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Communiqués de presse Organe subsidiaire de la Commission des droits de l’homme

LA SOUS-COMMISSION ACHÈVE SON DÉBAT GÉNÉRAL SUR LA PRÉVENTION DE LA DISCRIMINATION

02 août 2004



2 août 2004


Les questions relatives aux minorités et à l'opportunité
d'élaborer un instrument qui traiterait de leurs droits sont au cœur des débats


La Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme a achevé, cet après-midi, son débat général sur la prévention de la discrimination en entendant les déclarations de plusieurs de ses membres, qui ont porté leur attention sur le rapport du Groupe de travail sur les minorités. Les représentants de onze organisations non gouvernementales et de quatre gouvernements ont également pris la parole. La Sous-Commission reviendra brièvement sur cette question vendredi 6 août dans le cadre de la présentation du rapport du Groupe de travail sur les populations autochtones.

Plusieurs experts ont commenté le rapport du Groupe de travail sur les minorités. M. Miguel Alfonso Martínez a notamment souligné que, si les peuples autochtones ont des caractéristiques qui les distinguent des minorités ethniques, culturelles et linguistiques, il existe entre les deux d'importantes similitudes, ne serait-ce que du point de vue des violations des droits de l'homme subies. Il n'est pas souhaitable d'introduire l'autodétermination dans le débat sur les droits des minorités, a par ailleurs estimé M. Chen Shiqiu. Soulignant que certains pays comptent sur leur territoire plus d'une centaine de minorités, il a affirmé que si le droit à l'autodétermination est accordé aux minorités, cela ne manquera de créer le chaos. M. Vladimir Kartashkin a précisé que, lorsque le Groupe de travail sur les minorités examine les questions intéressant les minorités, il ne parle que d'autodétermination interne et il ne s'agit donc absolument pas d'autodétermination au sens territorial, mais plutôt d'autonomie. Des membres du Comité se sont en outre prononcés sur la question de l'élaboration éventuelle d'un nouveau protocole se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui traiterait des droits des minorités; des réticences ont été exprimées face à cette idée.

M. Yozo Yokota a réagi aux commentaires apportés par ses collègues de la Sous-Commission suite à la présentation du document de travail qu'il a rédigé avec M. Asbjørn Eide sur la discrimination fondée sur l'emploi et l'ascendance. Il a de nouveau plaidé en faveur de la désignation d'un rapporteur spécial pour poursuivre l'étude de la question. Le représentant de l'Inde a déclaré que son pays n'a jamais sous-estimé le phénomène de la discrimination fondée sur la caste, la Constitution contenant même des dispositions pour remédier à la situation par l'application de mesures de protection et d'action positive. Le représentant indien a exprimé sa déception face au document de travail de MM. Yokota et Eide qui, selon lui, ne tient pas suffisamment compte des efforts déployés par l'Inde pour éradiquer les pratiques discriminatoires fondées sur la caste.

La représentante de l’Iraq a fait valoir que la loi de l'administration provisoire garantit les droits des minorités et la non-discrimination quelle que soit l'origine de l'individu. Désormais, l'Iraq est un État multiculturel et multiethnique dont tous les citoyens sont égaux, a-t-elle insisté. Le représentant du Soudan a pour sa part invité le Groupe de travail sur les minorités à effectuer une visite dans son pays et à organiser un atelier régional sur les minorités au Soudan.

Pour leur part, les organisations non gouvernementales ont attiré l'attention sur nombre de situations de discriminations et de violations des droits des minorités qui prévalent dans plusieurs régions du monde. Ainsi, ont notamment été évoquées la situation des Kurdes en Turquie, la situation des dalits en Inde et la situation des minorités religieuses en Inde et au Pakistan. D'autres se sont penchées sur la situation des Coréens au Japon ou encore sur celle des populations autochtones du Vietnam. La situation au Darfour soudanais a également été évoquée à plusieurs reprises, et une organisation non gouvernementale a fait porter son intervention sur la situation des deux communautés de Chypre.

