Skip to main content

Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes auditionne des ONG sur la situation dans les pays devant être examinés à cette session

18 Janvier 2010

18 janvier 2010

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a tenu, cet après-midi, une réunion publique informelle avec des représentants d'organisations non gouvernementales qui ont fourni des informations concernant la situation dans trois pays dont les rapports seront examinés durant la présente session, à savoir le Malawi, l’Ukraine et l’Ouzbékistan.

S'agissant du Malawi, l'attention du Comité a notamment été attirée sur le fait que nombre de dispositions juridiques internes ne sont toujours pas conformes aux dispositions de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes en matière d'égalité entre les sexes. Les questions de droit foncier et de régime matrimonial ont été plus particulièrement soulevées dans ce contexte, l'attention étant également attirée sur le taux de mortalité maternelle anormalement élevé au Malawi.

En ce qui concerne l'Ukraine, ont notamment été mises en exergue les lacunes de la stratégie générale du Gouvernement en matière de promotion de l’égalité entre les sexes. La faible participation des femmes à la vie politique et la situation des personnes homosexuelles et transsexuelles - alors que la loi ukrainienne ne traite pas de l’interdiction de la discrimination au motif de l’appartenance sexuelle - ont également été évoquées.

Pour ce qui est de l'Ouzbékistan, a particulièrement été dénoncé le contrôle très étroit des activités des organisations non gouvernementales auquel se livrent les autorités de ce pays. Le Gouvernement ouzbek promeut officiellement une conception patriarcale des rapports entre les sexes qui n’est pas favorable à l’égalité entre les sexes, a-t-il été déploré.

Des interventions ont été faites au nom des ONG ci-après: Women and Law in Southern Africa Research Trust; National Assembly of Business Women; Women's Consortium of Ukraine; Za Ravnie Prava; Centre européen pour les droits des Roms ; Organisation des personnes gaies, lesbiennes et transsexuelles « Labrys »; Coalition of Uzbek Women Unions.

Suite aux interventions initiales des représentants d'ONG, un dialogue s'est noué avec les membres du Comité s'agissant de la situation dans les trois pays susmentionnés.

Lors de sa prochaine réunion publique, demain après-midi, à 15 heures, le Comité s’entretiendra avec des organisations non gouvernementales au sujet de leur interaction avec ses propres travaux.

Aperçu des déclarations

Concernant le Malawi

MME SEODI VENEKAI-RUDO WHITE (Women and Law in Southern Africa Research Trust) a souligné que l’intégration de la Convention pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes au droit du Malawi est régie par un arrêt de la Cour suprême de ce pays, ce qui n'empêche pas la législation interne malawienne de conserver de nombreuses dispositions contraires aux principes de cet instrument. Elle a attiré l'attention sur le retard pris dans l’adaptation du droit national aux dispositions de la Convention en matière d’égalité entre les sexes, en particulier pour ce qui est du droit foncier et du régime matrimonial. Elle a déploré que le Gouvernement du Malawi ne respecte pas les recommandations du Comité l’encourageant à légiférer sans tarder dans ces domaines. La Cour suprême du Malawi estime que le mariage ne suffit pas à établir la propriété commune des biens, exigeant des preuves matérielles de l’acquisition des biens communs, ce qui est contraire à l’esprit de la Convention, a insisté la représentante.

S'agissant des questions de santé, MME MARY FRANCES MALUNGA (National Assembly of Business Women) a fait observer que les taux de mortalité maternelle sont anormalement élevés au Malawi et a soulevé la question de l'avortement. Le Malawi ne consacre pas assez d’attention aux droits à la santé génésique des femmes, a-t-elle insisté. Elle a en outre déploré que la législation malawienne continue de stigmatiser la sexualité des femmes, avec un effet négatif en termes de propagation du VIH/sida.

Concernant l'Ukraine

MME MARIIA ALIEKSEIENKO (Women's Consortium of Ukraine) a déclaré que les principales difficultés à l’application de la Convention en Ukraine tiennent aux lacunes de la stratégie générale du Gouvernement en matière de promotion de l’égalité entre les sexes. Elle a attiré l'attention sur les difficultés liées au manque de statistiques et à la non-diffusion des documents officiels dans ce pays. Elle a en outre déploré la faible participation des femmes à la vie politique ainsi que le fait que des centres de soutien et d’hébergement à l'intention des femmes ne soient pas disponibles dans toutes les régions du pays.

