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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels examine le rapport de la Colombie

05 Mai 2010

MATIN

5 mai 2010

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné, hier et ce matin, le rapport de la Colombie sur les mesures prises par ce pays pour donner effet aux dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

Présentant le rapport de son pays, M. Esteban Piedrahita, Directeur national de la planification de la Colombie, a indiqué que le Gouvernement colombien avait fixé trois piliers de sa stratégie d'action visant à garantir les droits économiques, sociaux et culturels: garantir la sécurité sur tout le territoire afin que les Colombiens puissent jouir de leurs droits de l'homme; consolider et renforcer une croissance économique durable; réduire la pauvreté et promouvoir l'équité. En ce qui concerne les groupes vulnérables, et plus particulièrement pour ce qui est des syndicalistes, le nombre d'homicides a considérablement diminué depuis 2002 et la protection spécifique des responsables syndicaux a été renforcée, a-t-il déclaré. La Colombie connaît actuellement une période de croissance économique, a poursuivi M. Piedrahita, qui a fait valoir que depuis 2002, le nombre de personnes se trouvant dans l'extrême pauvreté avait sensiblement diminué. La population colombienne jouit d'un meilleur accès aux services de base que ce n'est le cas dans de nombreux autres pays d'Amérique latine, a-t-il ajouté. M. Piedrahita a par ailleurs souligné que depuis 1997, le pays dispose d'un registre des personnes déplacées; des progrès importants ont été réalisés pour s'assurer que les personnes déplacées disposent de papiers d'identité, de manière à ce qu'elles puissent accéder aux services de l'État. M. Piedrahita a affirmé que les terres autochtones - 30% du territoire national - sont inaliénables, et que ce droit à la terre est imprescriptible.

La délégation colombienne était également composée de représentants du Ministère de l'éducation nationale; du Ministère de la culture; du Ministère de la protection sociale; du Ministère des relations extérieures; du Ministère de l'intérieur et de la justice; de l'Agence présidentielle pour l'action sociale et la coopération internationale; et de la Direction du développement des entreprises. Elle a fourni aux experts des compléments d'information en ce qui concerne, notamment, les tensions entre les pouvoirs exécutif et judiciaire; la situation économique et sociale globale, s'agissant en particulier du chômage et de l'économie informelle; la situation de violence dans le pays; le problème des personnes déplacées; la situation des populations autochtones et d'ascendance africaine; l'accord de libre échange avec les États-Unis; les meurtres de syndicalistes; les questions de santé, d'éducation et de logement; le travail des enfants; la lutte contre le recrutement d'enfants par des groupes armées; l'âge minimum du mariage; ou encore le cadre de propriété intellectuelle en rapport avec les connaissances traditionnelles des populations autochtones.

Les experts ont en particulier porté leur attention sur la situation de violence que continue de connaître la Colombie de manière aiguë. Ils ont aussi rappelé qu'en 2001, le Comité avait déjà estimé que les autorités ne semblaient pas avoir de politique efficace pour traiter le problème des personnes déplacées illégalement, et ont souligné que le nombre de personnes déplacées était toujours en hausse. Les populations autochtones de Colombie sont victimes de violations de leurs droits les plus fondamentaux, eu égard en particulier aux expulsions dont elles sont victimes dans leur propre territoire, a-t-il aussi été souligné. Les cinq départements les plus pauvres sont ceux où l'on compte le plus grand nombre d'Afro-Colombiens et d'autochtones, ont aussi relevé les experts.

Le Comité adoptera, dans le cadre de séances privées, des observations finales concernant le rapport de la Colombie, qu'elle rendra publiques à la fin de la session, le vendredi 21 mai 2010.

Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport de l'Algérie (E/C.12/DZA/4).

Présentation du rapport

M. ALVARO ENRIQUE AYALA MELÉNDEZ, Ministre plénipotentiaire et chargé d'affaires de la Colombie, a souligné que l'engagement de la Colombie à l'égard du système des droits de l'homme des Nations Unies et de ses divers mécanismes se reflète notamment dans la présentation du pays devant l'Examen périodique universel et sa participation au suivi de cet examen, ainsi que dans les efforts que déploie la Colombie pour progresser sur la voie de la réalisation des recommandations de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme et dans le travail que le pays poursuit en collaboration avec les procédures spéciales et avec les organes conventionnels.

