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Communiqués de presse Organe subsidiaire de la Commission des droits de l’homme

SOUS-COMMISSION : EXAMEN D'UN RAPPORT SUR LES VIOLATIONS DES DROITS DE L'HOMME ET LES ARMES LÉGÈRES

09 août 2004



9 août 2004


La Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme a poursuivi ce matin, au cours d'une brève séance, l'examen de «questions spécifiques se rapportant aux droits de l'homme» en entendant la présentation d'un rapport sur la prévention des violations des droits de l'homme commises à l'aide d'armes de petit calibre et d'armes légères.

La Rapporteuse spéciale sur la question, Mme Barbara Frey, a notamment souligné que l'embargo, moyen essentiel de prévention des violations des droits de l'homme commises à l'aide d'armes de petit calibre et d'armes légères, n'a pas encore été utilisé avec efficacité. Elle a souligné que la poursuite des trafiquants d'armes devant les tribunaux internationaux et nationaux peut avoir un effet dissuasif sur les réseaux de trafiquants qui, à l'heure actuelle, opèrent en toute impunité. La présentation du rapport a été suivie d'un dialogue interactif auquel ont participé Mme Françoise Jane Hampson, Mme Florizelle O'connor, M. El-Hadji Guissé et M. José Bengoa.

MM. Chen Shiqiu et Gáspár Bíró ont fait des déclarations dans le cadre du débat général, de même que les représentants de quatre organisations non gouvernementales : Interfaith International; Parti radical transnational; Institut international de la paix; et Indian Council of Education.

À sa prochaine réunion publique, cet après-midi à 15 heures, la Sous-Commission doit se prononcer sur des projets de résolution et de décision qui lui sont soumis au titre des points de son ordre du jour relatif à la violation des droits de l'homme dans tous les pays; les droits économiques, sociaux et culturels; et la prévention de la discrimination.

Débat sur des questions spécifiques se rapportant aux droits de l'homme

M. SHARUKH (Interfaith International) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur les violations des droits humains des femmes perpétrées dans plusieurs pays du monde, et notamment au Pakistan. Les crimes d'honneur sont une violation récurrente des droits des femmes dans ce pays; 820 femmes, dont plusieurs mineures, y ont été victimes de cette coutume barbare. Dans le cas du Pakistan, on s'est occupé des symptômes mais pas des causes profondes de cette situation, qui résident dans le système politique féodal existant actuellement dans ce pays. Le représentant a également lancé un appel afin que cesse toute discrimination contre les populations du Sindh et du Balouchistan.

MME MARINA SIKORA (Parti radical transnational) s'est félicitée des progrès réalisés pour réduire la mutilation génitale des femmes, soulignant toutefois que ces pratiques se poursuivent dans les conditions les plus atroces. Cette pratique représente une violation de l'intégrité des femmes. La représentante a souligné la nécessité de briser des règles coutumières ancestrales et de retirer leur légitimité à ceux qui imposent aux femmes de tels actes. La représentante a exhorté les États membres de l'0rganisation de l'Union africaine qui ne l'ont pas encore fait à ratifier le Protocole de Maputo qui interdit en son article 5 les mutilations génitales féminines.

MME S. SAMINA (Institut international de la paix) a souligné que, pour que la base matérielle qui se trouve à l'origine de la discrimination perpétrée à l'encontre des femmes change, il faut modifier les conditions sociales. Elle a notamment dénoncé les crimes d'honneur, qui sont un héritage du passé, et a souligné qu'il existe des cultures où l'on donne sa fille en mariage. La représentante a attiré l'attention qui prévaut à cet égard dans des pays tel que le Pakistan où les seigneurs féodaux font régner leur loi et disposent même de leurs propres prisons et tribunaux. Étant donné que de telles coutumes existent dans plusieurs pays du monde, la Sous-Commission devrait désigner un expert chargé d'étudier ces questions, a-t-elle estimé.

M. S. KOHLI (Indian Council of Education) a déclaré qu'en temps de guerre, la violence a un impact dévastateur sur les femmes en tant qu'épouse ou mère, comme l'attestent les images de femmes qui, au milieu d'un conflit, recherchent le corps de leur fils ou de leur mari disparu. Le représentant a également dénoncé la violence au foyer. Il a souligné que, dans de nombreux pays, les femmes sont reléguées au rang de citoyens de deuxième catégorie. D'anciennes traditions sont parfois invoquées pour priver les femmes de leurs droits, notamment de leur droit de choisir leur mari, a en outre rappelé le représentant. Il a souligné que les femmes souffrent souvent d'interprétations rigides de la religion à leur détriment. Il faudrait apprendre aux enfants qu'avoir recours à la violence les dégrade plutôt que de les rendre puissants, a ajouté le représentant.

