Skip to main content

Communiqués de presse Organe subsidiaire de la Commission des droits de l’homme

LA SOUS-COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTAME SON DÉBAT SUR L'ADMINISTRATION DE LA JUSTICE

03 août 2001



Sous-Commission de la promotion et
de la protection des droits de l'homme
53ème session
3 août 2001
Matin



Une experte dénonce l'impunité de violations des
droits de l'homme commises par des membres du
personnel des opérations de maintien de la paix de l'ONU



La Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme a entamé, ce matin, son débat sur l'administration de la justice après avoir entendu les derniers orateurs sur la question de la violation des droits de l'homme dans tous les pays.

S'agissant de l'administration de la justice, Mme Françoise-Jane Hampson a attiré l'attention de la Sous-Commission sur l'impunité qui entoure les opérations de maintien de la paix des Nations Unies. Ainsi, des personnes agissant au nom de l'ONU, comme les policiers et militaires envoyés dans les missions de maintien de la paix, ne sont pas appelées à rendre des comptes. MM. Louis Joinet, Asbjørn Eide et El-Hadji Guissé ont réagi à cette intervention. Il a notamment été proposé d'élaborer des normes permettant d'engager la responsabilité de l'ONU dans le cadre des agissements de son personnel en charge des opérations de maintien de la paix.

La Sous-Commission a par ailleurs entendu des déclarations des organisations non gouvernementales suivantes: European Union of Public Relations, Fédération internationale des ligues des droits de l'homme , International Educational Development, Asian Centre for Organization Research and Development, Fédération mondiale de la jeunesse démocratique, Franciscain International, Interfaith International, Organisation mondiale contre la torture, Indian Council of Education, Indian Law Resource Center, Fédération mondiale de la jeunesse démocratique, Confédération internationale des syndicats libres et Organisation tunisienne des jeunes médecins sans frontières.

La plupart des organisations non gouvernementales ont dénoncé les nombreuses atteintes, à travers le monde, à l'administration d'une justice juste et équitable. Il a été rappelé que la lutte contre l'impunité constitue un élément essentiel d'une administration adéquate de la justice. Plusieurs organisations ont attiré l'attention sur la situation dans différents pays. Certains ont plaidé en faveur de l'abolition de la peine de mort dans tous les pays. La Sous-Commission a par ailleurs été encouragée à suivre de près la prise en charge aux frontières des mineurs isolés non admis sur le territoire d'un État.

Achevant son débat sur la question de la violation des droits de l'homme dans tous les pays, la Sous-Commission a entendu des déclarations de trois de ses membres: M. Soo Gil Park, Mme Erica-Irene Daes et M. Louis Joinet. Deux experts ont dénoncé l'attitude des autorités italiennes lors du Sommet du G-8 à Gênes, notamment l'irruption de la police dans l'école qui hébergeait le Genoa Social Forum.

M. Park a pour sa part axé son intervention sur la situation en République populaire démocratique de Corée, où les droits de l'homme sont, selon lui, bafoués. Mme Daes a notamment relevé que la situation des droits de l'homme en Irlande du Nord est en train de se détériorer sérieusement et a préconisé que la communauté internationale exprime sa préoccupation à cet égard. M. Joinet a notamment souligné les évolutions positives enregistrées dans quatre pays au sujet desquels la Sous-Commission avait pris des initiatives: le Togo, le Bahreïn, le Pérou et la République démocratique du Congo. Il a par ailleurs dénoncé la politique actuelle de l'État d'Israël en Palestine.

Le représentant de la République populaire démocratique de Corée a exercé son droit de réponse.

Cet après-midi, à 15 heures, la Sous-Commission poursuivra son débat sur l'administration de la justice.