M. ESTEBAN PIEDRAHITA, Directeur national de la planification de la Colombie, a pour sa part déclaré que la Colombie avait déjà parcouru beaucoup de chemin, même s'il lui reste encore beaucoup à faire. Le pays se trouve en plein processus électoral et, le 7 août prochain, il comptera un nouveau gouvernement, a-t-il rappelé.

M. Piedrahita a souligné que l'État colombien, en particulier avec l'adoption de la Constitution de 1991, s'est engagé à assurer le respect des droits de l'homme de tous les Colombiens. Cette Constitution est une bonne base à partir de laquelle le pays a légiféré, a-t-il ajouté. Le Gouvernement colombien a fixé trois piliers de sa stratégie d'action visant à garantir les droits économiques, sociaux et culturels: garantir la sécurité sur le territoire colombien, afin que les Colombiens puissent jouir de leurs droits de l'homme; consolider et renforcer une croissance économique durable; réduire la pauvreté et promouvoir l'équité.

En ce qui concerne les groupes vulnérables, et plus particulièrement pour ce qui est des syndicalistes, le nombre d'homicides a considérablement diminué depuis 2002 et la protection spécifique de ces personnes a été renforcée, a poursuivi M. Piedrahita.

Entre 2002 et 2009, grâce à la relance de l'économique mondiale, la croissance économique du pays a été proche de 5%, a poursuivi M. Piedrahita, indiquant que pour cette année, les autorités tablent sur une croissance de 2,5% - les premiers chiffres pour 2010 laissant même espérer que l'on pourrait revoir ces chiffres à la hausse. Depuis 2002, le nombre de personnes se trouvant dans l'extrême pauvreté a été sensiblement réduit, a par ailleurs fait valoir M. Piedrahita. En 2009, le prix des aliments a considérablement diminué, ce qui a eu une incidence incontestable sur le taux de l'extrême pauvreté, a-t-il ajouté, faisant observer que la tendance dans les autres pays d'Amérique latine était inverse. M. Piedrahita a indiqué qu'en 2009, la Colombie a pris des mesures en réaction à la crise internationale: pour la première fois dans une situation de crise, les autorités colombiennes sont parvenues à augmenter le réseau de protection sociale. Le niveau d'accès aux services de base en Colombie est supérieur à ce qu'il est dans de nombreux autres pays d'Amérique latine et se situe même devant celui de pays beaucoup plus riches comme le Brésil, par exemple, a fait valoir M. Piedrahita.

M. Piedrahita a par ailleurs indiqué que la Colombie compte plus de 5 millions de bénéficiaires de microcrédits. D'une manière globale, a-t-il ajouté, la stratégie des autorités colombiennes se concentre sur les 10% les plus pauvres de la population, afin de faire bénéficier ces familles des programmes de soutien de l'État et de leur permettre d'avoir accès aux services de l'État. Près de 93% de la population bénéficient d'une couverture sociale, alors que ce taux se situait aux alentours de 60% en 2002.

Le nombre de personnes affiliées à des organisations syndicales a augmenté de 76% entre 2002 et 2009, a poursuivi M. Piedrahita, soulignant que la croissance en la matière a été constante.

En matière d'éducation, des progrès significatifs ont été enregistrés en termes de scolarisation à tous les niveaux, du primaire au supérieur, a par ailleurs fait valoir M. Piedrahita. Sur les 9,5 millions d'élèves scolarisés dans l'enseignement public, plus de 5 millions bénéficient de la scolarité gratuite; les autres paient des frais de scolarité en fonction des revenus de leur famille. Il a fait part des programmes spéciaux mis en place afin de couvrir les frais de logement et de nourriture des étudiants d'ascendance africaine. L'analphabétisme ne cesse de baisser en Colombie, a en outre souligné M. Piedrahita. En 2006, 230 000 enfants déplacés ont pu avoir accès à l'éducation primaire et désormais, ce chiffre est passé à environ 500 000, a-t-il ajouté.

En matière de santé, la Colombie a connu de nettes améliorations pour ce qui est de la mortalité infantile et le pays devrait de ce point de vue être en mesure de réaliser les objectifs du Millénaire pour le développement, a poursuivi M. Piedrahita. Il a en outre attiré l'attention sur les ressources dégagées en faveur de la petite enfance. L'aide alimentaire apportée par les autorités se concentre sur les familles ayant des enfants en âge scolaire et sur les personnes âgées qui rencontrent des difficultés.