Les représentants des organisations non gouvernementales suivantes ont pris la parole : Société africaine de droit international et comparé; Japanese Workers Committee for Human Rights; Asian Indigenous and Tribal Peoples Network; Centre Europe tiers-monde - CETIM; Voluntary Action Network India; Fédération internationale islamique d'organisations d'étudiants; Comité international pour le respect et l'application de la charte africaine des droits de l'homme et des peuples; Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples – MRAP; Fondation de recherches et d'études culturelles himalayennes; Conseil consultatif d'organisations juives; et International Federation for the Protection of The Rights of Ethnic, Religious, Linguistic & Other Minorities.

Les membres suivants de la Sous-Commission sont intervenus à la fin du débat : M. Yozo Yokota, M. Miguel Alfonso Martínez, Mme Françoise Jane Hampson, M. Gudmuntur Alfredsson, M. Chen Shiqiu, Mme Iulia-Antoanella Motoc, M. Ibrahim Salama, M. Vladimir Kartashkin, M. Marc Bossuyt, M. El Hadji Guissé et M. Gáspár Bíró.

Le représentant de Maurice a exercé son droit de réponse en fin de séance.


La Sous-Commission entamera demain matin, à 10 heures, son débat sur les droits économiques, sociaux et culturels.


Suite du débat sur la prévention de la discrimination

Interventions d’organisations non gouvernementales

M. ABDELBAGI JIBRIL (Société africaine de droit international et comparé) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur la gravité de la situation au Darfour. Le représentant souligné la nécessité d'un engagement de la communauté internationale pour mettre fin à cette tragédie. Cette crise existe en réalité depuis 1989, date à laquelle les populations autochtones présentes dans la région ont commencé de faire l'objet d'attaques et de pillages. Le représentant a souligné l'implication des milices dans les tueries de masse et l'élimination physique des membres des tribus autochtones. Ces milices agissent en toute impunité et sont rémunérées sur la base de leurs forfaits. Le représentant a lancé un appel à la Sous-Commission afin qu'elle condamne fermement de telles actions et ouvre la voie à une action plus importante de la communauté internationale.

M. DONGGYU HAHM (Japanese Workers Committee for Human Rights) a salué le progrès remarquable intervenu au Japon récemment s'agissant des droits de l'homme des Coréens vivant dans le pays. Jusqu'à récemment, a-t-il rappelé, la minorité coréenne au Japon était victime de discrimination, car les autorités ne reconnaissaient pas les diplômes décernés par les écoles coréennes au Japon, ce qui rendait difficile l'accès à l'université de ces Coréens. Ce traitement discriminatoire a été maintes fois soulevé par les organisations non gouvernementales devant les organes des droits de l'homme des Nations Unies. Les étudiants coréens peuvent désormais se présenter aux examens d'accès à l'université, bien que les formalités introduites par la suite posent encore des problèmes. La mesure est néanmoins un pas, petit mais positif, vers une amélioration de la situation des droits de l'homme des étudiants coréens au Japon. Il a toutefois exprimé sa préoccupation devant l'augmentation des cas de violence contre des étudiants coréens.

M. SUHAS CHAKMA (Asian Indigenous and Tribal Peoples Network) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur les actes discriminatoires systématiques commis à l'encontre des populations autochtones du Vietnam, connues sous le nom de Montagnards. La discrimination et la répression qui frappent ces populations nécessitent une intervention immédiate de la communauté internationale. Il est essentiel que la Sous-Commission examine la situation du peuple montagnard qui n'a pas été abordée lors de la dernière session de Commission des droits de l'homme. Il faut en effet que des mesures efficaces soient prises pour mettre un terme aux discriminations.