Fin du débat sur la violation des droits de l'homme dans tous les pays

M. SOO GIL PARK, expert de la Sous-Commission, a rappelé l'importance du rôle des Nations Unies dans la protection des droits de l'homme dans le monde. Cet objectif doit rester au premier rang des priorités de la communauté internationale et donc de l'ONU, a souligné l'expert. L'expert a fait observer que le fascisme et les colonialismes ont presque disparu et que l'après Guerre froide a ouvert la voie au renforcement des efforts visant à assurer le respect des droits de l'homme et la bonne gestion des affaires publiques dans le monde. L'expert a attiré l'attention en particulier sur les situations au Moyen-orient, dans les Balkans, en Asie du Sud et du Sud-Est, ainsi que dans la région des Grands lacs en Afrique.

Comme exemple des luttes qu'il reste à mener, M. Park a évoqué la Corée du Nord, pays dans lequel les droits de l'homme sont bafoués. Selon l'expert, le travail des enfants, la discrimination à l'égard des femmes et les famines y sont monnaie courante, ce qui entraîne des départs massifs qui se font dans des conditions d'hygiène et de sécurité déplorables. Une question particulièrement préoccupante est celle des Nord-Coréens qui ont émigré en Chine, en Russie et dans d'autres pays de la région et dont le retour est refusé par le gouvernement de leur pays. En outre, le statut de réfugié leur est refusé par les différents gouvernements de la région malgré les recommandations du Haut Commissariat pour les réfugiés. M. Park a demandé que le Haut-Commissariat continue d'oeuvrer à la reconnaissance du droit au retour de ces réfugiés Nord-Coréens qui ont dû quitter leur pays dans la détresse. En particulier ceux qui se trouvent dans les montagnes du Nord-Est de la Chine.

M. Park a par ailleurs regretté que des manuels scolaires qui minimisent la responsabilité du Japon durant la seconde Guerre mondiale sont encore en circulation dans le système scolaire de ce pays.

MME ERICA-IRENE DAES, experte de la Sous-Commission, a déclaré que la vie, la santé et l'environnement de milliers de personnes, en particulier dans le monde en développement, sont menacés par les mouvements illicites de produits et de déchets toxiques et dangereux. Elle a notamment évoqué les menaces qui pèsent sur la vie de la petite population autochtone des Îles Marshall du Pacifique en raison des effets néfastes du mouvement illicite de produits et de déchets toxiques qu'une superpuissance déverse systématiquement sur le territoire de ces îles. De telles pratiques ne cessent de prendre de l'ampleur et la Sous-Commission devrait insister sur le respect des instruments internationaux existants en la matière. Il conviendrait en outre d'encourager la Rapporteuse spéciale sur ces questions de présenter des recommandations et des propositions concrètes afin de contrôler, de réduire et d'éliminer de telles pratiques inhumaines.

Mme Daes a dénoncé les violations graves des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui se sont produites à Gênes lors du récent Sommet du G-8. Les limitations et restrictions qui ont été décidées et appliquées par le Gouvernement italien à cette occasion n'étaient pas justifiées par la nécessité de protéger l'ordre public et l'intérêt national. Les autorités italiennes ont abusé de leur pouvoir et maltraité des centaines de personnes. Mme Daes a par ailleurs relevé que la situation des droits de l'homme en Irlande du Nord est en train de se détériorer sérieusement et a estimé que la communauté internationale devait exprimer sa préoccupation à cet égard. Mme Daes a également déclaré que les violations graves et systématiques des droits de l'homme des détenus, les grèves qu'ils déclenchent et les décès en détention ) les prétendues «prisons blanches» ) sont autant de pratiques inhumaines qui constituent une honte pour les pays dans lesquels ces traitements inhumains se produisent. Mme Daes a enfin dénoncé les violations graves et systématiques des droits de l'homme des populations autochtones qui se poursuivent, en particulier dans certains pays latino-américains, en dépit de nombreuses recommandations et de nombreux rapports pertinents des Nations Unies et des ONG concernées.

En réponse à la lettre que la Mission de Turquie a transmise aux membres du Comité suite à sa déclaration d'hier sur la question de Chypre, Mme Daes a rejeté certaines allégations contenues dans ce document.