S'agissant des déplacements forcés, M. Piedrahita a souligné que depuis 1997, la Colombie dispose d'un registre des personnes déplacées. Des progrès importants ont été réalisés au niveau de l'identification, c'est-à-dire pour s'assurer que les personnes déplacées disposent de papiers d'identité, de manière à ce qu'elles puissent accéder aux services de l'État. En 2004, a rappelé M. Piedrahita, la Cour constitutionnelle a jugé que les déplacements de population constituaient une infraction à la Constitution.

M. Piedrahita a par ailleurs indiqué que 30% du territoire colombien sont peuplés par des autochtones; ces terres sont inaliénables, c'est imprescriptible. Quant aux Afro-Colombiens, ils vivent principalement sur quelque 5% du territoire de la Colombie, a-t-il ajouté. Une politique publique a été conçue à l'intention de ces populations, a-t-il précisé. Certaines régions du pays sont très avancées alors que d'autres sont arriérées, mais même s'il y a décentralisation, les politiques adoptées par l'État sont valables pour tous, a conclu M. Piedrahita.

Le cinquième rapport périodique de la Colombie (E/C.12/COL/5) indique que la population métisse domine en Colombie et précise que l'on y identifie trois grands secteurs ethniques et sociaux géographiquement et culturellement distincts de la majorité de la population: les communautés afro-colombiennes; les communautés raizales de San Andrés et de Providencia, qui constituent 10,5% de la population totale, et les peuples autochtones, qui représentent 3,4% de la population; et les Roms. Au cours de la période 2002-2005, affirme le rapport, le taux de pauvreté a baissé de 7,8 points et s'est fixé à 49,2%. Il est estimé que l'extrême pauvreté a diminué de 10 points à l'échelle nationale, passant de 22% en 2002 à 12% au deuxième trimestre de 2006. Le taux de chômage mensuel est passé de 15,6% en juillet 2002 à 12,6% en juillet 2006. Les besoins fondamentaux de 27,6% de la population du pays ne sont pas satisfaits, reconnaît le rapport, faisant valoir que cela traduit une diminution de 8,2 points par rapport au recensement de 1993.

Les groupes armés illégaux menacent la stabilité de la société colombienne, poursuit le rapport; ils commettent des violences, en raison de la structuration d'une économie de guerre fondée sur les enlèvements, l'extorsion de fonds, la production et le trafic de stupéfiants et cette situation a entraîné de graves coûts sociaux, économiques et politiques pour la nation. Pour ce qui est des milices d'autodéfense, indique le rapport, le processus de démobilisation collective a atteint un point culminant en 2006 puisque 31 671 combattants de ces organisations ont rendu leurs armes. Il convient de noter que de nouvelles organisations criminelles ou de nouveaux groupes sont apparus dans les zones démobilisées, poursuit le rapport. Ces nouveaux groupes, incluant une petite proportion d'ex-membres des groupes d'autodéfense démobilisés, sont devenus un élément dynamique du crime organisé.

Le rapport explique par ailleurs que la jurisprudence de la Cour constitutionnelle a développé le thème de la discrimination positive en se fondant sur les principes constitutionnels et en ciblant les populations vulnérables qui souffrent d'inégalités flagrantes par rapport à l'ensemble de la population colombienne. Une Politique d'action affirmative pour la population noire ou afro-colombienne a commencé à se mettre en place afin de structurer le Plan intégral à long terme en faveur de la population noire, afro-colombienne, palenquera et raizal, ajoute le rapport. D'autres propositions visent à stimuler la création de réserves autochtones, précise-t-il. En termes de sécurité, rappelle-t-il, les communautés autochtones ont subi les conséquences des activités des groupes armés illégaux au cours de la période étudiée dans ce rapport. Toutefois, fait-il valoir, la situation, même si elle reste préoccupante, s'est améliorée grâce aux mesures prises par le Gouvernement pour protéger le droit à la vie de ces peuples et aux projets qui visent à protéger les populations autochtones les plus vulnérables contre d'éventuelles violations de leurs droits. Le nombre d'homicides d'autochtones est passé de 142 en 2000 à 44 en 2006, indique le rapport. Il souligne par ailleurs que des ressources importantes ont été allouées à la protection des dirigeants syndicaux: entre 2001 et 2006, l'État a protégé un total de 8404 dirigeants syndicaux.