M. MALIK ÖZDEN (Centre Europe tiers-monde - CETIM) a déclaré que, dans le but d'adhérer à l'Union européenne, la Turquie a entrepris des modifications dans sa législation, abolissant par exemple fort heureusement la peine de mort. Toutefois, s'agissant des Kurdes, les modifications législatives auxquelles la Turquie a procédé ne sont qu'illusoires et laissent perpétuer les violations des droits humains à l'égard de ce peuple. Les réformes entreprises n'ont guère favorisé le droit du peuple kurde à s'exprimer dans sa propre langue et à l'enseigner. En effet, l'autorisation d'enseigner la langue kurde comporte des restrictions et, en pratique, l'usage de cette langue est toujours réprimé. Ainsi, a poursuivi le représentant, l'ex-députée Leyla Zana et ses trois collègues, après leur libération fortement médiatisée en juin 2004, sont actuellement poursuivis pour avoir parlé en kurde en public. Le syndicat des enseignants, Egitim-Seni, risque d'être interdit pour avoir prévu dans les objectifs de ses statuts la promotion de l'enseignement en langue maternelle, à savoir le kurde. Le représentant du CETIM a par ailleurs apporté son soutien au Rapporteur spécial sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance religieuse qui a demandé l'examen de la notion de minorités dans le cadre du Traité de Lausanne par le Groupe de travail sur les minorités. Dans ce contexte, a-t-il ajouté, force est de reconnaître que la Turquie viole ce Traité, qui reconnaît la liberté linguistique. La situation des droits humains en Turquie demeure préoccupante et des cas d'exécutions, de torture et de détentions arbitraires se poursuivent. Dix mille prisonniers politiques kurdes continuent à croupir dans les prisons turques, a précisé le représentant. Il existe en outre des allégations d'utilisation d'armes chimiques par l'armée turque contre six combattants kurdes lors des accrochages du 6 mai 2004 sur la montagne de Caçi. L'enquête menée par l'Association des droits de l'homme de Turquie conclut à de sérieux indices en ce sens, étant donné que les corps des guérilleros tués n'ont pas été rendus à leurs familles, mais enterrés sur place, et que le rapport d'autopsie est gardé secret. Le CETIM exhorte les autorités kurdes à procéder à de véritables changements démocratiques afin que le peuple kurde recouvre ses droits fondamentaux.

M. NARENDER KUMAR (Voluntary Action Network India) a affirmé son ferme attachement à l'article 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui stipule que «toutes les personnes sont égales devant la loi et ont droit sans discrimination à une égale protection de la loi». Le représentant a ensuite abordé le phénomène des castes en Inde, source de discriminations, et plus particulièrement la discrimination à l'encontre des dalits. Les condamnations et la publicité ne suffiront pas à promouvoir les droits de l'homme des dalits, a-t-il estimé. Alors que la dynamique de l'oppression et des atrocités a changé, il importe de comprendre aujourd'hui le phénomène non plus uniquement sous l'angle de la «caste», mais sous l'angle de la «classe sociale». Les programmes d'action positive doivent être réévalués et reformulés afin qu'ils ne dégénèrent pas en système de quotas mais servent bien l'autonomisation des populations et l'accès universel à l'éducation. Après son accession à l'indépendance, l'Inde s'est lancée dans un programme ambitieux visant à assurer la justice sociale pour tous. Si un grand nombre de domaines ont été couvert, il y a encore beaucoup à faire. Partant, le représentant a appelé de ses vœux une action concertée de la part de la société civile et du gouvernement indien pour traiter de la discrimination fondée sur la caste d'une manière globale.

MME SHAMIM SHAWL (Fédération internationale islamique d'organisations d'étudiants) a souligné que le problème de la violation continue des droits des minorités dans chaque coin du monde constitue un grave défi. En Inde, les musulmans sont en butte à une grave répression, a-t-elle souligné. Près de 5000 musulmans ont perdu la vie ces cinq dernières années dans des actes perpétrés par la majorité hindoue. Dans l'état indien occupé du Jammu-et-Cachemire, une zone à prédominante musulmane, le Gouvernement continue de refuser le droit à l'autodétermination reconnu par le Conseil de sécurité. La persécution religieuse en Inde ne se limite pas aux seuls musulmans; les chrétiens, les sikhs et d'autres minorités sont également victimes d'un traitement dégradant. Le Groupe de travail sur les minorités devrait entreprendre une étude objective des faits entourant les émeutes qui ont éclaté au Gujarat en mars 2002, de manière à déterminer les facteurs responsables de cet horrible pogrom. Quant au Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, il devrait étudier la récente tendance à la restriction des symboles et des vêtements islamiques dans certains pays.