Attirant l'attention sur la situation des personnes homosexuelles et transsexuelles, MME KRYSTYNA POSUNKINA (Za Ravnie Prava - Pour l’égalité des droits) a fait observer que la loi ukrainienne ne traite pas de l’interdiction de la discrimination au motif de l’appartenance sexuelle. Les forces de police ne prennent pas en compte les plaintes déposées par des femmes homosexuelles et les avocats refusent d'assurer la défense de ces femmes. D’autre part, la loi interdit aux femmes homosexuelles l’accès aux méthodes de fécondation artificielle.

Mme Zemfira Kondur (Centre européen pour les droits des Roms) a attiré l'attention sur la situation des femmes roms, victimes de multiples discriminations en raison de leur sexe et de leur appartenance ethnique, au sein de la société et dans leur environnement familial. Elle a dénoncé l’indifférence des forces de l’ordre face aux violations des droits de ces femmes. Les femmes roms sont, entre autres, victimes de discrimination en matière d’accès à l'éducation, a-t-elle insisté. Il appartient aux autorités d’adopter des lois interdisant la discrimination au motif de l’origine ethnique et prévoyant des recours officiels en cas de discrimination avérée, a-t-elle ajouté. Des mesures ciblées doivent aussi être prises en faveur de la santé des femmes roms, notamment dans le domaine de la lutte contre la tuberculose.

Concernant l'Ouzbékistan

MME YASMINE MASSIDI (au nom de la Coalition of Uzbek Women Unions) a déploré que les femmes ouzbèkes soient soumises à la crainte et à l’intimidation, comme en témoigne l’impossibilité pour elles de venir témoigner en personne devant ce Comité. La loi ouzbèke établit un contrôle très étroit des activités des organisations non gouvernementales, avec des sanctions très dures en cas de conflit avec les autorités. Depuis l'examen du précédent rapport de l’Ouzbékistan par ce Comité, plusieurs militants des droits de l'homme du pays ont été emprisonnés, au motif que leurs rapports sur la situation des droits de l'homme en Ouzbékistan étaient contraires aux intérêts de l’État. En outre, le Gouvernement promeut officiellement une conception patriarcale des rapports entre les sexes qui n’est pas favorable à l’égalité entre les sexes. Les femmes sont victimes de violences domestiques, voire de viol marital, sans possibilité de recours juridique, a insisté la représentante. Elle a en outre attiré l’attention sur le programme gouvernemental de contrôle des naissances, dont un volet traite de la stérilisation - en principe volontaire.

Une autre représentante, MME ANNA KIREY, s’est exprimée au nom des femmes homosexuelles et transsexuelles ouzbèkes (Labrys), qui se trouvent elles aussi dans l’incapacité de se déplacer à Genève et sont victimes de discrimination, de violations de leurs droits et de poursuites de la part de l’État ouzbek. Il est urgent que le Comité intervienne pour assurer à ces personnes un cadre juridique interdisant la discrimination et leur permettant le libre exercice de leurs droits, notamment dans le cadre du travail, avec des possibilités de recours en cas de violation.

Dialogue avec les membres du Comité

Concernant le Malawi

Un membre du Comité a voulu savoir quelles étaient les raisons du rejet de nombreux projets de loi présentés au Ministère de la justice du Malawi concernant l’égalité entre les sexes. Les organisations non gouvernementales ont-elles l’intention de faire pression sur les membres du Parlement pour qu’il se saisisse de ces projets prioritaires? Comment les organisations non gouvernementales abordent-elles, avec les autorités, le problème du non-respect des dispositions de la Convention ?

Répondant à ces questions, une représentante d’organisation non gouvernementale a précisé que les projets de lois sont soumis par l’exécutif au Parlement, après un débat en Conseil des Ministres. Les organisations non gouvernementales doivent donc s’adresser à l’exécutif avant qu’il ne transmette les projets de lois au Parlement. En outre, la loi malawienne prévoit que le pouvoir judiciaire interprète le droit national à la lumière du droit international. Le Malawi est un État à la fois moniste et dualiste du point de vue de l’adoption des normes de droit, a-t-il été rappelé.