Conformément au Plan national de développement (2006-2010) intitulé «Vers un État communautaire: le développement pour tous», la Stratégie de l'Équité qui consiste à réussir à ce que les Colombiens bénéficient d'un accès égal et de qualité aux services sociaux, ce qui leur permettra d'atteindre un revenu suffisant pour mener une vie digne. Le rapport mentionne également le document «Vision de la Colombie 2019» qui fixe notamment pour objectif, d'ici 15 ans, de construire une société plus égalitaire et formule des buts précis, dont une couverture complète en matière de santé, d'éducation primaire et secondaire, d'eau potable et d'assainissement de base d'ici à 2019.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

Un membre du Comité s'est enquis du rôle du Défenseur du peuple et des organisations non gouvernementales dans la mise en œuvre des recommandations formulées par le Comité à l'intention de la Colombie, ainsi que de leur contribution à la rédaction du rapport présenté par le Gouvernement.

Un expert s'est enquis du statut du Pacte en droit interne colombien. Qu'implique la reconnaissance de la religion catholique comme religion officielle en Colombie du point de vue de l'impact éventuel de cette reconnaissance sur d'autres religions, a-t-il demandé? En outre, l'impôt n'est pas suffisamment progressif, a estimé l'expert. Une experte s'est enquise de l'impact escompté de la réforme fiscale sur les niveaux de pauvreté dans le pays.

Un expert s'est inquiété des tensions qui semblent exister entre les pouvoirs exécutif et judiciaire en Colombie, comme en témoigne un rapport des Nations Unies.

Un autre expert a relevé que le Gouvernement colombien, aux fins de la mise en œuvre de tous les programmes sociaux concernant les populations vulnérables, s'efforce de canaliser les ressources nationales et internationales au travers de l'Agence présidentielle pour l'action sociale et la coopération internationale; aussi, a-t-il souhaité savoir si la coopération internationale sollicitée par la Colombie s'est améliorée et si elle a donné les effets escomptés.

Plusieurs membres du Comité se sont interrogés sur les avantages et les inconvénients du Traité de libre échange signé par la Colombie avec les États-Unis. L'action de la Cour constitutionnelle colombienne va souvent à l'encontre des politiques économiques et sociales adoptées par l'État colombien, ont relevé nombre d'entre eux.

Pour ce qui est de la violence armée, chacun sait qu'en Colombie, la violence fait encore rage, a poursuivi l'expert. Les parties au conflit, en particulier les groupes tels que les FARC et l'ALN, ne respectent pas le droit international humanitaire, a-t-il ajouté.

Évoquant le problème des déplacements illégaux de personnes en Colombie, un autre expert a rappelé qu'en 2001, le Comité avait estimé que les autorités ne semblaient pas avoir de politique efficace pour traiter le problème des personnes déplacées illégalement. Or, il semblerait que le nombre de personnes déplacées soit toujours en hausse. Après avoir fait observer que huit assassinats de personnes déplacées ont été enregistrés depuis le début de cette année, l'expert s'est enquis des politiques mises en œuvre pour aider les personnes déplacées qui vivent dans une situation de pauvreté et pour promouvoir le retour de ces personnes dans leurs foyers d'origine. Selon des informations fournies par les autorités colombiennes elles-mêmes, plus de 94% des personnes déplacées dans le pays vivent en dessous du seuil de pauvreté, ce qui amène à s'interroger sur l'efficacité de l'action gouvernementale en faveur de ces personnes, a ajouté l'expert.

Les cinq départements les plus pauvres sont ceux où l'on compte le plus grand nombre d'Afro-Colombiens et d'autochtones, a fait observer un membre du Comité.

Le taux de chômage reste élevé et c'est indiscutablement l'un des facteurs qui contribuent à l'instabilité en Colombie, a estimé un membre du Comité. D'après les informations disponibles, a relevé un autre expert, les créations d'emplois ont surtout lieu dans le secteur informel de l'économie, ce qui est d'autant plus préoccupant que cela ne peut qu'avoir un effet négatif sur la protection sociale des personnes occupant ces emplois. D'autres membres du Comité se sont inquiétés de l'ampleur du travail informel et des taux élevés de chômage parmi les jeunes et parmi les populations autochtones et afro-colombiennes.

Il est vrai que les meurtres et enlèvements de syndicalistes ont baissé ces dernières années, mais les manœuvres de harcèlement à l'encontre des dirigeants syndicaux et des membres de leurs familles se poursuivent, a fait observer une experte. Les menaces qui pèsent sur les syndicalistes constituent une situation grave, a déclaré un autre membre du Comité, faisant observer que le taux d'homicides de syndicalistes en Colombie est très largement supérieur à ce qu'il peut être ailleurs dans le monde. Comment s'explique la grande fragmentation du monde syndical en Colombie, a demandé un expert ?