M. ARIF AAJAKIA (Comité international pour le respect et l'application de la charte africaine des droits de l'homme et des peuples) a déclaré qu'une véritable démocratie, dans quelque société ou pays que ce soit, est un élément essentiel pour prévenir les discriminations et protéger les droits des minorités, mais également pour assurer l'égalité et le partage. Le représentant a affirmé que la prévention de la discrimination et la protection des droits des minorités au Pakistan ne pourront être garanties que si la Constitution du pays tenait compte des aspirations et des intérêts des populations des provinces minoritaires. Le représentant a appelé de ses vœux l'organisation d'une conférence pour résoudre les différents conflits dans les provinces du Balouchistan et du Sindh par un dialogue sincère, au lieu de faire parler les armes. À défaut d'un dialogue associant les véritables représentants des provinces minoritaires, le Balouchistan et le Sindh pourraient devenir des points de tension en Asie du Sud.

M. JEAN-JACQUES KIRKYACHANIAN (Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples – MRAP) a déclaré que s'il faut se féliciter de la dénonciation généralisée du racisme, ce fléau demeure un ennemi difficile à saisir. Il a souligné qu'il est frappant que la femme mythomane qui s'est autoproclamée victime d'une agression antisémite ait désigné les agresseurs - dont elle disait qu'elle n'avait vu que les pieds - comme des Maghrébins et des Africains car, avoua-t-elle finalement, cela faisait plus vrai. On s'habitue au racisme dit populaire, à l'antisémitisme bon enfant, à la méfiance à l'égard de ceux qui ne sont pas d'ici, ce qui n'empêche pas de réprouver les profanations de tombes, a poursuivi le représentant. Il est plus facile de réprouver les croix gammées que d'admettre l'égalité des droits, a-t-il ajouté. Or, ce qui est l'essence de l'humain, c'est que l'inégalité est une injustice et que tout doit être fait pour faire avancer l'égalité, a souligné le représentant du MRAP.

M. IRSHAD AHMAD SHAH (Fondation de recherches et d'études culturelles himalayennes) a souligné que le Groupe de travail sur les minorités, qui a présenté ses rapport depuis un dizaine d'années, a fourni des directives importantes permettant la mise en œuvre pratique e la Déclaration des droits des personnes appartenant à des minorités nationales, ethniques, religieuses ou linguistiques. Le Groupe de travail a par ailleurs identifié un certain nombre d'États d'Asie du sud dont les dispositions constitutionnelles sont discriminatoires à l'encontre des minorités. Partant, le représentant a exprimé sa profonde préoccupation et a invité la Sous-Commission à faire pression sur les États qui ont ratifié les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme pour qu'ils assurent la conformité de leur législation avec les dispositions et protocoles se rapportant aux droits des minorités. La promotion et la protection des droits des minorités resteront lettre morte tant que des mécanismes appropriés ne seront pas mis en place pour en assurer la mise en œuvre effective.

M. GEORGES WILKES (Conseil consultatif d'organisations juives) a mis en relief le rôle de la résolution des conflits en matière de mise en œuvre des droits autochtones. Ce serait une occasion manquée pour la communauté internationale si les défis actuels associés à la mise en place de mécanismes institutionnels de résolution des conflits relatifs aux droits autochtones ne se voyaient pas accorder toute l'attention voulue par la Sous-Commission. Là où l'autonomie autochtone n'est pas une option immédiate, la médiation par le biais d'institutions nationales des droits de l'homme indépendantes reste l'un des moyens les plus prometteurs pour que les autochtones puissent faire entendre leurs voix, a souligné le représentant.

