation. Les paysans palestiniens sont par exemple assurés de pouvoir cultiver leurs terres. Les familles ont la possibilité de se réunir dans une mesure restreinte de part et d'autre de la clôture. Gaza pour sa part, depuis la prise de pouvoir par le Hamas, est désormais considérée comme une zone en guerre contre Israël, et donc soumise à des restrictions particulières.

Concernant la démolition d'habitations, la délégation a précisé que toute construction était soumise à l'obtention d'un permis préalable. Les démolitions sont pratiquées dans le respect des lois, en particulier en ce qui concerne le droit de recours. En 2007, 132 démolitions ont été réalisées dans les implantations illégales, 105 en 2008, 196 en 2009, et 67 en 2010.

Répondant à des questions concernant la limitation des zones constructibles en Cisjordanie, la délégation a expliqué qu'elle dépendait des autorités responsables: Israël administre à cet égard 60% environ du territoire, dont il doit réserver certaines zones pour le développement futur. En réalité, l'espace constructible ne manque pas, a observé la délégation. Les principales difficultés sont liées à la zone gérée administrativement par Israël et l'Autorité palestinienne.

Les plaintes contre des militaires sont examinées par le Procureur militaire qui détermine l'opportunité du renvoi devant une juridiction pénale ou disciplinaire, a-t-il été précisé. La police militaire et la police civile reçoivent indifféremment les plaintes des civils contre des actes commis par des militaires; les habitants de Gaza passent par l'intermédiaire d'une organisation non gouvernementale qui agit comme intermédiaire en leur faveur. Les enquêtes sont menées par une unité autonome, dépendant du Chef de l'État-major des armées.

La mise en détention administrative est décidée pour des raisons exceptionnelles de sécurité par le Ministre de la défense, pour une durée de six mois. La Cour suprême a jugé que cette démarche doit avoir pour objectif d'éviter un préjudice majeur. Il n'y a pas de détenu administratif en Israël à l'heure actuelle. En Cisjordanie, les mises en détention administrative répondent aux normes internationales, a assuré la délégation, et ne sont décidées que dans des situations constituant un risque de sécurité. Mille trois cents ordres de détention provisoire ont été émis en 2009, contre plus de deux mille l'année précédente. En réponse à des questions supplémentaires, la délégation a précisé que les justiciables sont toujours et complètement informés des charges retenues contre eux, a assuré la délégation, précisant que certaines restrictions existent dans le cas des détentions administratives. D'une manière générale, les personnes détenues pour des motifs de sécurité ne sont pas autorisés à communiquer par téléphone pour éviter qu'ils ne planifient de nouveaux attentats depuis leur prison, ce qui s'est déjà produit.

Concernant l'approvisionnement en eau et l'évacuation des eaux usées, la délégation a indiqué que des mesures ont été prises permettant un doublement du volume d'eau potable consommée par les populations palestiniennes de Cisjordanie. La construction d'une usine de désalinisation a été proposée par Israël, mais sans que la partie palestinienne ne prenne de décision en ce sens, ni d'ailleurs en faveur d'un assainissement plus rationnel de l'eau, qui est à la charge d'Israël. Répondant à une questions de suivi sur la qualité de l'eau en Cisjordanie et à Gaza, il a été assuré que les normes sanitaires s'appliquent de manière identique pour les Palestiniens et les Israéliens.

La délégation a indiqué que les autorités ont été contraintes, pour des raisons de sécurité et de souveraineté, de limiter les déplacements de personnes pour entrer et sortir de la bande de Gaza. Saisie, la Cour suprême a jugé que l'entrée sur le territoire israélien ne constituait pas un droit humanitaire fondamental de la population palestinienne. Les autorités doivent d'autre part prendre en compte la préservation de la sécurité publique. La Cour suprême a estimé que le préjudice subi par les personnes détenues en Israël ne justifie pas l'annulation ni le changement des règlements régissant le franchissement de la frontière.

Il a été précisé que les panneaux de signalisation routière sont inscrits en hébreu, en arabe et en anglais.