Les populations autochtones de Colombie sont victimes de violations de leurs droits les plus fondamentaux, eu égard en particulier aux expulsions dont elles sont victimes de leurs propres territoires, a souligné un membre du Comité. Par ailleurs, les populations autochtones devraient être consultées lors de tout projet (de développement, d'infrastructures…) les concernant, mais elles le sont rarement, a déploré un membre du Comité. Le fait est que les populations autochtones ont souvent été expulsées de leurs terres, ce qui est en contradiction avec les directives du Comité, a souligné un expert.

Un membre du Comité a fait état du «très grave problème» d'accès à la propriété, de personnes qui ne respectent pas les lois d'urbanisation et de personnes qui proposent des logements à des loyers exorbitants.

Le régime de santé en place en Colombie est-il fondé sur les cotisations et quel est son taux de couverture, a demandé une experte? En matière de sécurité sociale, plus de sept millions de personnes ne bénéficient de la couverture ni du régime contributif ni du régime subventionné, s'est inquiété un expert.

Il semble que certains programmes de vaccination s'appliquent davantage aux zones urbaines qu'aux zones rurales, a fait observer un expert. En outre, la diminution générale de la mortalité infantile semble avoir été de moindre ampleur dans les zones rurales. Un autre membre du Comité a relevé qu'en Colombie, 10,5% des enfants souffraient de malnutrition chronique en 2006 et que la situation était encore plus dramatique dans les zones rurales puisque durant cette même année 2006, plus de 8000 enfants y étaient morts de malnutrition.

En dépit d'efforts louables dans le domaine de l'éducation, l'enseignement primaire n'est pas totalement gratuit, a déploré une experte, faisant observer qu'il semble y avoir une privatisation partielle de ce degré d'enseignement. Alors que, selon la Constitution, l'éducation est obligatoire de 5 à 15 ans, il ressort du rapport qu'en 2005, la couverture scolaire n'atteignait que 88% au niveau du primaire, a relevé un expert, avant de demander à la délégation de fournir des données ventilées concernant la scolarisation des populations autochtones, notamment.

Une autre experte s'est inquiétée de la tendance à exclure et marginaliser les petits agriculteurs – qui n'ont pas accès au crédit – du fait que la production agricole de la Colombie est orientée vers l'exportation.

Un membre du Comité a fait part des préoccupations qu'il nourrit à l'égard de trois catégories d'enfants: les enfants soldats, les enfants qui vivent avec des forces armées irrégulières et le très grand nombre d'enfants de la rue. Un expert a relevé que le Comité des droits de l'enfant s'était inquiété qu'en 2006, 20% des naissances n'étaient pas enregistrées en Colombie.

Plusieurs experts se sont enquis de l'âge légal du mariage.

Réponses de la délégation colombienne

La délégation colombienne a indiqué qu'un certain nombre de commentaires voire de critiques émanant des organisations non gouvernementales ont été pris en compte dans le contexte de l'élaboration du rapport de la Colombie; mais il n'en demeure pas moins qu'il s'agit d'un rapport préparé par l'État colombien sans participation directe des ONG, a-t-elle précisé.

Le Pacte est intégré dans la Constitution et a donc rang constitutionnel, a par ailleurs indiqué la délégation, précisant que la Constitution attire l'attention sur le caractère progressif de certains droits.

La Constitution stipule que les forces armées et les forces de police de l'État colombien doivent respecter les droits de l'homme, a par ailleurs souligné la délégation.

Répondant à des questions sur les tensions entre les pouvoirs exécutif et judiciaire, il y a certes eu par le passé des tensions et incriminations mutuelles, mais le fait est que la Colombie dispose d'un judiciaire pleinement indépendant et d'un État qui respecte les décisions du judiciaire, que cela lui plaise ou non, a déclaré la délégation. Au titre de son programme de protection judiciaire, l'État colombien protège plus de 11 000 personnes dont bon nombre sont des juges et des avocats, a-t-elle rappelé.

Il n'y a pas de religion officielle en Colombie, a par ailleurs souligné la délégation.

La violence a grandement diminué en Colombie même s'il reste encore au pays beaucoup de chemin à parcourir de ce point de vue, a déclaré la délégation, affirmant que la Colombie n'est plus considérée comme le haut lieu du crime et de la violence.