M. LOUIS JOINET, expert de la commission, a rappelé les mesures prises par la Sous-Commission s'agissant des situations au Togo, au Bahreïn, au Pérou et en République populaire démocratique de Corée. Il a rappelé que, dans chacun de ces cas, la Sous-Commission a présenté une résolution qui, dans un premier temps, a fait réagir les gouvernements concernés puis, dans un second temps, a permis d'engager un dialogue constructif entre les parties et donc permettre des évolutions majeures et positives. M. Joinet a demandé si la Sous-Commission devait ou ne devait pas regretter ces résolutions qui, lorsqu'elles ont été prises, avaient été critiquées.

L'expert a dénoncé la fouille opérée par la police italienne dans les locaux qui hébergeaient le Genoa Social Forum, la coordination des antimondialistes. Il s'est félicité qu'une enquête parlementaire ait été ouverte sur le sujet par les autorités italiennes. En Tunisie, M. Joinet a évoqué le cas du Juge Mokhtar Yahyaoui, qui s'est récemment adressé dans une lettre ouverte au Président tunisien afin de dénoncer les atteintes à l'indépendance de la justice dans son pays. Il a été suspendu de ses fonctions. M. Joinet s'est toutefois félicité qu'il semble que la mesure de suspension de M. Yahyaoui ait été annulée. La politique actuelle de l'État d'Israël en Palestine qui
consiste à éliminer certains palestiniens suspectés de terrorisme pourrait être caractérisée, selon l'expert, de meurtres caractérisés constituant des violations des droits de l'homme. Des violations d'autant plus évidentes que les moyens employés sont d'ordre militaire. L'expert a enfin noté que dans le cas de certains conflits comme celui qui oppose l'Inde au Pakistan, certaines organisations non gouvernementales ont des positions qui ressemblent de plus en plus aux positions des observateurs nationaux, il s'est étonné de cette évolution.


Droit de réponse

Le représentant de la République populaire démocratique de Corée a déclaré que les allégations faites ce matin par M. Soo Gil Park sont totalement infondées. Il n'y a pas de problème entre la République populaire démocratique de Corée et la République populaire de Chine. De nombreux Coréens vont en Chine pour chercher du travail et des familles entières de Coréens sont établies en Chine, de sorte que de nombreux habitants de la République populaire démocratique de Corée se déplacent en Chine pour rendre visite à des parents. Il est étonnant que l'on qualifie toutes ces personnes de réfugiés. Certes, certaines personnes se rendent en Chine pour des raisons économiques mais elles reviennent ensuite dès que la situation s'améliore chez elles et c'est d'ailleurs ce qu'elles ont commencé à faire. Le représentant a par ailleurs dénoncé les agissements d'agents secrets qui tentent de désintégrer la République populaire démocratique de Corée.


Débat sur l'administration de la justice

M. S. ALI KASHMIRI (European Union of Public Relations) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur la situation qui prévaut au Jammu-et-Cachemire, actuellement occupé par l'Inde et le Pakistan. Il a dit être originaire de la partie du Jammu-et-Cachemire occupée par le Pakistan - pays dans lequel la primauté du droit est systématiquement bafouée pour des motifs politiques et où l'administration de la justice est marquée par le déni des droits les plus fondamentaux de millions de citoyens ordinaires. Il est heureux que l'Inde et le Pakistan aient commencé à se réunir pour parler de la question du Cachemire. Malheureusement, le récent Sommet d'Accra s'est concentré uniquement sur le Jammu-et-Cachemire occupé par l'Inde, a regretté M. Kashmiri. Il a souligné que, dans la partie du Jammu-et-Cachemire occupée par le Pakistan, la liberté de mouvement est inexistante. Lors des récentes élections qui se sont tenues, en juin dernier, dans cette région, les partis politiques cachemiriens se sont vus interdire toute contestation des élections et les candidats étaient obligés de signer une clause par laquelle ils reconnaissaient que l'Azad Cachemire faisait partie intégrante du Pakistan.