L'enquête indépendante sur l'incident au large de Gaza est du ressort du Gouvernement, qui a à cette fin mis sur pied une commission composée de personnalités éminentes israéliennes et de deux personnalités étrangères, pour assurer une observation internationale, a fait valoir la délégation.

La loi sur le rapatriement de personnes infiltrées illégalement sur le territoire israélien prévoit désormais une notification dans la langue des justiciables concernés, a assuré la délégation. Les rapatriements sont soumis à un délai de recours de 72 heures. Les Gazaouis qui souhaitent se rendre en Cisjordanie doivent être au bénéfice d'un permis. Le problème de la résidence illégale est relativement marginal, compte tenu des mesures administratives prises par Israël à la demande de l'Autorité palestinienne, a précisé encore la délégation. Concernant l'annulation de permis de résidence de députés appartenant au Hamas, la justice israélienne a justifié cette décision au motif qu'il est inacceptable qu'un élu compromette la sécurité nationale et la confiance du public dans les institutions politiques. La justice a estimé que les permis pourraient être maintenus si les personnes concernées renonçaient à leurs activités au sein du Hamas. Ceci ne s'étant pas produit, les permis ont été annulés. Des recours sont examinés par la Cour suprême. Israël ne s'opposera pas à une demande des requérants d'être portés sur les rôles de la population palestinienne, a précisé la délégation.

Il a été indiqué que les mesures d'aménagement urbain concernant les Bédouins sont prises en concertation avec ces derniers. Les autorités ont décidé la construction de onze nouvelles villes répondant aux besoins spécifiques de ces populations.

La délégation a fait savoir que plusieurs règlements protègent les lieux saints situés sur le territoire israélien contre tout préjudice matériel lié à la construction d'immeubles et à l'aménagement du territoire. Une commission a été mise sur pied afin d'évaluer l'état des lieux saints arabes et de renforcer le programme destiné à leur gestion, tandis qu'un budget a été attribué à leur restauration. Des listes des chantiers à mener ont été dressées en 2007 et 2008. Le Centre juridique pour les droits de la minorité arabe a refusé de collaborer à la rédaction de la deuxième liste, a relevé la délégation. Quant aux activités de certains groupes religieux dans la vieille ville de Jérusalem, la délégation a précisé que l'accès au Mont du Temple est limité: les Juifs et les visiteurs non musulmans ont le droit d'y accéder le matin et à midi, en dehors des heures de prière des musulmans. La politique israélienne à ce sujet n'a pas changé ces dernières années. La police israélienne n'autorise pas les personnes qui ne sont pas musulmanes (juifs ou chrétiens) à organiser aucune cérémonie rituelle que ce soit sur le Mont du Temple. Israël respecte pleinement le droit à la liberté de religion et de confession pour tous les peuples dans les lieux saints de la vieille ville de Jérusalem.

Concernant l'objection de conscience, la délégation a précisé que le Ministre de la défense était autorisé à exempter toute personne d'accomplir ses obligations militaires pour des motifs reconnus par la loi. La Cour suprême a jugé que si l'objection de conscience est avérée, l'exemption de service est accordée tant aux hommes qu'aux femmes. Les objecteurs de conscience peuvent accomplir le service national civil, organisé à l'intention des citoyens et résidents non soumis au service militaire. La délégation a par la suite ajouté qu'elle informerait par écrit le Comité des statistiques sur ce sujet. D'autre part, la commission chargée de juger des cas d'objection de conscience est composée de civils aussi bien que de militaires. Il faut rappeler que le service militaire est obligatoire en Israël et qu'il revient donc au requérant de prouver son état d'objecteur de conscience. Les décisions administratives peuvent faire l'objet de recours jusqu'aux plus hautes instances. Les réfractaires, par opposition aux objecteurs de conscience, sont soumis aux dispositions normales du droit.

S'agissant du financement des organisations non gouvernementales, la délégation a indiqué la loi impose que les organisations recevant des fonds d'agents étrangers afin de promouvoir une activité de nature politique informent le public de leurs relations avec leurs donateurs. La délégation a par la suite précisé que la loi exige la divulgation du financement étranger des organisations non gouvernementales. Une révision de la loi est en cours dans le sens de la prise en compte du danger d'influence du jeu politique national par des États étrangers. La transparence est réclamée dans ce domaine, il s'agit là d'une tendance de fond, a observé la délégation. Les organisations non gouvernementales sont particulièrement nombreuses et actives en Israël, qui autorise également la venue d'institutions étrangères. Certaines de ces dernières sont parfois soumises à des restrictions si elles risquent de compliquer la situation sécuritaire en Israël.