En ce qui concerne les personnes déplacées, il s'agit là d'un des plus grands défis auxquels est confrontée la Colombie, a déclaré la délégation; il s'agit en quelque sorte d'un défi générationnel, a-t-elle insisté. Elle a fait valoir que les autorités colombiennes ont multiplié par dix le budget alloué aux politiques en faveur de ces personnes déplacées. Certes, cela n'est pas suffisant, en dépit des effets positifs de ces politiques, a-t-elle reconnu. Dans l'ensemble, les autorités colombiennes sont satisfaites des progrès enregistrés en matière d'éducation et de santé s'agissant des personnes déplacées internes. Un processus est en cours pour compenser ces populations et leur restituer leurs terres, a ajouté la délégation; mais ce processus pourrait prendre plusieurs années – peut-être six ou sept ans. La politique globale de réparation englobe l'indemnisation des personnes déplacées, a insisté la délégation. Elle a par ailleurs fait état des mesures prises en faveur de la prévention des déplacements internes de populations, soulignant notamment celles de ces mesures qui visent à consolider les territoires en institutionnalisant les zones les plus sujettes aux déplacements.

Pour ce qui est de la justice de transition, le Gouvernement colombien a accompli des progrès considérables en ce qui concerne l'aide aux victimes et les mesures de réparation, a par ailleurs indiqué la délégation. Mais la réparation peut également passer par la justice classique, a-t-elle ajouté.

La Constitution stipule que les terres autochtones sont inaliénables; mais elle stipule également que tout ce qui trouve dans le sous-sol appartient à l'État, a expliqué la délégation. Aussi, y a-t-il là matière à conflit entre les droits des autochtones et les intérêts de l'État. Les consultations préalables des populations autochtones, mais aussi des populations d'ascendance africaine, sont un droit fondamental de ces populations dans le contexte de tout projet les affectant, a assuré la délégation.

Une partie importante de la législation applicable aux groupes ethniques part du principe qu'il faut maintenir le caractère collectif de la communauté, a précisé la délégation.

Parmi la population d'ascendance africaine et autochtone, la pauvreté est quasiment deux fois plus élevée que pour le reste de la population, a reconnu la délégation. Il existe de grandes inégalités en Colombie entre les villes et les campagnes et ce sont en particulier les groupes les plus vulnérables qui en pâtissent, a-t-elle ajouté, reconnaissant la nécessité d'une action corrective accrue en la matière.

Le chômage est très élevé en Colombie et les autorités s'efforcent de le réduire, a indiqué la délégation. Le taux de chômage est bien entendu beaucoup plus élevé dans les villes que dans les zones rurales, alors que la qualité de l'emploi est en revanche moins bonne dans ces dernières, a-t-elle ajouté.

La Colombie est confrontée à des problèmes de productivité et de contrôle de qualité et une partie importante de la population (qui travaille) se trouve sur un marché qui n'apporte qu'une faible valeur ajoutée, a indiqué la délégation.

S'agissant de la nécessaire lutte contre l'économie informelle, la délégation a reconnu l'importance de veiller à ce que les personnes qui travaillent soient déclarées et paient les taxes dues. Si seulement la moitié des travailleurs cotisent aux contributions sociales, le système ne sera pas viable, a-t-elle ajouté.

En termes réels, les dépenses sociales n'ont cessé d'augmenter, a par ailleurs assuré la délégation. Environ 7% de la population colombienne ne disposent pas de couverture sociale, a-elle précisé; mais des affectations budgétaires ont été prévues afin que dès cette année, la totalité de la population colombienne soit couverte, a-t-elle fait valoir.

Répondant aux questions sur la signature d'accords de libre échange, la délégation a admis que ces arrangements ne sont pas la panacée en matière de développement, mais a rappelé que de nombreux pays voisins, comme le Mexique, le Pérou et le Chili, ainsi que la plupart des pays d'Amérique centrale, ont signé des accords avec les États-Unis. Interrogée sur les raisons pour lesquelles les États-Unis n'ont pas encore ratifié l'accord de libre échange avec la Colombie, la délégation a indiqué que cela est en partie dû aux états de service de la Colombie s'agissant de la sécurité des dirigeants syndicaux.