M. ANTOINE MADELIN (Fédération internationale des ligues des droits de l'homme - FIDH) a souligné l'importance de la lutte contre l'impunité à l'échelle internationale mais a estimé que, chaque fois que cela est possible, la justice devrait être rendue dans les pays où se sont produits les faits. Dans le cas contraire, une compétence juridique universelle doit être consacrée. À cet égard, le représentant de la FIDH s'est félicité des procès menés en Belgique contre des Rwandais qui avaient participé au génocide ayant eu lieu dans ce pays en 1994. Il a toutefois regretté que la procédure en cours au Sénégal contre l'ancien président tchadien Hissène Habré ait été suspendue. Le représentant s'est également alarmé du maintien de la peine de mort dans plusieurs pays, notamment aux États-Unis. Il a rappelé la présence de la FIDH au 1er congrès mondial contre la peine de mort qui s'est tenu à Strasbourg. Le représentant a dénoncé les nombreuses arrestations arbitraires qui ont eu lieu en Mauritanie, qui auraient entraîné des détentions secrètes dans des conditions inhumaines. En République centrafricaine, la fermeture de la maison d'arrêt de Bangui a pour conséquence la détention des prévenus dans les différents commissariats de la ville, entraînant des la surpopulation des cellules. Au Cameroun, des exactions auraient été commises par le Commandement opérationnel de Douala dans sa lutte contre le grand-banditisme : des personnes seraient ainsi arrêtées sur la base de simples dénonciations. Au Vietnam, les détentions arbitraires des bonzes de l'Église bouddhique unifiée du Vietnam se perpétuent en dépit des décisions officielles des autorités.

MME K. PARKER (International Educational Development) s'est inquiétée que certains gouvernements n'appliquent pas le droit humanitaire dans le cadre de conflits armés. Elle a rappelé qu'il existe des règles concernant la protection des civils en temps de guerre et régissant la détention des prisonniers de guerre. La représentante a souligné que les personnes soupçonnées de terrorisme sont moins bien traitées que celles qui sont considérées comme des prisonniers de guerre, comme l'illustre le cas du leader kurde Oçalan en Turquie. Le Gouvernement indien, pour sa part , parle de terroristes islamistes s'agissant de la population cachemirienne et cherche ainsi à éviter la condamnation internationale pour ses agissements au Jammu-et-Cachemire. La représentante d'International Educational Development a par ailleurs attiré l'attention de la Sous-Commission sur la situation des adeptes du Falun Gong qui ont subi en Chine une grave répression qui s'est soldée par de nombreuses arrestations et par la mort de trois cents d'entre eux en prison.

MME K. WADHERA (Asian Centre for Organization Research and Development) a fait observer que son pays, l'Inde, a parcouru un long chemin depuis l'indépendance, notamment en matière de promotion de la démocratie, de réforme agraire et d'abolition de nombreuses pratiques féodales telles que le travail forcé. L'Inde n'a connu aucun cas de peine capitale infligée à un mineur, a-t-elle souligné. La communauté internationale devrait encourager les États à adopter des structures et des principes démocratiques et pourrait pour cela prendre des mesures d'incitation sous forme, par exemple, d'aide au développement. Des mesures de dissuasion devraient en outre être prises à l'encontre des États qui ne respectent pas les pratiques démocratiques. La Sous-Commission pourrait créer un groupe de travail qui serait chargé de se pencher sur ces questions, a suggéré la représentante.

MME HISAE SAITO (Association internationale des juristes démocrates (aijd), a attiré
l'attention de la Sous-Commission sur les victimes des crimes contre l'humanité commis par l'armée impériale du Japon, notamment les victimes de la loi pour le maintien de l'ordre de 1925. Ces victimes méritent des excuses officielles et des indemnisations de la part du Gouvernement japonais, selon la représentante. La question revêt aujourd'hui une urgence particulière car les victimes de la loi sur le maintien de l'ordre public qui ont survécu ont maintenant plus de quatre-vingt ans. À cet égard, son organisation demande à la Sous-Commission de prendre des mesures pour faire pression sur le Gouvernement japonais afin qu'il remplisse ses responsabilités face à ces personnes, qu'il indemnise les victimes et ratifie la Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité.