M. XENIS XENOFONTOS (International Federation for the Protection of The Rights of Ethnic, Religious, Linguistic & Other Minorities) a déclaré qu'après 30 ans de négociations, les Nations Unies, à travers leur Secrétaire général, ont adopté la position turque dans l'interprétation du concept de fédération «bizonale bicommunale» et ont défini un plan appelé le plan Annan, visant à régler le différend à Chypre. Le représentant a affirmé que ce plan, s'il était accepté, établirait une ségrégation permanente géographique et ethnique de Chypre, avec, de jure, un Nord turc et un Sud grec. Seulement la moitié des Chypriotes grecs seraient à même de retourner chez eux, et les Chypriotes grecs et turcs perdraient plus des deux tiers de leurs propriétés. Le représentant a affirmé que les Chypriotes, comme tous les autres peuples, aspirent à l'indépendance, à l'égalité, à la démocratie et aux droits de l'homme pour tous.


Interventions de représentants de gouvernements

MME JAWAN TAWFIQ (Iraq) a souligné que la lutte contre le racisme et la discrimination raciale reste l'un des objectifs principaux des Nations Unies et du droit humanitaire international. Les droits de l'homme n'ont pu être appliqués en Iraq au cours des trois dernières décennies, a-t-elle rappelé, soulignant à titre d'exemple que le régime précédent a mené des campagnes qui ont abouti au meurtre de milliers de Kurdes. Désormais, le Gouvernement provisoire d'Iraq a jeté les bases qui permettront de combattre la discrimination. La loi de l'administration provisoire garantit les droits des minorités et la non-discrimination quelle que soit l'origine de l'individu. Désormais, l'Iraq est un État multiculturel et multiethnique dont tous les citoyens sont égaux, quelles que soient leur race, leur croyance ou leur origine. En outre, le Gouvernement provisoire inclut des représentants de tous les groupes ethniques et religieux. Le nouvel Iraq se base donc sur la démocratie et la pluralité. Afin de réaliser ses objectifs, l'Iraq recherche l'appui de la communauté internationale, a ajouté la représentante iraquienne.

M. DEBABRATA SAHA (Inde) a déclaré que son pays n'a jamais sous-estimé le phénomène de la discrimination fondée sur la caste, ce type de discrimination étant même reconnu comme un problème par la Constitution. En effet, a affirmé le représentant, la Constitution indienne prévoit des dispositions pour remédier à la situation par l'application de mesures protectrices et d'action positive. Il faut comprendre qu'il est impossible de modifier en quelques décennies une structure sociale fondée sur des pratiques ancestrales, a souligné le représentant. Toutefois, les moyens de changer la donne sont en place, a-t-il assuré. Aussi, le représentant a-t-il exprimé sa déception face au document de travail de la Sous-Commission sur la discrimination fondée sur l'emploi et l'ascendance, qui ne tient pas suffisamment compte des efforts déployés par l'Inde pour éradiquer les pratiques discriminatoires fondées sur la caste. Le représentant a assuré les membres de la Sous-Commission de la volonté de son pays de faire de l'Inde une société idéale où les citoyens sont traités sur un pied d'égalité. Le représentant a enfin exprimé son désaccord avec la proposition visant à définir des lignes directrices dans le cadre de la Sous-Commission.

M. ELSADIG MUSTAFA OSMAN ALMAGLY (Soudan) a déclaré que son pays est fier d'avoir créé un exemple unique en ce qui concerne les minorités ethniques étrangères appartenant à des religions et des cultures différentes. Au cours des derniers siècles écoulés, le Soudan a accueilli diverses minorités ethniques provenant d'Afrique, du Moyen-Orient, d'Europe occidentale et d'Asie. Plus de six millions de Soudanais sont d'ascendance africaine et ont vécu pacifiquement dans la société soudanaise; d'autres sont venus d'autres continents et aucun n'a jamais été soumis à une quelconque violation des droits de l'homme ni à une quelconque discrimination. Aucun mouvement xénophobe n'a jamais eu et n'aura jamais sa place dans la politique soudanaise, a insisté le représentant. Il a invité le Groupe de travail sur les minorités à venir effectuer une visite au Soudan et à organiser un atelier régional sur les minorités au Soudan. Le représentant soudanais a par ailleurs rappelé que la résolution 2004/60 de la Commission est tout à fait claire en ce sens qu'elle indique que la Sous-Commission ne doit pas adopter de texte visant des pays spécifiques. Il s'est étonné que, s'agissant dans ce contexte de la liste des pays ne devant pas faire l'objet d'un examen par la Sous-Commission, Mme Hampson, dans sa déclaration au titre du présent point de l'ordre du jour, ait cité un document des Nations Unies en n'en mentionnant que l'une des deux annexes, passant sous silence la seconde dans laquelle le Soudan était listé.