S'agissant des violences à l'encontre des syndicalistes, la délégation a indiqué que les autorités colombiennes ont mis en place une série de mesures afin de lutter contre l'impunité et assurer la protection des militants syndicaux. Un groupe de procureurs a été désigné par le parquet général et le Conseil supérieur de la magistrature a quant à lui désigné des juges spécialisés pour les enquêtes relatives aux délits perpétrés contre des syndicalistes, a indiqué la délégation. Depuis la mise en place du programme de protection spécialement destiné aux dirigeants syndicaux, aucun homicide n'a été enregistré, ce qui tend à prouver l'efficacité de ce programme, a-t-elle déclaré. Elle a rappelé que l'apparition du problème des homicides de dirigeants syndicaux remonte à un moment où les groupes d'extrême droite pensaient que les insurgés - les guérilleros - avaient infiltré certains syndicats.

La Colombie a mis en place, en 2008, la stratégie d'élimination des pires formes de travail des enfants à l'horizon 2015, qu'il s'agisse d'exploitation sexuelle à des fins commerciales ou du travail dans les mines, a par ailleurs indiqué la délégation. Cette stratégie s'appuie sur les visites périodiques menées auprès des familles par les contrôleurs sociaux dont le rôle est de faire prendre conscience aux familles des risques encourus par leurs enfants. Le travail des enfants est particulièrement difficile à détecter, a souligné la délégation; aussi, le rôle des collectivités locales est-il particulièrement important dans ce contexte. La dernière enquête en date a laissé apparaître que le taux d'enfants qui travaillent est passé durant la décennie de 10% à 4% en 2009, a précisé la délégation. Il n'en demeure pas moins que les autorités souhaitent réduire encore ce taux car les 4% restants concernent la frange la plus défavorisée et donc la plus difficile à réduire. La nouvelle loi sur l'enfance et l'adolescence a fixé d'ambitieux objectifs et est très stricte à l'encontre de toute personne facilitant ou favorisant le travail d'un enfant, a ajouté la délégation.

En ce qui concerne les zones économiques spéciales, le Gouvernement estime que les investisseurs étrangers peuvent certes bénéficier d'exemptions fiscales, mais n'en doivent pas moins respecter les lois nationales, a indiqué la délégation.

La lutte contre les stupéfiants, la protection de l'environnement et la bonne gouvernance sont les trois axes stratégiques autour desquels s'articule la coopération internationale développés en Colombie en partenariat avec un certain nombre de pays et d'institutions.

En ce qui concerne le Programme présidentiel des droits de l'homme, la délégation a indiqué que c'est le Vice-Président de la République qui se trouve à la tête de ce Programme. L'objectif du Programme est d'aider le Président de la République à promouvoir et coordonner les actions visant à promouvoir les droits de l'homme et le droit international humanitaire, a-t-elle précisé. La délégation a en outre indiqué que la stratégie nationale visant à inclure les droits économiques, sociaux et culturels dans les plans et projets locaux s'appuie sur des processus de consultations visant à déterminer les besoins locaux. L'objectif global est de renforcer la protection des droits de l'homme et de rendre plus efficace l'action du Gouvernement et des collectivités locales dans ce domaine. La Colombie a beaucoup progressé en matière de décentralisation de l'action en faveur des droits de l'homme sur l'ensemble du territoire, a insisté la délégation.

Grâce à l'accroissement des ressources consacrées aux services sociaux, la Colombie est parvenue, au cours de la décennie écoulée, à accroître de 18,2% les inscriptions au niveau de l'éducation primaire et de 111% l'affiliation au régime subventionné de sécurité sociale, a fait valoir la délégation, attirant également l'attention sur la réduction sensible de la pauvreté enregistrée grâce à ces efforts budgétaires.

Revenant sur la situation des personnes déplacées, la délégation a indiqué que la Colombie comptait actuellement un peu plus de trois millions de personnes déplacées. Elle a par ailleurs rappelé qu'un registre unique a été mis en place pour l'enregistrement de ces personnes. Le Conseil d'État a établi qu'aux fins de leur inscription en tant que personnes déplacées, les personnes peuvent se manifester après leur déplacement, c'est-à-dire qu'il n'y a pas de délai pour se déclarer; c'est pourquoi on retrouve dans les registres des personnes qui ont fait état de leur situation de personnes déplacées alors que cette situation remontait au milieu du XXe siècle. Actuellement, plus de 80% des personnes déplacées ont accès aux soins de santé et 85% d'entre elles ont accès à l'éducation, a fait valoir la délégation. Elle a en outre souligné qu'une nouvelle politique agraire avait été mise en place afin de donner des terres aux personnes déplacées. La délégation a par ailleurs attiré l'attention sur la problématique importante relative à la situation un peu floue de la population déplacée qui ne se manifeste pas et pour laquelle il est donc difficile d'assurer un accès aux services de santé et d'éducation.