Pendant l'année scolaire 2009-2010, plus de 41 000 élèves étaient inscrits dans les écoles des quartiers est de Jérusalem, soit une augmentation de 40% en dix ans. La municipalité, qui ne pose aucune restriction à ce développement, est consciente de la pénurie de salles de classe dans cette zone et œuvre à l'amélioration de la situation, a assuré la délégation. Trois immeubles ont ainsi été loués afin d'abriter des salles de classe, outre deux immeubles déjà dévolus à cet effet: au total, mille cinq cents élèves y sont accueillis. Douze nouvelles écoles sont prévues. Ce sont ainsi 205 nouvelles salles au total qui seront à terme ouvertes dans les quartiers est de Jérusalem.

La délégation a encore indiqué que la Commission israélienne des services publics était très active dans la promotion d'une meilleure représentation des citoyens israéliens d'origines arabe, druze et circassienne. Une série de séances d'information a porté sur l'intégration d'employés arabes dans la fonction publique; certains postes leur ont été réservés; il a été fait appel à des agences de placement pour trouver des candidatures adaptées; un cadre d'examinateurs arabes est en voie de constitution pour intégration dans les commission chargées de noter les épreuves d'admission à la fonction publique. Les statistiques montrent une augmentation régulière de la proportion de fonctionnaires arabes, druzes et circassiens: en 2009, le pourcentage s'établit à 6,97%, contre 6,17% en 2007 et 6,67% en 2008. En 2008, 11,66% des nouvelles recrues de la fonction publique appartenaient à ces trois catégories. La représentation des populations minoritaires est également en voie d'amélioration au sein du pouvoir judiciaire (40 juges sur 569 à l'heure actuelle).

Répondant à des questions sur la discrimination, le Comité a été informé que la «loi sur la loyauté» a été rejetée le 31 mai dernier par la Commission ministérielle des affaires juridiques. Quant au problème des déclarations publiques de personnalités israéliennes au sujet des Arabes, il soulève la question de l'équilibre à maintenir entre liberté d'expression et protection du bien-être public. Cet équilibre est assuré par une évaluation au cas par cas, dont sont chargés les services du procureur général. Les membres de la Knesset jouissent, de par leur immunité parlementaire, d'une protection étendue de leur liberté d'expression.

Les incidents de violence ethnique font l'objet de strictes mesures de prévention et sont dénoncés au Procureur général, qu'elles qu'en soient les victimes et les auteurs, a assuré la délégation. En 2008, 525 enquêtes ont été menées pour troubles à la paix ou incitation à la haine raciale ou ethnique en Cisjordanie, 256 plaintes ont été déposées par des Palestiniens et autant par l'armée. Les forces de l'ordre sont donc bien actives dans ce domaine.

Conclusion

M. AHARON LESHNO YAAR, Représentant permanent d'Israël auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, a conclu l'examen du rapport de son pays en remerciant les membres du Comité de leurs questions et de leur écoute. La délégation fera fidèlement rapport sur ce dialogue, dont les résultats seront traités avec la plus grande attention par l'ensemble des ministères du Gouvernement.

M. YUJI IWASAWA, Président du Comité des droits de l'homme, a remercié la délégation d'avoir répondu aux nombreuses questions du Comité. Le Président a rappelé que le Comité estime qu'il revient à Israël d'appliquer les dispositions du Pacte dans les territoires occupés. Le Comité regrette qu'Israël n'ait pas répondu explicitement à toutes les questions. Cependant, il constate aussi que la délégation a engagé un dialogue ouvert et approfondi, s'efforçant de répondre à toutes les questions des membres du Comité. Il faut espérer que la politique israélienne d'application du Pacte tiendra compte des avis exprimés au cours du dialogue, a conclu le Président.

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