M. CHEN SHIQIU, expert de la Sous-Commission, a insisté sur les graves menaces qui pèsent sur la communauté internationale du fait de l'existence d'organisations terroristes du type Al-Qaïda, organisations secrètes et mobiles et qui prolifèrent. Aussi, les pays doivent-ils renforcer leurs efforts en matière de coopération internationale. À cet égard, les Nations Unies, et particulièrement le Conseil de sécurité, ont un rôle important à jouer. L'expert a ensuite souligné la difficulté qu'il y a à définir le phénomène du terrorisme, soulignant toutefois qu'il est essentiel pour la communauté internationale de parvenir à une telle définition. M. Chen a appuyé l'idée d'un cadre de principes directeurs concernant les droits de l'homme et le terrorisme contenus dans le rapport de Mme Koufa. M. Chen a en outre souligné qu'il sera impossible d'obtenir des résultats durables dans la lutte contre le terrorisme si l'on répond à ce phénomène par la terreur ou la violence. Il faut donc appliquer les règles du droit international et s'abstenir d'exécutions sommaires ou de détentions arbitraires. La communauté internationale doit se concentrer sur l'élimination des causes du terrorisme et, à cette fin, promouvoir la justice sociale et lutter contre la pauvreté. Des efforts plus importants devraient être déployés pour établir un nouvel ordre économique et social.

M. GÁSPÁR BÍRÓ, expert de la Sous-Commission, a relevé que, dans son rapport sur le terrorisme et les droits de l'homme, Mme Koufa rappelle la controverse qui subsiste autour de l'assertion selon laquelle les terroristes et d'autres acteurs non étatiques sont liés par les droits de l'homme et doivent être tenus pour responsables. Cette controverse est apparue dans les années 1990 dans les travaux relatifs aux relations internationales. Pendant longtemps, seuls les États ont été considérés comme des acteurs en politique internationale; mais avec l'avancée de la mondialisation, il a été reconnu que d'autres acteurs que les États prenaient de l'importance. Aussi, M. Bíró a-t-il recommandé de mener une recherche préliminaire pour traiter du problème des acteurs non étatiques et des droits de l'homme.

Présentation du rapport préliminaire sur la prévention des violations des droits de l'homme commises à l'aide d'armes de petit calibre et d'armes légères

Présentant son rapport préliminaire sur la prévention des violations des droits de l'homme commises à l'aide d'armes de petit calibre et d'armes légères (E/CN.4/Sub.2/2004/37), MME BARBARA FREY, Rapporteuse spéciale, a rappelé que l'on estime à 640 millions le nombre de ce type d'armes et à 230 millions le nombre de mines terrestres antipersonnel dans le monde. Mme Frey a précisé que son rapport intérimaire accorde, cette année, une attention particulière au rôle des armes légères dans la violation des droits de l'homme et des règles du droit humanitaire dans les conflits armés. Elle a souligné que la majorité des décès constatés dans ces conflits sont dus à l'usage d'armes légères et de petit calibre. Mme Frey souligne ensuite que l'embargo sur les armes représente un moyen essentiel de prévention des violations des droits de l'homme. Toutefois, cet outil n'a pas encore été utilisé avec efficacité, précise-t-elle. La crise actuelle au Soudan illustre la nécessité de prononcer des embargos de manière précoce et effective.

Mme Frey a souligné la nécessité de traduire en justice les auteurs de violations des droits de l'homme commises à l'aide d'armes légères. À cet égard, elle a précisé que la poursuite des trafiquants d'armes devant les cours internationales et nationales peut avoir un effet dissuasif sur les réseaux de trafiquants qui, à l'heure actuelle, opèrent en toute impunité. La Rapporteuse spéciale a ensuite fait observer que les femmes et les hommes ont des expériences très différentes en matière d'armes légères et de petit calibre. Dans ce cadre, elle a souligné que les armes légères peuvent être des instruments de violence sexuelle. Mme Frey a enfin déclaré qu'elle serait ravie que la Sous-Commission examine le projet de principes sur la prévention des violations des droits de l'homme commises à l'aide d'armes de petit calibre et d'armes légères, qui contient 9 principes directeurs relatifs à la possession et à l'usage d'armes légères par les officiers de police. Mme Frey a également déclaré qu'elle souhaiterait examiner plus avant la question de la responsabilité des États en matière de prévention et d'enquête s'agissant des violations des droits de l'homme imputables à des individus et des groupes armés. Mme Frey a enfin affirmé qu'elle souhaiterait explorer, dans son prochain rapport, la question des limites de la notion de légitime défense et de son application spécifique aux armes légères.