La délégation a par ailleurs indiqué que la Colombie s'était dotée en 2005 d'une loi contre la traite de personnes, assortie d'une stratégie nationale de lutte contre le trafic de personnes pour les années 2006-2012 qui est axée, en particulier, sur la prévention et l'assistance aux victimes. En Colombie, le tourisme sexuel est un délit qui relève du même motif d'accusation que le trafic de personnes, a poursuivi la délégation. Une loi de 2001 dont les dispositions s'appliquent plus particulièrement aux mineurs permet notamment d'arrêter toute personne qui se livrerait au tourisme sexuel sur des mineurs.

En ce qui concerne l'âge du mariage, la délégation a indiqué qu'en Colombie, il est prévu qu'entre 14 et 18 ans, un jeune puisse contracter mariage avec l'autorisation de ses parents et l'accord du procureur. Pour ces jeunes, un mariage qui ne respecterait pas ces dispositions serait considéré comme nul et non avenu en vertu du Code civil. À l'origine, le législateur a considéré que le but du mariage étant la reproduction, l'âge minimum du mariage pouvait correspondre à l'âge de la puberté, a rappelé la délégation.

La délégation a notamment indiqué que la mortalité maternelle avait diminué de 10% entre 2002 et 2008.

S'agissant des questions d'éducation, la délégation a indiqué que les autorités ont évalué à six millions le nombre d'étudiants particulièrement vulnérables, au nombre desquels figurent notamment des autochtones et des Afro-Colombiens. Une stratégie de soutien socioéconomique, associant notamment une aide financière et une aide en termes d'alimentation scolaire, a été mise en place à l'intention de ces enfants afin d'améliorer leur intégration et leur maintien dans le système scolaire, a précisé la délégation. La délégation a par ailleurs indiqué que le taux d'accès de la population à l'Internet est passé de 4,6% en 2002 à 46,2% en 2009.

La Colombie s'est dotée d'un nouveau Code de l'enfance et de l'adolescence qui se fonde essentiellement sur la Convention relative aux droits de l'enfant, a poursuivi la délégation. En Colombie, les mineurs ne peuvent pas être intégrés aux forces armées pour un service militaire, a-t-elle souligné. En outre, a ajouté la délégation, la possibilité d'une objection de conscience au service militaire obligatoire a été récemment approuvée. Par ailleurs, les autorités luttent contre le recrutement d'enfants par des groupes armés illégaux et, au total, plus de 3000 enfants dans cette situation ont pu être pris en charge par les autorités colombiennes, a indiqué la délégation. Sous la houlette du Président de la République, une commission intersectorielle de prévention du recrutement d'enfants a été créée, a-t-elle rappelé. Les militaires et le Gouvernement n'utilisent pas les enfants comme informateurs, a en outre assuré la délégation.

Interrogée sur l'éventuelle existence en Colombie d'un cadre régissant la propriété intellectuelle en rapport avec les connaissances traditionnelles des populations autochtones, la délégation a notamment indiqué que le pays dispose d'une loi remontant à 1994 qui traite de ces questions. En outre, un décret de mars 1997 établit une procédure interne pour l'accès aux ressources génétiques et dérivées. Par ailleurs, une décision de 2003 établit que c'est la «Direction des écosystèmes» qui doit veiller aux explorations menées par des sociétés étrangères sur les ressources génétiques en Colombie. L'accès aux connaissances et ressources traditionnelles des autochtones doit se faire avec l'assentiment libre et éclairé de ces derniers, a par ailleurs souligné la délégation.

S'agissant des questions de logement, la délégation a notamment indiqué que la proportion de la population colombienne dont le logement accuse un déficit qualitatif ou quantitatif s'élève à 26%.

Le Code pénal protège la liberté syndicale et le droit d'association, a par ailleurs déclaré la délégation. Elle a précisé qu'en 2009, une initiative gouvernementale a été lancée à l'issue de laquelle a été adoptée une loi qui sanctionne toute personne entravant ou empêchant une réunion licite.

Le phénomène de la répartition inégale des terres a notamment été aggravé par la criminalité organisée dont les acteurs achètent des terres aux paysans pour la consacrer ensuite à la culture de drogues, a par ailleurs déclaré la délégation. La culture de biocarburants représente actuellement moins de 7% des terres arables du pays, a-t-elle en outre indiqué, affirmant que les biocarburants peuvent aussi être source de développement pour la Colombie.

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