Un membre du Comité ayant soulevé la question des droits fonciers des veuves, la représentante d'une organisation non gouvernementale a confirmé que le Malawi ne reconnaît pas le régime de propriété commune d’un bien, même au sein du mariage. Ainsi, les femmes, déjà désavantagées au point de vue économique, se retrouvent souvent démunies au moment du divorce, n’ayant pas eu les moyens d'acquérir des biens pendant leur mariage.

En réponse aux interrogations d'une experte concernant l'éducation sexuelle et la planification familiale, la représentante d’une organisation non gouvernementale a souligné que ce type d’éducation est très lacunaire au Malawi, ce qui entraîne des conséquences dramatiques en termes de grossesses non désirées, de taux d’avortements et donc de mortalité maternelle.

Concernant l'Ukraine

La représentante d’une organisation non gouvernementale a reconnu les progrès réalisés, sur le plan juridique, par le Gouvernement ukrainien en matière de lutte contre la traite des femmes. Le programme national de lutte contre ce fléau donne pour la première fois une estimation chiffrée des montants, malheureusement limités, qui seront alloués à cette activité. Il manque toutefois encore des indicateurs précis permettant de mesurer les progrès réalisés dans ce domaine. De plus, l’accès à la justice et aux mesures de réparation pour les victimes de la traite reste limité et dépend de l’action de partenaires internationaux.

En réponse aux interrogations d'une experte, la représentante d’une organisation non gouvernementale ukrainienne a souligné que si la loi stipule l’égalité des droits en matière civique, la réalité est bien différente. On ne compte ainsi que cinq femmes ambassadrices dans le corps diplomatique ukrainien, a-t-elle notamment indiqué. Quant aux projets prévoyant un quota de candidatures féminines dans les listes des partis politiques, ils en sont toujours, depuis deux ans, au stade du débat parlementaire, alors que les prochaines élections approchent à grands pas. Aucun effort pédagogique n’est consenti, par le biais des médias, pour encourager la participation politique des femmes. Il n’existe pour ainsi dire aucun budget public pour les activités de sensibilisation à l’égalité des femmes dans le domaine professionnel, l’essentiel de l’action en la matière étant assumé par les organisations non gouvernementales.

Les dispositions juridiques protégeant explicitement les femmes roms sont quasiment inexistantes, a par ailleurs déploré une représentante d’organisation non gouvernementale en réponse à un membre du Comité. Un important effort pédagogique doit être consenti en direction de ces femmes, qui n’ont pas encore conscience d'avoir des droits.

La notion d’identité sexuelle n’étant pas reconnue par le droit ukrainien, les organisations non gouvernementales disposent de peu de moyens juridiques pour faire valoir les droits des personnes homosexuelles, a-t-il en outre été souligné. Enfin, la participation des organisations non gouvernementales à la rédaction du rapport de l'Ukraine s'est faite in extremis et est restée très limitée, de nombreux secteurs n’ayant pas été consultés, a fait observer la représentante d'une ONG.

Concernant l'Ouzbékistan

Une experte s'étant enquis de ce qu'il en était des violations des droits des personnes homosexuelles et transsexuelles, s'agissant notamment d’esclavage sexuel et de difficultés d’accès à l’emploi, la représentante d'une ONG a indiqué que les informations en la matière font défaut. Il n'en demeure pas moins que la législation ouzbèke pénalise l’homosexualité et que l’État a refusé de donner suite à la recommandation qui lui a été faite, à l'issue de l’Examen périodique universel de l'Ouzbékistan, de procéder à une dépénalisation de l'homosexualité.

Plusieurs membres du Comité ont souhaité savoir si les stérilisations pratiquées en Ouzbékistan étaient volontaires ou forcées. Il n’existe pas, dans le droit ouzbek, de définition officielle du viol marital, a relevé une experte. La représentante d'une ONG qui s'était exprimée auparavant au nom d'une ONG de l'Ouzbékistan a fait savoir que compte tenu de l’absence de représentants d'ONG ouzbèkes, elle ferait parvenir ultérieurement aux membres du Comité des réponses écrites concernant ces questions.

__________

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

Mots-clés

VOIR CETTE PAGE EN :