Interventions d'experts de la Sous-Commission

M. YOZO YOKOTA, expert de la Sous-Commission, a reconnu que la question de la discrimination fondée sur le travail et l'ascendance est une question très vaste et complexe en Inde. Il a reconnu que nombre de mesures ont été adoptées par le Gouvernement indien pour remédier à ce type de discriminations. Toutefois, il a exprimé son désaccord avec le représentant de l'Inde estimant que la Sous-Commission était bien compétente pour se pencher sur la question dès lors que des centaines de millions de personnes souffrent de cette forme illogique de discrimination fondée sur l'emploi et l'ascendance. Il est impossible d'affirmer que ce type de discrimination n'existe pas. Il est impossible d'affirmer que les gens qui souffrent d'une telle discrimination n'existent pas, a déclaré l'expert.

Pour M. Yokota, une étude supplémentaire s'impose pour aller au bout de l'enquête sur la discrimination fondée sur le travail et l'ascendance. À cet égard, la nomination d'un rapporteur spécial serait appropriée, a-t-il estimé. M. Yokota a estimé qu'il est important d'étudier les causes de cette discrimination. L'expert a en outre affirmé qu'il importe d'adopter des mesures administratives, législatives et judiciaires pour éliminer ces violations sérieuses des droits de l'homme. En outre, il convient de s'attaquer aux préjugés en la matière dès lors que ces discriminations trouvent leur origine dans des perceptions profondément ancrées dans la culture. À cet égard, il serait bon de renforcer le rôle des institutions nationales des droits de l'homme, a conclu l'expert.

M. MIGUEL ALFONSO MARTÍNEZ, expert de la Sous-Commission, s'est réjoui que le Groupe de travail sur les minorités ait progressé au niveau de son modus operandi, ce qui lui a permis d'avancer sur un certain nombre de questions à son ordre du jour. Il s'est félicité que le rapport de cette année reflète fort bien la participation aux débats du Groupe de travail de toute une série de représentants de groupes minoritaires provenant des différents continents. Les peuples autochtones ont des caractéristiques qui les distinguent des minorités ethniques, culturelles et linguistiques; mais il existe entre les deux d'importantes similitudes, ne serait-ce que du point de vue des violations de droits de l'homme subies, a souligné l'expert. Le Groupe de travail sur les minorités constitue pour tous un cadre particulièrement valable, compte tenu de la présence à ses débats de membres des minorités, a souligné M. Alfonso Martínez.

S'agissant du document de MM. Yokota et Eide sur la discrimination fondée sur l'emploi et l'ascendance, M. Alfonso Martínez a notamment affirmé avoir l'impression que l'idée que cette question puisse être réglée par une série de directives générales procédant d'une analyse extérieure de la situation ne constitue pas une démarche valable. Tout en soulignant que le problème existe bel et bien et touche des millions de personnes, M. Alfonso Martínez a estimé que l'idée de nommer un rapporteur spécial sur la question est peu judicieuse et trop ambitieuse, notamment eu égard au fait que l'on ne sait pas encore combien de temps cette étude pourrait durer.

MME FRANÇOISE JANE HAMPSON, experte de la Sous-Commission, a estimé que la discrimination fondée sur une croyance religieuse est une question qui dépasse le présent débat. Elle a souligné l'importance également de la question de la discrimination fondée sur la maladie, comme dans le cas du sida ou des maladies mentales, et elle a exprimé l'espoir que la Sous-Commission sera en mesure de se pencher sur ces questions le moment venu.