M. P. LEBLANC (Franciscain International) a plaidé en faveur de l'abolition de la peine de mort. À ce jour, a-t-il fait observer, 109 des 185 États membres des Nations Unies ont demandé qu'il soit mis un terme à la peine capitale ou ont adopté un moratoire sur cette peine. Selon Amnesty International, au cours de la décennie écoulée, au moins trois pays chaque année ont rejoint le camp des abolitionnistes. Pourtant, les États-Unis ont continué à avoir recours de plus en plus fréquemment à la peine capitale. Entre le moment où la peine de mort a été rétablie aux États-Unis, en 1977, et l'an 2000, 683 personnes ont été exécutées dans ce pays. Au 1er janvier 2001, 3 700 prisonniers étaient condamnés à mort aux États-Unis. On sait en outre que depuis 1977, 93 personnes dans 22 États des États-Unis ont été libérées des couloirs de la mort. En demandant l'abolition de la peine capitale, il convient de dénoncer le caractère injuste et inégal de l'application de cette peine. Dans les pays où cette peine existe encore, elle est davantage susceptible d'être appliquée aux minorités et aux membres des classes inférieures qu'aux autres. Le représentant a par ailleurs déploré l'application de la peine capitale aux personnes attardées mentales, comme cela se faisait encore en 1995 dans trois pays: Kirghizistan, États-Unis et Japon.

M. KASHINATH PANDITA (Interfaith International), a estimé que l'observance volontaire des principes religieux par les fidèles des différentes religions favoriserait le respect des droits de l'homme et la bonne administration de la justice. Par contre, la politisation de la religion, notamment en faisant des règles religieuses des lois de l'État, accentue les tensions qui peuvent exister entre les différentes communautés religieuses et mène à la création de systèmes judiciaires parallèles, différents selon les obédiences religieuses, qui ne favorisent pas une justice simple et efficace. M. Pandita a également attiré l'attention de la Sous-Commission sur l'importance de la signature par les États membres des Nations Unies de traités d'extradition afin de lutter contre l'impunité des crimes contre l'humanité. Deux «criminels», Osama Bin Laden et Dawwod Ibrahim, profiteraient en ce moment du manque de coopération internationale à cet égard, selon le représentant.

MME LEPENNEC (Organisation mondiale contre la torture, OMCT) a souligné les conséquences d'une législation discriminatoire en attirant l'attention de la Sous-Commission sur la situation des mineurs isolés demandeurs d'asile non admis sur le territoire français. En France, des centaines de mineurs sont retenus chaque année dans les zones d'attente sans autre considération que l'application de l'article 35 quater de l'Ordonnance de 1945 (législation sur l'entrée et le séjour des étrangers) qui permet de retenir jusqu'à vingt jours les étrangers non admis sur le territoire ou qui sollicitent l'asile aux frontières - le gouvernement estimant que cette procédure s'applique aux étrangers, qu'ils soient majeurs ou mineurs. L'OMCT s'interroge sur la légalité d'une telle décision de privation de liberté, notamment du point de vue de sa conformité avec les dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant dont l'article 37 précise en effet que «la détention ou l'emprisonnement d'un enfant doit être en conformité avec la loi, n'être qu'une mesure de dernier ressort, et être aussi brève que possible». De plus, le Haut-Commissariat pour les réfugiés considère qu'en application des articles 31 et 33 de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés, «les enfants isolés en quête de protection ne devront jamais se voir refuser l'accès au territoire ou être refoulés à la frontière. Ils ne seront jamais détenus pour cause d'immigration». L'OMCT encourage la Sous-Commission à suivre de près la prise en charge aux frontières des mineurs isolés non admis sur le territoire d'un État.

M. A. BHAN (Indian Council of Education), a exprimé son inquiétude sur la situation au Jammu-et-Cachemire. Des actes de terrorisme sont régulièrement perpétrés dans cette région par des éléments infiltrés en provenance du Pakistan. Une situation qui perdure depuis 1947, avec la séparation en trois entités distinctes du Jammu-et-Cachemire. Le représentant de Indian Council of Education demande la justice pour la population de la région et à une condamnation par la Sous-Commission du Pakistan comme principal oppresseur des peuples du Cachemire.