Le rapport intérimaire de Mme Barbara Frey, Rapporteuse spéciale chargée de la question de la prévention des violations des droits de l'homme commises à l'aide d'armes de petit calibre et d'armes légères (E/CN.4/Sub.2/2004/37 et Add.1) souligne que l'existence en grand nombre de telles armes et leur utilisation abusive font des centaines de milliers de morts et de blessés dans un conflit armé et entraînent l'effondrement des structures économiques et sociales sur lesquelles sont bâties des communautés vivant en sécurité. Les civils, malgré la protection que leur accorde le droit humanitaire international, sont pris entre deux feux et sont délibérément visés par les groupes armés. La communauté internationale n'a pas pris les mesures voulues pour empêcher que les armes de petit calibre tombent dans les mains de ceux qui les utilisent pour commettre des violations de droits de l'homme et du droit humanitaire international. La communauté des droits de l'homme, y compris la Sous-Commission, devrait demander que la sécurité des personnes et le respect des droits de l'homme soient au centre de l'action menée à l'échelle internationale au sujet des armes de petit calibre. Il est essentiel que les États dispensent à leur armée, à leurs forces de l'ordre et aux effectifs des entreprises de sécurité privée relevant de leur juridiction une formation relative aux principes fondamentaux du droit international des droits de l'homme et du droit humanitaire international, en particulier pour ce qui est de l'utilisation des armes de petit calibre.


Pour protéger les droits des personnes menacées par un conflit armé, la communauté internationale doit mieux concevoir et mieux faire appliquer les embargos sur les armes, tout en imposant des sanctions pénales aux personnes et aux groupes qui violent des embargos obligatoires. Les États devraient adopter une législation nationale contraignante assortie de critères d'exportation interdisant les transferts d'armes de petit calibre lorsque celles-ci sont susceptibles d'être utilisées pour commettre de graves violations du droit international relatif aux droits de l'homme ou du droit humanitaire international. La communauté internationale devrait adopter le traité relatif au commerce des armes, pour que le monde entier puisse disposer d'une norme commune visant à empêcher le transfert d'armes susceptibles d'être utilisées pour commettre de telles violations. Les États devraient mener des enquêtes et engager des poursuites contre les individus et les groupes relevant de leur juridiction qui, en connaissance de cause, fournissent des armes de petit calibre utilisées pour commettre un génocide, des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité; à défaut, ils devraient remettre ces individus à un tribunal international qui engagera des poursuites.

Le projet de principes sur la prévention des violations de droits de l'homme commises avec des petites armes, présenté par Mme Frey, figure dans l'additif 1 au rapport (à paraître en français).

Dialogue interactif

MME FRANÇOISE JANE HAMPSON, experte de la Sous-Commission, a notamment relevé que le projet de principes sur la prévention des violations de droits de l'homme commises à l'aide de petites armes, présenté par Mme Frey, reprend des éléments que l'on trouve déjà dans d'autres documents. Mme Hampson a suggéré que la Rapporteuse spéciale se risque davantage sur le terrain difficile des poursuites judiciaires contre les États fournisseurs d'armes de petit calibre.

MME FLORIZELLE O'CONNOR, experte de la Sous-Commission, a relevé que l'on n'a pas encore suffisamment accordé d'attention à la situation des petits États, notamment insulaires. Des armes de petit calibre sont acheminées dans ces petits pays, très souvent dans le cadre d'activités liées au trafic de stupéfiants, a insisté Mme O'Connor. Il faut qu'il y ait un mécanisme de contrôle des ventes d'armes de petit calibre, a souligné l'experte. Elle a souhaité que l'accent soit davantage mis sur la responsabilité des États où sont fabriquées ces armes. Il faut protéger les populations des pays où les petites armes jouent un rôle important dans les activités criminelles, a ajouté Mme O'Connor. Dans son état actuel, le projet de principes présenté par Mme Frey rappelle des principes qui sont déjà en place; il eut été beaucoup plus utile d'encourager, par exemple, les États à améliorer le respect des principes énoncés dans divers autres codes de conduite déjà existants, que de répéter ce qui existe déjà, a-t-elle estimé.

M. EL-HADJI GUISSÉ, expert de la Sous-Commission, a déclaré être «resté sur sa faim» suite à la présentation du rapport de Mme Frey. En effet, si l'on a l'impression, aujourd'hui plus que jamais, que beaucoup d'armes légères circulent, il eût été important de mettre l'accent sur la responsabilité des industries d'armement qui cherchent à écouler leur production dans les pays en développement. Il eut en outre été intéressant de donner une définition de ce qu'est une arme légère, a poursuivi M. Guissé. Un pistolet tout comme une kalachnikov sont des armes légères; or les armes légères font plus de dégâts que les armes lourdes, a insisté l'expert.

M. JOSÉ BENGOA, expert de la Sous-Commission, a rappelé que le rapport de Mme Frey s'inscrit dans la tradition de la Sous-Commission qui est de rechercher la paix dans la société. Il a recommandé à la Rapporteuse spéciale d'inscrire sa démarche dans le long terme. Il faut se pencher sur la question des pays producteurs d'armes petites et légères, a par ailleurs estimé M. Bengoa.

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