M. GUDMUNDUR ALFREDSSON, expert de la Sous-Commission, a félicité Mme Hampson pour son étude sur la disparition d'États pour des raisons environnementales. L'expert a ensuite souligné que le terme de «droit à l'autodétermination» est souvent interprété de manière différente. L'usage de ce terme est peut être à l'origine du retard pris dans l'adoption d'une déclaration sur les droits des populations autochtones, a-t-il fait remarquer. On ne gagne donc pas toujours à employer ce terme, a souligné l'expert. M. Alfredsson a appuyé l'idée d'une étude réaliste sur le droit à l'autodétermination dont un des aspects consisterait à explorer d'autres terminologies possibles, et pas seulement le terme d'autonomie. L'étiquette importe peu. Ce qui compte, c'est l'objectif à atteindre, à savoir, permettre à ces groupes d'avoir davantage leur mot à dire.

M. CHEN SHIQIU, expert de la Sous-Commission, a commenté le rapport du Groupe de travail sur les minorités en soulignant que les peuples autochtones et les groupes minoritaires sont différents de par leur nature. Généralement, les peuples autochtones tombent dans la définition des minorités alors que les minorités ne sont pas forcément des autochtones. De l'avis de M. Chen, il n'est pas souhaitable d'introduire le concept d'autodétermination dans le débat sur les droits des minorités. Soulignant que certains pays comptent sur leur territoire plus d'une centaine de minorités, M. Chen a affirmé que si le droit à l'autodétermination est accordé aux minorités, cela ne manquera de créer le chaos. M. Chen a souligné qu'il n'est en revanche pas opposé à l'idée d'accorder une certaine autonomie aux minorités. Il a en outre estimé qu'il n'y a pas lieu d'élaborer un nouveau protocole se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui traiterait des minorités.

MME ANTOANELLA ILIUA MOTOC, experte de la Sous-Commission, a abordé la question des discriminations à l'encontre de la population pygmée en République démocratique du Congo. Elle a notamment affirmé que dans tous les pays des grands lacs, les communautés de pygmées ont été déplacées de leurs terres traditionnelles sous l'effet des conflits. Elle a souligné que l'on est en présence d'une minorité qui n'a pas de représentativité. Mme Motoc a ensuite abordé la question des 12 millions de Roms dans le monde. Elle a souligné que ces communautés se posent la question de leur avenir, notamment dans le cadre de l'Union européenne.

Mme Motoc a par ailleurs indiqué que la question de la discrimination fondée sur le handicap sera analysée dans son rapport sur le génome humain.

M. IBRAHIM SALAMA, expert de la Sous-Commission, a mis l'accent sur la nécessité pour la Sous-Commission de rester fidèle à son rôle. S'agissant de l'élaboration éventuelle de principes et de directives concernant la prévention de la discrimination fondée sur l'emploi et l'ascendance, M. Salama s'est demandé si, étant donné la dimension culturelle que revêt la question, l'approche légaliste est la plus adéquate. L'expert a préconisé à la Sous-Commission de se concentrer sur un nombre limité de sujets pendant un certain temps afin d'être en mesure de montrer sa pertinence en avançant des résultats.

M. VLADIMIR KARTASHKIN, expert de la Sous-Commission, a relevé que les commentaires apportés au rapport du Groupe de travail sur les minorités ont témoigné de préoccupations concernant le droit à l'autodétermination dans le contexte des minorités. À ce sujet, M. Kartashkin a souligné que du point de vue du Groupe de travail, il existe deux types d'autodétermination, l'une interne et l'autre extérieure. Lorsque le Groupe de travail examine les questions intéressant les minorités, il ne parle que d'autodétermination interne et il ne s'agit donc absolument pas d'autodétermination au sens territorial, mais plutôt d'autonomie, a insisté M. Kartashkin. C'est à la Commission qu'il reviendra de dire si elle accepte une recommandation du Groupe de travail visant l'élaboration d'un protocole se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui traiterait des minorités, a par ailleurs indiqué l'expert.