MME C. DANN (Indian Law Resource Center) a dit espérer que la communauté internationale exercera des pressions sur les États-Unis afin qu'ils cessent leurs pratiques discriminatoires à l'encontre du peuple shoshone occidental. Une demande d'action urgente en ce sens a d'ailleurs été déposée devant le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale, a-t-
elle précisé. Elle a rappelé qu'il y a plusieurs années, la Cour suprême des États-Unis a décidé que ce pays acceptait de payer pour s'approprier la terre du peuple shoshone alors que ce peuple n'avait absolument pas décidé de la vendre. Jamais le peuple shoshone n'a quitté cette terre. L'attitude des États-Unis constitue un abus de justice.

M. M. AAJAKIA (Fédération mondiale de la jeunesse démocratique (FMJD), s'est exprimé sur la situation des Mohajirs, habitants de la province du Sindh, au Pakistan, où les représentants de cette ethnie sont opprimés par les Punjabis qui dominent les institutions civiles et militaires du pays. Il a évoqué la tentative de suicide de M. Mohammed Naeem, membre d'une organisation politique mohajir, après son arrestation, sa détention arbitraire et les tortures dont il a été victime par les autorités pakistanaises. Un exemple parmi tant d'autres, selon le représentant de la FMJD, qui a demandé à la Sous-Commission de faire son possible pour que le Pakistan revienne à des positions plus démocratiques et supprime les discriminations exercées par l'État sur une base ethnique. Il a également demandé à la Sous-Commission de soutenir l'organisation d'un recensement supervisé par les instances internationales au Pakistan afin de déterminer la part relative des différentes communautés ethno-linguistiques dans le pays, en vue de favoriser un accès représentatif des minorités à l'administration et aux charges de l'État.

MME A. BIONDI (Confédération internationale des syndicats libres, CISL) a condamné la violence d'État dont sont victimes les syndicalistes à travers le monde. Au Bélarus, plusieurs décrets ont été adoptés qui interdisent toute création de syndicat libre et le code du travail interdit pratiquement toute grève. La représentante a rappelé que l'OIT a condamné l'attitude du Président Loubashenko à cet égard. La situation est également préoccupante au Swaziland où le Roi a prononcé le décret nE2 qui restreint encore davantage les droits syndicaux en sapant l'autorité du pouvoir judiciaire et des médias. En 2001, des violations considérables des droits syndicaux ont en outre été enregistrées en République de Corée, notamment du point de vue de l'administration de la justice. Dans ce dernier pays, la police a mené une violente attaque sur les locaux du syndicat de Daewoo. Beaucoup d'autres pays tels que le Guatemala et le Zimbabwe pourraient être ajoutés à cette liste de pays bafouant les droits syndicaux.

M. M.E. BEN-MARZOUK (Organisation tunisienne des jeunes médecins sans frontières) a déclaré que, dans des pays émergents qui ont opté pour la conciliation entre le progrès économique et la préservation du capital humain, la démocratie, le pluralisme et la protection des droits de l'homme sont une réalité concrète ouvrant toutes les perspectives de développement. La volonté du peuple reste la source de la souveraineté et de la légitimité des pouvoirs. Il n'existe pas de liberté sans l'autorité de la loi. En outre, la démocratie n'a pas de sens hors des dispositions de la Constitution et des lois qui régissent la vie publique. Le représentant a souligné le paradoxe criant de voir certains clamer, parfois, des revendications ou commettre des actes qui ignorent la loi ou la transparence, au nom de la démocratie et des libertés. Il a rappelé l'importance de la loi pour le bon fonctionnement des démocraties. Soulignant que l'indépendance de la justice est à la source de cette bonne marche. Une indépendance de la justice qui est réelle dans son pays, la Tunisie, malgré certaines allégations qu'il a jugé malveillantes.

MME FRANÇOISE JANE HAMPSON, experte de la Sous-Commission, a attiré l'attention de la Sous-Commission sur l'impunité systématique et totale qui entoure les opérations de maintien de la paix de l'ONU. Il est particulièrement grave de constater que des personnes agissant au nom de l'ONU ne sont pas appelées à rendre des comptes, comme c'est le cas pour les policiers appartenant au Département des opérations de maintien de la paix, qui ne sont pas punis lorsqu'ils sont accusés d'avoir commis des crimes ou délits. Ainsi en est-il des policiers des Nations Unies en Bosnie et au Kosovo qui jouissent de l'immunité diplomatique et ne risquent qu'un renvoi dans leur pays. En Bosnie, plusieurs policiers de l'ONU ont dû démissionner après avoir été suspectés d'avoir commis des viols. Ils n'ont été punis ni en Bosnie ni dans leur pays d'origine: l'un d'eux s'est simplement vu retenir sa prime. Dans une autre affaire, un policier des Nations Unies a eu des relations sexuelles avec une jeune fille bosniaque de 13 ans. Au Kosovo, un policier des Nations Unies a pointé son arme contre une personne dans un club suite à une dispute: il a ensuite pu rentrer chez lui dans son pays sans être inquiété d'aucune façon. Un autre policier des Nations Unies a eu des relations sexuelles avec une jeune fille handicapée mentale de 14 ans. Actuellement, trois policiers des Nations Unies sont poursuivis pour traite des femmes entre la Serbie et le Kosovo.

Mme Hampson a ajouté que certains membres du contingent de la KFOR interprètent la résolution 1244 du Conseil de sécurité et son accord militaire technique figurant en annexe en pensant qu'ils ont le droit d'exproprier. En effet, cet accord militaire technique protège le personnel de la KFOR contre toute responsabilité pour dommage causé à la propriété publique ou privée, mais cela n'autorise pas pour autant le personnel à procéder à des expropriations sans indemniser les propriétaires. En outre, le KFOR détient des personnes suspectées d'appartenir aux groupes nationalistes armés albanais dans des camps militaires où le respect du droit à un procès équitable est chose rare. Le Médiateur des droits de l'homme au Kosovo n'a pas le droit d'instruire des plaintes contre des membres de la KFOR, a fait remarquer l'experte.

Mme Hampson a estimé que la Sous-Commission devait examiner la question de l'obligation redditionnelle des forces de maintien de la paix et de la police civile des Nations Unies, qui agissent au nom de la communauté internationale. Elle a estimé qu'un groupe de travail de la Sous-Commission devrait porter son attention à cette question.

M. LOUIS JOINET, expert de la Sous-Commission, intervenant au sujet de la déclaration de Mme Hampson, a estimé qu'il fallait différencier les infractions des personnels agissant dans le cadre des missions des Nations Unies qui doivent être sanctionnés et les difficultés à administrer la justice dans des pays qui sortent de situations de conflits. Le cas de détentions arbitraires perpétuées par les forces des Nations Unies dans le cadre de leurs missions est lié à des situations d'exception qui n'ont justement lieu que parce qu'il s'agit d'états de transition. Il a néanmoins appuyé la mise en place, par les instances internationales, de normes permettant aux missions de maintien de l'ordre et de la paix d'agir en évitant l'arbitraire.

M. ASBJØRN EIDE, expert de la Sous-Commission, a estimé que la question qui vient d'être abordée par Mme Hampson revêt une grande importance et que le terrain dans ce domaine mérite d'être défriché. La Sous-Commission pourrait demander à Mme Hampson et à M. Joinet de préparer un document sur la question d'ici la prochaine session.

M. EL-HADJI GUISSÉ, expert de la Sous-Commission, a souligné que les questions qui viennent d'être soulevées par Mme Hampson et par M. Joinet sont très techniques. Souvent, le système intérieur de justice est désagrégé dans les pays où sont envoyés des contingents de l'ONU, a fait observer M. Guissé. Il a jugé important de dégager des pistes possibles pour l'élaboration de normes permettant d'engager la responsabilité de l'ONU dans le contexte des agissements du personnel chargé des opérations de maintien de la paix, afin d'éviter tout déni de justice. Les problèmes ici évoqués se rencontrent non seulement en Europe mais aussi en Afrique, a souligné M. Guissé.

VOIR CETTE PAGE EN :