M. YOZO YOKOTA, expert de la Sous-Commission, a reconnu que la question de la discrimination fondée sur le travail et l'ascendance est complexe mais que certains pays ont montré qu'en prenant des mesures appropriées, on pouvait trouver une solution à ces situations discriminatoires. L'approche juridique du problème de la discrimination fondée sur le travail et l'ascendance a porté ses fruits. M. Yokota a ensuite précisé que, par l'expression «normes» utilisée dans le rapport qu'il a préparé avec M Eide, les auteurs entendent «directives». L'expert a enfin affirmé que c'est l'institution du rapporteur spécial qui lui paraît la plus appropriée pour continuer l'étude sur la discrimination fondée sur le l'emploi et l'ascendance.

M. MIGUEL ALFONSO MARTÍNEZ, expert de la Sous-Commission, s'agissant de la suite à donner à la présentation du document de travail sur la discrimination fondée sur l'emploi et l'ascendance, a estimé qu'il existe d'autres possibilités que l'alternative qui consiste soit à arrêter de traiter de cette question, soit à nommer un rapporteur spécial. M. Alfonso Martínez a ainsi préconisé une étude collective de la question. Il a mis l'accent sur la nécessité d'impliquer dans l'étude de cette question le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale, le Bureau international du travail, l'Unesco et des représentants des communautés affectés. M. Alfonso Martínez a réitéré les doutes que lui inspire l'approche de la question de la discrimination fondée sur l'emploi et l'ascendance si la démarche finale consiste à élaborer des directives et des conseils à l'attention des gouvernements.

M. MARC BOSSUYT, expert de la Sous-Commission, a exprimé sa réticence face à l'idée visant à établir un protocole additionnel au Pacte international relatif aux droits civils et politiques concernant les droits des minorités. Les droits des minorités sont déjà envisagés dans des instruments internationaux, a-t-il fait remarquer. Il ne s'agit donc pas de la reconnaissance de droits nouveaux. M. Bossuyt a ensuite attiré l'attention de la Sous-Commission sur la difficulté qu'il y a à établir une définition de la notion de «minorité» qui soit acceptable par tous les États. Il a affirmé que sa préférence allait à la définition d'une convention particulière.

M. EL HADJI GUISSÉ, expert de la Sous-Commission, a déclaré que lorsqu'on parle de droits déclaratoires, on fait souvent référence à la Déclaration universelle des droits de l'homme alors que les Pactes ont été source de plus-value de ces droits et ont une valeur juridique supérieure à ladite Déclaration. S'agissant de l'étude de la question de la discrimination fondée sur l'emploi et l'ascendance, M. Guissé a par ailleurs souligné que quand on envisage d'entreprendre une étude dans le cadre d'un rapport confié à un rapporteur spécial, cela n'écarte pas la possibilité de poursuivre l'étude dans le cadre d'un groupe de travail. M. Guissé a appuyé la recommandation de M. Yokota visant la création d'un mandat de rapporteur spécial consacré à cette question.

M. YOZO YOKOTA, expert de la Sous-Commission, s'est demandé s'il était nécessaire d'obtenir une autorisation de la Commission des droits de l'homme avant d'envoyer un questionnaire aux pays et institutions spécialisées des Nations Unies sur la question de la discrimination fondée sur le travail et l'ascendance. Il a souligné à nouveau l'importance qu'il y a à mener à bien une étude indépendante de la Sous-Commission consacrée à la question de la discrimination fondée sur l'emploi et l'ascendance.

M. GÁSPÁR BÍRÓ, expert de la Sous-Commission, a souligné que, dans son intervention ce matin, il avait émis des doutes quant à la possibilité et à la nécessité d'élaborer un protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui traiterait des minorités, sans toutefois s'opposer à la recommandation du Groupe de travail sur les minorités concernant l'élaboration d'un tel protocole.


Droit de réponse

MME NUNDINI PERTAUB (Maurice), répondant à la déclaration faite ce matin par l'organisation non gouvernementale «Libération», a déclaré que les personnes en provenance de l'archipel Chagos sont intégrés à la vie mauricienne et qu'ils sont des citoyens à part entière de Maurice. La représentante a affirmé que son gouvernement prend les mesures nécessaires pour protéger ces populations, tout en soutenant par ailleurs leur droit au retour.

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